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00:00Nous évoquons évidemment la violence durant l'enfance, Amandine est avec nous maintenant, bonjour Amandine.
00:07Bonjour à vous, merci de me recevoir.
00:09Je vous en prie Amandine.
00:10Bonjour.
00:11Donc vous aussi vous avez connu des abus par un cousin je crois ?
00:15Oui c'est ça, moi j'ai été agressée, j'avais 9 ans.
00:20Donc ça a commencé par des attouchements et ensuite j'ai subi un viol j'avais 11 ans.
00:27Et je n'ai pas parlé, je suis restée vraiment dans le mutisme et j'ai rencontré un garçon,
00:34j'avais 25 ans, qui m'a fait prendre conscience que c'était grave ce que j'avais vécu.
00:39Et du coup j'ai déposé plainte à ce moment là.
00:42Bien.
00:44Et à ce moment là, ça a été très difficile puisque comme c'était un cousin,
00:49ma famille n'a pas compris, m'a dit pourquoi tu as mis tant de temps pour parler.
00:54Enfin voilà, je fais très rapide parce que ça s'est pas créé sur, voilà.
00:59Et donc j'ai fait une dépression, ça a été très compliqué mais je me suis relevé.
01:06Oui parce que la famille vous a rejeté, c'est comme toujours.
01:10Oui, oui, oui, ils ne comprenaient pas pourquoi.
01:13Ils m'ont dit, on ne comprend pas pourquoi tu parles après ton année.
01:16Et je leur ai dit, je pense que si j'avais pensé être écoutée, j'aurais parlé.
01:23Parce que je pense que les enfants comprennent tout.
01:25Oui c'est ça.
01:27Après j'ai fait une thérapie, mais ça m'a suivie parce que j'ai développé une hyper-sexualisation
01:34dans le sens où pour moi la sexualité c'était rien en fait.
01:39Je pouvais avoir des rapports avec un homme sans que ça soit important pour moi.
01:44Et aujourd'hui j'ai 48 ans et je le regrette parce que je n'ai pas été suivie en fait comme j'en avais besoin.
01:52Alors on va revenir sur ce que disait Bruno Clavier tout à l'heure, il ne faut pas avoir de regrets.
01:56Peut-être que cette sexualité un petit peu excessive vous a permis aussi de tenir debout.
02:03De toute façon c'est le passé, on ne peut pas refaire le passé.
02:08Ce qui est important en revanche c'est de comprendre en quoi ça vous a blessé cette sexualité excessive,
02:14ce corps que vous avez donné à n'importe qui.
02:19Et ça ça peut être intéressant parce que ça va vous aider à réparer des blessures
02:24et puis à pouvoir mettre vos émotions, vos sentiments et votre désir à la bonne place.
02:32Oui tout à fait. Après je ne le prends pas mal parce que je chemine.
02:37Ça fait très longtemps que j'ai une spiritualité aussi qui m'aide sur le chemin.
02:41Donc je le prends, c'est mon chemin de vie.
02:44Donc je le vis aujourd'hui plutôt sereinement.
02:48Je ne me juge pas mais je fais un constat que j'aurais eu peut-être un autre rapport à la sexualité
02:57si je n'avais pas connu cet abus.
03:00Ça s'est passé comme ça, donc c'est mon chemin de vie.
03:04Après j'ai été diagnosticée autiste tardivement
03:08donc je pense que ça a joué aussi sur ma façon de percevoir les choses et de parler.
03:15Ce que je veux dire c'est que souvent, enfin pas souvent, c'est presque généralisé.
03:19Les personnes abusées, il y a deux grands versants.
03:22Il y a les sous-sexués, c'est-à-dire qu'il y en a qui se disent
03:25c'est traumatique, je ne le ferai plus jamais.
03:27Donc ils ne le font plus jamais.
03:29Et puis il y a ceux qui sont hyper sexualisés.
03:32Et moi j'ai tendance à dire que c'est une façon de conjurer l'angoisse.
03:36C'est-à-dire c'est une façon de répéter le traumatisme.
03:41Et c'est à ce moment-là une façon de conjurer l'angoisse
03:43parce qu'à ce moment-là de mettre de la sexualité, ça permet
03:49justement on parlait tout à l'heure de l'angoisse de mort
03:51c'est que tout abus sur l'enfant amène de l'angoisse de mort
03:54et ça permet de conjurer, de tenter de conjurer l'angoisse de mort.
03:58C'est comme ça que j'explique l'hyper sexualisation.
04:00D'accord. Alors moi j'avais un autre prisme.
04:04J'ai pensé aussi que je me réappropriais
04:10quelque part mon corps et que je décidais finalement.
04:13C'est moi qui décidais que je voulais coucher avec telle ou telle personne.
04:17Donc ça m'a fait du bien.
04:18Après quand j'ai déposé plainte, j'étais à Lyon à cette époque
04:22et j'ai rencontré des personnes formidables quand j'ai déposé plainte
04:27à la police qui était spécialisée dans les agressions.
04:33Donc ça compte énormément.
04:36Ce que j'ai trouvé violent par contre, c'est qu'on m'a fait un examen gynécologique.
04:43J'avais 11 ans quand c'est arrivé, j'avais 25 ans quand j'ai déposé plainte.
04:48J'ai trouvé ça très violent.
04:50Même si j'ai compris l'enjeu, pour moi ça a été violent.
04:54Oui c'est vrai qu'il y avait même quelque chose à faire
04:56par rapport, j'ai entendu beaucoup parler d'examens gynécologiques
04:59qui parfois sont un peu violents.
05:02Ça serait bien qu'il y ait quelque chose qui soit fait
05:05parce que des fois c'est délicat et puis des fois ça l'épanne,
05:07d'après ce que j'ai entendu.
05:09Et d'autant que vous faire un examen gynécologique à 25 ans
05:13pour quelque chose qui a eu lieu quand vous aviez 11 ans,
05:16de toute façon d'abord vous n'étiez de toute façon plus vierge
05:19et puis entre temps vous aviez eu d'autres rapports j'imagine.
05:22C'est là où je ne vois pas trop à quoi ça sert.
05:31Mais bon ils l'ont reconnu, ils nous ont dit c'est la procédure
05:34et on se rend bien compte que c'est un peu stupide.
05:37Mais c'est vrai que ça peut être violent, psychologiquement c'est violent
05:41parce qu'on doit toujours apporter des preuves de ce qui nous est arrivé
05:44et comme votre auditeur précédemment,
05:47bon ben moi il n'a rien eu non plus,
05:49il m'a traîné dans la boue,
05:51il a dit que j'étais jalouse.
05:54Il était âgé de combien de plus que vous ?
05:58Il avait 17 ans lui.
06:01J'avais 11 ans, il en avait 17.
06:05Mais c'est lui qui a commencé quand vous aviez 9 ans ?
06:08Il était plus jeune, il avait 15 ans quand vous aviez 9 ans
06:13et puis à 17 ans il est apte à avoir une relation sexuelle
06:16et donc il prend ce qu'il a sous la main, c'est-à-dire vous.
06:205 ans d'ailleurs ce qui est intéressant c'est que ça fait 6 ans de plus
06:23et au niveau légal c'est au-delà de 5 ans,
06:26ça relève du pénal immédiatement.
06:30Après ce qui est intéressant aussi,
06:33parce que moi j'ai voulu comprendre, j'ai fait toute une recherche,
06:36mais on était dans des contextes de famille violente.
06:39Lui avait un papa violent, moi j'avais un père violent,
06:43donc on était dans un contexte violent
06:45où il faut se taire, où les femmes doivent se taire,
06:48où les enfants se taisent.
06:50Ce qui est important à comprendre aussi Amandine,
06:53c'est que dans les familles où il y a de la violence,
06:55ça n'apporte pas la sécurité qu'un enfant a besoin.
07:00On parle toujours de l'amour, l'enfant a besoin de se sentir aimé,
07:03mais il a aussi besoin de se sentir en sécurité.
07:05Quand on grandit dans une famille violente,
07:08on n'est pas en sécurité, le corps n'est pas en sécurité.
07:11Donc on est forcément plus fragile face à un prédateur
07:15et je pense que des enfants qui sont élevés dans des familles sécurisantes
07:19sont plus à même à se défendre
07:23et à éviter ce genre de choses.
07:26Donc vous aviez à la fois une fragilité
07:31et plus cet abus sexuel.
07:34C'est normal que tout ça ait été compliqué.
07:37Et puis vous avez évidemment, comme Guillaume, cette colère
07:41que l'abuseur ne soit pas puni.
07:45Aujourd'hui je ne me sens plus en colère.
07:48Je me disais que la colère allait me bouffer,
07:53donc la colère permet de survivre pendant un temps
07:56et après quand on reprend vie,
07:58on n'est plus dans la colère, on est dans autre chose.
08:00Moi j'ai eu des enfants et je les ai vraiment élevés.
08:03Je vous rejoins tout à fait dans l'amour,
08:05mais aussi dans la protection, dans la sécurité.
08:09Je dois apprendre à respecter leur corps.
08:12Quand ils seront un peu plus grands,
08:14parce que ils ont 12 et 16 ans,
08:16ils sont aussi autistes tous les deux,
08:18donc je les préserve encore un petit peu,
08:20mais je pense que c'est important de leur dire
08:22pour conjurer en fait.
08:24J'ai déposé plainte et là je fais vraiment le contraire
08:26avec mes enfants pour casser justement
08:28cet intergénérationnel,
08:30je voulais absolument casser cette boucle-là.
08:32Donc pour moi c'était important,
08:34j'avais un rôle dans la famille
08:36dans ce sens-là et ça a pris tout son sens
08:38dans mon chemin de vie en fait.
08:40Comme je disais à Guillaume,
08:42je vous conseille quand même de le faire assez vite.
08:44Là ils ont l'âge,
08:46ils sont dans cette fourchette d'âge,
08:48toujours par le fait de répétitions,
08:51on va dire malheureusement du hasard,
08:53c'est-à-dire ils peuvent revivre
08:55des choses que vous avez vécues si vous leur dites pas.
08:57Donc Amandine fait son travail, bravo.
08:59Bravo Amandine,
09:01et puis j'entends bien que vous avez cheminé
09:03et je pense que la spiritualité
09:05certainement est aussi
09:07une belle manière de donner du sens à sa vie.
09:09Continuez, continuez à vous élever,
09:11Amandine,
09:13et merci de ce témoignage.
09:15On fait une petite pause.