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00:00France Info Soir, l'invité, Agathe Lambret.
00:04Bonsoir Thomas Cazeneuve, vous êtes député macroniste de Gironde, ancien ministre chargé
00:09des comptes publics surtout, et le projet de loi des finances pour 2025 sera présenté
00:14demain en Conseil des ministres et prévoit un effort budgétaire de 60 milliards d'euros
00:19dont 40 milliards d'économies et 20 milliards de hausses d'impôts selon le gouvernement
00:23selon les échos ça serait plutôt 25 milliards de hausses d'impôts, est-ce que c'est tenable ?
00:29D'abord je crois qu'on partage l'essentiel avec le gouvernement, c'est l'objectif,
00:34c'est-à-dire réduire le déficit public qui passe par un effort principal sur la réduction
00:40de la dépense et après aller chercher quelques recettes complémentaires pour tenir quoi
00:45notre objectif de ramener le déficit public à 5% et cet objectif-là on le partage, on
00:50le soutient et les députés de mon groupe soutiendront tous les efforts de Michel Barnier
00:54pour réduire le déficit public.
00:55Vous avez proposé votre contre-budget, concrètement qu'est-ce que vous proposez ? Ce sont des
01:01alternatives à certaines mesures, lesquelles ?
01:04Ce n'est pas un contre-budget, sur certains sujets on propose d'autres pistes, je vous
01:09donne un exemple, le gouvernement proposera d'augmenter les cotisations sociales qui
01:15pèsent sur les entreprises, les allégements de charges, on pense que c'est extrêmement
01:22risqué sur l'emploi, sur les PME, les TPE dans nos territoires et comme on s'est fixé
01:29pour règle de remplacer chaque proposition par une proposition alternative et de ne pas
01:34dégrader le déficit public, on propose au gouvernement de remettre sur la table la réforme
01:39de l'assurance chômage.
01:40En disant il vaut mieux réformer l'assurance chômage que de détruire de l'emploi et revenir
01:45en arrière sur ce que nous avons réussi, c'est-à-dire réduire le chômage dans le
01:48pays.
01:49Parce que ça va détruire de l'emploi, ces hausses des charges, ça va détruire de l'emploi,
01:50vous dites comme le MEDEF, comme la CPME, les petites et moyennes entreprises, attention
01:55il y a des secteurs où on va perdre des emplois, vraiment.
01:58Absolument, si vous réduisez les abattements, donc si vous augmentez les cotisations sociales,
02:03si vous augmentez le coût du travail dans notre pays, on a ces dernières années baissé
02:06le coût du travail avec succès, on a créé 2 millions d'emplois, on a ramené le chômage
02:11à 7,5%, on a brisé la tragédie française de la préférence pour le chômage et donc
02:17on dit attention, c'est une fausse route, il vaut mieux réformer l'assurance chômage
02:23qu'augmenter le coût du travail.
02:24Mais l'assurance chômage, c'est vous-même qui l'avez mis sur pause cette réforme,
02:27Gabriel Attal l'avait mis sur pause parce qu'elle était perçue comme injuste au sein
02:31même de la majorité présidentielle à l'époque, certains la considéraient même à contre-temps
02:36parce que le chômage augmentait, donc ce n'était pas le moment de durcir les règles
02:40pour les chômeurs, en quoi aujourd'hui elle serait plus pertinente qu'à l'époque ?
02:44On était dans une situation politique particulière, par ailleurs d'élection, il était important
02:49à un moment d'arrêter de prendre un certain nombre de décisions et je crois qu'il était
02:53juste de mettre sur pause.
02:54C'était dans un but électoral alors ?
02:56Non mais vous savez, moi j'ai été ministre démissionnaire pendant 3 mois, je sais ce
02:59que c'est, on ne peut pas prendre de décision, c'est normal.
03:02En revanche, on dit dans l'alternative, soit on augmente le coût du travail avec l'effet
03:06sur le chômage, sur l'emploi, soit on poursuit la réforme de l'assurance chômage, pourquoi
03:10? Parce que le chômage a continué à baisser, on est en train de remporter cette victoire
03:15et notre objectif politique demeure, et c'est ce que nous proposons avec Gabriel Attal et
03:20l'ensemble des députés, l'ensemble pour la République, continuer à aller vers le
03:23plein emploi.
03:24C'est ça notre identité politique depuis 2017.
03:26Mais Michel Barnier préfère redonner la main aux partenaires sociaux sur ce sujet.
03:29Mais ce n'est pas incompatible.
03:30On peut redonner la main aux partenaires sociaux en étant exigeant sur les économies que
03:34l'on souhaite faire sur le régime d'assurance chômage.
03:36Il y a une autre mesure que vous proposez, c'est de taxer les collectivités plutôt
03:39que de geler l'indexation des retraites sur l'inflation pendant six mois, disons.
03:44Alors, il y a deux sujets.
03:46Dans les sujets un peu désaccords, il y a effectivement le report de l'indexation des
03:50retraites.
03:51Pourquoi ? Parce que nous avons fait une campagne législative en prenant l'engagement vis-à-vis
03:55des retraités d'indexer leurs pensions de retraite sur l'inflation.
03:57Et là, on applique la même règle, si c'est une dépense supplémentaire, on doit pouvoir
04:03proposer d'autres économies.
04:04On propose des économies notamment sur les arrêts maladie, ce qu'on appelle les indemnités
04:08journalières qui ont énormément augmenté, notamment depuis la crise du Covid.
04:12Et on propose de réformer les indemnités journalières, ce qui permettra de financer
04:17le renoncement finalement à l'indexation au mois de juillet.
04:21Mais Thomas Cazenave, il y a aussi parmi les impôts encore plus emblématiques, la surtaxe
04:28de l'impôt sur les sociétés, ce qui rapporterait 8 milliards d'euros.
04:31Ça fait des semaines que les macronistes disent pas touche aux grandes entreprises,
04:35pas d'hausses d'impôts.
04:36Et ça finalement, vous n'avez pas d'alternative à proposer ?
04:39On est extrêmement vigilants sur les conséquences qu'aurait cette décision sur notre activité,
04:45la création d'emplois sur notre territoire.
04:47Mais vous ne proposez rien d'autre ?
04:48Mais on est réaliste.
04:50On dit si on n'arrive pas avec une proposition d'économie supplémentaire de 8 milliards
04:54d'euros, alors on est prêt à discuter de la mesure.
04:57Je pense qu'il faut rentrer dans le détail de la mesure.
04:59Est-ce que ça va s'appliquer de la même manière sur tous les secteurs ? Quel est
05:02le seuil retenu ? Qu'est-ce qu'une très grande entreprise ? Est-ce que c'est un
05:05milliard d'euros ? Deux milliards d'euros ?
05:06On n'est pas dans une position dogmatique en disant, circulez, il n'y a rien à voir,
05:11c'est zéro impôt.
05:12Vous comprenez que les Français s'interrogent sur vos motivations et sur votre sincérité
05:17parce que que ne l'avez-vous fait plus tôt ? Vous avez été au gouvernement, vous auriez
05:23pu vous préoccuper du déficit à cette époque.
05:26Mais on s'en est préoccupé du déficit.
05:28En début d'année, et ça a fait l'objet de nombreuses polémiques, y compris à votre
05:33micro.
05:34On a annulé 10 milliards d'euros.
05:35Mais j'y reviens, ça ne s'était jamais produit.
05:39Ensuite, on a dit, on a gelé 16 milliards d'euros.
05:43Et d'ailleurs, je l'ai redit au Premier ministre, elles sont à la disposition du
05:46gouvernement.
05:47Ils peuvent faire, dès 2024, plusieurs milliards d'euros d'économie.
05:52Et puis ensuite, on a préparé un budget avec 15 milliards d'euros d'économie.
05:55Donc, on a identifié 40 milliards d'euros d'économie.
05:58Est-ce que c'est suffisant aujourd'hui, compte tenu de la situation ? Moi, je comprends
06:01qu'on aille chercher quelques recettes complémentaires.
06:03On n'est pas opposé.
06:04C'est un tir de plus, quand même.
06:0560 milliards, vous êtes si loin du compte.
06:06On n'est pas irresponsable.
06:08On a eu une baisse des recettes, une augmentation des dépenses des collectivités territoriales
06:13qu'il faut compenser.
06:14Donc, on n'est pas figé.
06:15On est dans une coalition, on est pris à faire des compromis, on est prêt à discuter.
06:19Et donc, on dit, l'effort principal, c'est sur la dépense et c'est les propositions
06:24qu'on a faites.
06:25Il fallait aller chercher quelques recettes supplémentaires.
06:27On a proposé la taxation des rachats d'actions.
06:29Vous vous mettiez en garde contre les hausses d'impôts, vous vous mettiez en garde contre
06:31le fait que vous ne vouliez pas que les classes moyennes soient touchées.
06:34Aujourd'hui, le décalage de l'indexation sur les retraites, la hausse de la taxe sur
06:39l'électricité, la contribution des collectivités locales, tout ça, ça va impacter les classes
06:44moyennes aussi.
06:45Non.
06:46En fait, vous vous ralliez contre quelque chose.
06:47Non, sur les classes moyennes, on est très clair depuis le début.
06:49Pas d'augmentation d'impôts sur les classes moyennes et sur celles de ceux qui travaillent.
06:52Et donc, l'électricité, les retraites ?
06:53J'y reviendrai.
06:54Il y a eu un débat en disant est-ce qu'on peut toucher le barème de l'impôt sur le
06:57revenu ?
06:58On a dit non.
06:59On ne veut pas faire peser l'effort sur celles et ceux qui travaillent, notamment les classes
07:03moyennes.
07:04Et là-dessus, le gouvernement est d'accord.
07:05Est-ce qu'on est favorable à une contribution exceptionnelle pour les très hauts revenus,
07:10les très riches qui devraient participer au redressement des finances publiques ?
07:13On a dit d'accord.
07:14On est d'accord pour soutenir une mesure de justice fiscale.
07:18On comprend que vous allez être vigilant, mais que vous n'avez rien de mieux à proposer.
07:22Donc, c'est plus difficile d'être au pouvoir que d'être en dehors et de faire
07:26des propositions.
07:27Mais pour revenir sur votre bilan, je ne suis pas d'accord avec vous.
07:31Est-ce qu'on ne propose rien ?
07:32Non.
07:33On propose des réformes structurelles.
07:34La réforme de l'assurance chômage.
07:35Vous acceptez aussi des mesures qui étaient des lignes rouges pour vous il y a quelques
07:38jours.
07:39Mais c'est normal qu'on essaie de trouver des compromis.
07:40Les Françaises et les Français ne comprendraient pas qu'on bloque le pays.
07:43On a un débat avec le gouvernement.
07:45On est dans un socle commun, une coalition.
07:48On a des préoccupations sur les classes moyennes, celles et ceux qui travaillent.
07:52On ne veut pas y toucher.
07:53On dit que notre objectif, c'est le travail.
07:55On doit tout faire pour le protéger.
07:56Et c'est ce qu'on fait.
07:57Et d'ailleurs, la copie du gouvernement à ce stade respecte cette ligne-là.
08:00En revanche, on dit des cotisations sociales.
08:02Non, parce que ça va créer du chômage.
08:03Le déficit devrait atteindre plus de 6% contre 4,7% qu'était prévu en 2022.
08:11Les échos pointent aujourd'hui la responsabilité de votre gouvernement quand vous étiez au
08:16pouvoir sur ce déficit deux fois plus important que ce qui était prévu en janvier.
08:20Ils parlent d'un gouffre de 100 milliards d'euros qui s'est creusé en moins de 9
08:24mois.
08:25Ils pointent les mauvaises prévisions, les désaccords sur la stratégie, le temps perdu
08:29avec la dissolution, l'attente d'un nouveau gouvernement.
08:32En fait, vous avez perdu un temps fou alors qu'il y avait urgence, non ?
08:36Non.
08:37Alors, je vais vous dire.
08:38D'abord, quand on a eu cette très mauvaise nouvelle sur les recettes, vous avez raison,
08:41ce qui s'est passé, c'est qu'on a perdu 20 milliards de recettes.
08:43Oui, les prévisions de recettes n'étaient pas les bonnes.
08:46Mais quand on l'a constaté, au mois de février, on a pris des mesures très dures.
08:5110 milliards d'euros et on a dit qu'il faudrait faire 10 milliards d'euros supplémentaires.
08:55Mais là, on parle de 60 milliards d'efforts, 10 milliards, ça ne semble pas grand-chose
08:59à côté.
09:00Non, c'est pour ça qu'on a gelé 16 milliards d'euros.
09:02Et après, quand vous avez une dissolution et un gouvernement en affaire courante, vous
09:07ne pouvez pas prendre les mesures d'économie, c'est certain.
09:09Mais maintenant qu'on a un nouveau gouvernement, on dit à ce gouvernement, il n'y a aucune
09:13fatalité à avoir le déficit public de cette année dépassé les 6%.
09:17Et je repose la question, qu'est-ce que vous allez faire des 16 milliards d'euros qu'on
09:21a mis en réserve ?
09:22Est-ce que vous allez mettre en œuvre les recettes de 2024 qu'on avait prévues ?
09:27Je pense au rachat d'actions, je pense à la taxation des énergéticiens.
09:30Est-ce que vous allez faire un projet de loi de finances rectificatif pour avoir ces recettes ?
09:34Donc, il n'y a aucune fatalité.
09:36Il n'y a pas de fatalité, mais votre bilan est pointé du doigt, notamment par le rapporteur
09:41général de la Commission des finances du Sénat, qui constate qu'après la crise du
09:45Covid, vous n'avez pas su redresser les comptes.
09:48Et ce qu'il pointe, c'est surtout les baisses d'impôts d'Emmanuel Macron qui ont joué
09:52un rôle important dans cette dette.
09:54Il dit que ces baisses, elles n'étaient pas financées.
09:57Est-ce que vous faites un peu votre mea culpa aujourd'hui ?
10:00Vous reconnaissez que vous auriez pu faire les choses autrement ?
10:03Moi, je suis quand même toujours très surpris des leçons que l'on reçoit des mois ou des
10:08années après.
10:09Pendant la crise, en fait, ce qui s'est passé, c'est que la dépense a énormément
10:11augmenté parce qu'on a énormément protégé.
10:13Qui s'est opposé aux dépenses que nous avons consenties pour protéger les commerçants,
10:19protéger la santé des Français ?
10:20Mais là, il parle des baisses d'impôts.
10:21Il ne parle pas des dépenses liées au Covid.
10:22Ce n'est pas la même chose.
10:23La famille politique auxquelles ils appartiennent, on a dû refuser avec Bruno Le Maire des
10:28centaines et des milliers d'amendements de dépenses supplémentaires.
10:32Et moi, j'assume le fait qu'on ait à un moment dégradé le déficit public pour protéger
10:37les Français et notre économie.
10:38Si on a une des économies les plus résistantes d'Europe, on a plus de 1%, on continue à
10:43créer des emplois.
10:44C'est parce qu'on l'a protégé.
10:46C'est un peu facile de venir après en disant oui, mais on aurait fait différemment.
10:50Jamais ils ne s'y sont opposés.
10:51La question, c'est qu'est-ce qu'on fait tout de suite ?
10:53Et nous, on a pris nos responsabilités.
10:54On a fait des économies dès le mois de février qui nous ont été beaucoup reprochées.
10:58On a préparé les choses.
10:59Après, il y a une dissolution.
11:00Ça, on ne peut pas agir dans cette période-là.
11:03Vous n'y êtes pour rien.
11:04Ce n'est pas le président qui a pris cette décision.
11:05Non, mais attendez.
11:06Je suis en affaire courante qu'on ne peut plus prendre de mesures d'économie.
11:08Effectivement, c'est la décision du président.
11:10Thomas Cazeneuve, un mot juste sur la candidature de Gabriel Attal pour prendre la tête du
11:13parti Renaissance.
11:14Elle n'est pas encore officielle, mais elle ne fait guère de doutes.
11:18Est-ce qu'il ferait un bon candidat ?
11:19Gabriel Attal, qui est notre président de groupe à l'Assemblée, je pense qu'il
11:24a à la fois l'expérience, la légitimité pour être un très bon candidat à la tête
11:29de notre parti.
11:30Mais il ne l'a pas encore annoncé.
11:33Donc, votre candidat, c'est Gabriel Attal, pas Elisabeth Borne ?
11:36Non, mais je l'ai dit, j'attends de savoir quels sont les candidats.
11:38Elisabeth Borne a une place très importante dans notre groupe.
11:41J'ai été membre de son gouvernement.
11:43J'ai énormément de respect.
11:44J'ai énormément de respect.
11:45Mais votre candidat, c'est Gabriel Attal, c'est le candidat.
11:46Je considère que Gabriel Attal ferait aussi un très bon candidat.
11:47Merci Thomas Cazeneuve, ancien ministre chargé des Comptes publics, d'avoir répondu aux
11:51questions de France Info.
11:52Merci à vous.