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Au lendemain de l'arrivée de Michel Barnier à Matignon, Stéphane Zumsteeg, directeur du département politique et opinion à l’Institut de sondage Ipsos, analyse cette longue séquence politique comme un "échec" pour Emmanuel Macron.

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00:006h22 et votre invité ce matin, Marion, au lendemain de la nomination de Michel Barnier à Matignon est directeur du département politique et opinion à l'institut de sondage Ipsos.
00:11Bonjour Stéphane Zumsteg. Bonjour.
00:13On a déjà entendu de nombreuses réactions politiques mais quelle peut être la réaction de l'opinion après la nomination de Michel Barnier à Matignon hier ?
00:20Ce que l'opinion attend, et elle l'a manifesté lors des dernières élections législatives, c'est un changement, non pas une inflexion mais un changement radical de la politique menée par le gouvernement quel qu'il soit.
00:30Alors le problème c'est que les français ne sont pas d'accord, les attentes des gens de gauche ne sont pas les mêmes que celles des gens de droite ou d'extrême droite.
00:36Là, on assiste quand même à un double paradoxe.
00:39D'une part avec un premier ministre qui est issu des rangs d'une force qui est en perte de vitesse, la droite républicaine, sans lui faire injure, voit son influence baisser élection après élection.
00:506,5% aux dernières élections.
00:53Et moins de 5% à l'élection présidentielle.
00:55Et ça, ça pose quand même quelque part problème parce que cette majorité relative, elle va être très très étriquée, ça va être un gouvernement très minoritaire avec en plus un poids particulier, c'est que
01:04pourra-t-on véritablement parler de cohabitation ? Ce qu'attendent les français.
01:07Là encore, ça a été le message envoyé lors des élections législatives.
01:10Compte tenu du fait que la principale force qui va soutenir ce premier ministre, et bien c'est le bloc présidentiel.
01:14166 députés, c'est évidemment très peu, c'est beaucoup moins que lors des élections il y a deux ans.
01:20La défaite a été terrible pour le camp présidentiel, mais ça reste la principale force qui soutient.
01:24Comment peut-on encore parler de cohabitation ?
01:27Deuxième paradoxe, Emmanuel Macron l'a dit dès le début, il voulait tenir le RN à l'écart de ses négociations de ce jeu.
01:34Il n'a eu de cesse que d'essayer de l'exclure, de l'ostraciser durant ces 50 jours.
01:38Et on se retrouve dans cette situation où finalement il a fallu attendre le feu vert de Marine Le Pen pour qu'un nom sorte enfin du chapeau.
01:45Quel échec pour Emmanuel Macron.
01:47C'est ce que j'allais dire, est-ce que c'est un échec pour le président de la République de devoir consulter celle qu'il a toujours affichée comme sa première adversaire ?
01:54Ça a été l'un des leitmotivs du président de la République depuis sa première élection en 2017.
01:58C'est je suis le principal, si ce n'est le seul rempart face au nationalisme, face au populisme et donc face à Marine Le Pen et au RN.
02:04Et aujourd'hui on se retrouve avec un gouvernement très minoritaire qui va rester pendant quelques jours, quelques semaines, quelques mois,
02:11personne ne le sait évidemment, mais à la merci du bon vouloir de Marine Le Pen et du RN,
02:16qui a fait un geste dans sa stratégie d'institutionnalisation, de respectabilité, de dire nous ne censurons pas a priori.
02:23C'est bien pour ça que les hypothèses de Xavier Bertrand et Bernard Cazeneuve ont échoué.
02:27Mais ce gouvernement ne tient plus maintenant qu'au bon vouloir de Marine Le Pen.
02:31Alors hier le chef de file de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, parlait de vol de l'élection.
02:36Est-ce que ce n'est pas la sensation que risquent d'avoir certains citoyens qui avaient tout de même placé en tête le NFP,
02:42même s'ils ne disposent pas d'une majorité à l'Assemblée ?
02:45Alors là on est vraiment dans les éléments de langage, parce que c'est vrai que ça fait des semaines que les dirigeants de gauche disent que cette élection leur est volée,
02:51qu'ils avaient gagné les élections. Non, la gauche n'a pas gagné les élections, personne n'a gagné ces élections législatives.
02:56Mais ils étaient en tête, mais ils n'avaient pas gagné.
02:57Ils étaient en tête, mais de moins de 30 sièges par rapport au bloc présidentiel.
03:00Donc en tête, oui. L'usage politique veut que l'on se tourne vers la principale force,
03:05mais il n'y a pas non plus d'obligation juridique ou concessionnelle à choisir un premier ministre issu des rangs du bloc le plus fort.
03:12De toute façon, pour Emmanuel Macron, la proposition de nommer Lucie Castex était totalement inacceptable pour lui d'un point de vue politique,
03:20et pas seulement symbolique. Il était essentiel pour le président de la République pour assurer sa survie politique,
03:24qui n'est pas assurée jusqu'à 2027 pour l'instant évidemment, mais que ce soit lui qui propose un nom.
03:29Se faire imposer un nom, c'était quelque chose d'inacceptable pour lui, c'était un aveu de faiblesse par lequel il ne voulait pas passer.
03:34Lucie Castex était la candidate que voulait proposer, que voulait imposer le Nouveau Front Populaire.
03:39Hier, Michel Barnier, donc le nouveau premier ministre, a affiché ses priorités.
03:44École, accès aux services publics, sécurité au quotidien, maîtrise de l'immigration, travail et pouvoir d'achat.
03:49Est-ce que ça correspond à des demandes fortes ? Est-ce que ça correspond aux priorités des Français aujourd'hui ?
03:54Oui, la priorité des priorités d'une partie des Français, c'est toujours le problème avec les priorités.
03:58Il y a une hiérarchie, mais elle est totalement différente selon le profil politique des gens que l'on interroge.
04:02Évidemment qu'à droite et à l'extrême droite, la priorité des priorités, c'est l'immigration, c'est également la sécurité.
04:07Mais n'oublions pas les attentes de la gauche, même si la gauche est écartée, ou a priori devrait être écartée de ce gouvernement.
04:12Il faut encore voir s'il y aura des personnalités d'ouverture ou pas.
04:15Mais ce qu'on attend à gauche, c'est l'abrogation de la réforme des retraites. Autres lignes rouges inacceptables.
04:19Et ça, ça n'était pas dans les priorités.
04:20Et oui, et autres lignes rouges d'Emmanuel Macron, il n'était pas envisageable, pour lui, ne serait-ce qu'intellectuellement ou politiquement, de nommer quelqu'un de gauche.
04:27Donc les attentes des Français, elles sont multiples. J'insiste sur un point.
04:30Il y a eu des élections législatives, il y a eu avant le désaveu majeur des élections européennes pour la Macronie.
04:35Les Français attendent un changement profond de politique.
04:38Je ne suis pas persuadé que dans un système qui n'est pas véritablement une cohabitation, qui n'est même pas du tout une cohabitation...
04:42Une coexistence, dit le Président de la République. Enfin, son entourage, en tout cas.
04:45Oui, une coexistence avec le camp présidentiel qui pèse quatre fois plus que le camp du Premier ministre.
04:50Ça, on ne s'est jamais vu. Une cohabitation, c'est quoi ?
04:52C'est 1986, Jacques Chirac, le principal opposant qui devient Premier ministre du Président de la République, Mitterrand.
04:57Même chose en 1997 avec Lionel Jospin et Jacques Chirac.
05:00Là, on est dans une situation totalement différente.
05:02Non, Michel Barnier n'est pas le principal opposant du Président de la République.
05:06Très rapidement, Stéphane Zumsteg, on est quand même à sept semaines après l'élection législative.
05:10Est-ce que cette longue attente, cette crise, elle peut laisser des traces ?
05:13Elle peut laisser des traces ? Alors, dans la structure de l'image du Président de la République...
05:18Parce que le péché original, c'est quand même, de l'avis des Français, c'est cette dissolution que personne n'a compris.
05:22Il n'y a pas que la classe politique qui a été surprise.
05:24Il n'y a pas que la classe politique qui n'a pas compris.
05:26Personne n'a compris, personne n'a trouvé ça justifié ou légitime.
05:29Ensuite, il n'y a pas que le Président qui va sortir, à mon avis, abîmé de cette séquence.
05:33Parce que, durant ces plus de 50 jours, on a bien vu que les partis politiques, quels qu'ils soient,
05:38pensaient plus à 2027 qu'à la formation d'un gouvernement dans les jours ou dans les heures qui suivaient les différentes réunions.
05:43Et ça, ça a laissé des traces.
05:45Et ça contribuera probablement à creuser encore davantage le fossé entre les Français et leur personnel politique.
05:49Et à la défiance que vous aviez montrée dans une récente enquête que vous aviez publiée.
05:54Stéphane Zumsteg, directeur du département politique et opinion à l'institut de sondage Ipsos.
05:58Merci de nous avoir répondu sur Inter.

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