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Procès des viols de Mazan : à la barre Gisèle Pélicot a une fois de plus forcé le respect, mercredi 23 octobre. Regardez son avocat, Maître Antoine Camus.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 24 octobre 2024.

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Transcription
00:00RTL Matin
00:03Avec Amandine Bégaud et Thomas Soto
00:05Les 8h15, je veux changer la société. Gisèle Pellicot l'a dit hier et ça fait la une de la Provence ce matin.
00:11Le calvaire de cette femme aura peut-être servi à ouvrir un peu les yeux de la société.
00:15Alors pour votre interview ce matin, Amandine, vous avez choisi de recevoir un de ses avocats, Maître Antoine Camus.
00:20Bonjour Maître.
00:21Bonjour.
00:22Merci beaucoup d'être en direct avec nous ce matin d'Avignon.
00:26Gisèle Pellicot a donc une nouvelle fois pris la parole hier, audience extrêmement forte.
00:31Je voulais et je tenais à lire ces quelques mots prononcés hier.
00:35« Je suis une femme totalement détruite », a-t-elle dit.
00:38« Je ne sais pas comment je vais me reconstruire, me relever de tout ça.
00:41À bientôt 72 ans, je ne sais pas si ma vie suffira pour me relever ».
00:45Ces mots, Maître, ils tranchent avec l'image qu'on peut avoir de Gisèle Pellicot.
00:49Une femme digne, forte, elle arrive au tribunal la tête haute, ne se cache pas.
00:54On a tous été extrêmement impressionnés depuis deux mois par son courage.
00:57Vous qui la connaissez bien, est-ce que vous aussi vous êtes impressionné ?
01:01Je le suis évidemment.
01:03Néanmoins, je ne suis pas surpris parce qu'en réalité, je la connais depuis maintenant plus de deux ans et demi.
01:09J'ai immédiatement su que j'avais affaire à une personnalité tout à fait extraordinaire, contrairement à ce qu'elle peut imaginer.
01:16Elle ne cesse de se présenter comme quelqu'un de normal.
01:20Elle dit, je ne comprends pas finalement qu'on vienne me dire que je suis extraordinaire toutes les deux secondes,
01:25alors qu'en réalité, je me sens complètement normal.
01:28Elle n'est pas une personne entre guillemets normale.
01:32Elle a bien sûr un très fort caractère, elle est quelqu'un d'extrêmement courageuse
01:37et elle a en elle une force de vie qui lui permet de faire ce qu'elle fait, de mener ce combat.
01:44Donc non, je ne suis pas surpris, je suis admiratif, bien sûr, comme tout le monde.
01:48Admiratif, d'autant qu'elle suit cette audience pas à pas, deux mois d'audience maintenant et ça va continuer jusqu'au 20 décembre a priori.
01:57Comment va-t-elle ? Comment est-ce qu'elle vit ces deux mois d'audience ?
02:00Il faut rappeler quand même qu'elle est face à ses accusés, face à son ex-mari, 50 accusés, elle les a devant elle tous les jours.
02:10Bien sûr, bien sûr, c'est à la fois un marathon et une épreuve de tous les instants.
02:17Très clairement, mais elle s'y est préparée, on a eu tout de même le temps de s'y préparer pendant 4 ans d'instruction.
02:26Elle savait que ça allait être dur, elle est maintenant dans l'épreuve et elle est portée,
02:33elle est très clairement portée par tous les témoignages qu'elle reçoit qui sont innombrables,
02:38qui viennent du monde entier, des témoignages qui la bouleversent, qu'elle reçoit parfois directement au palais de justice d'Avignon
02:49où des quantités de femmes et d'hommes lui écrivent Madame Pellicot, Mazan,
02:56et figurez-vous que ça vient jusque entre ses mains au palais de justice d'Avignon.
03:01Nous, ses avocats, recevons également à son attention sur nos boîtes mail des témoignages de soutien.
03:07Tout ça la porte parce qu'en réalité, elle se rend bien compte, même si elle le pressentait, que son histoire fait résonance dans la société.
03:16Et c'est pour cette raison qu'elle s'inflige, entre guillemets, ce calvaire judiciaire parce que c'est très dur, elle entend des choses très dures.
03:26Elle l'a rappelé hier, elle n'est sortie qu'une seule fois cinq minutes parce que ça lui était insupportable.
03:31Mais pour le reste, elle tient à affronter en effet ces violeurs, à affronter les lignes de défense qui lui sont opposées
03:40parce qu'elle a décidé d'ouvrir les portes de cette salle d'audience pour que la société s'en saisisse et mène collectivement un débat de fond.
03:48C'est ça qui lui importe aujourd'hui.
03:51En réalité, à titre personnel, elle n'a rien à gagner de ce procès, elle n'en attend rien.
03:56Elle l'a dit, sa vie est détruite, même si elle est debout.
03:59Elle est incontestablement debout, elle a la force de poursuivre ce combat pour ses petits-enfants,
04:06pour toutes ces femmes et ces hommes qui lui écrivent tous les jours, toutes les semaines.
04:11Mais à titre personnel, qu'est-ce que vous voulez attendre ?
04:14En réalité, sa vie, c'est 50 ans de bonheur qui ont été fichus par terre.
04:20Donc en réalité, sa vie est plus derrière elle que devant.
04:24Donc aujourd'hui, elle le fait, elle le fait vraiment pour les générations futures
04:28et il y a une dimension sacrificielle incontestable dans ce qu'elle fait.
04:31C'est elle, et vous le rappeliez, Gisèle Pellicot, qui a demandé la levée du huis clos de ce procès,
04:36justement pour que son exemple serve aux autres, elle l'a redit hier à la barre.
04:40Est-ce qu'elle est consciente d'être devenue une icône ?
04:44Vous évoquiez des témoignages qui viennent du monde entier.
04:47L'icône, elle n'aime pas le terme, elle le réfute, elle ne le comprend pas vraiment.
04:57Je dirais plutôt qu'en réalité, elle se sent une responsabilité.
05:01Elle se sent une responsabilité très claire, à raison de tous ces témoignages qu'il apporte.
05:08Elle n'entend pas se dérober.
05:10Icône, elle l'entend, entre guillemets, quand on lui dit, voilà, vous êtes finalement quelqu'un d'accessible.
05:17Vous êtes extrêmement courageuse, mais accessible,
05:22parce que vous vous exprimez de telle manière que tout le monde peut vous comprendre.
05:27Il y a quelque chose qui fait résonance en vous, auprès de tout le monde.
05:33Elle comprend, en réalité, qu'elle touche, après un mouvement hashtag MeToo,
05:40qui lui, finalement, concernait une autre strata, en réalité, de la société.
05:49C'était des gens qui travaillaient.
05:51Ici, on va plus en profondeur dans les familles.
05:55C'est un peu la vie de chacun.
05:58Vous disiez tout à l'heure, Gisèle Pellicot est une femme extraordinaire, par son courage,
06:03et effectivement, on ne peut que dire ça, et sa force de vie.
06:07Mais c'est aussi, j'allais le dire, et il n'y a vraiment aucun point néfaste dans ce que je vais dire,
06:13mais c'est un peu Madame Tout-le-Monde aussi.
06:16C'est-à-dire que quand on la voit, on se dit, ça peut arriver à tout le monde.
06:20C'est certain.
06:22Et hier, moi, si je retiens une chose, il y a eu tellement de choses fortes,
06:27beaucoup de matières dans ce qu'elle a tenu à dire hier à la barre.
06:31Moi, je retiens une chose, c'est finalement ce qu'elle a dit à toutes ces femmes
06:36qui ont défilé depuis plusieurs semaines à la barre au soutien des accusés.
06:41Les mères, les compagnes, les sœurs.
06:44Elle leur a dit, mais vous savez, vous venez dire que votre compagnon est un formidable compagnon,
06:52votre frère est un formidable frère.
06:54Mais vous savez, j'avais le même à la maison, à dire vrai, j'avais le même à la maison.
06:59C'était un mari formidable, il ne me battait pas, j'étais la plus heureuse des femmes,
07:04et je pensais que j'allais finir mes jours très tranquillement aux côtés de l'homme que j'aimais.
07:09Et pourtant, j'ai découvert que le danger était au plus près de moi,
07:15c'est-à-dire dans mon foyer, là où je suis censé être en sécurité.
07:19La trahison est venue de l'intérieur.
07:21Donc oui, bien sûr que ça touche évidemment tout le monde,
07:25parce que, et on le sait, la majorité des agressions sexuelles et des viols,
07:29des violences sexuelles en tout cas,
07:31ne sont pas le fait d'un étranger dans un parking le tard de la nuit.
07:35C'est pas vrai, en réalité on les connaît,
07:38ils sont au plus proche de nous le plus souvent, dans une très large majorité des cas.
07:42Je cherche à comprendre comment ce mari, qui était l'homme parfait, a pu en arriver là.
07:47Voilà les mots de Gisèle Pellicot hier à la barre.
07:50J'imagine, Maître, que c'est la question qui la hante aujourd'hui.
07:54Pourquoi il a fait ça ?
07:56Bien sûr, bien sûr.
07:58Elle n'aura jamais la réponse, ou vous pensez qu'elle aura une réponse ?
08:01Je pense qu'on n'aura jamais la réponse.
08:03Évidemment, vous savez, c'est une discussion que nous avons eue collectivement
08:07avec l'expert psychiatre Paul Bensussan,
08:10qui est un immense expert psychiatre,
08:13qui a expertisé longuement Dominique Pellicot.
08:17En réalité, toute la difficulté, c'est la coexistence,
08:20c'est ce qu'on appelle le clivage, en réalité, en psychiatrie,
08:24c'est la coexistence de deux facettes.
08:27Il y a une face A, une face B,
08:29à sa famille, à ses amis, à ses voisins, à son épouse.
08:32Il n'a donné à voir que la face A,
08:34c'est-à-dire, finalement, celle de l'image d'un homme.
08:39Il a donné à voir l'image qu'il souhaitait donner,
08:42socialement, entre guillemets,
08:45et qui, en effet, était une image parfaite.
08:47Et la face B, il l'a réservée peut-être pour d'autres.
08:51Et en tout cas, à sa propre épouse,
08:54il n'a même pas pu la lui montrer.
08:56Il a fallu qu'il l'endorme, en réalité, pour la lui faire subir.
08:59Donc, ça, elle l'entend,
09:02c'est une forme d'explication, entre guillemets.
09:05Si l'explication il y a, c'est celle-ci, en réalité.
09:10C'est la psychologie de cet homme très particulier,
09:14grand pervers, incontestablement,
09:17avec des traits psychopathiques tout à fait diagnostiqués.
09:21À ce stade, l'explication est là.
09:24Merci beaucoup, Maître, d'avoir pris le temps
09:27de répondre ce matin à nos questions sur RTL.
09:31J'en profite pour vous dire qu'au nom de toute la rédaction,
09:34à apporter votre soutien, notre soutien aussi,
09:37à Gisèle Pellicot, qui, véritablement,
09:39nous impressionne ces dernières semaines.
09:41Son message est important.
09:43Merci aussi à Cyndi Hubert, qui est à vos côtés.

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