Dans son édito du 18/09/2024, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]
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00:00Autrement dit, si je vous comprends bien, la question de l'immigration illégale nous
00:04éloigne donc de l'essentiel, mais en parlant ainsi, est-ce que vous n'en venez pas à basculer
00:10dans le rêve d'une société fermée, sous-oxygénée, fermée sur elle-même ?
00:14Je ne crois pas, je ne crois pas, c'est-à-dire, vous avez tout à fait raison lorsque vous
00:18dites l'immigration illégale, c'est une manière finalement très limitée de parler
00:22de la question de l'immigration aujourd'hui.
00:24La question, ce n'est pas l'égal ou l'illégal, c'est la question de l'immigration massive.
00:28L'immigration massive qui rentre légalement et illégalement et qui participe à une révolution
00:33démographique qui transforme toutes les sociétés occidentales, pas seulement européennes.
00:38Regardez le débat politique américain en ce moment et vous allez voir que la question
00:41migratoire, elle est au cœur de l'élection américaine.
00:44Pourquoi je prends cette peine de distinguer entre illégal et pas illégal ?
00:48Prenez les cas d'insécurité qu'on connaît souvent.
00:52Le récit est souvent le suivant, un migrant en situation d'OQTF a agressé X, Y ou Z.
00:59Mais quand on se retrouve avec un migrant en situation régulière, là on a les amis
01:03qui ont agressé X, Y ou Z, là on a le parti migrationniste qui dit « Ah ah, vous voyez,
01:07c'est moins grave, il était en situation régulière ». Je ne suis pas certain que
01:11vous avez les priorités à la bonne place les amis.
01:13Donc le vrai critère aujourd'hui n'est pas régulier ou irrégulier, le vrai critère
01:18c'est cette révolution démographique, je le redis, qui entraîne une transformation
01:21intégrale de la société sur la base d'une alliance.
01:24Vous avez peut-être vu cette déclaration étonnante, ou peut-être pas, de M. Coquerel,
01:28Éric Coquerel, qui disait à la télévision hier ou avant-hier, il dit les franges les
01:32plus éclairées du patronat, savent que la France n'a pas assez de migrants et d'immigrés
01:39pour répondre aux besoins de la force de travail.
01:41Donc on comprend bien, la gauche la plus radicale, M. Coquerel, ce n'est pas les modérés chez
01:45la France Insoumise, c'est l'alliance de la gauche radicale et de la droite patronale
01:50pour abolir les frontières, pour abolir les nations, pour faire venir toujours plus de
01:53migrants.
01:54Et là on dirait « mais ça doit enrichir quelques personnes ». Oui, ça enrichit une
01:56partie du patronat, ça enrichit on pourrait dire l'électorat potentiel des parties de
02:00gauche qui trouvent là, à défaut de gagner des nouveaux électeurs, on va les faire venir
02:04d'ailleurs.
02:05Mais quand on pense au coût de l'immigration, ce n'est pas simplement le coût du budget
02:09immigration.
02:10Il faut avoir une vision large de ce que veut dire le coût de l'immigration dans nos
02:13pays.
02:14Les dépenses de santé et d'éducation, par exemple, leur augmentation tout à fait
02:17significative.
02:18Les dépenses sociales, plus largement, ne l'oublions pas.
02:21Les dépenses d'insécurité, je pense que ça c'est la partie qu'on oublie.
02:24Quand on dit « il faut construire sans cesse des prisons nouvelles, il faut toujours plus
02:28de sécurité, toujours plus de police dans les rues, toujours plus de force de l'ordre
02:30dans les rues », si on a gardé à l'esprit que juste avant ça on parle du lien entre
02:34insécurité et immigration, et bien on se dit que ça aussi ça fait partie des effets
02:39budgétaires, économiques, financiers réels de l'immigration massive qui transforment
02:44tout.
02:45Et, par ailleurs, on y revient, je suis désolé d'y revenir, parce que c'est l'évidence
02:49du siècle qui est représentée comme la transgression du siècle.
02:51Vous ne pouvez pas changer la population d'un pays sans en changer le peuple, sans en changer
02:57la culture, sans en changer le modèle social et économique.
03:00Tous les peuples n'ont pas le même développement sur Terre pour différentes raisons, structure
03:05religieuse, histoire, passé, il y a plein de raisons, mais le fait est que si vous changez
03:08la population d'un pays, vous changez à terme son peuple, sa culture et son modèle
03:12socio-économique.
03:13Et de ce point de vue, ce qui est intéressant, traversons l'Atlantique un instant, allons
03:17en Californie.
03:18La Californie, si on s'intéresse un peu à l'histoire de cet État, c'était jusqu'aux
03:23années 80 environ, 90 même, c'était l'État qui incarnait le rêve américain.
03:28C'était l'État des classes moyennes supérieures, c'était l'État où on s'installait là,
03:33on avait premièrement une météo idéale, mais plus encore, c'était la possibilité
03:36du rêve américain.
03:37Travaille fort et tu vas réussir à obtenir ce que tu souhaites.
03:40Ce n'était pas l'État, aujourd'hui ça a changé, ce n'était pas l'État du big
03:44tech tout puissant, des oligarques de la technologie, et ce n'était pas non plus
03:47l'État de l'immigration illégale.
03:49La Californie a connu un changement démographique majeur en l'espace de 30 ans, et que s'est-il
03:55passé?
03:56Que s'est-il passé?
03:57La Californie a complètement changé et d'identité, mais aussi de culture, mais aussi de dynamisme
04:02économique.
04:03C'est un État qu'aujourd'hui, oui, il y a les oligarques de la tech qui sont là,
04:06et qui ne sont pas à plaindre, mais sinon c'est un État que l'on fuit.
04:10Beaucoup de Californiens fuient vers les États limitrophes en disant « je suis désolé,
04:14on ne peut plus vivre dans ce pays ». C'est-à-dire, insécurité, qualité des services publics,
04:18coût de la propriété, tout ça a augmenté, tout ça n'a aucun sens, donc on part vers
04:22le Texas, on part vers la Californie, mais on arrive au Texas et en Californie en conservant
04:26les comportements électoraux qu'on avait en Californie, donc globalement ça va voter
04:29à gauche ailleurs que chez soi.
04:30Résultat, vous avez les mêmes conséquences de leurs idées politiques, disons ça ainsi.
04:36Springfield, on en a un mot, Springfield, dont on parle beaucoup ces jours-ci aux États-Unis,
04:40au-delà de l'histoire loufoque des chats ou des pachas, dont on en a parlé pendant
04:44le débat entre Trump et Harris.
04:47Vous disiez que les Haïtiens mangent des chats?
04:49Non, je laisse ça de côté tellement c'est lunaire.
04:52Mais ce qui n'est pas lunaire, c'est qu'il y a eu vraiment plusieurs dizaines de milliers,
04:5720 000 Haïtiens qui sont arrivés là-bas et ça a changé la dynamique de la ville.
05:00Pas parce que ce sont des personnes méchantes, parce qu'il y a eu un choc culturel, parce
05:04qu'il y a eu un choc de civilisation quelquefois, tout le moins de culture, un choc des mœurs
05:07et tout ça transforme la ville.
05:09Et on y revient toujours à la question centrale, c'est la peur des peuples européens et occidentaux
05:14de devenir minoritaires chez soi.
05:16C'est le jour où on va comprendre que c'est une peur légitime, on va comprendre beaucoup
05:19de choses.
05:20Je résume en un mot, comment on fait disparaître cette peur aujourd'hui?
05:23On nous dit « Non, on ne peut pas devenir minoritaire chez soi, prenez la France, il
05:27va toujours y avoir un territoire qui va se nommer la France.
05:29Donc pourquoi la France disparaîtrait-elle?
05:31La France est pure géographie.
05:32» Et ensuite, il y aura toujours des gens qui vont dire « La nationalité française
05:36est strictement administrative, elle est strictement juridique, donc les Français ne seront jamais
05:40minoritaires chez eux, parce qu'il y aura toujours des gens, il suffit d'arriver ici,
05:44d'avoir les papiers, de devenir Français comme les autres.
05:46» Juridiquement, c'est vrai.
05:47À l'échelle de l'histoire, le peuple historique français devient minoritaire en ses propres
05:51terres, comme d'autres peuples en Europe, et tout ça participe à la grande inquiétude
05:56des temps présents.
05:57Alors, vous parlez souvent de persécution contre ce que vous appelez les nouveaux dissidents
06:01d'Occident.
06:02Est-ce que la formule n'est pas un peu abusive, on est quand même dans un pays libre?
06:06Ah bien voilà, il faut en parler pour un instant.
06:08Vous êtes un pays libre, oui, et une civilisation libre de moins en moins.
06:11Parce que ce que je viens de dire, de rappeler des petites évidences, dans quelques années,
06:15je serai digne de poursuite pour avoir dit cela.
06:17On aurait dit « propos haineux », « désinformation ». 2 plus 2 égale 4 égale potentiellement
06:23propos haineux aujourd'hui.
06:24Je vais citer un entretien de Mme Clinton hier soir, je traverse l'Atlantique un instant,
06:28vous allez voir pourquoi.
06:29Mme Clinton, on est 48 heures après la tentative d'assassinat de Donald Trump, et deux déclarations
06:33notamment lors de son passage, c'est MSNBC, une chaîne info américaine, c'est très
06:37intéressant.
06:38Elle dit « Il est temps que les médias définissent un narratif pour dire clairement que Donald
06:44Trump est objectivement dangereux pour la démocratie et pour le monde.
06:48Donc, Mme Clinton veut fixer politiquement le narratif médiatique pour qu'il traite
06:51correctement, de son point de vue, son adversaire politique.
06:55Donc, les médias devraient faire le travail des politiques pour faire la guerre aux uns
06:57et aux autres.
06:58Et ensuite, elle n'a pas fermé la porte à la possibilité d'envoyer en prison des
07:02gens qui relaient la désinformation dont on parle aujourd'hui à la désinformation
07:07en prison.
07:08Le problème, c'est que chaque fois qu'on parle aujourd'hui des effets de l'immigration
07:11massive sur nos sociétés, on cherche à présenter cela comme des propos haineux
07:14et comme de la désinformation.
07:16On cherche à présenter cela comme des propos qu'on n'a pas le droit de mentionner sans
07:19être justement, sans devenir un dissident, sans devenir un infréquentable d'extrême
07:22droite à maudire.
07:23Et ça nous rappelle ce dont on parlait hier en Italie, même si vous gagnez les élections,
07:28même si vous gagnez les élections clairement avec un programme, si vous cherchez à appliquer
07:31votre programme, une fois qu'on aura tout fait pour vous entraver, on cherchera à vous
07:34mettre en prison.
07:35Tel est le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui quand on cherche à contenir l'immigration.
07:38On serait bientôt en prison ?
07:41J'espère que non, mais je pense que nous avons tous un jour, on va tous avoir un jour
07:45cette inquiétude en disant « est-ce que j'ai été trop loin ? Serais-je poursuivi
07:48demain ? »