Avec Bruno Cautrès, politologue, chercheur au CNRS et au CEVIPOF (centre de recherche politiques de Science Po)
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NewsTranscription
00:00Le Grand Matin Sud Radio, 8h10h, Benjamin Gleize.
00:04Sud Radio, il est à 8h09, c'est à la une, Emmanuel Macron sort de son silence, donc le Président de la République
00:10accordera une interview ce soir sur France 2, depuis le Trocadéro, ce sera sa première télé depuis les élections législatives.
00:17Bonjour Bruno Cotteres.
00:19Bonjour.
00:20Politologue, chercheur au CNRS et au Cvipof, merci d'être avec nous ce matin. Déjà, comment interprétez-vous cette
00:26prise de parole ce soir, Bruno Cotteres ?
00:29Le chef de l'État ne s'était pas exprimé de manière officielle
00:34depuis l'annonce de la dissolution et depuis ce courrier qu'il avait adressé aux responsables de partis politiques,
00:40les invitants à lui faire des propositions pour former des coalitions
00:44stables et en fait, effectivement, le chef de l'État ne s'est pas exprimé depuis. On a eu 15 jours d'une sorte de chaos quand même
00:51de notre vie politique, où personne ne sait très bien
00:54ce qui est en train de se passer, qui va gouverner le pays après les Jeux olympiques.
00:59Donc une prise de parole du chef de l'État pour redonner du champ, redonner la perspective,
01:05peut-être aussi nous parler des Jeux olympiques.
01:07Oui, c'est ce qui est prévu, à priori, c'est ce que nous dit l'Élysée, il va parler des Jeux olympiques, des Jeux paralympiques, il va également
01:14nous dit-on, parler de la situation politique française. Est-ce que c'est le moment pour en parler selon vous, Bruno Cotteres ?
01:21Alors, effectivement, c'est quand même le moment, parce qu'on a 15 jours qui viennent de se passer avec quand même beaucoup d'incertitude,
01:28il y a beaucoup d'anxiété, d'inquiétude chez les uns, chez les autres, ceux qui ont voté, par exemple,
01:33pour des formations politiques, en ne comprenant pas très bien pourquoi elles ne gouvernent pas.
01:37Donc il est temps, effectivement, que le chef de l'État nous dise où il en est aussi, de ses propres
01:41réflexions, comment lui-même analyse les 15 jours qui viennent de se passer et surtout quelle perspective nous donne-t-il
01:48parce que les Jeux olympiques sont là, mais les Jeux olympiques, ça va passer assez vite, il faut qu'on sache à la rentrée
01:54qui gouverne le pays.
01:55Et donc, ça a dressé éventuellement aux électeurs du RN qui n'ont pas forcément compris aussi ce résultat des élections
02:02législatives avec ce front républicain et cette absence notamment des postes à responsabilité au sein de l'Assemblée ?
02:09Le chef de l'État, normalement, est dans son rôle de vouloir parler à tout le monde,
02:14d'incarner l'unité nationale, surtout à la veille d'un grand événement comme les Jeux olympiques,
02:18et sans doute le chef de l'État va-t-il vouloir s'adresser
02:21à ces électrices, ces électeurs qui se sentent un peu bafoués, qui se sentent un peu, au fond, stigmatisés,
02:27le front républicain d'abord, ensuite pas de poste à l'Assemblée nationale.
02:32Donc, effectivement, il faut que le chef de l'État donne du sens à tout ceci, trace des perspectives,
02:37parce que sinon c'est une accumulation de frustration
02:41qui peut, à un moment donné, être très négative pour lui dans l'opinion, mais
02:45globalement être très négative pour le pays.
02:47Après, il peut y avoir aussi une autre incompréhension, peut-être Bruno Cotteres, puisque le chef de l'État
02:52appelle à une trêve politique et en même temps il prend la parole trois jours avant les JO, c'est pas un peu contradictoire ça quand même ?
03:00Un peu contradictoire. Alors, tout dépendra du contenu de la parole du chef de l'État. Effectivement, si le chef de l'État
03:05avait, par exemple, des annonces à nous faire, on se doute bien que ça ne correspond pas du tout à l'idée d'une trêve
03:11politique. Mais là, j'imagine qu'il va être plutôt dans le registre de l'unité nationale, de l'appel à se serrer les coudes à la veille des JO
03:20et aussi, au fond, de se réconcilier après cette période, au fond, d'élections.
03:26Trois élections qui se sont suivies, les élections européennes, les deux tours des élections législatives,
03:31les JO qui arrivent. Donc, sans aucun doute que le chef d'État va plutôt être dans la posture du chef de l'État qui prend du
03:37champ, qui prend du recul. C'était alors la posture qu'il avait prise
03:40dans ce courrier qu'il avait adressé aux partis politiques, comme si tout ceci ne le concernait que de loin.
03:46Si je vous suis bien, Bruno Cotteres, ça veut dire que vous n'envisagez pas que le Président de la République puisse
03:52annoncer le nom du futur nouveau Premier ministre, quoi ?
03:56Non, ça n'est pas l'habitude, sous la Ve République, de l'annoncer lors d'une allocution
04:02comme ceci. Le chef d'État peut éventuellement nous donner quelques pistes en nous disant justement quelle est l'interprétation
04:08qu'il donne de tout ce qui vient de se passer. Va-t-il donner une interprétation au fait que
04:14Yelle Brune-Pivet a été réélue à la tête de l'Assemblée nationale ?
04:17Et à ce moment-là, ça trace pour lui une perspective qui pourrait être cette espèce
04:22d'alliance tacite avec les Républicains. On se rappelle que Laurent Wauquiez et Bruno Retailleux hier ont donné une conférence de presse
04:28en disant que nous, on met sur la table 13 propositions. Si le gouvernement va dans ce sens-là, on s'engage
04:34à les soutenir et à ne pas censurer le gouvernement. Est-ce que c'est ça que le chef d'État va nous dire ?
04:39Ou est-ce que le chef d'État va vouloir continuer à entretenir l'idée, en même temps en faisant venir autour du gouvernement des centristes du centre,
04:47des centristes de droite et des centristes de gauche, compte tenu de l'état de la gauche aujourd'hui ?
04:54En tout cas, si finalement, il ne nous parle pas d'un éventuellement un nouveau Premier ministre issu du nouveau Front populaire, ça risque de lui être
05:02rédiqué d'une certaine manière de la part de la gauche. Elle va se reculer dessus, c'est ça aussi ?
05:06Non ? Oui, mais pour le moment, c'est vrai que la gauche n'arrive pas à dégager elle-même une perspective d'unité autour
05:15d'une personnalité qui incarnerait un gouvernement
05:18du nouveau Front populaire avec, au fond, peut-être derrière les questions de personnes,
05:23derrière les questions de tactique, peut-être aussi des questions plus stratégiques, plus fondamentales,
05:28peut-être aussi de relatifs désaccords sur le rythme auquel il faudrait faire
05:32le programme du nouveau Front populaire, la hiérarchie dans lequel il faudrait faire les choses. On se doute que derrière les questions de personnes,
05:40il y a sans doute d'autres questions qui sont peut-être plus fondamentales.
05:43Alors le patron d'Alephi, Emmanuel Bompard, dit que c'est au Président de les appeler pour nommer un éventuel Premier ministre issu du nouveau Front populaire.
05:51Est-ce que c'est vrai ? Est-ce que c'est la tradition, Bruno Cotteret ? Est-ce que ce soit le Président de la République qui appelle, dans ce cas-là,
05:59éventuellement la majorité relative ou en tout cas le groupe qu'il souhaite avoir pour gouverner ?
06:06C'est la tradition. Si on est en majorité absolue,
06:08et qu'il y a soit un accord entre le chef de l'État et la majorité absolue, soit une question de cohabitation claire et nette.
06:16On n'est ni dans un cas de figure, ni dans l'autre.
06:19Donc que le chef de l'État nomme le Premier ministre, ça c'est la Constitution, ce sont ses prérogatives constitutionnelles.
06:26Par contre, il n'y a aucune obligation pour le Président de la République de faire appel à telle formation politique plutôt qu'une autre.
06:33Ça va être l'appréciation de savoir si ce sont le nombre de sièges obtenus le soir
06:38du second tour, ou si c'est le nombre de sièges
06:42réunis autour d'un projet, autour d'une coalition, autour d'une proposition. Et c'est vrai que de ce point de vue-là,
06:49les Républicains avec la Macronie ont apporté, lors de l'élection de Yann Brompydé,
06:56la preuve qu'ils pouvaient aussi réunir un certain nombre de sièges.
07:00Dernière question, donc a priori pas de nouveau Premier ministre avant les JO, est-ce que ça va permettre d'une certaine manière au Président d'être
07:06encore plus et davantage au centre de ces jeux ?
07:11Oui, alors il le sera incontestablement, parce que d'abord, c'est une fonction éminente
07:16qui est celle d'un chef de l'État qui représente, qui est présent à la cérémonie d'inauguration des JO, qui incarne
07:24effectivement le pays qu'accueille, mais aussi l'unité nationale.
07:27Donc Emmanuel Macron va sans doute vouloir, au fond, se glisser dans ce tableau des JO,
07:33pour peut-être aussi retrouver un petit peu de crédit dans l'opinion, parce qu'il sort quand même
07:37assez abîmé de toute cette séquence en termes d'images, en termes de popularité dans l'opinion, qu'il a le sentiment de ne plus très bien comprendre
07:44son chef de l'État.
07:46Merci beaucoup Bruno Cotteres,
07:48politologue, chercheur au CNRS et au CIVIPOF, merci d'avoir été avec nous ce matin sur ce radio, je vous souhaite
07:54une très belle journée.