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Édouard Philippe était l’invité spécial de BFMTV ce vendredi 6 décembre. L’ancien Premier ministre et président du parti Horizons, s’est exprimé notamment sur la censure du gouvernement de Michel Barnier.

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00:00Bonsoir Edouard Philippe.
00:01Bonsoir.
00:02Merci d'être avec nous ce soir dans Tout le monde veut savoir et d'avoir choisi BFM TV pour votre première prise de parole depuis la censure de Michel Barnier.
00:08Une prise de parole attendue, tant la situation politique paraît bloquée. Je rappelle que vous êtes maire du Havre, ancien Premier ministre, président d'Horizon.
00:15Votre parti politique est candidat à l'élection présidentielle, on y reviendra à la fin de cet entretien.
00:20Mais je voudrais commencer Edouard Philippe pour planter le décor par vous citer, juste après l'adoption de la motion de censure, vous avez eu ces mots sur X.
00:29Ouvrez les guillemets, soyons lucides, nous sommes au bord du gouffre. C'est de la lucidité ou votre habitude de jouer les cassandres ?
00:37Je déteste jouer les cassandres, mais si j'ai dit et si j'ai écrit ça, c'est parce que je le pense.
00:43Et je ne le pense pas depuis hier, ça fait longtemps que je dis que notre situation financière et budgétaire nous place dans une fragilité qui est inquiétante.
00:53Et ce qui s'est passé au cours de cette semaine que vous venez de résumer, à travers la motion de censure, nous place dans une situation qui, je le crois, est une situation dangereuse.
01:02Qu'est-ce qui s'est passé ? Il y a eu une motion de censure. Cette motion de censure, elle est issue de quoi ?
01:08Je vais le prendre autrement. Lorsqu'on a créé la Ve République en 1958, je n'étais pas là,
01:18elle a été créée par le général de Gaulle et par ses concepteurs pour réintroduire un exécutif puissant, une stabilité, une vision de long terme, une capacité à agir et à réformer.
01:29Pourquoi ? Parce que sous la quatrième, on avait connu le régime des partis, l'instabilité, l'incapacité à sortir de problèmes et avoir des politiques de long terme.
01:37Bon, qu'est-ce qu'on observe aujourd'hui ? On observe une situation où lorsque le président de la République aura nommé un premier ministre, peut-être la semaine prochaine, on aura eu quatre premiers ministres en un an.
01:49Donc l'instabilité, elle est là.
01:51C'est quoi, c'est une crise de régime ?
01:52La capacité à voir à long terme, elle a quasiment disparu. Le régime des partis, il est exactement en train de revenir.
01:59Tout ce qu'on a entendu depuis cette semaine, et d'ailleurs en vérité tout ce qu'on a entendu depuis six mois, tend à montrer que, en effet, le régime des partis est en train de revenir.
02:06C'est donc, on n'est pas très loin d'une crise de régime. Je voudrais insister sur la gravité.
02:11C'est important ce que vous dites, pas très loin d'une crise de régime.
02:13On n'est pas très loin d'une crise de régime. Parce que véritablement, la Ve République, c'est-à-dire notre cadre constitutionnel tel qu'il a été conçu, tel qu'il doit fonctionner, tel qu'il nous permet d'avancer, je le constate quasiment remis en cause.
02:28Et ça n'est pas sans conséquences. Alors, je sais qu'il y a quelques semaines ou quelques jours avant la censure, il y a beaucoup de gens qui ont dit, mais si la censure est votée, le gouvernement tombe, et tout s'arrête.
02:40Oui, ce sera un shutdown, ce qu'on a entendu.
02:42Un arrêt brutal.
02:43Jean-Bette Borne disant même, les cartes vitales ne marcheront plus. Visiblement, ces arguments-là n'ont pas convaincu les uns et les autres de ne pas voter la censure.
02:51Je crois qu'ils sont excessifs, mais surtout, je crois que même s'ils sont excessifs, ils ne disent pas ce qui est plus inquiétant. Ils sont excessifs parce que l'État va continuer à fonctionner.
03:02Le président hier a eu raison de dire que le gouvernement proposerait une loi spéciale, de façon à ce qu'on puisse lever les impôts, donc assurer les dépenses.
03:11Ce n'est pas aussi simple que ça paraît, parce qu'on ne sait pas très bien ce que c'est qu'une loi spéciale. On ne sait pas si on peut modifier la façon dont on a prélevé les impôts l'année d'avant.
03:19Pour expliquer à ceux qui nous regardent, Edouard Philippe, la loi spéciale, c'est pour prolonger le budget 2024 sur l'année qui suit.
03:25Exactement. Et donc la question, c'est est-ce qu'on sera capable de remettre des choses qu'on avait imaginé mettre dans le budget de 25 dans la loi spéciale ?
03:31C'est assez peu probable, mais passons, je ne veux pas rentrer dans la technique.
03:34L'État va continuer à fonctionner, certes, mais il y a beaucoup de choses qui vont aller beaucoup moins bien.
03:39D'abord parce que cette instabilité politique manifeste, elle a un coût politique, elle a un coût budgétaire, elle a un coût financier.
03:48Les marchés, c'est-à-dire ceux qui nous prêtent, nous font moins confiance, donc nos taux d'intérêt augmentent.
03:54Qu'est-ce que ça veut dire que nos taux d'intérêt augmentent ? On peut se dire que les taux d'intérêt, on s'en fout.
03:57Les taux d'intérêt, c'est technique, les taux d'intérêt, c'est financier.
04:00Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que nous allons, chaque année, consacrer de plus en plus de moyens à simplement payer les intérêts de notre dette.
04:11La charge de la dette, ça doit être environ 50, peut-être un peu plus maintenant, milliards d'euros.
04:15C'est plus que ce que nous consacrons à l'éducation nationale.
04:19Ça veut dire que chaque année, nous autres Français, nous payons plus cher les intérêts de notre dette, je ne vous parle même pas du capital,
04:25les intérêts de notre dette que ce que nous investissons pour la jeunesse, pour l'avenir de la France, pour la puissance de la France.
04:31C'est fou, et ça va continuer. Et vous savez ce qui va se passer aussi ?
04:34Si les taux d'intérêt continuent à augmenter, ça veut dire une crise du logement qui va s'aggraver.
04:38Ça veut dire donc une politique du logement et une capacité des Français à entrer sur le marché de l'immobilier qui va être plus difficile.
04:45En vérité, nous sommes en train d'aggraver la crise économique qui est là.
04:51Nous sommes en train de casser des perspectives pour des millions de Français.
04:54Notre influence et notre rayonnement diminuent. Nous l'avons vu.
04:58Signature par l'Union européenne, par la commission du traité Mercosur.
05:03La vérité, c'est que nous sommes en train de nous laisser aller.
05:08C'est ça que nous voyons.
05:11Et d'ailleurs, en vérité, ça énerve beaucoup les Français.
05:13Et on sent une sorte de colère sourde.
05:15Évidemment que je suis en colère !
05:17Comment vous voulez ne pas être en colère ?
05:19Je ne suis pas en train de dire...
05:21Mais qui est responsable ? Qui a décidé de dissoudre l'Assemblée nationale le 9 juin ?
05:25On y viendra.
05:26Oui, mais on y viendra, c'est quand même un élément important de la discussion.
05:29C'est très facile, et c'est très français, de vouloir pointer quelque chose.
05:32Je dis que collectivement, la France est en train de glisser.
05:36Et ça m'inquiète, ça me fait mal, ça m'agace, ça me met en colère.
05:41Et je pense qu'il faut qu'on en ait bien conscience.
05:43Et je dis donc que la motion de censure, qui n'est pas anti-républicaine,
05:47au sens où il y a des armes constitutionnelles qui sont utilisées,
05:51mais qui nous place dans une situation de très grande fragilité,
05:56a des conséquences graves sur notre pays.
05:58Et qu'on puisse le nier, qu'on puisse dire
06:00« Non, ce n'est pas grave, vous allez voir, ça va bien se passer »,
06:02ça me rend dingue.
06:03Ça me rend dingue parce que ça a des conséquences graves.
06:05Alors, Edouard Philippe, vous avez, dans l'introduction de cet entretien,
06:08on a du temps pour parler de tous ces sujets, évoquer plusieurs éléments.
06:11Je voudrais qu'on les prenne point par point, là encore,
06:13pour que nos téléspectateurs comprennent bien.
06:15D'abord, l'aspect financier.
06:16Vous dites effectivement « risque d'augmentation des taux d'intérêt »,
06:19ça veut dire « renchérissement du coût de la dette »,
06:21ça veut dire que sur les marchés financiers,
06:23nos prêteurs demandent davantage d'intérêt pour nous prêter de l'argent.
06:27Moi, j'ai entendu le Président de la République, c'était en Arabie Saoudite,
06:30auprès d'un certain nombre de nos confrères, qui disaient
06:32« Non, il ne faut pas inquiéter les Français. L'économie française, elle est solide.
06:35On n'est pas à la veille d'une crise financière. »
06:37Il a raison, au sens où nous sommes un pays riche.
06:40La France, c'est un pays riche, c'est un pays qui a des remarquables entreprises.
06:44Tout ne va pas mal en France, mais nous nous laissons aller.
06:47Alors, vous pouvez être riche, et quand on se laisse aller…
06:49On est à la veille d'une crise financière ?
06:50On est à la veille d'une situation comme…
06:52J'ai toujours considéré, vous m'avez dit…
06:53Comme l'adresse ?
06:54J'ai toujours considéré, et vous m'avez toujours entendu dire,
06:56et je l'ai dit pendant la campagne législative, au moment de la dissolution,
07:00je l'ai même dit dès 2001, que nous devions faire attention à stabiliser nos finances publiques,
07:04parce que quand on ne stabilise pas nos finances publiques,
07:06nous nous abandonnons, nous nous mettons dans la main de ceux qui nous prêtent de l'argent,
07:11nous perdons notre souveraineté.
07:12Mais est-ce que nous sommes à la veille, Edouard Philippe,
07:14compte tenu de la situation politique et de l'instabilité,
07:16d'une crise financière, crise de la dette,
07:18d'avoir à un moment donné un dérapage tel que la France perdrait le contrôle
07:22de ses finances publiques et de la situation économique ?
07:25Ceux qui ne veulent pas voir le risque, m'effraient.
07:29Et je sais bien qu'il y a des gens qui vous disent,
07:31c'est théorique, les Français, d'abord je pense qu'ils comprennent très bien les Français,
07:37et je pense que la politique de l'autruche, en espérant que ça passe,
07:42en espérant que ça ne se déclenche pas,
07:44en se disant que ça se déclenchera plus tard et que c'est d'autres qui auront à le gérer,
07:46c'est une mauvaise politique.
07:48Ça c'est l'économie.
07:49Sur la partie politique, pardon, ça avait l'air de vous agacer un petit peu cette question,
07:52peut-être qu'elle est rituelle,
07:53et en même temps je pense que celles et ceux qui nous regardent ce soir se la postent aussi.
07:56Vous dites, on n'est pas loin d'une crise de régime.
07:58Mais qui la provoque, la crise de régime, Edouard Philippe ?
08:00Qui a décidé, visiblement contre tous les avertissements qui avaient pu être faits,
08:04vous-même d'ailleurs, vous expliquez qu'au fond,
08:07en décidant de dissoudre l'Assemblée nationale,
08:08Emmanuel Macron avait brisé la majorité présidentielle.
08:12C'est Emmanuel Macron qui décide de dissoudre l'Assemblée le 9 juin ?
08:15C'est le Président de la République qui décide de dissoudre.
08:18J'ai toujours pensé que c'était une mauvaise décision,
08:22et j'observe que lui-même, hier,
08:25je connais le Président,
08:27dans la façon qu'il a eu de le dire, ça veut dire que...
08:30Il dit qu'elle n'est pas comprise.
08:31On a connu, mais à quel pas plus affirmé.
08:34Peut-être, et disons que moi j'ai compris que le Président faisait le premier pas pour l'admettre.
08:39Mais ne faisons pas, comme c'est trop souvent facile de le faire,
08:42d'expliquer que tous les problèmes viennent du Président de la République.
08:45L'incapacité des partis à travailler ensemble,
08:48à rentrer dans des logiques de compromis,
08:51depuis juillet 2024,
08:53elle ne dépend pas du Président de la République.
08:55Tous les partis, le socle commun également,
08:57c'est-à-dire les macronistes, la droite...
08:59Est-ce que Michel Barnier a été suffisamment aidé par le socle commun ?
09:01Chez Horizon, on n'a fixé aucune ligne rouge.
09:04Vous avez été plutôt bon élève, il faut le dire, ce qui n'est pas exactement le cas.
09:06L'objectif n'était pas d'être bon élève,
09:08l'objectif c'était d'essayer d'aider.
09:09Le Premier ministre a stabilisé politiquement la situation.
09:12Je ne demande pas des bons points,
09:14et je crois que les députés de Horizon ont essayé de le faire avec beaucoup de sérieux,
09:17et je crois beaucoup de loyauté.
09:19Il n'a pas été suffisamment aidé ?
09:21Reconnaissons qu'il n'y avait pas de contrat de coalition,
09:23et on ne peut pas dire que l'ensemble des forces politiques
09:27qui composaient ce socle commun un peu fragile
09:29aient été au rendez-vous d'un soutien solide,
09:33résolu, déterminé, à Michel Barnier,
09:35qui en avait bien besoin.
09:37Et aujourd'hui, qu'est-ce qu'on constate ?
09:39Des petits bougés, avec des lignes rouges dans tous les sens.
09:42On revient en régime des partis, je ne peux pas dire mieux.
09:46Je suis président d'un parti politique,
09:48je ne vous dirai jamais que les partis politiques c'est mal.
09:50On en a besoin.
09:52Mais on n'a pas besoin d'un régime de partis,
09:54on n'a pas besoin que les partis politiques, entre eux,
09:56prennent posture sur posture pour ne pas faire avancer le pays.
10:00Et donc ça, ce n'est pas lié au président de la République,
10:02c'est lié à la capacité des responsables politiques
10:06à dépasser le moment et à penser à leur pays.
10:09Mais simplement, cette dissolution,
10:12et la censure qui s'en est suivie,
10:14c'est une preuve de plus qu'il ne fallait pas dissoudre l'Assemblée nationale ?
10:17C'est les Français qui ont voté.
10:19Le président de la République a pris la décision de dissoudre.
10:22Peut-être que c'était une mauvaise décision,
10:23mais il a pris la décision de dissoudre.
10:24Ensuite, les Français ont voté.
10:25Et ils ont beaucoup voté.
10:27Tout le monde reconnaît que la participation aux élections législatives
10:30en juin et en juillet a été supérieure à ce qu'on avait connu depuis longtemps.
10:34Ils ont voté.
10:35Qu'est-ce qu'ils ont dit ?
10:36Ils ont dit quelque chose qui ne donne de majorité à personne.
10:39A absolument personne.
10:41Et vous savez, là aussi, c'est assez intéressant.
10:44Pendant très longtemps, j'ai entendu, lorsque j'étais étudiant,
10:47c'était vraiment longtemps,
10:48et puis depuis, qu'en France, le fait qu'il y ait des majorités stables,
10:53qu'il y ait des majorités dures,
10:54qu'il y ait des majorités massives,
10:56rendait difficile la culture du compromis.
10:59Ce que je constate, c'est qu'il n'y a pas de majorité aujourd'hui,
11:02que je ne vois pas la culture du compromis progresser,
11:04et qu'en revanche, ce qui est clair,
11:06c'est que le pays a du mal à être gouverné.
11:08Et on va rentrer dans le détail, Edouard Phil,
11:09puisque vous évoquiez effectivement les uns et les autres
11:11qui avancent des lignes rouges,
11:12même s'il y a quelques évolutions.
11:14Et là encore, on va rentrer dans le détail précisément,
11:16puisque la question qui se pose ce soir,
11:17et je vous la poserai très directement dans un instant, Edouard Philippe,
11:19c'est comment sortons de cette situation ?
11:22Juste avant, vous évoquiez parmi les conséquences
11:24en cascade de cette instabilité,
11:26ce qui s'est passé aujourd'hui.
11:28La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen,
11:30qui a annoncé la conclusion d'un accord commercial
11:33entre l'Union européenne et les pays du Mercosur,
11:36c'est-à-dire des pays d'Amérique latine.
11:38Il faut encore que cet accord soit soumis aux États membres.
11:42La France s'y oppose.
11:44Mais elle n'est pas écoutée, elle n'est pas entendue.
11:48Ursula von der Leyen continue de dire que c'est un bon accord
11:50et il faut qu'il rentre en vigueur.
11:51La France ne compte plus ?
11:52Ursula von der Leyen pense que c'est un bon accord.
11:54Je crois qu'elle le pense sincèrement.
11:56Les Allemands pensent que c'est un bon accord.
11:57Les Espagnols pensent que c'est un bon accord.
11:59La France, qui a du mal à se mettre d'accord sur les choses,
12:01considère de façon quasi unanime que c'est un mauvais accord.
12:04Qu'est-ce qu'elle peut faire, la France ?
12:06Qu'est-ce que nous pouvons faire si nous considérons que c'est un mauvais accord ?
12:09Nous pouvons lutter sur deux choses.
12:11Pas nous plaindre de ce que la Commission a signé,
12:13il y avait un mandat à la signer.
12:15Nous devons faire deux choses.
12:16Réunir au niveau des États une coalition de blocage,
12:21une minorité de blocage.
12:22Ça veut dire aller parler aux Italiens, aux Polonais,
12:24à d'autres États pour leur dire,
12:25lorsque le Conseil européen va approuver cet accord,
12:28il faut qu'il y ait une minorité de blocage.
12:30Soit nous y arrivons, soit nous n'y arrivons pas.
12:32Reconnaissons, monsieur Duhamel,
12:34que sans ministre des Affaires étrangères,
12:36qui exécute les affaires courantes,
12:37et sans ministre de l'Agriculture,
12:39qui exécute les affaires courantes,
12:40c'est un petit peu plus difficile d'aller mobiliser...
12:42C'est de la faute de ceux qui ont voté la motion de censure ?
12:45Vous ne me verrez pas pointer du doigt en disant
12:47c'est de votre faute, c'est de votre faute, c'est de votre faute.
12:49Parce que c'est un peu facile.
12:50Au fond, la question qui se pose, Edouard Philippe,
12:52sur la question du Mercosur, c'est
12:53est-ce que la France, sur la scène internationale européenne,
12:55se fait encore respecter ?
12:56Monsieur Duhamel, c'est facile de pointer les responsabilités.
13:02Nous voulons bloquer l'entrée en vigueur de ce traité.
13:05Il ne s'agit pas de lancer des grands cris d'orfraie.
13:10Il s'agit de s'organiser pour créer,
13:12un, une minorité de blocage au Conseil européen,
13:14et deux, pour essayer d'obtenir une majorité au Parlement européen.
13:17Parce que je voudrais quand même rappeler que ce traité,
13:19il doit être ratifié dès lors qu'il aura été approuvé par le Conseil,
13:22au Parlement européen.
13:23Mais il faut une minorité de blocage,
13:24c'est-à-dire que la France seule n'a pas les moyens de s'y opposer.
13:26Il faut une minorité de blocage au Conseil,
13:29et ensuite, on peut, au Parlement européen, s'opposer à sa ratification.
13:33Et je voudrais attirer votre attention, Monsieur Duhamel,
13:35sur le fait que, là encore, au lieu de lancer des grands cris d'orfraie,
13:38on a du travail à faire.
13:40Il y a des groupes parlementaires au Parlement européen.
13:43Les socialistes français, qui sont très contre ce traité,
13:46ils sont dans un groupe,
13:47social-démocrate au Parlement européen.
13:49Les républicains, qui sont très contre ce traité,
13:52ils sont dans un groupe,
13:53le PPE, c'est le plus puissant.
13:54Eh bien, il faut qu'ils convainquent leurs collègues,
13:56et c'est un énorme travail politique à faire.
13:58Et on compte sur eux.
13:59Et c'est vrai qu'il y a des divisions à l'échelle européenne,
14:01des familles politiques qui, en France, s'y opposent,
14:04et sont dans des groupes,
14:05où certaines autres forces politiques, à gauche, à droite,
14:08sont favorables à ce traité.
14:09Oui, ils ont peut-être trop peu d'influence.
14:10Juste avant de parler, là encore,
14:11de la perspective d'une sortie de crise politique,
14:13je voudrais revenir un instant sur ce qui s'est passé mercredi soir.
14:16La censure, la chute de Michel Barnier,
14:20première motion de censure adoptée depuis 1962.
14:23Est-ce qu'au fond, Michel Barnier a payé le fait
14:26qu'il n'avait pas suffisamment négocié,
14:28pas fait suffisamment de compromis ?
14:29Marine Le Pen a dit, s'il avait lâché sur la question
14:32de l'indexation des pensions de retraite au 1er janvier,
14:34je ne l'aurais pas censurée.
14:36Est-ce que, là encore, vous parlez de la responsabilité
14:38des uns et des autres,
14:39est-ce que la responsabilité de Michel Barnier,
14:40d'ailleurs, je me souviens, sur cette même antenne,
14:41en septembre, vous disiez, je soutiens,
14:43il n'y a pas une feuille de papier à cigarette
14:44entre Michel Barnier et moi,
14:45est-ce que là, il n'aurait pas dû aller plus loin,
14:47encore une fois, pour tenter de négocier,
14:50de passer des compromis,
14:51y compris avec le Rassemblement national ?
14:53Écoutez, d'abord, avant de répondre à votre question,
14:57moi, je voudrais dire que la tâche
14:59qui a été confiée à Michel Barnier
15:01était redoutablement difficile.
15:03Je ne suis pas sûr qu'il ait tout fait bien,
15:05je suis certain qu'il a fait de son mieux,
15:07et de ça, je crois qu'on peut lui accorder crédit,
15:09et moi, je veux le remercier.
15:11C'est facile de passer tout de suite à autre chose,
15:13il a eu cette responsabilité difficile,
15:16que je connais un peu, d'être Premier ministre,
15:18dans des conditions redoutablement difficiles,
15:20il a fait de son mieux, merci.
15:22Premier point.
15:23Deuxième point, est-ce qu'il aurait pu faire autrement ?
15:25Donner plus à Mme Le Pen ?
15:27Je ne crois pas.
15:28Est-ce qu'il aurait pu aller de l'autre côté,
15:30voir les socialistes, pour essayer de leur donner ?
15:32Peut-être, mais vous voyez bien
15:34que ce que je disais tout à l'heure est terrible.
15:38Nous sommes retombés dans un système
15:41par défaut de fait majoritaire,
15:43où les partis, pour des postures,
15:45sont incapables de s'entendre
15:47sur des mesures qui sont nécessaires.
15:48Est-ce qu'on a réussi à baisser les dépenses,
15:50comme M. Barnier avait dit qu'il fallait le faire,
15:52dans un pays où la dépense publique
15:54est dans une logique d'hyper-augmentation ?
15:57En construisant un budget, Édouard Philippe,
15:59où il y avait à la fin, sans doute,
16:01davantage d'augmentation d'impôts que de baisse de dépenses.
16:03C'est ce que je dis, pourquoi ?
16:04Parce qu'il a fallu lâcher ça, à tel autre, ça.
16:07Vous voyez bien que ça,
16:10je ne mets pas en cause le travail parlementaire,
16:13mais vous voyez bien que ça,
16:14ce n'est pas la hauteur des enjeux.
16:15C'était aussi, Édouard Philippe,
16:16sous la pression de Laurent Wauquiez,
16:19qui souhaitait pouvoir annoncer l'élément de Gabriel Attal,
16:23qui considérait que sur la question des exonérations de cotisations,
16:26il ne voulait pas lâcher.
16:27Il y a eu une irresponsabilité de Gabriel Attal, Laurent Wauquiez ?
16:31Vous êtes fasciné par la question de la responsabilité.
16:33Ah, en politique, c'est important.
16:35Oui, je sais. Je sais bien.
16:37Mais moi, ce que je vous dis,
16:38c'est que je ne veux pas passer 50 heures
16:40à discuter de pourquoi.
16:42Ce que je vous dis, c'est que si on continue comme ça,
16:45on va au gouffre.
16:46Alors, justement.
16:47Et donc, il faut que ça change.
16:48Je vous prends au mot.
16:49Si on continue comme ça, on va au gouffre.
16:50Emmanuel Macron, hier soir, dans son allocution,
16:53a appelé à la constitution d'un gouvernement d'intérêt général.
16:56Il a promis de nommer un Premier ministre dans les jours qui viennent.
16:59Des débuts de tractation,
17:01on va y revenir, notamment avec des socialistes,
17:03qui ont été reçus aujourd'hui à l'Élysée.
17:05C'est quoi la sortie de crise ?
17:06Au fond, on a le sentiment que le jeu est totalement bloqué
17:09et que toutes les hypothèses qui sont évoquées
17:12ne changeraient pas la donne.
17:13C'est-à-dire une Ve République qui, en l'état, est bloquée.
17:16Comment est-ce qu'on sort de la crise, selon vous ?
17:19D'abord, je pense qu'on a le droit de faire preuve d'une certaine humilité.
17:22Je dis les choses avec beaucoup de conviction,
17:26parce qu'elles me touchent,
17:27mais je sais aussi que les choses sont difficiles.
17:29On peut faire preuve d'une certaine humilité sur ce qu'il faut faire.
17:34Je crois qu'il faut bien distinguer le très court terme,
17:37le court terme et le plus long terme.
17:40Le court terme, c'est la nécessaire stabilisation politique de notre situation.
17:43C'est indispensable.
17:45Je pense que vous vous souvenez que je vous disais déjà ça au mois de septembre.
17:49C'est encore plus vrai aujourd'hui.
17:50Et ça n'a pas bien fonctionné ?
17:51Ça n'a pas bien fonctionné.
17:52On doit stabiliser la situation politique pour tenir nos comptes,
17:56pour tenir notre état.
17:58Sinon, nous allons continuer à glisser.
18:00Et en général, quand on est sur un toboggan,
18:02on glisse de plus en plus vite.
18:04Donc, j'attire l'attention de tout le monde.
18:06Je le dis clairement, simplement.
18:08Je ne fais de la leçon à personne.
18:10Je serai bien le dernier placé pour faire la leçon à qui que ce soit.
18:12Mais je dis simplement que si on ne stabilise pas le jeu,
18:15on va faire ce que les médecins...
18:17Vous savez, les médecins, quand ils sont face à un malade,
18:19ils disent que le premier impératif, c'est ne pas nuire.
18:22Nous devons nous attacher à ne pas nuire.
18:25Stabiliser politiquement.
18:27Stabiliser avec qui ?
18:28La stabilisation politique, c'est probablement d'avoir la base politique
18:32la plus large possible.
18:34Probablement, et je l'ai dit dès avant la dissolution.
18:38Dès avant la dissolution, c'est ce que je disais.
18:40Dès qu'elle a été prononcée.
18:41Dès avant les élections législatives, je disais
18:43il faut avoir un accord qui va, si possible,
18:45de LR jusqu'aux socio-démocrates.
18:47Si possible, de LR jusqu'aux socio-démocrates.
18:49Et si on a un accord politique qui sera à minima,
18:52parce que nous ne voulons pas la même chose.
18:54Nous ne sommes pas d'accord sur beaucoup de sujets.
18:56Mais si on a un accord politique à minima,
18:58qui permet à l'État de fonctionner,
19:00qui permet à nos comptes d'être tenus,
19:02alors on a une chance de stabiliser les choses.
19:04On ne fera pas de grandes réformes, ça n'est pas vrai.
19:06On ne fera pas des grandes transformations,
19:08dont notre pays a besoin, pour ne pas décrocher.
19:11On va juste stabiliser les choses.
19:13Et si on ne fait pas ça, on va continuer à glisser
19:15dans l'instabilité et dans le gouffre.
19:18Je vous prends au mot.
19:19Comment est-ce qu'on fait ça ?
19:20De LR jusqu'aux socio-démocrates.
19:21Un exemple.
19:22Aujourd'hui, les socialistes, Olivier Faure, Boris Vallaud,
19:26Patrick Cannaire, Rochuelle Elysée,
19:28ils sortent, ils disent, il y a effectivement une évolution.
19:30On est prêt à des compromis, des concessions réciproques,
19:33à une condition.
19:34Un Premier ministre de gauche.
19:36Est-ce que ça, c'est une condition que vous seriez prêt à regarder
19:39pour précisément tenter de construire un accord minimal ?
19:43Je ne suis pas Président de la République.
19:45Je ne choisis pas le Premier ministre.
19:47Mais vous faites partie de…
19:48Mais je ne suis pas Président de la République
19:50et je ne choisis pas le Premier ministre.
19:51Ce que je peux dire, en tant que responsable politique,
19:53c'est que j'appelle de mes voeux la coalition la plus large
19:57et je sais, par définition, elle sera minima.
20:01Je pense qu'il faut que le Président de la République
20:02nomme rapidement un Premier ministre.
20:04Je pense que ce Premier ministre,
20:05comme l'a dit le Président de la République,
20:07doit être à la tête d'un gouvernement
20:08beaucoup plus resserré que ce qu'on dit à chaque fois en même temps.
20:11Oui, mais on est dans des circonstances assez particulières
20:13et donc je considère qu'il faudrait,
20:15vous me demandez mon avis, je vous le dis,
20:17un gouvernement beaucoup plus resserré.
20:18Je pense aussi.
20:20Je pense deux choses.
20:21C'est que compte tenu du blocage à l'Assemblée nationale,
20:23d'un blocage qui est très puissant,
20:25et malheureusement très durable, je le crains.
20:27Je pense qu'il faut essayer de se reposer sur deux choses
20:29qui permettent de créer de la capacité de décision
20:33et ou de la capacité de consensus.
20:35Le premier élément qu'il faut qu'on utilise plus,
20:37c'est le référendum.
20:39Si le Parlement a du mal à discuter,
20:43s'il est dans les excès que l'on a constatés,
20:46je pense qu'il sera utile d'utiliser l'outil du référendum.
20:49Sur quels sujets ?
20:50D'utiliser l'outil du référendum.
20:51On peut le faire sur des sujets dans le respect de l'article 11,
20:54bien entendu, sur des sujets économiques et sociaux,
20:56réforme de l'assurance chômage,
20:58est-ce qu'il faut la faire ?
21:00Est-ce qu'il faut aller plus loin ?
21:02On peut l'utiliser sur des sujets institutionnels,
21:04dans le respect de la Constitution,
21:06par exemple sur une loi électorale.
21:08On peut aller sur des sujets d'organisation,
21:10peut-être sur des sujets sociétaux.
21:13Je crois en tout cas que dès lors que l'Assemblée
21:15est bloquée dans un jeu à trois
21:17qui ne permet pas de définir des majorités,
21:19utiliser le référendum sera une bonne chose.
21:21Et deuxième élément,
21:23il faut qu'on crée du consensus là où il est susceptible
21:25de pouvoir être créé.
21:26Et j'en vois un domaine.
21:28Et je vois un domaine,
21:30c'est les questions sociales.
21:32J'ai été très frappé
21:34des déclarations récentes
21:36formulées aussi bien
21:38par les organisations représentatives
21:40des salariés que par
21:42les organisations représentatives du patronat,
21:45qui ont conscience de la crise économique
21:47dans laquelle nous sommes entrés
21:49et qui ont conscience du prix
21:51que nous allons payer à cause
21:53du régime des partis.
21:54Et qui disent, faites-nous confiance,
21:56on est capables sur un certain nombre de sujets.
21:58Je le dis,
22:00je pense que nous devons saisir cette offre.
22:02Je pense que nous devons saisir cette offre
22:04et nous appuyer sur des responsables syndicaux.
22:07Je n'ai pas toujours été très tendre,
22:09remarquez qu'ils n'ont pas toujours été très tendres
22:11avec moi non plus,
22:12avec les responsables des organisations syndicales.
22:14Mais quand j'entends Mme Binet, CGT,
22:16dire, attention,
22:18nous vivons une période où la crise arrive,
22:20il faut arrêter avec l'instabilité.
22:22Quand je vois la patronne de la CFDT
22:24essayer d'avancer,
22:26quand je vois les attitudes
22:28que je crois très responsables du patron du MEDEF,
22:30je me dis qu'il y a là quelque chose
22:32que nous devons saisir.
22:34Donc, des référendums pour que le peuple tranche
22:36et de la discussion sociale
22:38avec les organisations syndicales
22:40pour essayer d'avancer.
22:41C'est intéressant, effectivement,
22:43et c'est de nouveautés dans le débat.
22:44Mais, pardon Hédore Philippe,
22:45j'ai toujours pas compris
22:46comment on arrive à ce socle minimal
22:48puisque, c'est écrit en bas de l'écran,
22:50Hédore Philippe veut un accord de LR à la gauche.
22:52Je répète ce que disent les responsables
22:54dits sociodémocrates, tels que vous les appelez.
22:56D'abord, j'ai dit les sociodémocrates,
22:58pas dit à gauche,
23:00parce que je ne crois pas du tout qu'on puisse arriver
23:02à un accord, y compris avec les communistes
23:04et certainement pas avec LFI.
23:06Je répète Hédore Philippe.
23:08Donc, j'ai dit avec les sociodémocrates.
23:10Mais les sociodémocrates, c'est le Parti Socialiste.
23:12Oui, il peut y avoir des sociodémocrates ailleurs,
23:14mais en tout cas avec les sociodémocrates.
23:16C'est un socle à peu près envisageable,
23:18qui existe dans d'autres pays.
23:20Hédore Philippe, le Parti Socialiste
23:22dit qu'on accepte de discuter
23:24à condition d'avoir un Premier ministre de gauche.
23:26Est-ce que, vous disiez tout à l'heure
23:28je ne suis pas Président de la République, pardon,
23:30il y a des ministres horizon.
23:32Oui, ça ne m'a pas échappé.
23:34On parlera tout à l'heure de votre candidature.
23:36Il y a des ministres horizon,
23:38qui sont désormais des ministres démissionnaires.
23:40Vous êtes à la tête d'un parti qui fait partie de ce socle commun.
23:42Est-ce que ce parti horizon pourrait accepter
23:44une solution institutionnelle avec,
23:46à la tête d'un gouvernement de socle minimal,
23:48une personnalité de gauche ?
23:50Je considère que plus le socle sera solide,
23:52mieux nous nous porterons.
23:54Je ne sais pas quelle discussion
23:56le Président de la République aura avec les responsables politiques,
23:58mais moi, je vous le dis,
24:00plus le socle sera solide, mieux on se portera.
24:02Mais ça ne répond pas à ma question.
24:04Mais parce que ce n'est pas à moi de répondre à votre question.
24:06Je dis depuis le début...
24:08Je vais vous citer Bruno Retailleau.
24:10Bruno Retailleau dit,
24:12la droite ne pourra faire aucun compromis avec la gauche
24:14qui a trahi Blum et Clemenceau.
24:16Là, vous avez un responsable politique
24:18qui dit de façon très claire,
24:20moi, travailler avec la gauche,
24:22qui a pactisé avec les insoumis, donc les socialistes,
24:24c'est non.
24:26Très bien. Monsieur Duhamel.
24:28Vous ne m'enlèverez pas de l'idée
24:30qu'être constant est un avantage.
24:32Je dis,
24:34depuis maintenant deux ans,
24:36j'ai dit dès 1922 qu'il fallait une coalition avec LR,
24:38parce qu'elle nous aurait garanti une stabilité.
24:40Ça n'a pas été fait, je le regrette.
24:42Je dis depuis 2024 qu'il faut une coalition large
24:44et je continue à le penser.
24:46Si elle n'est pas possible,
24:48parce que les partis n'en veulent pas,
24:50il arrivera que le président devra choisir
24:52quelque chose qui n'est pas la coalition la plus large.
24:54Mais vous ne m'empêcherez pas de dire
24:56que dans l'intérêt du pays, je trouverais intéressant
24:58que les partis s'entendent.
25:00S'ils veulent chacun dire, ça, ça n'est pas possible,
25:02ça, c'est une ligne rouge,
25:04je préfère qu'ils se mettent au vert.
25:06Il n'y a pas de ligne rouge de votre part
25:08Je le respecte, je l'entends,
25:10mais je pense que nous gagnerions tous en France
25:12à avoir un socle large.
25:14Ensuite, il faut que le président sorte
25:16de cette indétermination.
25:18Il lui appartiendra de choisir un premier ministre.
25:20Indétermination, c'est-à-dire qu'il a du mal à choisir ?
25:22Non, de cette situation.
25:24Notre situation politique est indéterminée.
25:30Je vois le président Trump qui va prendre ses fonctions
25:32le mois prochain.
25:34Je vois des questions qui se posent sur la sécurité
25:36à nos frontières.
25:38Je vois en Afrique des États qui sortent la France.
25:40Je vois un monde qui est dangereux,
25:42une crise économique qui est grave,
25:44des enjeux de souveraineté industrielle qui sont considérables
25:46et je vois que nous n'avons pas de gouvernement
25:48et pas de budget.
25:50Je considère que c'est une situation
25:52d'indétermination et je pense qu'elle est dangereuse.
25:54Je pense qu'il faut en sortir.
25:56Nommer un premier ministre rapidement,
25:58composer un gouvernement resserré, faire en sorte
26:00de demander leur avis aux Français par des référendums,
26:02faire confiance aux organisations syndicales
26:04qui sont la machine du dialogue et pour pouvoir avancer.
26:06Voilà ce que je vous propose.
26:08Pardonnez-moi pour cette idée fixe de ce qui a été
26:10mis en avant comme condition
26:12pour participer éventuellement à un collectif.
26:14Est-ce qu'un homme comme Bernard Cazeneuve,
26:16que vous connaissez bien, ancien Premier ministre,
26:18pourrait incarner
26:20cette équipe
26:22gouvernementale
26:24resserrée ?
26:26Bernard Cazeneuve a été Premier ministre.
26:28Il a été ministre de l'Intérieur, je le connais bien,
26:30j'ai de l'estime pour lui. Je ne l'ai jamais caché.
26:32On a le droit d'avoir de l'estime
26:34pour quelqu'un avec qui on n'est pas d'accord, surtout.
26:36Ou alors il faut
26:38changer de régime,
26:40échanger de pays.
26:42Moi je suis démocrate et je suis français.
26:44Ça ne veut pas dire que je suis d'accord avec lui, surtout.
26:46Il y a beaucoup de sujets sur lesquels on n'est pas d'accord.
26:48Et ce n'est pas nouveau, je peux vous dire. Et ça durera longtemps.
26:50J'ai de l'estime pour lui. Est-ce qu'il peut apporter quelque chose
26:52au pays ? Oui, mais ce n'est pas le seul.
26:54Il y a heureusement dans ce pays des gens de qualité.
26:56Donc il pourrait
26:58être parti de la solution.
27:00Le président de la République, si vous avez bien entendu
27:02ce que j'ai dit tout à l'heure, ne va pas nommer un Premier ministre
27:04pour faire trois ans de réforme fondamentale.
27:06Il n'y a pas de socle majoritaire
27:08pour ça.
27:10Ensuite on rentrera dans un autre point
27:12de programmatique sur la question de la France.
27:14Vous n'arrêtez pas de dire de toute façon, il ne faut pas se faire d'illusions,
27:16il n'y aura pas de grande réforme. Ça veut dire que
27:18de toute façon, la France est
27:20condamnée à une forme d'inertie,
27:22à être à l'arrêt, à simplement gérer les affaires courantes ?
27:26Est-ce que vous voyez une réforme
27:28d'ampleur, à la hauteur
27:30des enjeux français, qui soit susceptible
27:32d'obtenir aujourd'hui une majorité
27:34dans le Parlement français, telle qu'il est découpée en trois blocs ?
27:36Non, je n'en vois pas.
27:38Mais simplement je suis frappé de voir quelqu'un qui
27:40fait partie de ce, là encore je ne sais pas
27:42si on peut toujours l'appeler socle commun,
27:44être à ce point fataliste sur
27:46l'issue du deuxième quinquennat
27:48d'Emmanuel Macron.
27:50Je ne suis absolument pas
27:52fataliste. Je suis venu
27:54vous dire que j'étais en colère et que je voulais me battre.
27:56Mais on peut être lucide
27:58aussi. Il n'y a pas,
28:00dans cette Assemblée nationale, une majorité
28:02capable de porter une politique
28:04ambitieuse sur des sujets.
28:06Je le constate.
28:08Regardez les discussions qu'on a eues sur le budget.
28:10Ça me paraît évident.
28:12Et d'ailleurs, je vais vous dire, tout le monde le sait.
28:14Tout le monde le voit.
28:16Un point très précis, Edouard Philippe, sur la question de la réforme des retraites.
28:18Là encore, sur
28:20les quelques idées qui pourraient rassembler
28:22des bonnes volontés.
28:24Les socialistes évoluent.
28:26Ils ne disent plus abrogation, forcément. Ils disent
28:28nous, on est prêts à réfléchir
28:30si au moins, le président de la République,
28:32la personne qui sera nommée à Matignon, s'engage à un
28:34gel de la réforme des retraites.
28:36Est-ce que, là encore, ça peut faire
28:38partie des discussions ? Ou est-ce que vous êtes sur une position
28:40qui est visiblement assez partagée
28:42au sein, encore une fois, de ce socle commun, qui est de dire
28:44non, la réforme des retraites, on ne peut pas y toucher.
28:46Le gel, ça veut dire quoi ?
28:48Je suis d'accord avec vous, c'est pas très clair.
28:50Le gel, ça veut dire quoi ?
28:52Ça veut dire qu'on bloque l'application
28:54de la réforme.
28:56Je ne sais pas d'ailleurs si ça veut dire qu'on bloque
28:58l'application de l'ancienne réforme, y compris
29:00celle faite par les socialistes, dit la réforme prenne.
29:02Ça veut dire qu'au fond, les 64 ans ne s'appliquent pas.
29:04Je vous trouve très affirmatif.
29:06Le gel de la réforme des retraites, c'est le principal élément
29:08de la réforme des retraites d'Elisabeth Borne.
29:10C'est le recul de l'âge légal.
29:12Je vous trouve très affirmatif, parce que moi, j'ai vu
29:14les socialistes défendre
29:16une proposition de loi qui revenait
29:18pas seulement sur la réforme
29:20de Mme Borne,
29:22mais qui était également un retour
29:24sur la réforme de Mme Touraine.
29:26Une réforme qui avait été votée
29:28par la gauche, je vous permets de le rappeler.
29:30Je ne sais pas ce que ça veut dire, le gel.
29:32Mais ce que je sais, c'est ce que ça coûte.
29:34Ce que je sais, c'est que dans le système
29:36totalement déséquilibré des retraites
29:38aujourd'hui, qui continue,
29:40année après année, à peser sur notre dette
29:42et à accroître notre dette, je l'ai,
29:44c'est-à-dire attendre, surtout ne pas avancer,
29:46surtout ne pas faire de réforme, à un coût
29:48considérable. Voilà, c'est ça que ça veut dire.
29:50C'est-à-dire qu'encore une fois, il s'agit d'attendre.
29:52Donc, Édouard Philippe, il n'y aura pas
29:54d'accord qui ira jusqu'au socio-démocrate.
29:56Je ne sais pas.
29:58Vous dites, gel, je ne sais pas ce que c'est,
30:00abrogation, je sais combien ça coûte.
30:02Au fond, ce qui est intéressant...
30:04Peut-être qu'on arrivera à discuter sur ce sujet
30:06et sur d'autres, mais je sais ce que ça coûte.
30:08Ça ne coûte pas...
30:10Ce qui est frappant, Édouard Philippe, c'est que
30:12dans toutes ces discussions, il y a un certain nombre
30:14de responsables politiques du socle commun qui disent
30:16il faut savoir
30:18discuter avec les uns et les autres. Mais dès qu'on rentre dans le fond
30:20des sujets, on ne voit pas le moindre élément sur lequel
30:22vous êtes prêt à des compromis
30:24à aller
30:26vers celles et ceux que vous essayez
30:28de convaincre de participer à ce socle minimal.
30:30Je pense qu'on peut essayer de construire
30:32un socle minimal, peut-être en mettant de côté
30:34un certain nombre de choses, mais un socle minimal sur quoi ?
30:36D'abord, essayer de faire en sorte que l'État fonctionne.
30:38Ça a l'air tout bête, mais ce n'est pas si simple aujourd'hui.
30:40Essayer de faire en sorte que l'État fonctionne.
30:42Dans le socle minimal, on peut mettre des choses comme par exemple
30:44l'attitude
30:46que nous avons vis-à-vis des menaces les plus proches
30:48de nous. La poursuite du soutien
30:50à l'Ukraine.
30:52Ça me paraît important. Je ne dis pas que c'est ce qui préoccupe
30:54avant tout les Français,
30:56mais ça me paraît important. On peut aussi
30:58se demander si on met dans cet
31:00accord minimal la capacité
31:02à ne pas aggraver la situation
31:04financière. Je vais vous dire, ne pas
31:06aggraver la situation financière, ça veut dire rester dans
31:08une mauvaise situation financière.
31:10Mais au moins ne pas l'aggraver.
31:12Ce n'est pas mon sens naturel.
31:14Je voudrais qu'on fasse des réformes pour limiter ce déficit.
31:16Au moins ne pas l'aggraver.
31:18On a des choses sur lesquelles on peut se mettre d'accord.
31:20Ce sera à minima, mais on peut se mettre d'accord, je le crois.
31:22Edouard Philippe, je rebondis là encore
31:24sur ce que vous venez de dire.
31:26Il n'y a pas de grandes réformes qui peuvent passer vu l'Assemblée
31:28telle qu'elle existe. Est-ce que ça veut dire
31:30qu'une nouvelle dissolution est inéluctable ?
31:32On sait que constitutionnellement,
31:34le Président ne peut décider de dissoudre avant
31:36un an, c'est-à-dire que ça nous renvoie à l'été prochain.
31:38Est-ce que c'est inéluctable ?
31:40Je ne sais pas.
31:42Il m'est arrivé de dire que je ne savais pas
31:44et j'assume de dire que je ne sais pas.
31:46Je ne sais pas si une dissolution est inéluctable,
31:48je ne sais pas si le Président de la République...
31:50Mais serait-elle souhaitable ?
31:52Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est que le Président
31:54ne peut pas dissoudre avant juillet prochain.
31:56Je le vois mal dissoudre
31:58après le 14 juillet,
32:00pour organiser des élections fin juillet ou en août.
32:02En France, franchement, je vois mal ça.
32:04Et dissoudre ensuite,
32:06au mois de septembre, au mois d'octobre,
32:08en plein exercice budgétaire qui va être
32:10encore plus compliqué l'année prochaine que cette année,
32:12je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée.
32:14Je préférerais qu'on arrive à se mettre d'accord
32:16pour éviter d'en arriver là. Mais je ne sais pas
32:18ce qui va se passer. Et je ne veux pas mentir aux Français.
32:20Je ne sais pas.
32:22On continue en quelque sorte à soulever
32:24le capot de ces propositions que vous faites
32:26ce soir. Un mot sur
32:28au fond la gravité de la situation
32:30que vous décrivez et le sens
32:32des responsabilités toujours. Vous dites, on est à un moment
32:34critique. La France est au bord du gouffre.
32:36Est-ce que vous accepteriez-vous
32:38de faire partie d'un collectif ?
32:40On ne sait pas à quelle place. A partir du moment
32:42où vous dites que les temps sont extrêmement graves,
32:44d'aller se
32:46retrousser les manches et de faire partie d'un collectif ?
32:48Je crois
32:50que vous m'avez posé la question en septembre.
32:52C'est peut-être une idée fixe.
32:54Et peut-être aussi que la réponse n'était pas
32:56tout à fait satisfaisante et que donc je la repose.
32:58C'était la mienne. Peut-être que vous ne l'aimez pas,
33:00mais c'est la mienne. Vous m'avez posé la question en septembre.
33:02Je vous ai dit que je n'étais pas demandeur.
33:04Je vous ai dit que j'étais maire du Havre.
33:06Mais c'est vrai que la situation politique du pays va mal.
33:08On ne peut pas se dire,
33:10écoutez, elle va mal. Vous voyez, tout va mal
33:12et ça ne me préoccupe pas. Je vous ai dit tout à l'heure
33:14combien ça me préoccupait. Je ne suis pas de menteur.
33:16Je n'ai pas envie.
33:18Je ne suis pas sûr d'ailleurs que ça aiderait.
33:20Ça n'est pas ce à quoi je me prépare.
33:22Mais je le dis sérieusement, on vit
33:24une période que je qualifie de suffisamment dangereuse
33:26et suffisamment délicate pour que chacun
33:28essaye de faire un effort dans l'intérêt du pays.
33:30Donc ça veut dire que je ne suis pas demandeur.
33:32Ça veut dire que je ne suis pas demandeur.
33:34Oui, enfin bon, vous pouvez ne pas être demandeur et on peut
33:36à un moment donné, on ne sait pas qui sera nommé à Matignon,
33:38quelqu'un qui considérait qu'un ancien Premier ministre
33:40à sa place, dans une équipe visant
33:42à régler un certain nombre de problèmes.
33:44Je ne suis pas sûr.
33:46Je ne crois pas être indispensable dans cet exercice.
33:48Mais encore une fois,
33:50vous avez vu, je ne mets pas
33:52de lignes rouges.
33:54Et j'essaie de donner sa chance
33:56à la constitution
33:58d'un pôle le plus stable possible.
34:00Donc je ne changerai pas d'avis,
34:02je veux donner sa chance à un pôle le plus stable possible.
34:04Je le fais lucidement,
34:06en sachant que ça ne fera pas des grandes réformes,
34:08mais en pensant que c'est la meilleure façon
34:10de ne pas nuire.
34:12Donc votre éventuelle participation à un collectif n'est pas non plus
34:14une ligne rouge. Vous n'êtes pas demandeur, mais si on vous posait la question...
34:16Je le dirais que je ne suis pas demandeur.
34:18Mais vous ne direz pas non plus.
34:20Vous avez compris ma réponse.
34:22Je continue au fond sur les
34:24hypothèses. À gauche,
34:26je ne vois toujours pas
34:28dans quelle mesure vous pourriez arriver à un accord.
34:30S'il n'y a pas d'accord avec la gauche, ça veut dire qu'on reste
34:32sur ce même socle commun,
34:34c'est-à-dire
34:36ce qu'on appelle les macronistes, le bloc central,
34:38et vous, et la droite.
34:40Ça veut donc dire, Édouard Philippe, que le Rassemblement National,
34:42Marine Le Pen, continue
34:44de tenir dans leurs mains
34:46le destin d'un éventuel gouvernement.
34:48Est-ce que ça veut dire qu'il faut peut-être
34:50encore plus que Michel Barnier ne l'a fait,
34:52assumer de parler avec Marine Le Pen,
34:54de répondre à un certain nombre de leurs revendications,
34:56assumer de peut-être davantage s'adresser
34:58aux 11 millions d'électeurs
35:00qui se sont portés sur le Rassemblement National
35:02au moment des élections législatives ?
35:04Moi, je suis d'avis de respecter les élus de la République,
35:06quels qu'ils soient.
35:08Je suis d'avis, d'ailleurs je le trouve formidable quand ils se respectent
35:10entre eux. Je trouve qu'à l'Assemblée Nationale,
35:12ils ne se respectent pas beaucoup entre eux, si vous voulez mon avis.
35:14Néanmoins, je suis d'avis,
35:16et c'est mon avis et je le partage,
35:18de respecter tous les élus de la République. Tous.
35:20Parce qu'ils ont été élus
35:22dans un cadre démocratique. Et donc, ils sont respectables,
35:24il faut les respecter. Je suis d'avis
35:26de considérer qu'on peut discuter
35:28dans une démocratie.
35:30Mais je sais que les désaccords que j'ai
35:32avec le Rassemblement National sont
35:34extrêmement rudes,
35:36extrêmement documentés.
35:38Je ne crois pas que nous puissions
35:40être d'accord, et je n'ai pas,
35:42je n'ai aucun espoir
35:44que nous puissions être d'accord,
35:46et je me bats pour créer une alternative crédible.
35:48Donc Marine Le Pen continue d'avoir
35:50le droit de vie ou de mort sur les gouvernements
35:52qui seront nommés dans les jours qui viennent.
35:54Mais je ne suis pas d'accord avec le prémice,
35:56avec les prémices de votre question.
35:58Vous dites que Marine Le Pen a le droit de vie ou de mort,
36:00mais la gauche aussi, le Parti Socialiste, tout autant.
36:02Oui, mais vous dites on ne bouge pas sur la table.
36:04Le Parti Socialiste n'est pas obligé de voter la censure.
36:06Il peut très bien dire qu'il n'est pas d'accord, il peut voter contre un texte,
36:08il n'est pas obligé de voter la censure. Oui, mais sauf qu'il fixe
36:10deux lignes. Il n'est pas obligé de voter la censure, et ses responsabilités
36:12il les prend. Premier ministre de gauche et
36:14vous n'avez pas l'air très emballé.
36:16Il peut très bien dire qu'il n'est pas d'accord avec ça,
36:18et ne pas voter la censure. Il peut très bien
36:20s'opposer à l'Assemblée et ne pas voter la censure.
36:22Je n'ai jamais compris ça
36:24depuis les résultats des élections électorales.
36:26Tout le monde dit, vous voyez, Marine Le Pen
36:28tient le gouvernement.
36:30Le Parti Socialiste tient tout autant
36:32le gouvernement. La preuve,
36:34c'est qu'il a voté la censure.
36:36L'ancien président de la République,
36:38François Hollande, a voté la censure, sans hésiter.
36:40Bon, ben écoutez,
36:42il a, sans hésiter, mélangé ses voix
36:44avec le Rassemblement national. Ça ne lui a
36:46posé aucun problème.
36:48Moi, ça m'a surpris, je ne vous le cache pas.
36:50Édouard Philippe, Emmanuel Macron, qui doit donc faire son choix
36:52dans les prochains jours,
36:54vraisemblablement en début de semaine prochaine,
36:56ne va pas faire de casting ici, parce que je m'imagine que vous n'êtes pas exactement
36:58coutumier de ce genre d'interrogations.
37:00Il n'empêche que...
37:02Il n'empêche que vous aimeriez bien qu'on joue à ça.
37:04C'est une forme de prétérition.
37:06Parce que c'est important et que
37:08celles et ceux qui nous regardent se posent des questions.
37:10Le premier nom qui a été évoqué,
37:12c'est celui de Sébastien Lecornu, ministre des Armées.
37:14Il s'avère que c'est
37:16un de vos proches. Vous aviez décidé de le faire
37:18rentrer au gouvernement en 2017.
37:20Est-ce qu'il a
37:22les qualités pour être Premier ministre Sébastien Lecornu ?
37:24Je l'aime beaucoup.
37:26Il a d'immenses qualités.
37:28Je ne rentrerai pas dans le petit jeu de savoir qui a
37:30le plus de chances que l'autre. Pour une raison simple,
37:32c'est que
37:34j'ai vu, lorsque je suis
37:36devenu Premier ministre, et depuis,
37:38que la question de savoir qui le Président choisissait
37:40pour être Premier ministre était une question qui lui revenait
37:42à lui et à lui seul.
37:44C'est une prérogative
37:46du Président de la République.
37:48Et il fera son choix en conscience.
37:50Et je n'ai pas envie de rentrer dans la course de petits chevaux
37:52pour savoir qui est le mieux placé.
37:54Pardon, mais c'est un peu facile
37:56de réduire ces questions à simplement
37:58des enjeux personnels. Ce ne sont pas les mêmes.
38:00Je ne réduis pas à des enjeux personnels.
38:02Je n'ai pas envie de jouer à ce jeu.
38:04Je ne réduis pas à des enjeux personnels.
38:06Le Président de la République prendra sa décision.
38:08Et vous n'avez aucun avis ?
38:10Je ne veux pas rentrer dans le jeu public
38:12de savoir, ah oui, mais lui, il est mieux...
38:14Voilà, ça ne m'intéresse pas. Je ne veux pas rentrer.
38:16Si le Président de la République me demande mon avis, je lui donnerai.
38:18Il n'a pas du tout besoin de me le demander.
38:20Et s'il me le demande, je lui donnerai. Et je ne vais pas rentrer
38:22dans ce jeu-là. Je ne crois pas que ce...
38:24Pardon, je vous le dis avec un peu de...
38:26Je comprends que vous posiez la question.
38:28Mais je ne crois pas que ce soit très intéressant.
38:30Moi, je pense que ça intéresse ceux qui nous regardent.
38:32Et je pense que quand on fait de la politique,
38:34si l'événement est un sujet important,
38:36ce n'est pas la même chose, selon Sébastien Lecornu
38:38ou François Bayrou et Nobéa Matignon.
38:40Mais comme on n'a aucune prise sur les événements,
38:42je préférais qu'on parle
38:44de ce qu'on fait
38:46après avoir stabilisé le pays.
38:48Je vais poser la question différemment.
38:50Ça veut donc dire que
38:52votre parti politique, Horizon, représenté
38:54à l'Assemblée,
38:56qui fait partie du gouvernement,
38:58quel que soit le Premier ministre, vous accepterez d'en faire partie ?
39:00J'ai dit en 2024, et je ne peux pas croire
39:02que vous l'ayez oublié,
39:04que dès lors que le Président de la République
39:06choisirait un Premier ministre
39:08issu du Bloc central,
39:10ayant conscience
39:12qu'il fallait gouverner
39:14conformément à cet espace
39:16central, nous le soutiendrions.
39:18Je n'ai pas changé d'avis et je ne veux pas rentrer
39:20dans la course des petits fous.
39:22Soutien et participation ?
39:24On verra ce que le Premier ministre dit.
39:26Mais encore une fois,
39:28je pense que
39:30ça n'a pas
39:32beaucoup d'intérêt. Pardon de vous le dire.
39:34Je pense que ce serait plus intéressant
39:36– je ne voudrais pas faire les questions à votre place –
39:38que l'on se pose
39:40la question de savoir qu'est-ce qu'on fait après.
39:42On va parler
39:44de ce qu'on fait après, mais pardonnez-moi d'insister.
39:46François Bayrou, quand vous étiez
39:48à Matignon, on ne peut pas dire qu'il vous ait
39:50facilité la tâche. Même récemment,
39:52j'ai le souvenir quand vous avez déclaré
39:54votre candidature à l'élection présidentielle dans les colonnes du Point.
39:56Je vous avais d'ailleurs interviewé dans les jours qui en suivent.
39:58François Bayrou, c'était d'ailleurs sur ce même plateau,
40:00il était en face de vous un dimanche, il avait dit
40:02« Attention, en politique,
40:04les fautes de temps sont pires que les fautes de grammaire. »
40:06C'est ça.
40:10Les agrégés de lettres
40:12sont toujours sensibles aux fautes de grammaire.
40:14Je les comprends.
40:18François Bayrou, Sébastien Lecornu,
40:20Bernard Cazeneuve, tous les gens que vous avez mentionnés
40:22jusqu'à présent sont des gens de qualité.
40:24Il y en a avec qui je m'entends mieux que d'autres.
40:26Il n'y a pas de préférence ?
40:28Ce jeu, monsieur Duhamel,
40:30n'a aucun intérêt.
40:32Je pense qu'il ne sert pas
40:34la démocratie
40:36dans un moment où
40:38l'heure est grave.
40:40Je vous le dis comme je le pense,
40:42je pense que ce n'est pas très intéressant.
40:44Et encore une fois, même si c'est intéressant,
40:46ni vous, ni moi n'avons aucune prise
40:48sur ce choix. Vous sans doute plus que moi.
40:50Non, c'est une prérogative du président de la République.
40:52Edouard Philippe, il y a ceux qui demandent
40:54un changement de cap, un Premier ministre de gauche,
40:56et ceux qui considèrent que la seule chose
40:58à même de débloquer la situation,
41:00ce serait une démission du président de la République
41:02à la France Insoumise, mais pas seulement.
41:04Jean-François Copé, David Lysnard, le maire de Cannes,
41:06deux hommes de droite, Charles de Courson,
41:08pas exactement des anarchistes,
41:10Emmanuel Macron a répondu hier soir en disant
41:12qu'il irait jusqu'au bout de son mandat.
41:14Mais est-ce qu'à la fin,
41:16si les gouvernements tombent les uns après les autres,
41:18ce ne sera pas la seule solution ?
41:20Je commence à faire le bilan de tout ce que vous venez de nous dire.
41:22Vous dressez un tableau quasiment apocalyptique
41:24de la situation sur quasiment
41:26une crise de régime, l'incapacité
41:28à faire la moindre réforme,
41:30une situation totalement sclérosée, bloquée.
41:32Peut-être que ceux qui nous regardent se disent
41:34mais en fait Edouard Philippe lui aussi, il se dit
41:36qu'à la fin des fins, Emmanuel Macron n'aura pas d'autre choix
41:38que de démissionner.
41:40D'abord, le président de la République a répondu hier.
41:42Et il a répondu clairement.
41:44On n'a pas de gouvernement.
41:46On n'a pas de majorité. On n'a pas de budget.
41:48Je ne suis pas sûr qu'on aurait mieux si on n'avait pas de président.
41:50Donc, pour moi, la question
41:52elle est tranchée.
41:54Ce qui est vrai,
41:56ce que je dis, c'est que la situation
41:58telle qu'elle est, qui est une situation délicate,
42:00je le dis peut-être de façon sombre,
42:02je le dis telle que je la vois.
42:04J'essaie d'être lucide. J'essaie de ne pas raconter de blagues.
42:06J'essaie de ne pas raconter d'histoire.
42:08Ce qui m'inquiète, moi,
42:10ce n'est même pas la situation, c'est les gens qui font semblant de ne pas la voir.
42:12Ça, ça m'inquiète vraiment beaucoup.
42:14Et qui fait semblant de ne pas la voir ?
42:16Écoutez,
42:18est-ce que vous avez l'impression que collectivement,
42:20tous ensemble, on est à la hauteur des enjeux ?
42:22Moi, je vais vous dire un truc.
42:24Je n'ai pas rencontré un Français à Vesoules,
42:26à Epinal, à Dambach-la-Ville, à Albi,
42:28à Lautrec, dans toutes ces villes où je me suis promené
42:30et où j'ai parcouru le pays
42:32dans les deux ou trois dernières semaines,
42:34je n'ai pas vu un Français me disant
42:36heureusement, l'heure est grave, mais heureusement,
42:38le monde politique est à la hauteur des enjeux.
42:40Pas un. Si vous en avez vu un, vous,
42:42vous êtes super. Mais moi, je n'en ai pas vu un.
42:44J'ai vu des Français inquiets.
42:46J'ai vu des Français qui me disaient, on a besoin de stabilité
42:48parce que les investissements sont en train de décroître,
42:50parce que les taux d'intérêt sont en train de monter.
42:52Ça, j'ai vu des Français dire ça.
42:54Je n'ai pas vu un Français me dire
42:56franchement, les gars, touchez à rien, tout va bien.
42:58Donc, pardon, mais les Français, je pense qu'ils sont lucides.
43:00Je pense qu'ils sont très lucides
43:02sur ce qui ne va pas bien.
43:04Donc moi, ma question, c'est comment est-ce qu'on essaie d'en sortir ?
43:06On stabilise à court terme
43:08et on pense, en 2027,
43:10au moment des prochaines élections présidentielles,
43:12à proposer un projet
43:14aux Français qui soit de nature
43:16à faire rebondir le pays.
43:18Je crois que c'est ça qui est intéressant.
43:20Et on en parle dans un instant, mais juste, vous dites
43:22on stabilise dans un premier temps.
43:24Mais si ça ne fonctionne pas ?
43:26Parce que là encore, Michel Barnier, au mois de septembre,
43:28sur cette même antenne, vous disiez...
43:30Et si on se retrouve dans une situation
43:32où les gouvernements tombent les uns après les autres
43:34parce que vous plaidez pour une solution institutionnelle
43:36des sociodémocrates à la droite.
43:38Déjà, les sociodémocrates, c'est assez mal parti.
43:40On l'a vu compte tenu des conditions qui sont fixées.
43:42Vous parlez de lucidité.
43:44On ne peut pas totalement exclure
43:46un scénario où,
43:48compte tenu de la façon dont l'Assemblée
43:50est composée, où les gouvernements
43:52tomberaient les uns après les autres.
43:54Comment est-ce qu'on réussit à sortir de cela ?
43:56Compte tenu des enjeux, je pense que
44:00il est souhaitable
44:02que tout le monde
44:04se ressaisisse et que nous
44:06puissions stabiliser, d'ailleurs d'une certaine façon.
44:08Les mêmes qui ont voté
44:10la motion de censure
44:12ont compris qu'il y avait un coût
44:14à voter la motion de censure, un coût politique
44:16à voter la motion de censure.
44:18Je ne suis pas sûr qu'un très grand nombre
44:20d'agriculteurs français
44:22trouvent que voter la motion
44:24de censure, c'était quelque chose d'adapté,
44:26d'opportun. Je ne suis pas sûr.
44:28Je ne suis pas sûr même que
44:30chez les électeurs du Parti Socialiste,
44:32il y a une immense majorité de gens qui disent
44:34quel bonheur d'appeler les non-voix au RN.
44:36Ce qui vale, mais une majorité
44:38de Français étaient favorables
44:40à la motion de censure.
44:42Disons à tout le moins que la position
44:44du Parti Socialiste
44:46a évolué
44:48depuis le vote de la motion de censure.
44:50Preuve que peut-être les gens se font à l'idée
44:52qu'il faut se ressaisir
44:54et qu'il faut stabiliser la situation.
44:56Moi, je veux travailler à ça.
44:58Elle a évolué, mais le Parti Socialiste
45:00fixe deux lignes rouges auxquelles vous répondez ce soir.
45:02Non ?
45:04Je vous ai dit ce que j'en pensais.
45:06Et voilà.
45:08Vous évoquiez 2027.
45:10Deux questions à ce sujet, Edouard Philippe,
45:12pour clore cet entretien. La première,
45:14vous répondiez à la question
45:16dans les colonnes du Point.
45:18Est-ce que vous préparez à l'hypothèse
45:20l'éventualité d'une présidence inanticipée ?
45:22Vous répondiez oui, je vous le confirme.
45:24Est-ce que, je ne dis pas que vous le souhaitez,
45:26et vous venez de dire très clairement que vous ne le souhaitiez pas,
45:28si d'aventure le président était contraint,
45:30faisait le choix de la démission et qu'il y avait une présidence inanticipée ?
45:32Est-ce que vous seriez candidat ?
45:34Cherchez pas les petites phrases. Le président de la République a dit hier
45:36qu'il irait au bout de son mandat.
45:38Je vous ai dit que je pensais que sans majorité,
45:40sans gouvernement et sans budget,
45:42ne pas vouloir, enfin espérer qu'il ne puisse
45:44plus y avoir de président, ce serait plonger le pays
45:46dans quelque chose de très grave. Donc, c'est clair,
45:48je vous ai répondu.
45:50Ce qui est clair aussi, c'est que lors de la prochaine
45:52élection présidentielle, il faudra présenter un projet aux Français.
45:54Et que je me prépare aussi pour ça.
45:56Oui, ça c'est vrai. Pour l'élection 2027.
45:58Et qu'elle soit en 2027 ou avant ?
46:00Pour la prochaine élection présidentielle.
46:02Elle ne va pas être en 2029.
46:04Elle est normalement en 2027.
46:06En 2027, je vais être prêt.
46:08Cette déclaration de candidature,
46:10vous l'avez faite, notamment dans les colonnes du Point,
46:12c'était au début de l'année, en septembre.
46:14Qu'est-ce que vous dites
46:16à ceux qui nous regardent ce soir,
46:18qui se détournent du président de la République,
46:20qui voient que dans les sondages, il continue de baisser,
46:22là encore, les sondages valent ce qu'ils valent,
46:24mais le fait est que la tendance est assez claire.
46:26Vous disiez tout à l'heure aussi
46:28le risque que ces Français-là
46:30se détournent de la politique.
46:32Et ces Français qui se disent au fond,
46:34Edouard Philippe, il a été Premier ministre d'Emmanuel Macron
46:36pendant trois ans,
46:38il fait partie du système,
46:40il est maire du Havre, il est dans le monde politique depuis très longtemps,
46:42il nous dit,
46:44j'ai un programme, ce sera la même chose,
46:46ce sera la prolongation du macronisme.
46:48Est-ce que vous allez assumer une rupture
46:50avec le président de la République
46:52et le macronisme tel qu'on continue
46:54à le voir aujourd'hui ?
46:56Le moment venu,
46:58c'est-à-dire au moment de la campagne présidentielle,
47:00on n'y est pas.
47:02J'ai toujours dit que je serais candidat.
47:04On n'y est pas. Pour l'instant, la France a des problèmes.
47:06Il faut aussi s'en occuper. Mais le moment venu,
47:08je proposerai un projet
47:10sur un certain nombre de points
47:12qui sera massif, parce que je pense que si on ne transforme pas
47:14ces points, on va continuer
47:16à tomber.
47:18Mon objectif, c'est de dire
47:20sur l'école,
47:22sur la justice,
47:24sur le financement de notre modèle
47:26social, si on ne remet
47:28pas les choses à l'endroit,
47:30on ne s'en sortira jamais.
47:32Et on ne s'en sortira pas sur ces trois
47:34sujets, et sur d'autres,
47:36simplement avec des rustines ou avec des
47:38petites choses. Il va falloir que nous acceptions
47:40de changer assez profondément
47:42les cadres
47:44auxquels nous étions habitués
47:46et parfois attachés.
47:48Et je proposerai ça
47:50et je pense
47:52que c'est utile de le préparer,
47:54progressivement,
47:56y réfléchir, de consulter.
47:58Et à la fin de la fin,
48:00je ne chercherai pas à être en rupture
48:02ou en continuité,
48:04je ne chercherai pas à plaire à telle
48:06personne ou à tel autre, je dirai
48:08ce que je crois utile
48:10et faisable pour le pays.
48:12Parce que je pense qu'il n'y a que comme ça qu'on peut avancer.
48:14Encore deux questions, je rajoute deux questions
48:16puisque j'ai l'esprit d'escalier
48:18sur, là encore,
48:20le discours de gravité et ce qui pourrait advenir.
48:22À un moment donné, il peut arriver
48:24dans l'histoire des pays qui sont en difficulté,
48:26qui font face à des crises, qu'il y ait des gouvernements d'union nationale.
48:28Vous répondiez
48:30tout à l'heure, je ne suis pas demandeur.
48:32Est-ce que, malgré tout, prendre la tête d'un gouvernement d'union nationale,
48:34si, à un moment donné,
48:36c'était la seule solution,
48:38mais une des solutions ?
48:40Encore une fois, je ne sais pas
48:42si c'est possible.
48:44Mais je pense que,
48:46je parle du gouvernement d'union nationale,
48:48je ne crois pas qu'on puisse obtenir
48:50une union nationale avec l'ensemble du spectre politique.
48:52Je ne crois pas du tout.
48:54Je ne crois pas du tout qu'on puisse se mettre
48:56d'accord avec LFI.
48:58Je ne crois pas du tout qu'on puisse se mettre d'accord avec le Rassemblement National, surtout.
49:00Mais un gouvernement d'union
49:02la plus large possible,
49:04pour essayer de stabiliser les choses,
49:06faire fonctionner l'État, arrêter la bascule
49:08financière, essayer
49:10d'avancer sur un certain nombre de sujets, faire confiance aux partenaires
49:12sociaux, demander aux Français
49:14de trancher quelques sujets,
49:16je pense que c'est nécessaire. Je pense que c'est indispensable.
49:18Dernière question, Edouard Philippe.
49:20Certains s'interrogent parfois sur
49:22votre silence,
49:24le fait que, contrairement à d'autres responsables
49:26politiques, vous n'avez pas décidé de
49:28retomber dans le chaudron parlementaire,
49:30là où vous auriez pu être candidat à la députation
49:32cet été.
49:34Est-ce que vous êtes vraiment déterminé ?
49:36Est-ce que vous êtes prêt à être candidat ?
49:38Ou est-ce que, au fond,
49:40selon les circonstances, au gré de la façon
49:42dont tout cela pourra évoluer, vous pourriez changer d'avis ?
49:44Je savais que vous étiez sérieux, mais je ne savais pas que vous, en plus,
49:46vous aviez de l'humour, comme ça,
49:48en fin d'émission.
49:50Je suis très sérieux.
49:52Je suis très sérieux.
49:54D'ailleurs, en général, les gens trouvent que je suis très sérieux.
49:56Et donc, je suis très déterminé.
49:58Très déterminé parce que je pense
50:00que mon pays va mal.
50:02Et que ça m'insupporte.
50:04Et que,
50:06au fond, il peut le repartir.
50:08Quand je le regarde de Paris,
50:10je m'angoisse dans des proportions qui sont considérables.
50:12Quand je parcours le pays,
50:14je vois partout des pépites.
50:16Je vois partout des compétences,
50:18des enthousiasmes,
50:20des sites patrimoniaux remarquablement bien mis en valeur,
50:22des acteurs sociaux qui font un travail extraordinaire,
50:24des chefs d'entreprise qui prennent des risques.
50:26Notre pays, il a de la ressource.
50:28Il a de la ressource,
50:30mais il est englué.
50:32Donc, il faut qu'il reparte.
50:34Et je pense qu'il repartira si on pose
50:36des masses de granit sur le sol,
50:38faire en sorte que l'État fonctionne,
50:40ramener un peu d'ordre,
50:42pas un peu, de l'ordre,
50:44faire en sorte que les services publics,
50:46que l'État fonctionne
50:48là où seul l'État peut fonctionner,
50:50faire confiance aux gens,
50:52faire repartir le pays,
50:54équilibrer le financement de notre modèle social,
50:56et le pays repartira.
50:58Parce que la liberté des Françaises et des Français
51:00créera ce qu'il y a de mieux.
51:02Merci beaucoup, Edouard Philippe,
51:04d'avoir été l'invité exceptionnel de Tout le monde veut savoir
51:06et d'avoir réservé votre première réaction à BFM TV.

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