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00:00 Et Aurélie Herbemont à mes côtés.
00:06 Bonjour Bristain Thurier.
00:07 Bonjour.
00:08 Directeur général délégué d'Ipsos.
00:10 On va prendre avec vous ce matin le pouls du pays à quelques jours de la rentrée,
00:16 rentrée politique notamment, à peine amorcée hier soir par Emmanuel Macron à Bormes-les-Mimosas,
00:20 les commémorations de la libération de la ville, et un court discours, 13 minutes, qui
00:25 contenait un petit message pour la jeunesse.
00:28 Il y a chez nos jeunes un appétit de liberté qui se cherche parfois, auquel nous devons
00:32 répondre.
00:33 Il a parlé aussi de droits et devoirs pour la jeune génération.
00:35 Est-ce que c'est la réponse d'Emmanuel Macron aux émeutes du début de l'été ?
00:39 Non, je ne pense pas que ce soit la réponse définitive, mais on voit bien que c'est au
00:43 moins le sujet qu'il met en avant, qu'il met le plus en avant.
00:46 Non sans raison.
00:48 Pour les Français, vous avez eu deux marqueurs jusqu'à maintenant du deuxième quinquennat,
00:53 du second quinquennat d'Emmanuel Macron.
00:54 C'est la réforme des retraites et ces émeutes urbaines.
00:57 Quelles traces ont-elles laissées, d'ores et déjà, ces émeutes urbaines du début
01:01 de l'été ?
01:02 Une trace qui reste encore extrêmement forte.
01:03 C'est pour ça qu'on voit bien qu'Emmanuel Macron réamorce l'idée d'un diagnostic
01:08 avec ce discours sur les jeunes.
01:10 Je pense qu'il y reviendra au moment de la rentrée.
01:12 Il faut maintenant qu'il annonce des mesures.
01:14 Pour l'instant, il avait dit qu'il fallait prendre le temps de la réflexion.
01:18 Le temps de la réflexion, maintenant, va être achevé.
01:21 Et les Français attendent quelque chose qui ne peut pas rester en apesanteur, parce que
01:25 véritablement ces émeutes ont choqué, ont bouleversé le pays.
01:29 On l'a vu ensuite dans toutes les courbes de popularité.
01:32 Ce sont plutôt les personnalités qui défendent l'autorité, qui ont augmenté.
01:35 Donc il s'est produit quelque chose qui a tétanisé au mois de juin, de juillet, les
01:41 Français.
01:42 Les Français attendent quel type de réponse ? De la fermeté, essentiellement ?
01:45 Ils attendent essentiellement, effectivement, de la fermeté.
01:50 Une partie de la population, enfin la population est quand même très clivée là-dessus.
01:53 Si vous prenez les sympathisants de gauche, et notamment de la France insoumise, eux considèrent
01:59 que ces émeutes sont la résultante de dysfonctionnements sociaux, de problèmes de richesse, etc.
02:05 Si vous prenez maintenant le Bloc central et la droite, et évidemment encore plus du
02:10 côté du RN ou d'Éric Zemmour, là vous avez une toute autre lecture des événements.
02:14 Et l'idée c'est qu'il faut impérativement beaucoup plus d'autorité, beaucoup plus
02:19 de fermeté, et qu'on déverserait, disent-ils, trop même de moyens dans ces territoires,
02:26 dans ces banlieues.
02:27 Ça sera un sujet de la rentrée.
02:28 Emmanuel Macron doit-il s'attendre à une rentrée compliquée ?
02:31 Oui, je pense qu'elle est incontestablement compliquée.
02:34 On le dit souvent à chaque rentrée.
02:35 C'est vrai que c'est un peu en marronnier.
02:36 Mais là, pour le coup, il y a toujours cet élément tout à fait nouveau et qui structure
02:41 différemment notre vie politique, c'est la tripartition de l'espace politique sans
02:45 majorité absolue pour le pouvoir en place.
02:47 Donc, la grande initiative politique d'ampleur annoncée par le chef de l'État, elle s'inscrit
02:54 dans ce besoin pour le gouvernement de retrouver de l'espace, de retrouver de l'oxygène,
02:59 du coup de retrouver aussi des capacités de réforme pour sortir justement de ces deux
03:03 points négatifs que j'évoquais, négatifs dans l'opinion, la réforme des retraites
03:09 et les émeutes de ces derniers temps, et pouvoir apparaître comme celui qui continue
03:14 à réformer profondément ce pays.
03:15 Mais pour ça, il faut des alliés.
03:16 Et on voit bien que le chef de l'État est toujours un peu empêché, embourbé dans
03:21 cette absence de majorité.
03:22 Et face à cela, quelles sont justement les préoccupations principales des Français ?
03:28 Le pouvoir d'achat reste en tête en cette rentrée ?
03:30 Le pouvoir d'achat reste en tête.
03:31 Et puis, on a maintenant depuis le début de l'été la question de l'énergie qui
03:35 revient en force avec la fin des boucliers, avec la hausse de l'électricité, avec la
03:40 hausse aussi du coût de l'essence.
03:41 On est dans un moment de vacances et évidemment, tout cela pèse énormément.
03:44 Donc le pouvoir d'achat reste la grande question pour les Français.
03:49 Ensuite, la question des retraites qui avait beaucoup augmenté a baissé.
03:52 La question de l'insécurité, en revanche, a augmenté.
03:54 Ce sont les éléments plus conjoncturels.
03:56 Et la question de l'environnement n'a pas du tout disparu.
03:58 Justement, on va rentrer dans une séquence de canicule en France ces prochaines heures.
04:03 Cela reste aussi une des préoccupations de nos compatriotes ?
04:07 Cela reste une des préoccupations majeures des Français, même s'il n'y a pas de
04:10 lien direct.
04:11 On l'a parfaitement vu l'année dernière, par exemple, entre des événements climatiques
04:15 extrêmes et une attention qui serait encore plus forte vis-à-vis du réchauffement climatique.
04:20 L'année dernière, vous avez eu des épisodes de canicule.
04:23 Vous avez eu une hausse du climato-sceptique l'année dernière, alors même qu'on avait
04:27 eu cet été caniculaire.
04:29 Donc là, on verra ce qu'il en est.
04:31 Ce qui est important, en revanche, c'est que, évidemment, cette question du réchauffement
04:34 climatique continue à faire partie des trois, quatre premières attentes préoccupations
04:39 des Français.
04:40 Et à cela, quel est l'état de l'opinion, si on peut le dire comme ça ?
04:44 Bristain Thurier, est-ce qu'il y a de la résignation de la part des Français, de
04:48 la colère sur certains de ces sujets ?
04:49 J'ai envie de vous dire les deux.
04:51 Il y a à la fois une partie de la population, parce qu'encore une fois, on ne peut plus
04:55 raisonner en disant "les Français".
04:57 C'est la limite de l'exercice, tellement ce pays est divisé, c'est très segmenté.
05:01 Donc, vous avez une partie de la population qui reste animée par une très forte colère.
05:05 C'est beaucoup, c'est quasiment un tiers de la population.
05:09 L'immense majorité est mécontente, soit en colère, soit mécontente.
05:13 Et puis, vous avez une partie qui n'est non pas résignée, mais qui se dit de toute façon
05:18 "que pouvons-nous faire ?" Sur le plan politique, il n'y a pas d'échéance d'alternance
05:23 avant trois ans et demi, presque quatre ans.
05:25 Il n'y a pas de majorité.
05:27 Certes, des scrutins intermédiaires vont intervenir, et puis il y a les élections
05:30 européennes.
05:31 Avec les européennes en juin prochain.
05:32 Mais voilà, que peuvent-ils concrètement faire ?
05:33 Donc, ce n'est pas de la résignation, c'est simplement la prise en compte d'une situation
05:39 qui fait que le changement de politique aujourd'hui n'est pas possible.
05:45 Et puis, qu'il y a une polarisation, encore une fois, sur les enjeux du quotidien, et
05:48 notamment sur les questions de pouvoir d'achat.
05:49 Mais beaucoup de responsables politiques nous disent "la France est une cocotte minute".
05:53 Est-ce que c'est une analyse que vous partagez ?
05:55 Oui, je pense qu'effectivement, on peut parler d'un chaudron français, plus que
06:00 jamais, avec beaucoup de peur.
06:02 Ce qui me frappe aussi, c'est les inquiétudes des Français.
06:05 Il y a des angoisses de disparition dans ce pays.
06:07 Quand les Français s'inquiètent sur l'avenir, sur la dissolution de la France dans la mondialisation,
06:12 sur le réchauffement climatique, sur une supposée submersion par l'immigration, etc.
06:18 Et je n'ai même pas évoqué les crises sanitaires potentielles, avec un petit retour
06:22 de la Covid.
06:23 Quel est le point d'union entre toutes ces peurs ?
06:26 C'est une angoisse de disparition.
06:28 Vous avez véritablement un pays qui reste fondamentalement inquiet, mais un pays qui
06:34 est inquiet et pour partie aussi très en colère.
06:36 Donc la moindre étincelle, elle peut réactiver ses colères, ses mouvements.
06:41 Les manifestations sur les retraites ont frappé, c'est un enseignement important justement
06:47 par leur maîtrise, par leur calme.
06:49 Mais on voyait bien que le désaccord était extrêmement profond.
06:52 Et les émeutures urbaines sont un autre phénomène qui montre à quel point la situation peut
06:56 à tout moment déraper.
06:57 Brice Tenturier, directeur général délégué d'Ipsos, vous restez avec nous.
07:02 On poursuit cet échange après l'Essentiel ce matin à 8h40 avec Elia Bergel.
07:07 Jusqu'à 41 degrés attendus ce week-end dans le sud-est, un dôme de chaleur arrive
07:12 sur le pays.
07:13 19 départements sont placés en vigilance orange.
07:16 Calicule par météo France aujourd'hui du Gers au Doubs en passant par la Savoie ou
07:20 la Corrèze.
07:21 Le député européen écologiste Benoît Habitaud estime sur France Info que le gouvernement
07:26 n'a pas compris les attentes sociétales.
07:28 L'élu participe au convoi de l'eau qu'organisent aujourd'hui les opposants au projet de méga-bassine
07:34 de Saint-Céline, départ des Deux-Sèvres, direction Paris.
07:37 Les Nations Unies annoncent le retrait des casques bleus d'un troisième camp au Mali.
07:42 C'est ce que prévoit le plan de départ de l'ONU à la demande de la junte arrivée
07:46 au pouvoir après un coup d'État il y a trois ans.
07:48 C'est parti pour la nouvelle saison de rugby ce soir.
07:51 Le top 14 reprend avec Bayonne, Toulouse à 21h avant la Coupe du Monde de rugby en France
07:57 qui commence le 8 septembre.
07:58 Nous sommes toujours avec Brice Tinturier, directeur général délégué d'Ipsos.
08:12 Vous parliez de la colère des Français, du mécontentement.
08:15 On a vu aussi ces dernières semaines, ces derniers mois, beaucoup de violence, de violence
08:19 notamment contre les élus pendant la réforme des retraites, pendant les émeutes urbaines.
08:25 Et puis il y a quelques années, il y avait eu les gilets jaunes.
08:27 Est-ce qu'il faut s'habituer à ce contexte, à ce climat de plus en plus violent ?
08:31 Oui, je crois.
08:33 Les Français, en tous les cas, en sont persuadés.
08:35 Vous avez plus de 80% de nos concitoyens qui estiment que nous vivons dans une société
08:40 violente, que la violence a augmenté.
08:42 Et puis on a des éléments qu'on a pu voir dans l'actualité qui viennent alimenter
08:47 cette idée, qui sont des éléments objectifs de violence, vous l'avez souligné, de plus
08:51 en plus forte à l'égard des élus, ce qui est quand même un phénomène relativement
08:55 nouveau.
08:56 Il y a toujours eu dans l'histoire politique de ce pays, il y a des violences verbales,
09:00 des agressions, des coups de poing même.
09:01 On oublie un peu sous la Troisième République la violence des débats et même des violences
09:05 physiques.
09:06 Mais malgré tout, le système s'était un peu pacifié sur une partie de la Ve République.
09:10 Et là, de plus en plus, on a le sentiment que des barrières tombent vis-à-vis des
09:15 élus, vis-à-vis d'un certain nombre de biens communs qui étaient davantage respectés.
09:20 Et ces déclenchements de rage, de violence sont de plus en plus fréquents et inquiètent
09:26 de plus en plus la population.
09:27 - Comment on l'analyse ?
09:28 - Il y a une série de facteurs, je crois, qui concourent.
09:33 Il y a des facteurs d'abord économiques et sociaux.
09:36 Ils existent, il ne faut pas les mettre de côté ou les nier.
09:39 Avec des populations qui ont le sentiment qu'en termes d'avenir, l'avenir n'est pas pour
09:44 eux, qu'elles sont enfermées dans des ghettos, qu'il n'y a pas de possibilité d'ascension.
09:49 Je pense que la question de la mobilité sociale, du fameux ascenseur social, est quelque chose
09:53 de décisif.
09:54 Quand vous avez le sentiment d'une société totalement bloquée et que vous êtes du mauvais
09:57 côté, alors je ne dis pas que ça favorise ou que ça explique...
10:01 - En 2017, Emmanuel Macron faisait campagne contre ce phénomène d'assignation à résidence.
10:03 Il n'a pas réussi à y répondre.
10:05 - Il n'a pas réussi.
10:06 Et cette société bloquée, c'est un problème qui, par moment, peut générer aussi des
10:10 réactions ou faciliter des réactions de violence.
10:13 Mais ça ne suffit pas à expliquer, bien évidemment, ce qui se passe.
10:17 - Il y a aussi l'idée du paysage politique de plus en plus polarisé.
10:21 Vous l'évoquiez un peu.
10:22 Des partis politiques, des sujets qui divisent, ça, ça explique aussi.
10:26 On ne peut plus communiquer tellement.
10:28 - J'allais y venir.
10:29 Il y a aussi des normes et des valeurs qui se sont modifiées.
10:32 Regardez, moi, je suis très frappé par exemple à la question de la colère.
10:35 Aujourd'hui, la colère est quelque chose qui, parfois, est valorisé.
10:38 On dit oui, mais vous comprenez, ils sont en colère ou ils étaient en colère quand
10:41 il a commis tel ou tel acte.
10:42 Jusqu'il y a encore une dizaine d'années, on essayait ou on apprenait aux gens à réfréner
10:49 leur colère et donc à avoir un comportement qui permettait, même quand on était en désaccord
10:55 ou mécontent, d'éviter de passer par la case violence ou colère.
10:58 Là, c'est quelque chose qui, parfois, est même valorisé ou en tous les cas, qui sert
11:03 de justification.
11:04 Vous avez une évolution sur un certain nombre de valeurs qui peuvent favoriser ensuite le
11:09 passage à l'acte.
11:10 Une fois que vous valorisez la colère, le passage à l'acte est malgré tout facilité.
11:14 Et puis, vous avez une polarisation extrême.
11:17 Vous avez tout à fait raison de souligner ce phénomène qu'on n'avait pas encore une
11:19 fois quand le pays était en alternance gauche-droite plus classique.
11:23 Là, la polarisation entretient l'idée de l'antagonisme, l'idée qu'il n'y a pas de
11:29 zone de consensus, de négociation possible.
11:31 Et s'il n'y a pas de négociation possible, il ne reste que la violence.
11:34 Sur tout type de sujet, on est pour ou contre les soulèvements de la terre ? On est pour
11:37 écouter la jeunesse ou pour protéger en priorité la police, par exemple ?
11:41 Oui, il y a aussi un débat qui est de plus en plus caricatural, qui polarise de plus
11:46 en plus les points de vue, avec là aussi une forme de valorisation de ce qui serait
11:51 cash et définitif, là où la nuance, la négociation, le compromis, le respect de
11:58 la minorité tout autant que celui, évidemment, de la majorité, tout cela constitue des valeurs
12:04 aujourd'hui un peu en retrait.
12:05 Et donc, on favorise le clash verbal, mais encore une fois, c'est un gradient.
12:10 Quand vous êtes dans le clash verbal, vous vous rapprochez ensuite du passage à l'acte
12:14 physique.
12:15 Un sujet va beaucoup cliver en cette rentrée, c'est le dossier de l'immigration.
12:18 Emmanuel Macron promet qu'il y aura un projet de loi, projet déjà jusqu'ici plusieurs
12:23 fois reporté.
12:24 Qu'est-ce que les Français attendent sur l'immigration ?
12:28 Globalement, ils attendent une réponse de fermeté.
12:31 Ils sont inquiets sur cette question de l'immigration.
12:35 Ils considèrent que, depuis longtemps, qu'il y a trop d'étrangers en France.
12:39 Nos enquêtes fractures françaises montrent que 65% environ de Français considèrent
12:44 qu'il y a trop d'étrangers.
12:45 Ça ne veut pas dire que 65% de Français pensent qu'il faudrait qu'il y ait zéro étranger
12:50 ou qu'il faudrait rejeter ces étrangers.
12:52 Mais c'est un phénomène qui les préoccupe.
12:55 Ce n'est pas la première des préoccupations.
12:57 Je n'ai pas cité l'immigration, par exemple, dans les trois sujets.
12:59 Mais ça arrive ensuite, en cinquième rang, souvent, suivant ce que vous avez dans la
13:06 liste.
13:07 Et l'idée que le pays permettrait trop facilement à des étrangers de venir et que cela pose
13:12 de plus en plus de problèmes d'intégration est une idée qui s'est répandue dans la
13:16 société française depuis maintenant longtemps.
13:18 On a vu dans plusieurs sondages qu'il y avait effectivement cette demande de fermeté.
13:21 Et en même temps, le gouvernement voudrait mettre en place des titres de séjour pour
13:26 régulariser des travailleurs qui exercent leur profession dans des secteurs en tension.
13:30 On voit que là aussi, les Français sont pour ces régularisations.
13:34 Mais bien sûr, ça fait partie des contradictions de l'opinion publique qui, d'un côté,
13:39 disent qu'il y a trop d'étrangers, mais qui, d'un autre côté, sont quand même soulagés
13:43 qu'il y ait, y compris des médecins ou des infirmières étrangères qui viennent soulager
13:49 notre système hospitalier.
13:50 On a beaucoup vu pendant le Covid.
13:51 Voilà, pendant le Covid, mais pas seulement pendant le Covid.
13:53 Pas seulement, au quotidien.
13:55 Encore aujourd'hui, ou que dans des secteurs en tension, comme la restauration, on est
13:59 en période estivale où les Français sont davantage dehors.
14:03 Et bien que là aussi, il y ait une main d'œuvre qu'on ne trouve pas aujourd'hui dans une
14:07 série de secteurs.
14:08 Donc là, ce sont les tensions internes de la société française qui, ça peut paraître
14:12 paradoxal, mais c'est parce que ça renvoie à des peurs différentes, mais qui, d'un
14:15 côté, s'inquiètent d'un trop grand nombre d'étrangers.
14:17 Et puis, d'un autre côté, s'inquiètent d'une incapacité à avoir de la main d'œuvre
14:21 dans des secteurs adéquats.
14:22 Vous l'évoquiez tout à l'heure, l'autre rendez-vous, là, dans les tout prochains
14:26 jours, presque, l'initiative politique que propose Emmanuel Macron, c'est l'idée de
14:31 faire avancer certains de ces sujets grâce aux partis d'opposition, en écartant la France
14:37 Insoumise et le Rassemblement National.
14:38 Mais est-ce que les Français sont en demande d'une telle action transpartisane ?
14:42 Non, je ne pense pas qu'ils soient en demande d'une action transpartisane.
14:46 En tous les cas, ce n'est pas ce qu'on voit dans nos enquêtes, puisqu'on est dans un
14:49 phénomène aussi de tripartition et, vous l'avez souligné, de polarisation.
14:53 En revanche, il y a bien intrinsèquement aussi cette idée que quelque chose ne va pas dans
15:00 le système actuel.
15:01 Et les Français sont très partagés sur, finalement, est-ce que c'est mieux d'avoir
15:06 comme ça une majorité relative seulement parce que ça oblige le gouvernement à faire
15:10 des concessions ou une majorité absolue ?
15:13 Sur le papier, ils nous disent "c'est bien qu'il y ait davantage de négociations et
15:17 de concessions".
15:18 Mais ce qu'on commence à voir apparaître aussi, c'est le sentiment d'un pays qui a
15:22 des...
15:23 Bloqué ?
15:24 Non, pas bloqué, pas à l'arrêt.
15:25 Ça, ce n'est pas vrai d'abord, le pays n'est pas bloqué, il n'est pas à l'arrêt.
15:27 Et les Français n'ont pas ce sentiment.
15:29 En revanche, c'est la perspective qui manque.
15:32 C'est la capacité de souffle, d'engagement, de perspective sur un certain nombre de sujets
15:38 qui les préoccupent.
15:39 Vous avez souligné l'immigration.
15:40 Les Français ont parfaitement compris qu'il y a des désaccords profonds, gauche, droite,
15:46 bloc central et que ce sujet-là, il a été mis à l'agenda et retiré de l'agenda de
15:51 multiples reprises.
15:52 Donc là, il y a quelque chose qui coince.
15:55 Et à ce stade, Emmanuel Macron n'a pas de majorité pour le faire passer.
15:58 Tout à fait.
15:59 Et ce n'est pas le seul sujet sur lequel il y a une majorité impossible ou difficile à
16:04 trouver.
16:05 Sur la transition environnementale, autre sujet de préoccupation.
16:08 Des choses se font en réalité.
16:09 Mais la ligne n'apparaît pas clairement aux yeux des Français.
16:13 Et puis, la ligne n'apparaît pas comme partagée sur plusieurs blocs politiques qui se mettraient
16:18 d'accord et qui permettraient d'avancer.
16:20 Donc, le pays n'est pas à l'arrêt.
16:21 Mais il y a ce sentiment que quand même, on est dans une situation inédite avec des
16:26 défis et des enjeux extrêmement complexes et extrêmement graves.
16:29 C'est le concept de polycrise où plusieurs crises arrivent au même moment et que politiquement,
16:36 institutionnellement, même si là aussi, on pourrait dire que ce n'est pas forcément
16:38 exact.
16:39 Le pays n'est pas suffisamment armé pour répondre à cette série de crises.
16:44 Merci Brice Tinturier, directeur général délégué d'Ipsos.
16:48 Merci d'être venu sur France Info ce matin.
16:51 Il est 8h50.