Thierry Cotillard, président du groupement Les Mousquetaires/Intermarché, le 9 janvier 2025 sur franceinfo.
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00:00Alors un nouveau gouvernement est nommé, il doit à nouveau, lui, à son tour, trouver des compromis pour monter un budget.
00:07Défi politique du moment, l'incertitude sur le budget, sur votre activité, parce que vous disiez l'investissement, ça a quelles conséquences ?
00:15Est-ce que vous devez limiter vos investissements en ce début d'année pour tenir compte de cette incertitude ?
00:20Nous, en fait, vous savez, quand vous êtes à une enseigne de discount comme intermarché, depuis deux ans, on est dans un plan de réduction vraiment drastique de nos charges,
00:30c'est-à-dire que les investissements, je vous donne des chiffres que je n'ai jamais donnés, c'était 700 millions à l'échelle du groupement, on les a ramenés à 500 millions.
00:37Les charges, on les baisse aussi, parce que justement, on a aussi un peu peur de l'inconnu, et quand vous me demandez, est-ce que vous reniez sur vos marges,
00:45quand on est un bon distributeur, on travaille aussi nos investissements et nos charges, parce que ces investissements-là et ces charges qui baissent,
00:51on peut les réinjecter aussi dans nos prix, c'est ce qui fait qu'on est performant.
00:55Oui, bien évidemment, c'est sujet de fiscalité, puisque ça va être la question, on en est préoccupé.
01:01La surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises, vous êtes directement visé ?
01:05On est visé, alors, on ne peut pas être contre l'effort collectif, vu la situation de la France, mais à un moment, ça ne peut pas être la seule solution.
01:13C'est-à-dire qu'on est plutôt rassuré d'entendre aussi qu'on va aller regarder ce qui se passe sur les dépenses publiques,
01:17c'est-à-dire que payer des impôts et puis avoir dégringolé dans tous les classements sur l'éducation, avoir les déserts médicaux, etc.,
01:24en tant que citoyen, ça ne peut pas nous satisfaire.
01:27Donc, on espère que si on a un peu d'impôts en plus, que ce soit bien exploité et surtout qu'on s'occupe aussi de la charge de l'État.
01:33Je reviens sur le chiffre que vous venez de nous donner, 700 millions, hier, 500 millions d'investissements, aujourd'hui, c'est 200 millions, il devait servir à quoi ?
01:41Informatique, essentiellement, parce qu'on est aujourd'hui face à des Amazones qui arrivent, des transformations incroyables.
01:48Donc, c'est réduction de ce qu'on appelle les CAPEX informatiques.
01:52Et puis après, il y a des projets, vous les décalez aussi un petit peu.
01:56Des travaux ?
01:57Des travaux, des rénovations.
01:59Donc, c'est de l'activité en moins, par exemple, pour le BTP localement ?
02:03Non, pourquoi ? Parce que ça, ces 700 millions, c'est l'enveloppe que le collectif porte.
02:10Par contre, je pense qu'on va investir plus de 500 millions dans les 18 mois sur la rénovation des casinos.
02:19Et ça, c'est une super nouvelle parce qu'on sait, nous, on est dans le bricolage.
02:22Vous savez, on a bricomarché, bricorama, bricocache.
02:24C'est une activité qui est en difficulté puisque la construction est en recul.
02:29Eh bien, lorsqu'un groupe comme Casino, c'est 300 points de vente à intermarché,
02:32ces 300 points de vente qui vont se refaire.
02:34Donc, c'est des maçons, c'est des carreleurs qui vont avoir de l'emploi en plus dans les bassins où on est
02:39et qui vont recréer un peu d'économie.
02:41Donc ça, c'est plutôt super.
02:42Mais c'est ça, ça ne va pas en contre de ce que vous venez de dire il y a deux minutes.
02:44Vous dites, on investit moins parce qu'on a peur de la suite.
02:47Mais on a quand même acheté près de 300 points de vente Casino.
02:50Ça ne s'oppose pas.
02:51Ça a coûté 2 milliards d'euros.
02:53Oui, mais ça ne s'oppose pas parce que l'enveloppe que nous, on réduit,
02:57c'est l'enveloppe du collectif des mousquetaires.
02:59Et on demande à chaque chef d'entreprise, lorsqu'il reprend un Casino,
03:02d'être au rendez-vous de ce qu'attendent les consommateurs
03:05et ils veulent notamment une expérience d'achat dans un point de vente qui soit au top.
03:09Donc, quand on reprend un Casino, c'est vêtu.
03:11Ça fait 10 ans qu'il n'y a pas eu d'investissement.
03:13Donc, chaque chef d'entreprise, lorsqu'il reprend un Casino, a un plan d'investissement pour le refaire
03:17et non pas garder un Casino, mais refaire un intermarché.
03:20Ça coûte de l'argent.
03:21Donc, comment vous financez ça ?
03:2240 % de croissance de chiffre d'affaires.
03:24C'est le pari de Casino quand on le reprend et qu'il devient intermarché.
03:28Au moment où je vous parle, on n'a pas fait les travaux.
03:31On a simplement baissé nos prix de 18 %.
03:34On a 10 % de trafic en plus qu'avant.
03:37Et quand les gens viennent, comme c'est moins cher,
03:39vous voyez, c'est mécanique, comme c'est moins cher, ils achètent plus.
03:41Et on est à plus 25.
03:42Donc, le 15 points qui me manquent, ce sera par les travaux qu'on va aller chercher.
03:46L'emploi chez vous, l'emploi.
03:48Parce qu'Auchan a annoncé un plan social de 1300 emplois menacés chez vous.
03:53Ça se passe comment en 2025 ?
03:54Écoutez, moi, je pense que le secteur de la distribution va quand même bien.
03:59Il y a des acteurs qui sont en difficulté.
04:01Mais ne faisons pas quand même le raccourci de penser que la distribution va mal.
04:05Puisque Leclerc va bien, Intermarché va bien.
04:07Et donc, nous, on va recruter probablement 6 à 7 000 personnes.
04:11Ne serait-ce que, je vous donne un exemple, dans les casinos,
04:14on n'avait que des caisses automatiques.
04:16Vous voyez ?
04:17Et bien, nous, on est des commerçants indépendants qui croyons à la relation humaine.
04:20On remet des hôtesses de caisse, donc on réembauche.
04:22Il n'y avait plus de bouchées traditionnelles.
04:24On réembauche des bouchées.
04:25Donc, tout ça, c'est de l'embauche.
04:27Et on va être sur un excédent de 7 à 8 000 postes
04:30qui vont être créés chez Les Mousquetaires cette année.
04:32Pardon, parce qu'Auchan, ce sont vos partenaires.
04:33Et ils ont annoncé un plan social de 2300 emplois menacés.
04:37Vous dites quoi ?
04:38En fait, ils ont mal géré ?
04:39Puisqu'en fait, tout le monde va bien, sauf eux.
04:41Moi, je ne peux pas me permettre...
04:42Écoutez, déjà, c'est un partenaire.
04:43Je ne peux pas me permettre de juger la gestion d'Auchan.
04:47Déjà, c'est plutôt le passé.
04:49Moi, je discute avec des dirigeants aujourd'hui
04:51qui savent où ils vont,
04:52qui ont l'air de vouloir réinjecter dans le commerce aussi des prix
04:56qui vont être obtenus par cette alliance à l'achat.
04:58Donc, non, je vais être très fair-play.
05:02Je vais leur souhaiter de venir nous chercher en part de marché.
05:05Sur les caisses automatiques,
05:06on voit qu'il y a une sorte de marche arrière
05:08de la part des distributeurs, effectivement,
05:10notamment pour remettre un peu de lien dans vos magasins
05:13parce qu'il n'y avait plus de caissiers et de caissières.
05:16Je pense que chez Les Mousquetaires, on n'a pas été trop loin.
05:19C'est-à-dire qu'on a toujours eu la théorie de penser que...
05:21Parce qu'on est aussi...
05:22Vous savez, on est quand même l'enseigne des territoires.
05:25On a plein de gens qui viennent.
05:27C'est un lieu de vie sociale.
05:28Donc, on a toujours privilégié le contact humain
05:31et on a ajouté des caisses automatiques.
05:33Et on n'a jamais fait marche arrière.
05:34On a essayé de trouver le bon équilibre.
05:36Donc, quand il y a 8 caisses traditionnelles,
05:38il y en a 4 automatiques.
05:39Et vous nous rappelez le rapport de coût
05:41entre une caisse automatique
05:42et une caisse qui est tenue par une personne humaine ?
05:44Le coût, en gros, une caisse traditionnelle,
05:48en termes de gestion, nécessite une personne
05:50et va correspondre à 4 caisses automatiques.
05:53Ça coûte 4 fois moins cher.
05:56Ce qu'il faut dire aussi, c'est que les caisses automatiques,
05:58pardon, j'insiste là-dessus,
06:00parce que les distributeurs ont misé aussi là-dessus,
06:02ça vous permet d'optimiser la productivité
06:04et ça vous permet aussi d'avoir recours
06:06à l'intelligence artificielle.
06:08Et ça, c'est une autre manière de travailler.
06:10Plus performante.
06:12On a changé un peu la donne il y a un peu plus d'un an,
06:17où on s'est aperçu que le vol était beaucoup plus important
06:20sur les caisses automatiques,
06:21puisqu'évidemment, il y a moins de surveillance,
06:23moins de contrôle.
06:24Donc, l'intelligence artificielle est arrivée.
06:26Moi, j'étais allé à New York, à la NRF,
06:28il y a un an,
06:30et on est revenu avec une start-up
06:32et on a équipé les caisses automatiques
06:34de quelques caméras qui permettent
06:36de faire sonner la caisse
06:38s'il y a un mouvement qui nous fait comprendre
06:40qu'évidemment, il y a de la fraude
06:42ou surtout, il y a un produit qui est resté dans le caddie.
06:44Donc, cette intelligence artificielle,
06:46elle est au service du commerçant
06:49qui lutte contre la démarque.
06:51Et lorsqu'on lutte contre la démarque,
06:52ça permet aussi, à un moment,
06:54de ne pas augmenter les prix,
06:55parce que lorsque il y a trop de vols,
06:56le commerçant est obligé d'augmenter les prix
06:58et ça ne bénéficie à personne.
07:00En tout cas, pas aux bons clients.