L'édito de Mathieu Bock-Côté : «Michel Barnier pour une "plus grande justice fiscale" ?»
Dans son édito du 17/09/2024, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]
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00:00Alors, je l'ai vu dans Le Parisien, ça m'intéressait, Michel Barnier dit « Il se peut, je crois
00:06que je serais obligé d'augmenter les impôts et je m'en désole, je m'en attriste. »
00:11Alors, soudainement, je me suis dit par ailleurs, j'ai enfin trouvé un critère pour distinguer
00:15la gauche et la droite. La gauche est celle qui augmente les impôts dans l'enthousiasme
00:20et la droite est celle qui augmente les impôts mais sans attriste. Mais dans les deux cas,
00:24n'en doutez pas, vous serez braqués, chers amis.
00:26On est déjà les plus braqués du monde.
00:28Moi, on peut l'être toujours davantage. Il vous reste un petit quelque chose qu'on
00:30peut prendre, Christine, je n'en doute pas, un petit quelque chose que vous avez gagné
00:33par vous-même, par votre travail, par votre effort, mais ça ne vous appartient pas, ça
00:38appartient au collectif. Et ensuite, on vous laissera quelques miettes, peut-être, si
00:42vous êtes gentille, mais pas tant que ça. Parce que c'est la logique et c'est pour
00:45ça qu'on doit traiter cette question-là, non pas simplement en matière technique.
00:49Moi, ça me fascine dans le débat sur les impôts, il a évolué considérablement en
00:53un siècle. Au début, c'était une question de philosophie politique et de politique
00:59au sens large. Lorsqu'on crée un impôt nouveau, la réaction première pendant les
01:03premières décennies du XXe siècle, c'est un instant, de quel droit l'État peut-il
01:08ainsi élargir le domaine où il se permet d'entrer dans? C'est le fruit de l'œuvre
01:13du travail des uns et des autres. De quel droit l'État peut-il confisquer ainsi la
01:18richesse produite par les Français, par les Allemands, par les Italiens, faites la liste.
01:22Donc, des gens qui travaillent, qui produisent une richesse. Et là, on a une forme d'inversion.
01:26Et ça, c'est le propre, en fait, de l'État-providence dans la deuxième moitié du XXe siècle,
01:31une forme d'inversion. Et cette inversion nous dit, globalement, « Désormais, l'argent
01:36que vous avez gagné ne vous appartient pas d'abord et avant tout. L'argent appartient
01:40à l'État. L'argent appartient à la collectivité. Et ensuite, donc, l'État va se servir, l'État
01:46va piger, l'État va prendre tout ce qu'il désire, et ensuite, il vous laissera une
01:51petite part pour vous amuser et vous occuper des vôtres. Mais de toute façon, ne vous
01:55occupez pas trop des vôtres parce que l'État va s'en charger par l'éducation, par la
01:59crèche, par le système de santé. Donc, toujours, il est en son domaine et toujours, il vous
02:03en reste de moins en moins. Voilà pourquoi, ensuite, on vous explique que si vous êtes
02:07contre une hausse d'impôts, on vous accusera très certainement d'égoïsme. Et ça, de
02:12gauche comme de droite, taxeurs fanatiques.
02:14On apprend à l'instant, dans une interview aux Parisiens, que le gouverneur de la Banque
02:18de France suggère un effort de grandes entreprises et gros contribuables sans toucher les classes
02:23moyennes ni les PME. Est-ce que la droite libérale est finalement socialiste sans le
02:28savoir ?
02:29Bien évidemment. Tout le monde est socialiste sans le savoir jusqu'à s'en prendre conscience.
02:32Sauf vous.
02:33D'accord. Et deux ou trois, j'espère. Non, mais évidemment. Alors, moi, ça me fascine
02:36quand on dit « Certains ne font pas déjà assez d'efforts ». Mais en fait, cette espèce
02:40de ruse, cette arnaque, on dit « Faites-vous en pas, les classes moyennes ne seront pas
02:44touchées et seulement les très très riches, donc les très très vilains qui vont devoir
02:47payer ». Ne vous inquiétez pas, les très très riches, les très très vilains trouvent
02:51toujours le moyen de se sauver d'une manière ou de l'autre.
02:54Ceux qui doivent casquer, ceux qui doivent payer, ceux qui seront mis à contribution,
02:58ce sont les classes moyennes « supérieures ». Ceux qui, par leur travail, réussissent
03:02vraiment à s'enrichir sans pour autant devenir chrésus, ceux-là, on peut toujours
03:06leur en prendre davantage. Et de ce point de vue, il y a une théorie en sciences politiques
03:11qui s'appelle la théorie des choix publics. Je l'évoque en une seconde. C'est une théorie
03:14qui nous dit, l'État, on nous présente toujours ça comme l'agent de l'intérêt
03:18général. Un instant, l'État a ses propres intérêts, c'est presque un intérêt privé
03:23comme les autres et il est dans sa logique de toujours s'étendre, de toujours étendre
03:27ses responsabilités, de toujours étendre l'assiette fiscale qui est la sienne et ensuite
03:31il nous demande de lui dire merci parce qu'il se nomme intérêt général. Non merci.
03:34Et dans tout ça, tout ce qui est public, on l'a vu tout à l'heure, il n'y a pas d'intérieur.
03:39Et comme je viens de dire, c'est ma phrase préférée, c'est une blague, je le précise,
03:42qui paie ses impôts vole sa famille.