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"Le match France-Israël doit se tenir, autrement ce serait une victoire pour les antisémites", prévient le président du Crif, qui appelle à une prise de conscience. Yonathan Arfi, président du Conseil représentatif des institutions juives de France, est l'invité de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 14 novembre 2024.

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Transcription
00:00RTL Matin
00:03Avec Amandine Bégaud et Thomas Soto
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud, à une douzaine d'heures du match France-Israël au Stade de France.
00:10Amandine, vous avez choisi de recevoir un homme inquiet, parce qu'être juif en France, aujourd'hui, c'est vivre dangereusement.
00:16C'est Yonatan Harfi, le président du CRIF, le Conseil représentatif des institutions juives de France. Bonjour et bienvenue.
00:21Bonjour Yonatan Harfi.
00:23Bonjour.
00:24Inquiet, disait Thomas à l'instant, c'est le bon mot, c'est votre état d'esprit ce matin ?
00:28Oui, on est inquiet, on est vigilant, parce que nous savons que ce soir se tient le match France-Israël, sous haute tension sécuritaire, avec beaucoup de menaces.
00:38Et c'est devenu un peu le symbole de la condition des juifs, non seulement en France, mais en Europe, après les événements d'Amsterdam,
00:44parce que nous savons le niveau d'antisémitisme qui s'abat sur les communautés juives depuis le 7 octobre dernier, enfin 7 octobre 2023.
00:50Très concrètement, vous redoutez des scènes comme celles qu'on a vues, ces scènes abominables à Amsterdam la semaine dernière ?
00:55Oui, je les redoute, alors je sais que la mobilisation policière est importante.
00:594000 policiers, on le rappelle.
01:00Voilà, et je veux saluer la mobilisation du ministère de l'Intérieur sur la question qui prend très sérieusement le sujet, bien sûr,
01:05mais je crains toujours qu'il y ait cette libération de passage à l'acte antisémite, prenant prétexte du match, prenant prétexte du conflit à Gaza,
01:13pour s'attaquer directement à des Français juifs au nom de ce conflit.
01:19C'est ce qu'on a vu à Amsterdam, c'est ce qu'on voit régulièrement, et ça renvoie à des images dans l'inconscient juif et dans l'inconscient européen qui sont des images douloureuses.
01:264000 policiers et gendarmes mobilisés ce soir pour 12 000 spectateurs.
01:30Le chiffre, il est stupéfiant, confirmé hier ici même par Laurent Nunes, le préfet de police de Paris sur RTL.
01:35Tout le monde peut venir au stade en toute sécurité, disait-il, vous êtes d'accord avec ça ?
01:39Vous dites à tous nos compatriotes juifs, venez au stade ce soir, il n'y aura pas de problème ?
01:44Je dis d'abord à tous nos compatriotes tout court qu'il faut aller voir ce match parce que c'est devenu un symbole qui va au-delà du sport,
01:50c'est devenu un symbole presque politique d'affirmation face à l'antisémitisme, d'affirmation républicaine tout court,
01:56et c'est important effectivement que les choses se passent bien.
01:59Ma crainte n'est pas simplement autour du stade, mais bien au-delà, c'est que nous ayons des agressions qui se déroulent dans les transports, même au retour, à l'issue du match.
02:07Dans Paris ?
02:08Oui, comme on l'a vu au fond à Amsterdam où les incidents n'ont pas eu lieu à la sortie du match immédiatement, mais beaucoup plus loin dans la ville.
02:14Ça veut dire quel conseil vous donnez ce matin ?
02:18Le conseil c'est toujours celui de la prudence et de la vigilance dans toutes les circonstances et donc en particulier ce soir.
02:25Il faut à la fois évidemment respecter les instructions données par la préfecture de police sur ces sujets.
02:32Je veux pour autant rappeler qu'il y aura une mobilisation de police importante et qu'il faut espérer que les choses se passent bien.
02:39On avait aussi ce type d'inquiétude avant les Jeux Olympiques autour de la présence de la délégation israélienne.
02:44Les choses se sont bien passées, j'espère que les moyens mis en place permettront ce soir que ça se passe bien également.
02:49Mais pardon, ça veut dire qu'on n'affiche pas sa religion ce soir ?
02:53Je vais vous le dire très basiquement, vous conseillez à tous ceux qui portent une kippa de ne pas la porter ce soir ?
02:58Qu'ils aillent au match ou qu'ils n'y aillent pas ?
03:00C'est des choix qui sont individuels et c'est à chacun de prendre les décisions qu'il juge les plus pertinentes par rapport à son évaluation des risques
03:06et je me refuserai toujours à donner l'instruction générale de masquer des signes d'appartenance ou d'adhésion à la communauté juive
03:14parce que ce serait un échec pour la République.
03:17A chacun évidemment d'être prudent, j'insiste sur ce point, à chacun d'évaluer les choses, bien sûr.
03:22Néanmoins, je ne veux pas que nous ayons non plus une forme d'acceptation, d'un effacement des juifs de l'espace public.
03:31Ce serait donner une victoire symbolique aux antisémites, inacceptable.
03:34Donc il faut là-dessus trouver le point d'équilibre entre la sécurité bien sûr et le refus d'effacer la présence juive de l'espace public.
03:41Mais je me permets de vous poser cette question Yonatan Harfi parce que l'autre jour, et je me suis fait la remarque,
03:45j'ai vu un jeune qui marchait dans la rue très tôt le matin qui avait une kippa
03:49et au moment de descendre dans la station de métro, il a mis sa capuche.
03:53C'est ça le quotidien aujourd'hui des juifs de France ?
03:56Oui, c'est le quotidien de beaucoup de juifs en France malheureusement.
03:59Ce jeune homme qui a recouvert sa kippa avec sa capuche n'a peut-être même plus conscience du geste qu'il fait
04:06parce qu'il l'a intégré comme étant un geste de sécurité élémentaire, de vigilance face aux risques d'agression.
04:14Vous savez, l'antisémitisme, pour le dire très schématiquement, c'est beaucoup moins de risques de discrimination mais beaucoup plus de risques d'agression.
04:20Les juifs, l'antisémitisme a cette particularité d'être souvent porté par une forme violente et haineuse
04:26plus que de la discrimination au sens strict.
04:2857% des agressions racistes et antireligieuses sont des actes antisémites
04:32alors même que les juifs ne représentent qu'un pour cent de la population française.
04:35Ce chiffre a été donné avant-hier par Bruno Retaillon, le ministre de l'Intérieur à l'Assemblée.
04:3980% des Français de confession juive sortent la peur au ventre.
04:43Ce sont des chiffres de la Fondation Fondapol.
04:45Comment est-ce qu'on en est arrivé là ? Qui est responsable ?
04:48On en est arrivé là d'abord parce que c'est un long cheminement.
04:51Je rappelle l'explosion de l'antisémitisme au début des années 2000.
04:54On l'a oublié au début de la seconde nitipada.
04:56Il y a en France immédiatement des répliques antisémites avec des agressions, avec des incendies de synagogues.
05:03Et puis s'est installé aujourd'hui un antisémitisme contemporain porté par des carburants nouveaux.
05:08Je pense à l'islamisme, je pense à la haine d'Israël, je pense au complotisme aussi qui est galvanisé par les réseaux sociaux
05:15et qui gangrène une partie de notre jeunesse.
05:18Donc on a cette responsabilité, mais il y a une particularité dans les derniers mois.
05:21C'est aussi une composante politique parce que LFI a une responsabilité directe par ses discours
05:27et son hystérisation du débat public autour de la question de Gaza a une responsabilité directe dans la flambée d'antisémitisme.
05:32Ils ont redonné une caution politique à l'antisémitisme dans notre pays.
05:35Jean-Luc Mélenchon a dénoncé hier sur son blog une ambiance politico-médiatique pourrie, regrettant, je le cite,
05:40que quiconque s'oppose à la politique de Benjamin Netanyahou soit qualifié d'antisémite.
05:44Qu'est-ce que vous lui répondez ce matin ?
05:45D'abord que le premier responsable de cette ambiance terrible, délétère dans notre pays, c'est Jean-Luc Mélenchon lui-même
05:52qui a aligné ses troupes politiques sur un mot d'ordre qui est celui d'hystériser notre débat public,
05:58de faire de la question de Gaza un fonds de commerce électoral, d'en faire un slogan politique.
06:03C'est totalement irresponsable et ça contribue à mettre directement une cible dans le dos des juifs,
06:09mais pas seulement, parce que ça contribue à un climat insurrectionnel dans notre pays de manière générale.
06:14Une cible ?
06:15Oui, parce qu'aujourd'hui nous avons vu depuis le 7 octobre dernier l'antisémitisme flamber directement dans notre pays
06:22en lien avec des dénonciations mensongères, calomnieuses par rapport à l'État d'Israël.
06:27Et on le sait, c'est fait à la France Insoumise sciemment dans une stratégie communautariste.
06:32Mais vous comprenez que ce qui se passe à Gaza puisse choquer, interpeller ?
06:36Bien sûr, mais toutes les consciences humaines sont interpellées par la détresse de populations civiles et je le suis.
06:41Il y a des jours où vous dites qu'il faudrait que ça s'arrête ?
06:43Mais tout le monde se dit qu'il faudrait que ça s'arrête, évidemment.
06:46La question n'est pas là, la question c'est comment ça peut s'arrêter,
06:50comment on peut faire pour qu'il y ait demain un processus de paix qui se réengage,
06:54que les otages soient libérés, que le Hamas accepte de rendre les armes
06:57et nous aurons demain, je l'espère, un Moyen-Orient qui n'est pas condamné à la guerre.
07:00Aucune région du monde n'est condamnée définitivement à la guerre.
07:03Un temps viendra aussi pour la paix, je l'espère, rapidement.
07:05Jonathan Arfi, vous serez ce soir au Stade de France, aux côtés d'Emmanuel Macron,
07:08mais aussi de Nicolas Sarkozy, de François Hollande.
07:10C'est important que les présidents fassent bloc, c'est un signal fort ou c'est de la com ?
07:14Non, c'est un signal fort parce que nous avons besoin de symboles dans notre pays.
07:18Face à l'antisémitisme, mais face à la haine de manière générale,
07:21on a besoin de rappeler ce qu'est la concorde civile.
07:24La concorde civile, c'est quand des acteurs politiques qui peuvent être opposés
07:28le reste du temps dans des débats publics, acceptent de s'unir face à la question de l'antisémitisme.
07:33Sauf qu'il y a eu cette marche, par exemple, il y a un an, certes, le président Macron n'y est pas allé,
07:37d'ailleurs ça avait beaucoup choqué à l'époque la communauté juive,
07:40mais il y a eu cette marche et depuis les chiffres continuent de flamber.
07:44On a l'impression que rien ne change.
07:46Est-ce que ça suffira à changer les choses ? Non, nous le savons.
07:48Est-ce que pour autant c'est un symbole important ?
07:50Oui, et le fait que le président de la République s'y rende
07:53a entraîné aussi une large participation d'élus de tout bord derrière,
07:56et c'est une excellente chose, et je salue ça comme un moment d'unité républicaine
08:01et d'affirmation d'engagement contre l'antisémitisme.
08:04C'est au fond l'anti-Amsterdam que nous devons donner à voir ce soir au Stade de France.
08:10Est-ce que ce n'est pas aussi une façon pour Emmanuel Macron de se rattraper
08:13après un certain nombre de prises d'opposition qui ont suscité beaucoup de colère au sein de la communauté juive ?
08:18Je me souviens de ce dîner, il y a quelques semaines, à l'occasion du 7 octobre,
08:24son nom avait été hué. Il y a besoin aussi de retendre la mort ?
08:28Il y a eu un certain nombre de sujets de crise et de désaccords publics
08:32sur lesquels nous nous sommes exprimés à ce moment-là très largement.
08:35Je crois que ce qui compte aujourd'hui, c'est de réenclencher une dynamique d'unité du pays
08:40sur la question de l'antisémitisme. Il n'y a pas en France, au fond,
08:44des antisémites et des non-antisémites et un pays qu'il faudrait accepter comme tel.
08:49Il faut que la lutte contre l'antisémitisme soit, au fond, une colonne vertébrale
08:53de l'engagement républicain, comme elle l'a toujours été depuis l'affaire Dreyfus dans notre pays.
08:57Et c'est important de le rappeler dans ces termes.
08:59Merci beaucoup Yonatan Arfi.
09:01Merci Yonatan Arfi. Nous devons donner à voir l'anti-Amsterdam ce soir au Stade de France.
09:04Et puisque vous évoquiez la situation catastrophique à tout point de vue au Proche-Orient,
09:08on a une pensée pour nos deux compatriotes dont on est sans nouvelles
09:11depuis qu'ils ont été élevés par le Hamas le 7 octobre 2023 au Fer Calderon.

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