Depuis le 30 décembre dernier, le cadre harmonisé européen remplace progressivement les cadres nationaux pour mieux encadrer le marché des crypto-actifs. Analyse des enjeux dans SMART PATRIMOINE avec Salomé Tibloux-Galas, superviseur blockchain et crypto chez KPMG France.
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00:00Mais d'abord, parlons crypto, l'écho des cryptos. Pour entamer cette première émission de Smart
00:09Patrimoine en 2025, nous parlons des enjeux réglementaires avec l'application du règlement
00:13européen dit Nika Marketing Crypto Assets qui s'applique désormais aux acteurs de la crypto
00:19en Europe. Nous en parlons avec Salomé Thibout-Gallas, superviseur blockchain et crypto
00:24chez KPMG France. Salomé, bonjour. Bienvenue, merci beaucoup d'être avec nous depuis le 30
00:29décembre. Effectivement, 2024 s'applique la réglementation européenne dite Nika aux acteurs
00:34de la crypto. Qu'est-ce que cette réglementation change pour les acteurs de la crypto établis
00:38aujourd'hui, Salomé ? Premièrement, c'est une façon d'harmoniser le cadre réglementaire au
00:43niveau européen, donc qui remplace l'ensemble des cadres nationaux qui étaient précédemment en
00:47place. Vous l'avez dit, aujourd'hui, l'ensemble des acteurs crypto qui souhaitent opérer en Europe
00:52doit donc obtenir ce statut CAS, pour avoir le droit de le faire. Et donc, pour ces acteurs-là,
00:57c'est surtout des nouvelles exigences en termes de conformité. Donc, globalement, avant Mika,
01:02pour avoir le droit d'opérer, il fallait remplir deux critères principaux, la lutte contre le
01:07blanchiment d'argent et la lutte contre le financement du terrorisme. La base, quoi.
01:10Exactement. Et c'est ce qui permettait aux France d'art, par exemple, un enregistrement
01:15PSAN ou VASP dans les autres pays européens. Aujourd'hui, on a des exigences renforcées,
01:20notamment sur trois critères. Des exigences financières, notamment en termes de réserve
01:24de fonds propres ou d'obtention d'une responsabilité civile professionnelle,
01:28d'une assurance. Le deuxième point, c'est plus de transparence, donc sur la gestion des fonds des
01:33clients, mais aussi sur les techniques commerciales utilisées. Et enfin, le troisième point, c'est
01:37de la protection des consommateurs, donc la prévention des abus de marché, par exemple,
01:40les délits d'initié, et aussi se conformer à des réglementations sur la cybersécurité et,
01:45notamment, la réglementation d'EURA. Donc, gros renforcement en termes de conformité. CASP,
01:51c'est prestataire de services en actifs cryptos, c'est ça ? Pour comprendre un peu les anagrammes
01:57européens. À propos d'anagrammes, qu'est-ce qu'il faut comprendre des agréments PSAN,
02:03des premiers agréments PSAN, prestataire de services en actifs numériques, qui ont été
02:08délivrés par l'AMF Salomé ? Tout à fait. Donc, on a beaucoup parlé des agréments PSAN obtenus
02:13en fin d'année dernière. L'idée, c'est que, comme on l'a dit, avant que Mika arrive,
02:18il y avait des cadres nationaux en place en France. Il y avait l'enregistrement PSAN,
02:22qui était une étape obligatoire pour avoir le droit d'opérer en France. La grosse différence,
02:26c'est qu'avec le CASP, on va avoir un passeport européen et les acteurs vont pouvoir opérer dans
02:31l'ensemble de l'Europe. Et l'AMF a proposé d'aller un peu plus loin avec une étape optionnelle,
02:36supplémentaire, qui était l'agrément PSAN, avec des exigences, là aussi, plus strictes. Et
02:41l'intérêt d'aller chercher cet agrément PSAN pour les acteurs cryptos, c'est que c'est des exigences
02:46qui sont très similaires à celles de Mika, finalement. Et donc, ça va représenter une
02:50sorte de tremplin pour eux, pour aller plus facilement chercher un agrément derrière.
02:54D'ailleurs, on peut même imaginer que les premiers dossiers qui seront instruits par l'AMF,
02:58dans le cadre de Mika, seront les dossiers des acteurs ayant obtenu cet agrément.
03:03Les premiers CASP seront les premiers agréments PSAN, d'une certaine manière.
03:08Certainement. En tout cas, ils remplissent déjà un certain nombre de critères qui sont
03:11demandés dans le cadre de Mika. Beaucoup d'acteurs, sur la base du volontariat,
03:14sont allés chercher ces agréments PSAN.
03:15Et bien, exigences renforcées égalent aussi plus de difficultés à se mettre en compte.
03:22Il y a eu une sélection.
03:23Donc, il y a eu une sélection. Il y a cinq acteurs qui l'ont obtenu. Et ce qui est intéressant de
03:27voir, c'est que parmi ces cinq acteurs, on a deux institutions financières traditionnelles,
03:30Société Générale Forge et BPC, avec sa filiale EXARC. Et derrière, on a aussi DBLOG,
03:35COMECT, qui est soutenu par FDJ, donc aussi un acteur institutionnel. Et EXAION,
03:39qui est la filiale WEB3 de EDF.
03:41On parle beaucoup des enjeux réglementaires en Europe en général.
03:44Quelles sont les forces et faiblesses de la réglementation Mika qui s'applique
03:48désormais aux acteurs de la crypto, Salomé ?
03:50Et bien, en résumé, sur les avantages, le premier, on l'a dit, c'est une harmonisation.
03:53Donc, on met tous les acteurs européens sur un pied d'égalité.
03:56Le deuxième, c'est l'expansion.
03:57Encore une fois, ça permet de toucher tout le public européen,
04:00donc un public beaucoup plus large.
04:02Deuxième élément, c'est la professionnalisation du secteur.
04:04Cade réglementaire strict, mais aussi clair.
04:07Donc, ça veut dire plus de légitimité de ces acteurs-là vis-à-vis des partenaires,
04:10d'investisseurs, mais aussi créer plus facilement de la confiance vis-à-vis de leurs clients.
04:15Et le dernier avantage, on l'a un peu dit, mais c'est une incitation aussi claire
04:18pour les institutions financières déjà régulées,
04:21qui d'une part, pouvaient avoir plus de réticence à envisager des services cryptos
04:24dans un cadre d'incertitude réglementaire.
04:27Et aussi, on l'a vu avec l'agrément PSAN,
04:29c'est des acteurs qui ont l'habitude de la conformité.
04:31Donc, c'est plus facile pour eux d'aller aussi peut-être chercher cet agrément.
04:35Est-ce qu'il y a des points négatifs quand même, malgré tout,
04:37à travers cette réglementation nouvelle qui s'applique aujourd'hui ?
04:40Eh bien, quelques inconvénients tout de même.
04:42Le premier, qui découle aussi de ce qu'on vient de dire,
04:45c'est que MICA est assez rigide et s'applique de la même manière à tous les acteurs.
04:49Donc, on soit un acteur de la finance traditionnelle déjà régulée,
04:52ou une petite start-up...
04:54C'est le one size fit all, quoi.
04:55C'est la même taille pour tout le monde.
04:57Et ça va être plus compliqué, du coup, pour une start-up,
04:59déjà peut-être de constituer de la trésorerie pour constituer ses réserves de fonds,
05:04aussi de recruter des profils qui maîtrisent les enjeux de conformité
05:07pour pouvoir comprendre cette nouvelle réglementation.
05:10Et donc, ça, ça peut représenter un frein pour ces acteurs-là, l'innovation.
05:13Et le deuxième inconvénient, ce sont des défis communs cette fois-ci,
05:16peu importe la taille des entreprises,
05:19mais plus en fonction des acteurs traditionnels et leur capacité à les accompagner.
05:23Un assureur, il faut qu'il maîtrise ces enjeux-là.
05:25Le régulateur, lui aussi, il faut qu'il comprenne l'applicabilité de MICA
05:29en fonction des différents services, et ça, ça peut prendre du temps.
05:31Comment est-ce qu'on peut dépasser ces freins ?
05:33Comment vous réfléchissez à ça chez KPMG, au service crypto-blockchain Salomé ?
05:39Sachant que d'autres zones géographiques, ce n'est pas le sujet ici,
05:42vont sans doute se développer peut-être avec une réglementation beaucoup plus légère.
05:46Comment est-ce qu'on fait en Europe pour maintenir ce niveau de réglementation,
05:50mais faire en sorte que la réglementation ne soit pas une entrave
05:52au développement du marché de l'innovation et des acteurs cryptos, comme vous disiez ?
05:56Bien sûr, pour nous, il y a deux enjeux majeurs avec MICA.
05:59Le premier, on vient de le dire, mais ça va être l'équilibre à trouver
06:02entre le temps de mise en conformité, notamment vis-à-vis des régulateurs,
06:06et la vitesse à laquelle va le marché pour rester compétitif.
06:09Le deuxième élément, c'est la capacité de l'Europe, en parallèle de ce cadre réglementaire,
06:13qui est clair, mais qui, encore une fois, est assez rigide,
06:15et on est assez pionniers là-dessus, à mettre en place un plan d'investissement
06:19pour soutenir l'écosystème.
06:20Il y a deux jambes.
06:21Exactement. Aux États-Unis, on le voit peut-être que l'innovation
06:24est plus facilement favorisée, en tout cas le financement,
06:27en témoignant les géants aujourd'hui du secteur, que ce soit Coinbase, Racken, Binance.
06:31Et donc, si eux aussi s'inspirent de Mika pour mettre en place un cadre réglementaire
06:34peut-être un peu plus souple, et qu'en parallèle, l'Europe n'est pas en mesure
06:39de soutenir davantage l'innovation par le financement,
06:41eh bien, on pourrait perdre en part de marché.
06:44Merci beaucoup, Salomé, pour cet éclairage,
06:46premier de la saison 2025 de Sparte Patrimoine,
06:49dans l'éco des cryptos, cet éclairage réglementaire avec, effectivement,
06:52cette étape importante dans l'application de la réglementation européenne,
06:56Mika, aux acteurs de la crypto.
06:58Salomé Thibougalas, superviseur blockchain et crypto chez KPMG France,
07:02était notre invité dans Sparte Patrimoine aujourd'hui.