Le député LFI de Loire-Atlantique Andy Kerbrat a reconnu avoir été pris en flagrant délit d'achat de stupéfiants et a annoncé entamer un protocole de soins. Le ministre de l'intérieur Bruno Retailleau estime "qu'un député a un devoir d'exemplarité" et qu'il "doit tirer les conséquences de ses actes". Pour en parler, le professeur Laurent Karila, psychiatre, spécialiste des addictions, et Bernard Jomier, sénateur Place publique et médecin.
Regardez L'invité de Yves Calvi avec Yves Calvi du 22 octobre 2024.
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00:00RTL Soir, Yves Calvi et Agnès Bonfillon.
00:04Le député France Insoumise de Loire-Atlantique, Andy Carbra, a donc reconnu avoir été pris en flagrant délit d'achat de stupéfiants.
00:11Il annonce commencer un protocole de soins.
00:13Bonsoir Bertin Arjaubier.
00:14Bonsoir.
00:15Vous êtes médecin et sénateur Place Publique.
00:17Je vous cite, les addictions touchent toute la société, parlementaires et ministres inclus.
00:22Vous en êtes sûr ?
00:23Oui, j'en suis certain.
00:25Les hommes politiques n'échappent pas à ce phénomène de société et jusqu'au plus haut niveau.
00:30Une députée d'ailleurs de la mouvance présidentielle l'avait rappelé en janvier dernier.
00:36L'alcool et les substances illicites circulent même dans les enseignes politiques.
00:41Pensez-vous que le cas de votre confrère député est isolé néanmoins ?
00:44Non, je ne crois pas qu'il soit isolé.
00:47Il faut noter d'ailleurs que ce député a consommé, acheté, consommé une substance illicite.
00:54Mais il ne faut pas tout confondre.
00:56Il n'a pas commis des actes de violence liés à la consommation de cette substance.
01:01Donc ce qui lui est reproché est peut-être qu'il devrait démissionner.
01:05Mais ce n'est pas ça qui me paraît devoir retenir l'attention.
01:08Ce qui doit retenir l'attention, c'est qu'il a dit en gros dans son communiqué,
01:12voilà, oui j'ai consommé des substances illicites.
01:15Donc évidemment il les a achetées illégalement.
01:18Et je vais me faire soigner, j'ai des difficultés personnelles.
01:22Et ce qu'il dit, avec des mots qui sont des mots au fond assez simples,
01:25et bien beaucoup de Français le vivent, que ce soit des ministres,
01:28que ce soit des parlementaires, que ce soit des citoyens dans tout le pays,
01:34surtout les territoires.
01:35Voilà, il faut qu'on prenne conscience de ce problème du développement exponentiel
01:40de la consommation de drogues diverses et variées dans notre pays.
01:43Alors il y a un principe de responsabilité individuelle.
01:45Mais on doit aussi apporter une réponse collective.
01:48Ils doivent pouvoir trouver un soignant, un lieu pour être aidés.
01:53Moi je note que le professeur Benyaminade,
01:57qui a rendu le rapport à Emmanuel Macron sur ce sujet en 2022,
02:01rappelait aujourd'hui, aujourd'hui même, à cette occasion,
02:05qu'aucun dispositif n'avait été développé depuis la remise de son rapport.
02:10Merci beaucoup Bernard Jaumier, médecin.
02:12Et sénateur, place publique d'avoir pris la parole ce soir sur RTL.
02:15Et nous sommes maintenant en ligne avec le professeur Laurent Carilla,
02:18psychiatre et spécialiste de l'addiction.
02:20Les policiers ont saisi sur le député Andy Carbra,
02:22un gramme d'une drogue de synthèse appelée 3-MMC.
02:26Qu'est-ce que c'est que cette drogue Laurent Carilla ?
02:28La 3-MMC, c'est une nouvelle drogue de synthèse
02:31qui mime les effets des amphétamines et de la cocaïne en gros.
02:35C'est une drogue qui est stimulante.
02:37C'est de la poudre, on l'inale, ça se prend comment ?
02:39A la base, oui, c'est souvent vendu sous forme de poudre.
02:42On peut l'inaler, on peut la gober, on peut se l'injecter.
02:45Il y a différentes façons de la prendre.
02:47Et même si je pense que vous avez commencé à répondre à cette question,
02:50j'ai envie de vous dire qu'elle a-t-elle comme particularité ?
02:52Et par ailleurs, quels sont ses dangers ?
02:54La 3-MMC, c'est une nouvelle drogue de synthèse qui n'est pas si nouvelle que ça.
02:57Ça existe depuis un petit moment.
02:59On les retrouve dans les séances et les séquences de chemsex,
03:03ces comportements de consommation avec de la sexualité.
03:07Elle mime la cocaïne, elle mime les amphétamines.
03:09Donc, c'est des drogues stimulantes à la base.
03:12C'est-à-dire qu'on va rechercher des effets stimulants,
03:14c'est-à-dire de l'euphorie, du bien-être, de la désinhibition,
03:17l'envie de sexualité.
03:19Et je vais dire, les premiers effets indésirables
03:22qui peuvent être un peu graves,
03:24c'est des effets déjà cardiovasculaires.
03:26On peut faire un infarctus rapidement après une prise,
03:28deux prises ou dix prises ou dix mille prises.
03:30Donc, il y a un risque cardiovasculaire.
03:32Il y a un risque cérébral, d'accident vasculaire cérébral.
03:34Il y a un risque en fonction des voies d'administration.
03:37Il y a un risque qu'on ne se protège pas lors de rapports sexuels
03:40parce qu'on est désinhibé, par exemple.
03:42Est-elle aussi répandue qu'on le dit aujourd'hui ?
03:44Clairement, les catinones de synthèse sont présentes sur le marché.
03:47Clairement, le business qu'il y a autour a changé.
03:52C'est-à-dire qu'on n'est plus, on ne va pas forcément
03:54acheter ce produit-là chez le dealer,
03:56même s'ils en ont de plus en plus.
03:58On peut se le procurer par Internet, malheureusement.
04:01Donc, vraiment, il y a un nouveau marché de ces nouvelles drogues.
04:05On prétend qu'elle n'est pas chère, qu'elle serait moitié moins chère, par exemple,
04:07que la cocaïne. C'est une réalité ?
04:09Oui, c'est une réalité. Plus vous en achetez, moins ça coûte cher.
04:12Les dealers, y compris le business,
04:15peuvent vendre cette substance-là,
04:18vendue comme cocaïne,
04:20alors qu'il n'y a pas du tout de cocaïne dans ce qu'ils vendent.
04:22Ça veut dire que vous avez des patients
04:25qui vous ont consulté après avoir pris cette drogue de synthèse ?
04:27Oui, j'en ai de plus en plus.
04:29Le sujet des nouveaux produits de synthèse,
04:31c'est un sujet d'intérêt pour moi
04:33depuis de nombreuses années.
04:35Ça ne date pas de maintenant, les nouvelles drogues de synthèse.
04:38Il y avait une drogue qui s'appelait la Méphedrone en 2010,
04:40qu'on appelait miaou-miaou dans les soirées.
04:42Pourquoi on l'appelait miaou-miaou dans les soirées ?
04:44Cela vous l'a rendu sympathique, même si je sais que ce n'est pas votre projet.
04:47Justement, il y a des noms glamour de ces produits.
04:50C'est ça, le truc. Il y a des noms glamour de ces produits.
04:53L'injection intraveineuse,
04:55qui était vécue comme, je ne sais pas,
04:57le shoot, le fixe dans les années 90,
05:00là, ça s'appelle le slam.
05:02Il y a un nom même glamour de l'injection intraveineuse.
05:04C'est pour vous dire qu'il y a tout un truc qui a changé
05:07autour de ces nouvelles drogues.
05:09La 3-MMC, à un moment, et d'autres produits,
05:11étaient très stigmatisés,
05:13étaient très mis dans le milieu des hommes
05:15qui ont des rapports sexuels avec des hommes.
05:17Or, maintenant, ça a dépassé la communauté HSH.
05:20C'est-à-dire qu'il y a des gens qui prennent à l'apéro la 3-MMC.
05:24La sénatrice écologiste Mélanie Vaugel
05:26regrette que la politique française
05:28soit uniquement focalisée sur la répression
05:30plutôt que sur l'essentiel, le soin.
05:32Est-ce qu'elle a raison, vous qui êtes médecin ?
05:34Moi, je suis professeur de médecine.
05:36Elle a tout à fait raison, bien évidemment.
05:38Et j'ai envie de redire que ce que je dis toujours,
05:40c'est que la prévention en France
05:42contre les addictions, elle est nulle.
05:44Donc, il faut se bouger.
05:46On n'a aucune prévention sanitaire d'ampleur
05:48dans notre pays.
05:49Elle n'est pas bonne.
05:50Il y a des petites campagnes qui coûtent très très cher
05:52qui ne servent à rien.
05:53La 3-MMC est une drogue de l'élite
05:55ou des hapifus, des gens qui ont de l'argent
05:57ou elle touche tous les milieux aujourd'hui ?
05:58Non, ça touche tous les milieux.
06:00C'est fini les drogues 4-7,
06:02comme la cocaïne dans les années 90 ou 2000.
06:04C'est terminé, ça.
06:05Notre député qui s'est engagé
06:07aujourd'hui à suivre des soins,
06:09est-ce qu'il peut s'en sortir ?
06:10Est-ce qu'on peut l'aider ?
06:11Évidemment.
06:12Moi, j'ai envie de dire en tant que médecin
06:14bien sûr qu'on peut s'en sortir.
06:16Après, moi, je ne connais pas cette personne.
06:17Je ne sais pas quel diagnostic il a eu.
06:19Mais bien sûr, dès qu'on a un problème
06:21avec des substances,
06:23il faut se faire aider
06:24parce que c'est très très difficile de stopper ça.
06:26Je peux peut-être vous poser la question à l'envers.
06:28C'est comment on aide des gens dépendants ?
06:30Et puis, ce qu'on appelait avant,
06:31même si ce terme est déplaisant à utiliser,
06:33des drogués.
06:34Moi, je n'aime plus le mot drogué ni toxicomane.
06:36Donc, des gens addicts.
06:37Ah, très bien.
06:38Quelqu'un qui a un diagnostic d'addiction,
06:40on va le faire entrer dans un protocole de soins.
06:42Et le protocole de soins, ça va être quoi ?
06:44Ça va être un suivi médical addictologique.
06:47C'est-à-dire qu'on va travailler sur les substances,
06:49on va travailler sur les comportements de consommation,
06:51comment les gérer, comment essayer d'arrêter.
06:54On va travailler sur la base psychologique.
06:57C'est-à-dire que quand on est addict,
06:59finalement, on n'est pas qu'accroché à une substance.
07:03Il y a des problèmes en dessous,
07:04comme les racines d'un arbre.
07:05Donc, on va aller explorer ces racines
07:07et essayer de dénouer tous les nœuds,
07:11tous les liens pathologiques.
07:13Il va y avoir un accompagnement serré
07:15parce qu'un suivi médical isolé, ça ne suffit pas.
07:18Donc, il faut faire un programme avec psychiatre addictologue
07:21ou médecin addictologue, psychologue
07:23et infirmier en addictologie.
07:25Et puis, si c'est difficile en consultation,
07:27on va prendre la solution d'hospitalisation
07:29pour faire un tremplin, pour aller vers une rémission.
07:32Merci beaucoup Laurent Carilla.
07:33Je rappelle que vous êtes médecin psychiatre,
07:35spécialiste de l'addiction.
07:36Et je renvoie volontiers à votre podcast
07:38Addiction avec un K.
07:39Bonne soirée.
07:41Et dans un instant, le journal de 18h30,
07:43puis direction les États-Unis,
07:44notre correspondant Arnaud Touche,
07:45nous plonge dans le quotidien des Américains
07:47à deux semaines de l'élection présidentielle.
07:49Petite visite de New York ce soir,
07:51ville démocrate,
07:52mais où Donald Trump garde de très nombreux supporters.
07:55Enfin, à 18h45,
07:56nous reviendrons sur cette explosion spectaculaire.
07:58Le nombre d'automobilistes contrôlés et sans assurance
08:01a progressé de 400% en quatre ans.
08:04400%, nous ferons le point avec la générale de gendarmerie,
08:07Florence Guillaume.
08:08A tout de suite.