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00:00Bonsoir à toutes et à tous. C'est un livre à mettre sous le sapin. Succession saison 2 de nos
00:06consoeurs du monde, Vanessa Schneider et vous-même Raphaël Bach. Et bonsoir. Une série d'été qui
00:12devient donc un livre chez Albain Michel. Après avoir appris à connaître dans le premier ouvrage
00:17les Arnaud, les Pinot, les Mulliez, on découvre cette fois-ci d'autres familles françaises à la
00:24tête de groupes florissants. Des familles qui ont bâti des Empires, les Rothschild, les Dassault,
00:29les Ricard, les Saadet et toujours cette même impression d'être dans Dallas. Ce ne sont pas
00:35que des histoires capitalistiques qui racontent la naissance et la transmission d'une entreprise
00:39de génération en génération. Ce qui me frappe avant tout c'est que ce sont avant tout des
00:43histoires de famille, des histoires d'amour, des histoires de trahison, de fils blessés. Est-ce
00:49que vous aussi ça vous frappe ou est-ce que c'est justement ce que vous êtes allé chercher dans
00:54ces histoires, dans ces sagas, des histoires familiales ? Oui bien sûr parce que ce qui nous
00:58a frappé évidemment la fortune de ces familles les distingue de nous. Mais en revanche elles
01:05connaissent les mêmes difficultés, les mêmes rivalités, les mêmes situations où on préfère
01:11un enfant à un autre, où les fratrices déchirent. Tout ce que tout un chacun connaît au moment de
01:18la succession. Chez le notaire on peut se déchirer pour des petites cuillères alors eux ils se
01:22déchirent pour des choses beaucoup plus importantes. Mais la transmission du pouvoir quand on a créé
01:27une grande entreprise et bien ça crée une espèce de précipité des relations humaines et on voit
01:33et c'est ça qu'on voulait raconter. Effectivement il y a des rapports qui sont parfois très très
01:37durs chez les Dassault évidemment par exemple, au-delà de l'Empire, de la réussite, les avions,
01:41les logiciels, l'art. Il y a cet homme, Serge, incapable d'un mot gentil pour ses fils qui leur
01:47savonne la planche en permanence, les humilie en public. Ça vous vous y attendiez ? C'est vrai que
01:52ça nous a frappé de voir des très grands ingénieurs parce que Marcel Dassault et Serge
01:58Dassault sont de très grands ingénieurs qui ont inventé réellement des avions. Et puis dans leur
02:06vie familiale comme père, ils sont d'une psychologie tellement rudimentaire que c'est très étonnant.
02:13Marcel Dassault qui a connu en plus la rudesse et même l'inhumanité des camps de concentration,
02:22il est incapable de dire quelque chose d'aimable à son fils, il l'appelle Monsieur dans l'entreprise
02:28et il ne cesse de le dénigrer. Et Serge Dassault reproduira exactement le même modèle paternel,
02:34d'une façon désastreuse d'ailleurs pour ses enfants. Vous vous interrogez d'ailleurs dans
02:37l'introduction sur la sécheresse de cœur que vous retrouvez chez nombre de ces grands fauves.
02:42Sont-ils incapables d'amour ou est-ce une façon finalement de les préparer à la succession et à
02:48la vie des affaires ? Est-ce que vous avez trouvé la réponse à cette question ? Je crois d'abord que
02:52tous ces hommes sont des créateurs d'entreprises et ils font un égo surpuissant, à vrai dire,
02:56pour créer quelque chose d'important et le diriger avec succès. Et c'est leur cas. Donc évidemment
03:03ces hommes ont un très gros égo. Ils ont du mal à envisager leur succession parce qu'évidemment
03:09passer la main ça veut dire mourir un peu, disparaître. Et donc ça c'est très difficile et
03:15ils ont du mal. On sait bien en tant que parents que la bonne éducation c'est de laisser ses enfants
03:21s'émanciper au bout d'un moment. Or quand vous voulez transmettre ce que vous avez créé, votre
03:25entreprise, vous avez tendance à envisager votre successeur comme un petit moi. Il faut
03:31qu'il vous ressemble et donc cette émancipation elle est très difficile. Et c'est ça qu'on voit
03:36dans toutes ces familles. Alors quels sont ceux qui vous ont le plus intrigué, le plus surpris ?
03:40À vrai dire tous, dans des genres très différents. Les Dassaults, on vient de le dire, bien sûr,
03:46les Vertemers sont très intéressants. Ça c'est Chanel, on ne les connaît pas du tout. Vous ne les
03:51connaissez pas du tout mais vous connaissez leur marque, Chanel. Et effectivement ils sont
03:55incroyablement secrets. Ils cultivent ce secret. D'ailleurs ils ont des histoires de famille
04:01insensées. On ne racontera pas. Mais les actuels propriétaires de Chanel, Alain et Gérard, ont dû
04:09mettre sous tutelle leur père pour prendre la direction. Donc c'est vraiment des histoires
04:14très particulières. Leclerc, les Leclerc. Alors justement, lui il est très médiatique, on a
04:18l'impression qu'on le connaît. Le contraire de Chanel si je puis dire. Eux ils font de la grande distribution. Et là
04:23aussi il y a une histoire très difficile entre père et fils. Non pas d'ailleurs sur l'argent.
04:29Il dit parce qu'il lui a pris son nom. Il dit comme s'il s'était approprié son nom. Comme s'il l'avait
04:34volé. Comme s'il l'avait vraiment remplacé. C'est-à-dire que Michel-Edouard, Leclerc au départ
04:40s'appelle Michel. Et il prend le nom de son père, Edouard, Michel-Edouard. Non seulement il lui prend
04:45son nom, mais il le remplace dans les médias. Et son père lui dit tu me voles tout ! Et ça c'est
04:51très intéressant. C'est-à-dire que dans un milieu complètement différent de Chanel, on voit la même
04:55problématique. La difficulté à laisser la place et notamment à la chair de sa chair en fait. Alors
05:01qu'on devrait au contraire être plus généreux. Est-ce que le succès médiatique et le succès
05:06littéraire d'ailleurs du tome 1 de Succession vous a aidé à approcher ceux que vous avez rencontrés
05:12pour le tome 2 ? D'abord ce qui nous a frappé c'est qu'ils avaient lu le tome 1 avec
05:17beaucoup d'attention bien sûr. Ils sont très curieux. Oui, parce qu'ils sont très curieux de
05:23comment font les autres. Ils cherchent des modèles parfois ou des contre-modèles. Ils vous en parlent ?
05:29Bien sûr qu'ils nous en parlent. Ils n'ont pas toujours ouvert la porte avec facilité. Mais on a
05:34fait des grosses enquêtes. On a cerné aussi leur entourage, leur haut cadre, qui sont souvent de
05:40très bonnes sources pour savoir ce qui se passe dans les familles. Et donc finalement peu à peu
05:44ils nous ont ouvert la porte. Pas tous. Les vertémeurs par exemple sont très très verrouillés.
05:49Mais on a quand même fait une très grosse enquête et je crois qu'on réussit à raconter vraiment ce
05:53qui se passe dans l'intimité de ces familles. Est-ce qu'il y en a un que vous regrettez de ne
05:56pas avoir pu mettre dans ce livre ? Est-ce qu'il manque des familles finalement ? Ou est-ce que
06:01vous les avez toutes à travers ces deux tomes ? D'abord en France il y a beaucoup d'entreprises
06:05familiales. Donc évidemment que notre recherche n'est pas exhaustive. On s'est intéressé quand
06:11même aux principales familles. Mais est-ce qu'il y a des familles très importantes que vous regrettez
06:15de ne pas avoir pu approcher ? En fait ce qu'on regarde c'est maintenant au-delà de nos frontières.
06:17Parce que c'est vrai que les Agnelli par exemple sont une famille tout à fait passionnante. En
06:24Allemagne, en Belgique, vous avez des très grandes familles d'industriels qui offrent des
06:29modèles un peu semblables aux nôtres. Donc c'est ça qui est intéressant. Semblable aux nôtres, c'est-à-dire
06:34qu'on n'est pas une exception. Non, on n'est pas une exception. Mais la nôtre, enfin en France,
06:39vous le savez, vous ne pouvez pas déshériter un enfant ou trop favoriser un enfant. Ce qui existe
06:45dans d'autres pays. Donc ce n'est pas une question d'argent. C'est une question de transmission du
06:51pouvoir, du nom, de la reconnaissance. Et c'est là que ça devient vraiment une affaire purement
06:58de sentiments. Dernière question, Raphaël Baquet. Il n'y a que des hommes dans ces livres, dans le
07:04tome 1, dans le tome 2. Les histoires familiales d'entreprises françaises, ce ne sont que des
07:09histoires d'hommes. Oui, nous aussi on a été désappointé évidemment avec Vanessa, puisqu'on est
07:13toutes les deux des femmes. Je pense que c'est aussi une question de génération. Le milieu économique
07:18est en retard sur le milieu politique, par exemple, qui a pratiqué la parité depuis les années 90.
07:25Donc aujourd'hui, ça arrive. Mais ce qu'on a vu, c'est qu'on a repéré dans les nouvelles
07:29générations des femmes. Elles ont aujourd'hui 30 ans, en fait. Elles sont super diplômées et
07:35elles rentrent, elles commencent à rentrer dans les conseils d'administration. Je pense que si
07:40nous refaisons une succession dans 10 ans, elles seront là. On en prend le pari ce soir. Merci
07:46beaucoup, Raphaël Bacquet.