2011. Le Voyage Extraordinaire

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00:00:00Un obus dans l'œil de la Lune. Quelle idée saugrenue.
00:00:17Cette vision fantasmagorique de la conquête de l'espace est pourtant devenue une icône mondialement connue,
00:00:24qui continue de fasciner plus de cent ans après avoir été imaginée.
00:00:29Mais qui connaît vraiment le film dont elle est extraite ?
00:00:32Et qui se souvient de son génial créateur ?
00:00:36Je vais vous faire découvrir la face cachée de ce voyage dans la Lune pas comme les autres,
00:00:41le premier succès mondial de l'histoire du cinéma.
00:00:58Nous sommes dans les premières années du siècle, le vingtième.
00:01:14L'automobile, la radio ou le téléphone n'en sont qu'à leur balbutiement, réservés à quelques privilégiés fortunés.
00:01:23Les avions ne volent pas encore.
00:01:26Les horloges municipales fonctionnent à l'air comprimé.
00:01:29Et les rues, où l'on ne sort jamais sans son chapeau, empestent toujours le crotin de cheval.
00:01:35Le cinéma vient de naître.
00:01:55Il n'est qu'une curiosité que l'on découvre dans les fêtes foraines, au même titre que la femme à barbe ou les rayons X.
00:02:06Les programmes, composés de films durant moins d'une minute, alternent scènes de la vie quotidienne,
00:02:13défilés militaires, événements mondains ou scènes comiques au scénario débridé.
00:02:19On en a pour ses vingt sous.
00:02:35Présent à la première séance des Frères Lumière, le 28 décembre 1895,
00:02:50un certain Georges Méliès n'a pas hésité longtemps à se lancer dans l'aventure du cinématographe.
00:02:56Ce sera le héros de notre histoire.
00:03:00Il est fils d'un riche fabricant de chaussures, de chaussures de qualité, de chaussures de luxe, bien entendu.
00:03:09Mais à la triste réalité des affaires, Méliès préfère la fantaisie des spectacles des scènes parisiennes,
00:03:16et surtout ceux de magie à laquelle il s'est initié lors d'un voyage en Angleterre.
00:03:22En 1888, avec sa part de l'entreprise familiale, il s'est rendu acquéreur du Théâtre Robert-Roudin,
00:03:29situé huit boulevards des Italiens, à Paris.
00:03:34C'est dans ce temple de l'illusion, créé par le père de la magie moderne,
00:03:38que Méliès s'est fait connaître comme un homme à l'imagination sans limite.
00:03:53En découvrant le cinématographe, Méliès comprend rapidement ce que cette nouvelle attraction de magie lumineuse
00:03:59pourrait apporter à son spectacle.
00:04:07Si les premières vues qu'il tourne et présente chaque soir à partir d'avril 1896 sont dans la lignée des films Lumière,
00:04:15il s'oriente rapidement vers des sujets plus originaux, inspirés de ceux qui ont fait la renommée de son théâtre,
00:04:22comme le fameux numéro d'escamotage d'une dame.
00:04:46Sur scène, l'escamotage nécessite quelques accessoires spéciaux pour dissimuler le moment où l'assise de la chaise bascule
00:04:54et la jeune femme disparaît à travers une trappe cachée sous un journal.
00:04:59Au cinéma, pour réaliser cette substitution, Méliès va utiliser un truc un peu plus compliqué,
00:05:04c'est-à-dire une trappe à l'écran.
00:05:10C'est tout simplement un blocage d'appareil qui s'est produit place de l'opéra pendant que je prenais les voitures qui passaient devant moi.
00:05:16Tout à coup l'appareil s'arrête, le temps qu'on le débloque, naturellement les voitures qui suivaient avaient changé de place,
00:05:25et j'ai eu l'assurtance qu'il n'y avait plus d'appareil.
00:05:31Tout à coup l'appareil s'arrête, le temps qu'on le débloque, naturellement les voitures qui suivaient avaient changé de place,
00:05:38et j'ai eu la surprise, après collage, de voir, tout d'un coup, apparaître à la place d'un ami du Spadlène Bastille, un corbillard, avec la famille qui suivait derrière.
00:05:47Le premier trucage cinématographique est né, et Méliès comprend tout de suite comment il va pouvoir s'en servir.
00:06:18C'est le premier qui a vu au cinéma du spectacle. Il a fait avec le cinéma du spectacle.
00:06:24Homme de théâtre, il a adopté le cinéma au théâtre et aux exigences, je dirais, du spectacle théâtral.
00:06:32Et il voulait absolument amuser les gens, amuser avec des disparitions, avec des apparitions, avec des gens qui prenaient leur tête et les mettaient sur une commande, etc.
00:06:40Donc, ça n'était pas pour raconter des choses sérieuses.
00:07:00Les films de Méliès, c'est quand même l'invention du trucage, parce qu'aujourd'hui, bon, ça paraît facile, simple et tout, mais c'était les premiers à avoir fait ça.
00:07:09Ils inventaient. En art ou en technique, on ne fait qu'utiliser tout ce qui était fait avant.
00:07:16En art, on ne fait que copier, et puis on transforme un petit peu à sa manière, puis un autre va prendre ce qu'on a fait, le mélanger avec autre chose.
00:07:22On n'invente jamais rien, à part peut-être des grands génies comme Picasso, qui vont un peu plus loin ou un peu plus vite.
00:07:27C'était un magicien, donc il connaissait la prestigie d'éditation, il connaissait les tours de magie, et il s'en servait à l'image.
00:07:33Mais enfin, quand même, ils étaient les premiers à inventer ça.
00:07:35Donc ça, c'est un truc fabuleux, mais ça doit être aussi génial d'être devant un terrain vierge.
00:07:38D'un coup, un truc nouveau, ça s'appelle le cinéma, on a une caméra, qu'est-ce qu'on va pouvoir faire ?
00:07:42Personne ne l'a fait avant, ça doit être un truc incroyable.
00:07:44Aujourd'hui, c'est beaucoup plus difficile de se retrouver devant des terrains nouveaux.
00:08:05Ce qui est intéressant dans ces films, c'est qu'il n'y a pas de prétexte.
00:08:08Il n'y a pas de prétexte, il n'y a pas de prétexte.
00:08:10Il n'y a pas de prétexte.
00:08:11Il n'y a pas de prétexte.
00:08:12Il n'y a pas de prétexte.
00:08:13Il n'y a pas de prétexte.
00:08:14Il n'y a pas de prétexte.
00:08:15Il n'y a pas de prétexte.
00:08:16Il n'y a pas de prétexte.
00:08:17Il n'y a pas de prétexte.
00:08:18Il n'y a pas de prétexte.
00:08:19Il n'y a pas de prétexte.
00:08:20Il n'y a pas de prétexte.
00:08:21Il n'y a pas de prétexte.
00:08:22Il n'y a pas de prétexte.
00:08:24Ce qui est intéressant dans ces films, c'est qu'évidemment, non seulement il y a l'aspect
00:08:30artistique, mais il y a l'aspect recherche scientifique presque, technique, les multiplications
00:08:35des personnages.
00:08:36A l'époque, ça devait être un vrai casse-tête.
00:08:37On retrouve ça aujourd'hui chez des gens comme James Cameron, qui est un passionné
00:08:42de technique, qui innove avec la stéroscopie.
00:08:46On a souvent ce côté passionné de technique.
00:08:50C'est incroyable.
00:08:51Ils sont filmés du dessus et mis en surimpression.
00:09:17Je crois que la particularité de ces métiers, surtout dans la veine de Méliès, c'est qu'il
00:09:22n'y a pas franchement de transition entre le travail de l'enfance, c'est-à-dire l'amusement
00:09:27et la créativité, et le travail de l'âge adulte, où normalement il y a une cassure,
00:09:33où on devient un adulte et puis on oublie un petit peu son propos.
00:09:39Le propos qu'on avait en étant enfant, c'est d'imaginer le monde et de le recréer à
00:09:44sa manière.
00:09:45Si on comprend un petit peu ça, on peut s'amuser à en jouer comme Méliès le faisait.
00:09:50C'est-à-dire qu'il avait ça comme un instrument qui allait l'aider à accomplir des trucages
00:09:54encore plus incroyables.
00:10:00Si les frères Lumière ont inventé le cinématographe, Méliès est bien le père du spectacle cinématographique.
00:10:07C'est d'ailleurs Louis Lumière qui le dit.
00:10:10Entre ses mains, la caméra ne cherche pas à enregistrer le réel.
00:10:14Elle donne naissance à tout un univers où l'imaginaire et le merveilleux règnent en maître.
00:10:21En quelques années, Méliès se fait connaître dans le monde entier pour ses scènes à trucs
00:10:26ainsi que pour ses féeries, films plus ambitieux inspirés des contes ou des spectacles du Châtelet.
00:11:11Ils sont joyeux tous ces films.
00:11:13Et on peut même analyser le public de cette époque, voir avec quoi ils s'amusaient les
00:11:18gens en voyant les films de Méliès.
00:11:20C'est-à-dire psychologiquement et socialement, on peut très bien faire une explication du
00:11:24public par rapport aux gags, par rapport aux histoires qu'ils aimaient, parce qu'ils
00:11:28aimaient ces histoires-là.
00:11:29C'est-à-dire qu'ils aimaient les films de Méliès, c'est-à-dire psychologiquement
00:11:33et socialement, on peut très bien faire une explication du public par rapport aux gags,
00:11:37par rapport aux histoires qu'ils aimaient, parce qu'ils aimaient ces histoires.
00:11:40Et c'était un succès énorme, Méliès.
00:11:43Méliès était un peu tout à la fois.
00:11:45Au début, il était producteur, il était décorateur, il était cinéaste et tout.
00:11:48Mais quelque part au début, il n'y a sûrement pas tellement de choix.
00:11:51C'est plus tard que les métiers se sont spécialisés et divisés.
00:11:54Et je pense que c'est ça qui devait lui plaire et l'amuser, c'était de tout faire.
00:12:07Dans le jardin de sa propriété, à Montreuil, Méliès a construit le premier studio de
00:12:36une immense verrière pour profiter de la lumière du jour.
00:12:41Le premier studio était simplement une grande salle, longue, de 16 mètres sur 6 de large,
00:12:45vitrée de tous les côtés en verre dépoli.
00:12:47Et sans aucune préparation, il n'y avait à ce moment-là aucun truc de scène, n'est-ce pas,
00:12:51ni comme j'ai fait plus tard.
00:12:52Plus tard, j'ai monté toute une machinerie théâtrale avec dessous et dessus,
00:12:55de façon à pouvoir faire de la grande féerie, comme je suis arrivé à faire des pièces importantes.
00:12:59Dès 7 heures du matin, il imagine les scénarios, met en place les séquences
00:13:05et invente de nouveaux effets d'optique, dont il règle la mise au point avec ses assistants.
00:13:10Le matin est dédié à la fabrication des décors, que Méliès n'hésite pas à peindre lui-même.
00:13:19Ils sont peints en noir et blanc, sur des feuilles de bois ou de simples toiles,
00:13:24pour mieux apprécier le rendu final sur l'image.
00:13:27Car les pellicules, elles aussi, sont encore très primitives.
00:13:35Et comme on ne peut tourner qu'entre 11 heures et 15 heures,
00:13:38les seuls moments où le soleil éclaire le plateau,
00:13:41l'équipe doit minutieusement préparer costumes et accessoires,
00:13:44pour ne pas perdre de précieuses minutes de tournage.
00:13:48En mai 1902, une activité fébrile règne dans le studio.
00:13:58Méliès s'apprête à tourner son œuvre la plus ambitieuse.
00:14:02Un film de 15 minutes, qui doit entraîner le spectateur dans la Lune.
00:14:08La Lune, si lointaine, semble pourtant plus accessible depuis quelques temps.
00:14:21En 1865, Jules Verne a publié « De la Terre à la Lune »,
00:14:27suivi de « Autour de la Lune »,
00:14:29deux livres de la série des voyages extraordinaires,
00:14:32remplis de gravures qui firent rêver des générations de lecteurs.
00:14:45Quelques années plus tard, avec Jacques Offenbach,
00:14:48c'est en musique que s'effectue « Le voyage dans la Lune »,
00:14:51un opéra fééri en quatre actes et 23 tableaux.
00:14:58Enfin, le dernier roman de H.G. Wells, « Les premiers hommes dans la Lune »,
00:15:02vient de paraître.
00:15:04Des astronautes y posent pour la première fois le pied sur la planète mystérieuse
00:15:09et font connaissance avec ses habitants, les fameux sélénites.
00:15:17La Lune, Méliès en avait déjà rêvé dans l'un de ses premiers films,
00:15:22« La Lune à un mètre »,
00:15:23une petite scène au trucage rudimentaire tournée dans son jardin.
00:15:31Le voyage dans la Lune que prépare cette fois Méliès est beaucoup plus ambitieux.
00:15:36Une pièce à grands spectacles, en 30 tableaux,
00:15:39qui va demander trois mois de travail, du jamais vu.
00:15:45L'aventure commence dans les locaux de l'Institut d'astronomie incohérente,
00:15:50où le professeur Barbanfouilly, alias Georges Méliès,
00:15:53va présenter son projet et essayer de convaincre les membres
00:15:56de l'accompagner dans son voyage vers la Lune.
00:16:01Après une petite visite dans les ateliers,
00:16:04où forgerons, mécaniciens et charpentiers s'activent à terminer l'obus
00:16:08qui doit emporter les intrépides voyageurs dans l'espace,
00:16:12nous nous retrouvons sur le pas de tir,
00:16:14où l'obus est chargé dans un canon gigantesque.
00:16:19L'heure de la mise à feu est proche.
00:16:45L'aventure commence dans les locaux de l'Institut d'astronomie incohérente,
00:16:49où le professeur Barbanfouilly, alias Georges Méliès,
00:16:52va présenter son projet et essayer de convaincre les membres
00:16:55de l'accompagner dans son voyage vers la Lune.
00:17:15Il utilise ces outils pour communiquer
00:17:19quelque chose d'impossible.
00:17:22Et ce que Méliès a fait, pour la première fois,
00:17:25dans l'un des médias les plus puissants du monde,
00:17:28les images en mouvement,
00:17:30c'est qu'il nous a montré ce que c'était comme,
00:17:32qu'il a imaginé ce que c'était comme,
00:17:34qu'il a imaginé l'aventure qu'il pouvait faire là-bas,
00:17:36et les vistas étonnantes qu'ils doivent voir.
00:17:45Retracer la conquête de l'espace
00:17:47sans rendre hommage au voyage dans la Lune
00:17:49est aujourd'hui inconcevable,
00:17:51même pour les grands noms de Hollywood.
00:17:53Preuve s'il en est que le professeur Barbanfouilly
00:17:56est bien le précurseur de Neil Armstrong et Buzz Aldrin,
00:17:59les premiers hommes à avoir marché sur la Lune.
00:18:03Certaines mauvaises langues,
00:18:05comme l'anglais, le français,
00:18:07le français, l'anglais, le français,
00:18:09le français, le français, le français,
00:18:12certaines mauvaises langues ont d'ailleurs prétendu
00:18:15que les astronautes américains n'y étaient jamais allés
00:18:18et que tout avait été filmé en studio par Stanley Kubrick.
00:18:22Un peu comme chez Méliès,
00:18:24mais avec un peu plus de moyens.
00:18:43En 1902, chez Méliès,
00:18:45l'éclairage électrique n'étant pas disponible,
00:18:48on ne tourne que les jours de beau temps.
00:18:52Il n'y a pas de montage,
00:18:54il faut donc arrêter la caméra à chaque fois
00:18:57pour changer de décor.
00:18:59Et pour savoir si la prise est réussie,
00:19:01pas de vidéo comme aujourd'hui.
00:19:03Il faut attendre que la pellicule soit développée,
00:19:06ce qui peut prendre un certain temps.
00:19:12Son voyage vers le Moon
00:19:14a été le premier drapeau du programme Apollo.
00:19:17Comment l'a-t-il fait ?
00:19:19Il a construit un gros canon, nous avons construit un gros rocket.
00:19:22Ce sont les seules différences.
00:19:24Il est allé vers les aliens de l'espace.
00:19:26Même Méliès n'est pas allé vers les aliens de l'espace.
00:19:29Mais ils sont revenus de la même façon.
00:19:31Ils ont été parachutés dans l'océan
00:19:33et sont retournés par la navette.
00:19:35Les corrélations sont assez étonnantes.
00:19:43Méliès décide de faire un spectacle
00:19:46qui pourrait correspondre aujourd'hui à Avatar, disons,
00:19:50pour l'époque.
00:19:52Il faut se placer toujours à l'époque.
00:19:54Parce qu'il fait le film comment ?
00:19:56Six ans, sept ans après avoir vu le premier film
00:19:59de Frère Lumière, où il en est absolument bouleversé.
00:20:02Il n'arrive pas qu'on puisse faire ça.
00:20:04Et six ans après,
00:20:06il réussit à faire un spectacle
00:20:08considérable.
00:20:10Ça, évidemment, ça devient
00:20:12le best-seller le plus énorme du cinéma à l'époque.
00:20:31Octobre 1902.
00:20:33Passé le premier moment d'incrédulité,
00:20:35le public répond en masse
00:20:37à l'appel du bonimenteur forain
00:20:39qui l'incite à venir découvrir ce voyage inouï.
00:20:42Et tandis que stupeur et émerveillement
00:20:44illuminent le regard des spectateurs,
00:20:47le cinéma gagne ses premières lettres de noblesse.
00:21:05« Le voyage dans la Lune »
00:21:27Mais le voyage dans la Lune
00:21:29reste cependant un succès bien amer.
00:21:33S'il est vendu dans le monde entier,
00:21:35Méliès n'en profitera que partiellement.
00:21:38Car dès la sortie du film,
00:21:40une bobine est détournée vers un laboratoire secret
00:21:43où seront fabriqués des copies et des négatifs pirates.
00:21:46Alors que Méliès annonce la sortie de son film,
00:21:49il est presque déjà sur tous les écrans américains
00:21:52où Lubin, Zellig et Edison
00:21:55exploitent le film avec le même succès,
00:21:58mais sans reverser un centime
00:22:00à son producteur d'origine.
00:22:07Pour se protéger à l'avenir contre le piratage,
00:22:10Méliès envoie son frère Gaston aux États-Unis
00:22:13pour ouvrir une succursale
00:22:15et y défendre les intérêts
00:22:17de la Méliès Star Films,
00:22:19marque déposée.
00:22:21Encore des frais et des tracasseries en perspective.
00:22:26Plus grave.
00:22:28En quelques années,
00:22:30les studios concurrents commencent à maîtriser les trucages
00:22:33et à produire en série
00:22:35des aventures interplanétaires tout aussi prometteuses,
00:22:38que ce soit vers le Soleil, Jupiter
00:22:41ou encore vers les étoiles.
00:22:47Mais la Lune reste une valeur sûre
00:22:50et Pathé propose à son tour
00:22:52une nouvelle version du voyage dans la Lune
00:22:55que l'on qualifierait aujourd'hui au mieux de remake,
00:22:58au pire de plagiat pur et simple.
00:23:05Toutefois, cette excursion dans la Lune
00:23:08réalisée par Segundo de Chemon
00:23:10possède un attrait supplémentaire.
00:23:14Elle est...
00:23:16en couleur.
00:23:23De la couleur au début du siècle.
00:23:26Contrairement aux idées reçues,
00:23:28des films en couleur,
00:23:30il y en avait bien avant l'arrivée dans les années 30
00:23:33des productions hollywoodiennes en magnifique Technicolor.
00:23:53Dès les premières années du cinéma,
00:23:56des procédés scientifiques fort complexes
00:23:59vont tenter de recréer les couleurs de la vie,
00:24:02des couleurs naturelles,
00:24:04basées sur le principe de la trichromie,
00:24:06rouge, vert, bleu.
00:24:08Mais devant ces premiers résultats,
00:24:10plutôt décevant, il est vrai,
00:24:12l'art est venu au secours de la science.
00:24:15Les premiers films en couleur
00:24:17seront tout simplement des films en noir et blanc
00:24:20coloriés au pinceau, image après image.
00:24:50Sous-titrage Société Radio-Canada
00:25:21Le coloriage d'un film
00:25:23ne nécessite pas de matériel sophistiqué.
00:25:26Il exige en revanche une précision
00:25:28et une infinie patience
00:25:30pour enluminer des images
00:25:32dont la taille n'excède pas 2 cm.
00:25:37Ces couleurs n'ont bien sûr rien de naturel.
00:25:40Elles donnent au film un aspect irréel et fantastique
00:25:43qui ne peut se reproduire
00:25:45qu'en l'écoutant.
00:25:48Couleurs et illusions
00:25:50vont tout de suite faire bon ménage
00:25:52dans les catalogues de la Starfilm.
00:26:05Les films de Georges Méliès
00:26:07sont des films en noir et blanc
00:26:09et en noir et blanc.
00:26:11Les couleurs et l'illusion
00:26:13vont tout de suite faire bon ménage
00:26:15dans les catalogues de la Starfilm.
00:26:17Les films de Georges Méliès
00:26:19sont mis en couleur
00:26:21dans l'atelier de mademoiselle Elisabeth Tuillier,
00:26:24une ancienne coloriste de plaques de verre
00:26:26et celluloïde pour lanterne magique
00:26:28installée 87 rue du Bac à Paris.
00:26:32J'ai colorié tous les films de M. Méliès.
00:26:35Ce coloriage était entièrement fait à la main.
00:26:38J'employais 200 ouvrières dans mon atelier.
00:26:41Chacune d'elles recevait 1 franc
00:26:43pour une journée de travail.
00:26:45Je passais mes nuits à sélectionner
00:26:47et à échantillonner les couleurs
00:26:49et pendant le jour,
00:26:51les ouvrières posaient la couleur
00:26:53suivant mes instructions.
00:26:55Chaque ouvrière spécialisée
00:26:57ne déposait qu'une couleur à la fois.
00:26:59Il en fallait parfois près de 10
00:27:01pour terminer une scène.
00:27:03Cela prenait de longues journées
00:27:05pour colorier un film, même cours.
00:27:14Le coloriage coûtait près de 1000 francs par copie
00:27:17pour une bande de 300 mètres
00:27:19et nous exécutions en moyenne 60 copies
00:27:21pour chaque production.
00:27:23Le coloriage à la main
00:27:25grevait donc assez lourdement
00:27:27le budget des producteurs.
00:27:43C'est une mode de couleur
00:27:45repris au pinceau,
00:27:47les images coloriées au pinceau.
00:27:49En fait, c'est hyper évocateur.
00:27:51Au bout d'un moment,
00:27:53ça devient une iconographie en soi.
00:27:55Quand on voit une image,
00:27:57ça nous envoie tout de suite
00:27:59dans cette époque-là.
00:28:01C'est pareil, ça ne change rien.
00:28:03C'est la même chose
00:28:05avec les couleurs.
00:28:07C'est la même chose avec les couleurs.
00:28:09C'est la même chose avec les couleurs.
00:28:11Au bout d'un moment,
00:28:13ça ne cherche absolument pas
00:28:15à être réaliste.
00:28:17C'est plus proche de la peinture.
00:28:19On parle beaucoup de théâtre filmé
00:28:21et je trouve que ça ressemble plus
00:28:23à des tableaux de peinture en mouvement.
00:28:25Les paysages très escarpés,
00:28:27c'est hyper joli.
00:28:29Ça sent le carton pâte à plein nez
00:28:31mais on voit les plis des toiles peintes.
00:28:33Naïve, innocente
00:28:35et hyper belle.
00:28:37Il y a de la poésie vraiment parfond.
00:28:41C'est vraiment une peinture en mouvement
00:28:43avec une narration très claire
00:28:45et très visuelle.
00:28:47C'est vraiment une peinture en mouvement
00:28:49avec une narration très claire
00:28:51et très visuelle.
00:28:53et très visuelle.
00:28:55et très visuel.
00:28:57Et très visuelle.
00:28:59Pendant quelques années,
00:29:01la star film va connaître
00:29:03le succès et une renommée mondiale.
00:29:05Les films de Méliès,
00:29:07on en redemande.
00:29:09Alors chaque mois sortiront des studios de Montreuil de nouvelles scènes à trucs, de nouvelles féeries et des voyages impossibles de plus en plus spectaculaires et toujours coloriés au pinceau.
00:29:39Mais le public, lentement, se lasse.
00:29:58En février 1909, le congrès des éditeurs de films se réunit à Paris.
00:30:13Georges Méliès le préside, entouré de Léon Gaumont, Georges Istmann, Charles Pathé et des plus grands producteurs internationaux.
00:30:21Il faut répondre à la demande et chaque compagnie s'engage ce jour-là à produire au moins une bobine de 300 mètres, soit 10 minutes par semaine.
00:30:32C'est bien trop pour le studio indépendant de la Starfilm.
00:30:36Méliès, l'artisan, doit désormais multiplier les cadences, produire à la chaîne.
00:30:42Il a bien construit un second studio en 1907 et peut tourner un deuxième film en parallèle dont il confie la réalisation à un assistant.
00:30:50Mais l'artistique ne suit pas. La qualité s'en ressent et les films s'étirent de plus en plus en longueur.
00:31:01Méliès, il est dépassé. Lui, il fait du théâtre. Il fait des blagues, il fait du théâtre, il fait des choses amusantes.
00:31:06Mais le cinéma rentre dans une époque, une période sérieuse. On touche à la société.
00:31:11Et ça, ça lui échappe un peu. Il n'arrive pas à sortir du théâtre malgré son modernisme parce qu'il fait des studios, il construit dans les studios, etc.
00:31:20Mais il y en a qui sortent dehors. Il y en a qui vont dans la vie. Et lui, il n'arrive pas à aller dans la vie.
00:31:24Il reste dans le théâtre, il reste dans les limites théâtrales.
00:31:33En 1912, le dernier voyage de Méliès emporte de nouveaux explorateurs vers un pôle Nord de carton pâte.
00:31:41Mais le pôle, Amundsen vient de le conquérir, en vrai.
00:31:46Et les premières actualités cinématographiques vont bientôt en faire découvrir les images.
00:31:55Les voyages extraordinaires de Méliès ne font plus rêver.
00:32:00La conquête de l'air a progressé à pas de géant.
00:32:04Et en matière de fantaisie, la réalité dépasse désormais la fiction.
00:32:24L'hélicoptère de Méliès
00:32:29L'hélicoptère de Méliès
00:32:34L'hélicoptère de Méliès
00:32:39L'hélicoptère de Méliès
00:32:44L'hélicoptère de Méliès
00:32:48L'hélicoptère de Méliès
00:32:54Méliès ferme définitivement son studio en 1913, après seulement 16 années de production.
00:33:01Il a 52 ans et ne filmera plus jamais.
00:33:11Le cinéma est désormais une industrie puissante qui ne laisse guère de place aux artisans, aussi doués soient-ils.
00:33:18Et puis, les goûts du public ont changé. Il lui faut des programmes variés et toujours de la nouveauté.
00:33:25On vient de découvrir les premiers dessins animés, les actualités filmées ou les westerns.
00:33:34Le cinéma
00:33:39Le langage cinématographique évolue. La caméra change de place pour rendre les scènes plus dramatiques et l'écran se découpe.
00:33:48Le spectateur veut de l'action, du suspense, des images du bout du monde, en vrai.
00:33:55Il veut être au cœur de l'action, alors la caméra, qui jusqu'ici filmait les voitures de loin, monte désormais à l'intérieur.
00:34:06Nouveau visage, enfin. Les vedettes s'appellent désormais Boireau, Rigadin ou Max Linder.
00:34:12Demain, ce sera Charlie Chaplin et les films américains.
00:34:17Une nouvelle ère est en marche dont l'écran se fait le témoin.
00:34:55La fin de la guerre
00:35:05La fin de la guerre marque la naissance d'un monde nouveau.
00:35:09Dans l'optimisme général, les cheveux se raccourcissent et les jupes aussi.
00:35:19En 1923, on inaugure dans la joie le prolongement du boulevard Haussmann.
00:35:38Méliès, lui, n'a pas le cœur à rire.
00:35:43Son cher théâtre Robert-Roudin a été démoli pour l'occasion.
00:35:49Ruiné, ne pouvant faire face à ses créanciers, il lui faut vendre sa propriété de montreuil et ses studios désormais inutiles.
00:36:00Avant de quitter la propriété, Méliès vide une à une les boîtes entreposées dans le studio et détruit par le feu son stock de films.
00:36:11500 négatifs devenus obsolètes.
00:36:15La production de la star film part en fumée et rejoint le royaume des rêves impossibles et des illusions perdues.
00:36:29J'ai pensé d'une sorte de suicide.
00:36:31Une façon de se suicider à travers son oeuvre et une façon de protester aussi énormément.
00:36:38Il y a des artistes qui ont fait, des grands artistes qui ont brûlé des oeuvres, qui ont brûlé des tableaux, etc.
00:36:44Mais ça c'est assez inexplicable.
00:36:49On retrouve Georges Méliès tenant un magasin de jouets à la gare Montparnasse,
00:36:53aux côtés de Jeanne d'Alcy, la vedette de ses films passés qu'il vient d'épouser en seconde noce.
00:37:00Un travail pénible, 7 jours sur 7 en plein courant d'air.
00:37:04Grandeur et décadence.
00:37:07Alors, pour occuper ses rares moments de liberté, il y reprend en dessin les grandes scènes de ses chefs-d'œuvre, désormais invisibles.
00:37:17Petit à petit, une nouvelle génération de cinéphiles commence à lui rendre visite et s'émeut de son sort.
00:37:24En décembre 1929, l'un d'eux, Jean Mauclair, directeur du studio 28, organise le grande soirée de gala en son honneur, Salle Pléiel.
00:37:34Mais la reconnaissance est bien tardive et il ne reste déjà plus assez de films pour lui rendre cet ultime hommage.
00:37:42Huit titres sur une production qui en comportait plus de 500.
00:37:47Il faudra compléter le programme avec un long métrage américain.
00:37:54Parmi ces huit titres figure tout de même Le voyage dans la lune.
00:37:59C'est la dernière fois que Méliès reverra son chef-d'œuvre.
00:38:11Mais la copie retrouvée est incomplète, rayée et contrastée.
00:38:16Mauclair a bien tenté de lui redonner un peu d'illustre de sa splendeur passée en faisant rajouter quelques teintes.
00:38:23En vain.
00:38:25Et tandis que Méliès renoue avec les honneurs et peut enfin savourer une retraite paisible, l'industrie cinématographique connaît une véritable révolution.
00:38:55C'est vrai.
00:39:26L'anglois Franju et quelques autres se disent ne peut pas laisser détruire tout cela.
00:39:32Et ils ont arraché de la catastrophe tout ce qu'ils ont pu.
00:39:36Ils ont réuni beaucoup de choses à la cinémathèque.
00:39:41On peut dire d'ailleurs je crois que 70, 75% de la période du muet est disparu.
00:39:48Donc il y a sûrement des chefs-d'œuvre qui ont été détruits.
00:39:52Ou vendus pour faire des peignes, pour faire de n'importe quoi avec la celluloïde.
00:39:56Et ça c'est une grande catastrophe du cinéma.
00:40:03Georges Méliès rejoint le pays des étoiles le 21 janvier 1938, deux ans après la création de la cinémathèque française.
00:40:22Avec lui disparaît une certaine vision naïve mais ô combien poétique de la Lune et de ses mystères.
00:40:33Plus de 60 ans après nos explorateurs improbables, le rêve poétique de Méliès devient une réalité scientifique et technique.
00:40:42On a marché sur la Lune.
00:40:45Et sur la Lune, il n'y a...
00:40:49... qu'une seule Lune.
00:40:53Pendant les années 1980, ce qui est devenue un peu plus compliqué pour les scientifiques et techniciens,
00:41:00c'est qu'il y avait une synthèse de la Lune qui était assez claire.
00:41:05Pendant de longues années, on n'entendra plus parler du cinéma des premiers temps.
00:41:26Bien sûr, cinémathèques et collectionneurs ont tenté de retrouver les bobines oubliées dans les caves ou dans les greniers.
00:41:33Mais combien de films manquent encore à l'appel ?
00:41:47Retrouver des films est aussi une course contre le temps, car une autre tragédie guette le cinéma ancien.
00:41:54Fabriqués sur une pellicule chimiquement instable, les films se décomposent inéluctablement après quelques dizaines d'années.
00:42:04Au début, l'image se tâche et se délite.
00:42:11Puis la pellicule devient collante et se transforme en cristaux acides.
00:42:17Une réaction imprévisible, inéluctable et malheureusement irréversible.
00:42:24À ce jour, 200 films de Georges Méliès ont été retrouvés grâce aux efforts des cinémathèques, des collectionneurs et de sa famille.
00:42:37Mais il en manque encore 300.
00:42:42Les chances de retrouver de nouveaux films plus d'un siècle après l'invention du cinéma sont donc bien minces.
00:42:49À moins d'un miracle.
00:43:19J'ai reçu quelques copies d'un film de Méliès.
00:43:24Je lui ai demandé ce qu'il avait comme film de Méliès.
00:43:28Il m'a annoncé une copie en couleur du Voyage dans la Lune.
00:43:33Le voyage dans la lune en couleur a toujours été un rêve pour moi.
00:43:37Tous les films de Méliès les plus spectaculaires existaient dans des versions colorio-pinceaux.
00:43:42Et dans le Voyage dans la Lune, personne n'en parlait, c'était écrit nulle part, il n'y avait pas de catalogue.
00:43:47Et pourtant pour moi c'était le grave, parce que je me disais que ce n'est pas possible que ce n'ait pas existé.
00:43:52Je crois que chacun a de toute façon son centre d'intérêt.
00:43:55Quand on fait une collection de films, quand on recherche des films, on ne peut pas tous restaurer toujours la même chose.
00:44:00Quand Henri Menès, en tant que patron de la Cinémathèque de Barcelone, recherchait des films de Ségou de Tchaumont,
00:44:05du coup on est tombé tout naturellement d'accord pour faire un film de Méliès.
00:44:08C'est un film qui a toujours été un rêve pour moi.
00:44:11C'est un film qui a toujours été un rêve pour moi.
00:44:14C'est un film qui a toujours été un rêve pour moi.
00:44:17C'est un film qui a toujours été un rêve pour moi.
00:44:20Du coup on est tombé tout naturellement d'accord pour faire un échange.
00:44:23Et le Ségou de Tchaumont est reparti en Espagne, et le copie couleur du Voyage à la Lune est revenu en France.
00:44:29Même quand elle est là sous nos yeux, on a un petit peu de mal à y croire, sauf évidemment quand on commence à ouvrir la boîte.
00:44:34Ce qui était vraiment très étrange avec cette bobine, c'est que théoriquement elle était totalement décomposée.
00:44:39Ce qu'avait expliqué Antoine Henri Menès, et il n'y avait pas de raison de ne pas le croire, pour qu'il se défasse aussi facilement de cette copie.
00:44:47Effectivement quand on voit la bobine arriver, on prend la bobine et évidemment c'est un morceau de bois.
00:44:53On peut taper dessus, il n'y a rien à faire, il n'y a pas d'image qui se décolle.
00:44:56Et pourtant sur le bord, on voit les images, on voit les premières images, et on voit que c'est en couleur.
00:45:00Donc on voit que c'est merveilleux.
00:45:03Une fois qu'on est là, on a savouré cette première étape qui est la découverte.
00:45:06Et puis après on se dit, ben oui, mais ce n'est pas le tout d'avoir trouvé le film maintenant, il va falloir le restaurer.
00:45:11Parce que le film, il faut quand même pouvoir le montrer.
00:45:15Restaurer un film, ce n'est pas comme restaurer un livre ou un tableau.
00:45:19Ce qui importe, c'est qu'il y ait le film.
00:45:21C'est ce qu'il y a d'intéressant, c'est ce qu'il y a d'intéressant.
00:45:23C'est ce qu'il y a d'intéressant, c'est ce qu'il y a d'intéressant.
00:45:26Restaurer un film, ce n'est pas comme restaurer un livre ou un tableau.
00:45:31Ce qui importe, ce n'est pas le support original, mais son contenu qu'il faut recopier sur un support moderne.
00:45:38Mais pour cela, encore faut-il pouvoir dérouler la pellicule.
00:45:43Les meilleurs laboratoires cinématographiques sont consultés.
00:45:46Expertise et analyse se succèdent, sans trouver de solution.
00:45:56Vient alors le temps de la chimie.
00:45:59Il va falloir tenter le tout pour le tout,
00:46:01et imaginer un traitement de choc qui risque de détruire le film original.
00:46:08Un pari un peu fou, pour un résultat incertain et dont personne ne veut prendre la responsabilité.
00:46:19Nous nous débrouillerons donc avec les moyens du bord, à nos heures perdues.
00:46:26En février 2001, dans une cave de Versailles,
00:46:30la bobine est placée dans une cloche de verre, pour y être soumise à des vapeurs corrosives.
00:46:35Cela durera des semaines, des mois peut-être.
00:46:39Alors, avec le temps, certains fragments du film se décolleront,
00:46:44et seront quelques heures assez souples pour être photographiées image par image,
00:46:49avant de redevenir cassants, comme du verre.
00:46:52Ce genre de travail, on ne peut pas l'entreprendre si on n'a pas la foi, si on n'y croit pas.
00:46:57C'est vrai que quand on passe des nuits entières à essayer de faire quelque chose,
00:47:01dont tout le monde vous a dit que c'était impossible de le faire,
00:47:04il ne faut pas chercher une logique là-dedans.
00:47:06Au contraire, c'est le domaine du déraisonnable, c'est le domaine de la folie, et puis c'est ça qui est bon.
00:47:13Rapidement, je me suis rendu compte que la bobine était collée sur le bord,
00:47:17la décomposition avait attaqué uniquement les bords,
00:47:20et que l'image était intacte, globalement,
00:47:24et qu'avec beaucoup de patience, on arrivait à décoller, millimètre par millimètre.
00:47:35Quand on commence, on ne se rend pas compte de ce qu'il se passe,
00:47:40quand on commence, on ne se rend pas compte du temps que ça va prendre.
00:47:43On voit la première bobine, on se dit, on y va,
00:47:46même si ça prend deux minutes, on en fait une deuxième, encore deux minutes,
00:47:49et puis au bout d'une heure, on en a fait une trentaine.
00:47:52Il y en a des milliers à faire, mais on ne se rend pas compte qu'on est déjà tellement émerveillé
00:47:55d'avoir réussi à sauvegarder une trentaine d'images qui correspondent à peu près à deux secondes.
00:48:00Il y a déjà un bout de mouvement, ça commence à prendre vie.
00:48:10L'avantage dans ce projet, c'est que quand j'ai commencé, il n'y avait pas de délai.
00:48:13De toute façon, personne n'attendait rien de ce bout de bobine totalement décomposé.
00:48:18Donc ce qui sortirait, ce serait toujours ça de pris.
00:48:21Les jours ont passé, les semaines, et puis voilà.
00:48:24On n'imagine pas le temps que ça peut prendre, en fait.
00:48:27Il ne faut mieux pas y penser, d'ailleurs.
00:48:29C'est un projet qui a été réalisé à la fin de l'année.
00:48:32C'est un projet qui a été réalisé à la fin de l'année.
00:48:35C'est un projet qui a été réalisé à la fin de l'année.
00:48:38Il ne faut mieux pas y penser, sinon on arrête tout de suite.
00:49:08Au bout d'un an, on a 10 000 fichiers correspondant à des images ou parfois des fragments d'images.
00:49:10Au bout d'un an, on a 10 000 fichiers correspondant à des images ou parfois des fragments d'images.
00:49:35Evidemment, il va falloir assembler toutes les pièces de Spuz,
00:49:39mais c'est vrai qu'avec les technologies dont on disposait il y a dix ans,
00:49:44c'était absolument pas possible.
00:49:46Ou c'était possible, mais ça aurait pris trop de temps,
00:49:48c'était pas logique de poursuivre comme ça, il valait mieux attendre.
00:49:51Là, on était un petit peu plus sereins,
00:49:53puisqu'en fait, le film avait été sauvegardé.
00:49:55Il n'était évidemment pas restauré, il n'était pas montrable,
00:49:57mais au moins toutes les images avaient été sauvegardées.
00:49:59Ce sont en fait 13 795 images qui auront ainsi été photographiées nuit après nuit.
00:50:06Et tandis que les originaux continuent de se décomposer,
00:50:09les images numérisées vont dormir sur un disque dur pendant huit ans.
00:50:14Le temps pour les technologies de progresser.
00:50:17Le temps également de trouver de nouveaux partenaires.
00:50:23Le second acte de cette restauration commence en avril 2010,
00:50:27avec l'engagement à nos côtés de la Fondation Groupe Amagane
00:50:30et de la Fondation Technicolor pour le cinéma.
00:50:33Les choses vont enfin pouvoir se faire en grand.
00:50:37Fini le temps de l'artisanat.
00:50:41Bien vite, les archives françaises du film du Centre National du Cinéma
00:50:46se joignent au projet,
00:50:48et c'est dans leur laboratoire que vont s'effectuer les premières étapes décisives.
00:50:57Dans les réserves des archives sont déposées plusieurs copies en noir et blanc du voyage dans la Lune,
00:51:03en plus ou moins bon état.
00:51:05Nous allons devoir les comparer entre elles
00:51:07et sélectionner les images qui manquent toujours dans notre copie couleur.
00:51:12À gauche c'est la copie Méliès, à droite c'est la copie Mauclair de 1929,
00:51:16donc du gala Méliès.
00:51:18Ah d'accord, sur la copie Mauclair, il n'y a pas le premier tableau.
00:51:22Voilà, à gauche l'image est quand même assez exceptionnelle.
00:51:26Très vite, une copie appartenant à la petite fille du réalisateur,
00:51:30Madeleine Maltette Méliès, nous apparaît comme la plus intéressante
00:51:33et d'une qualité d'image magnifique.
00:51:36Mais la fin est très endommagée,
00:51:38et plus courte de 54 images que la copie fabriquée pour le gala Méliès,
00:51:42aujourd'hui propriété de l'État.
00:51:46Même en noir et blanc, il n'existe donc aujourd'hui aucune copie originale
00:51:50complète et en parfait état du voyage dans la Lune.
00:51:54Image après image, nous allons devoir jongler entre les différents éléments.
00:52:00Les dernières pièces du puzzle ont été identifiées.
00:52:03Il ne reste plus qu'à les numériser à leur tour
00:52:06et pour cela, le scanner Sacha est la machine idéale.
00:52:10Plus stable, plus précis.
00:52:13C'est un prototype construit spécifiquement pour ce genre de film.
00:52:19En comparaison de ces images nouvelles,
00:52:21nos scans de la copie couleur semblent avoir été faits au Moyen-Âge.
00:52:26Presque par défi, nous proposons aux archives
00:52:29de tenter de mettre sur le Sacha quelques fragments survivants de la copie couleur.
00:52:34Une blague.
00:52:37Au début, je me suis dit, on va réussir à faire des miracles.
00:52:42Et rapidement, c'est devenu très compliqué.
00:52:46On prenait des bouts de pellicules, on commençait à les passer dans le scanner.
00:52:50C'est pourtant un scanner prévu pour prendre en charge les films très abîmés.
00:52:55Et finalement, ça cassait.
00:52:57On commençait à scanner, ça recassait.
00:53:00On essayait, on essayait, on essayait.
00:53:02On n'arrivait jamais à rien.
00:53:10Après huit années d'attente,
00:53:12il nous faut maintenant rencontrer le dernier héros de notre histoire.
00:53:15Un super-héros ? Peut-être.
00:53:17En tout cas, il n'en a pas l'air.
00:53:19Il ressemble plutôt à George Méliès.
00:53:22Il s'appelle Tom Burton
00:53:24et est directeur de Technical or Creative Services.
00:53:27Tom Burton est vraiment un individu formidable,
00:53:29quelqu'un de peu probable,
00:53:31qui a tout de suite été passionné par le projet,
00:53:34qui a tout de suite vu la magie du film
00:53:37avant d'imaginer les solutions techniques,
00:53:39de voir comment il pourrait restaurer ça.
00:53:41Et ce qu'il passionnait, c'était vraiment le film.
00:53:43Donc après, les moyens, ça les suive tout de suite.
00:53:46C'était naturel pour lui de trouver une solution.
00:53:48Même si elle n'existait pas, pareil, il savait qu'il allait la trouver.
00:53:52Ce projet est très différent
00:53:54de n'importe quel autre projet de restauration qui a été réalisé.
00:53:57C'est une reconstruction, une résurrection, si vous voulez,
00:54:01plutôt qu'une restauration.
00:54:03Parce que, franchement, on ne pouvait même pas commencer
00:54:06à restaurer les images
00:54:08jusqu'à ce qu'on puisse déterminer
00:54:10comment toutes les images s'assemblaient dans un timeline.
00:54:13On n'avait pas de référence
00:54:15à comment ces petits morceaux de nitrate cassés
00:54:18pourraient représenter un cercle d'images cohérentes.
00:54:24Une première étape va consister à donner à chaque image du film son numéro,
00:54:28comme une identité absolue,
00:54:30qui permettra de la comparer dans chaque copie existante.
00:54:33Et cette mise en miroir des images
00:54:35donne une idée du travail qui nous attend.
00:54:40Vous avez la référence noire et blanche à droite,
00:54:43et la référence rouge à gauche.
00:54:45Et avec les morceaux manquants.
00:54:47Et partout où ça disparaît, il n'y a pas de couleur du tout.
00:54:51Et c'est ce qu'on va remplacer plus tard.
00:54:55Mon équipe a l'expression
00:54:57que le plus difficile, on le fait immédiatement.
00:55:00L'impossible, ça prend un peu plus de temps.
00:55:05Il va falloir sauver tout ce qui peut l'être de la copie-couleur.
00:55:08Certaines images ont survécu sans pratiquer.
00:55:11Mais il est rare que plus de 5 images successives
00:55:14ne nécessitent aucune intervention.
00:55:16Sans parler des images fragmentaires ou manquantes.
00:55:42Nous avons une palette de moyens numériques
00:55:45qui sont une collection de 5 ou 6
00:55:48des principaux plateformes commerciales disponibles pour la restauration.
00:55:52Mais nous apportons aussi dans le mélange
00:55:55tous les approches que vous utiliseriez
00:55:57si vous faisiez des effets visuels pour un film moderne.
00:56:11Une à une, les attentes du temps.
00:56:41L'image est bonne, non ?
00:57:12Pour les images qui n'ont survécu qu'en noir et blanc,
00:57:15les restaurateurs doivent réinventer le métier de coloriste.
00:57:19Cette fois, les pixels vont remplacer les encres
00:57:22et la palette graphique, les pinceaux.
00:57:41Il y a beaucoup de variables.
00:58:11Tu peux enlever ça.
00:58:14Et chaque fois, individuellement.
00:58:17Tu peux y aller.
00:58:20C'est en loupant.
00:58:22Tu peux voir le bleu.
00:58:24Les filles se déplacent derrière.
00:58:26Les gens se déplacent à droite et à gauche.
00:58:30J'aime quand, sur certaines occasions,
00:58:33tu gardes des défauts
00:58:35qui montrent d'où tu viens
00:58:37et qui donnent vie et poésie à ce que c'est.
00:58:40Ce n'est pas un film.
00:58:42C'est un rêve.
00:58:44C'est de la poésie.
00:59:10Le film peut être estompé.
00:59:12Comment retrouver l'équilibre d'origine ?
00:59:15En tirant plus vers le vert ?
00:59:17Ou le bleu ?
00:59:20Durant trois semaines,
00:59:22le film réparé va être revu plan par plan.
00:59:25Les couleurs de chaque image ou de chaque partie d'image
00:59:28vont être harmonisées les unes par rapport aux autres.
00:59:31Et les derniers défauts,
00:59:33imperceptibles sur le petit écran,
00:59:35vont être traités.
00:59:40C'est une attitude européen-américaine impérialiste.
00:59:43Quand tu rencontres quelque chose que tu ne comprends pas,
00:59:46tu l'as tué.
01:00:11Plus d'un siècle après son tournage
01:00:13et près de 20 ans après la découverte
01:00:15de la copie miraculeuse en couleurs,
01:00:17le temps est venu pour les restaurateurs,
01:00:19les logiciels et les techniciens de pointe
01:00:22de se faire oublier.
01:00:24Les technologies n'étaient qu'un passage
01:00:27pour effacer les outrages du temps.
01:00:31De l'ouverture du Festival de Cannes à Los Angeles,
01:00:34de Pékin à Toronto,
01:00:36c'est pour tous les publics du monde
01:00:38que la magie de Georges Méliès va désormais renaître.
01:00:41Elle est intacte, éternelle
01:00:44et peut à nouveau nous faire voyager
01:00:46au pays de l'enfance du cinéma,
01:00:48au pays des étoiles
01:00:50et au pays des rêves.
01:01:00Sous-titrage Société Radio-Canada
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