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00:00Bonjour à tous et bienvenue dans cette nouvelle vidéo corrigée de l'épreuve de philosophie.
00:19Je suis Marine Hilario, journaliste à l'étudiant et nous allons corriger ensemble les sujets
00:24de l'épreuve de philosophie de la voie générale.
00:26Pour cela, je suis avec Laurent Awono qui est professeur de philosophie au lycée polyvalent
00:32Gustave-Monnault à Anguien-les-Bains et auteur de la méthode de la dissertation en carte
00:36mentale.
00:37Bonjour Laurent, merci beaucoup d'être avec nous pour se corriger.
00:39Bonjour Marine, je suis enchanté d'être là.
00:42Les élèves sur cette épreuve de philosophie avaient trois exercices au choix, deux dissertations,
00:50une explication de texte.
00:51La première dissertation portait sur « La science ne peut-elle satisfaire notre besoin
00:55de vérité ? » et la seconde, « L'État nous doit-il quelque chose ? ». Quant au
01:00dernier sujet, il portait sur un texte de Simone Veil, philosophe française « La
01:04condition ouvrière ».
01:05Alors, on va peut-être commencer par le premier sujet, donc premier sujet de dissertation
01:09« La science peut-elle satisfaire notre besoin de vérité ? ». Alors, quand on découvre
01:14ce sujet, Laurent, est-ce qu'il y a des choses à éviter de faire tout de suite ou
01:18qu'est-ce qu'il faut éviter de faire ?
01:19Oui Marine, face à un sujet de philosophie, il faut éviter de se précipiter pour répondre
01:25par oui ou par non.
01:26Ça, c'est vraiment l'erreur à ne pas commettre.
01:29C'est l'erreur à ne pas commettre.
01:30Et alors, du coup, par quoi il faut commencer ?
01:32On peut commencer par se poser la question de savoir ce qu'autorise le sujet, ce qu'il
01:39admet.
01:40La science peut-elle satisfaire notre besoin de vérité ? On peut commencer par admettre
01:47que le sujet autorise que nous pensions que nous avons un besoin de vérité et la question
01:54qui se poserait dans ce sujet serait de savoir si la science peut satisfaire ce besoin.
02:00Donc, c'est ça en fait la problématique qu'on peut faire ressortir de ce sujet-là.
02:04La problématique, je ne l'ai pas encore donnée, la problématique peut s'énoncer
02:10comme suit.
02:11Si on définit le besoin en le différenciant par exemple du désir, si on définit le besoin
02:18comme étant de nature physiologique, par exemple lorsque vous avez besoin de manger
02:23et que vous mangez, vous êtes rassasié, quand vous avez besoin de boire et que lorsque
02:28vous avez bu, vous êtes rassasié, est-ce qu'on peut dire qu'on a ce même rapport
02:32avec la science ? Est-ce qu'il y a un moment où je suis rassasié de connaître ? Ce serait
02:38ça la problématique.
02:39La science est une connaissance, elle est une forme de connaissance.
02:43Est-ce qu'elle répond aux besoins et encore plus aux besoins de vérité ? Termes à définir.
02:51Est-ce qu'elle est suffisante et est-ce qu'on peut s'en contenter ?
02:54Est-ce qu'on peut s'en contenter ? C'est ça, ce serait ça la problématique.
02:57Une fois qu'on a cette problématique en tête, quel développement à travers un plan
03:03peut-être vous pourriez nous proposer ?
03:04Traditionnellement, on demande aux élèves d'avoir un plan en trois parties.
03:09Pour cette question, on peut commencer par définir le terme de besoin.
03:15Qu'est-ce qu'un besoin ? Et encore plus, qu'est-ce qu'un besoin de vérité ?
03:21Je le disais tout à l'heure, le besoin peut se définir dans le sens physiologique
03:27comme appartenant au corps.
03:29Lorsque le besoin est satisfait, le corps arrête sa demande.
03:35Lorsque vous avez soif ou faim, vous avez besoin de manger.
03:40Quand vous avez mangé à satiété, vous n'avez plus faim.
03:44Or, la science étant une forme de connaissance, on ne peut pas dire que la science satisfasse
03:51notre besoin de vérité.
03:53Pourquoi ? Parce que la science nous pousse toujours à chercher plus de vérité.
03:59Je pense que dans une première partie, l'hypothèse de cette première partie peut être négative.
04:06La science ne satisfait pas notre besoin de vérité.
04:10L'idée de la satisfaction étant que lorsque j'ai ce qu'il me faut, je ne recherche plus.
04:17Dans une première partie, on peut partir sur cette idée-là.
04:21Dans une deuxième partie, comme on aurait insisté sur l'idée de besoin dans la première
04:26partie, on peut insister sur l'idée de vérité dans la deuxième partie.
04:31Qu'est-ce que la vérité ? C'est ce que nous recherchons, par exemple.
04:35On peut définir la vérité comme ça.
04:37Est-ce que la science satisfait ce besoin de vérité ? Si la science satisfaisait notre
04:43besoin de vérité, on n'aurait plus à chercher.
04:45Les scientifiques seraient mis au chômage.
04:48En tant que la vérité se cherche toujours, même lorsque la science pense l'avoir trouvée,
04:57elle continue à chercher.
04:58Dans cette deuxième partie, l'hypothèse serait tout aussi négative.
05:03La science ne satisfait pas notre besoin de vérité.
05:07En tant que la vérité est toujours ce qu'il y a à chercher.
05:11Dans une troisième partie, on peut se poser la question, mais qu'est-ce que la science,
05:17finalement ? Est-ce que de toutes les formes de connaissances, je fais appel, j'ai en tête
05:26la religion, par exemple, ou même l'ignorance.
05:29De toutes ces formes de connaissances, la science est peut-être celle qui est le moins
05:34satisfaisante du point de vue de la vérité.
05:39Les scientifiques ne savent même pas quand ils ont trouvé la vérité.
05:41Ils sont les plus réticents.
05:43Il n'y a qu'en philosophie, par exemple, où on parle de la recherche de la vérité,
05:47mais les scientifiques sont très réticents à dire qu'ils possèdent la vérité.
05:52La science nous permet, me semble-t-il, de remettre perpétuellement en question ce que
05:58nous croyons être vrai.
05:59On parle à ce titre de paradigme scientifique, c'est-à-dire ce qui est tenu pour vrai
06:05en attendant d'autres découvertes.
06:09Pour chacune de ces parties, est-ce que vous auriez quelques auteurs de références ?
06:14Peut-être qu'il était intéressant de mentionner ou de citer ?
06:18Disons que comme le sujet, l'énoncé, porte quand même sur la science, qui est une notion
06:25épistémologique.
06:26Je pense à Karl Popper, par exemple, qui, dans sa méthode, parle de falsifiabilité.
06:34La falsifiabilité est la méthode par laquelle on teste les théories scientifiques, justement
06:39pour prouver non pas qu'elles sont vraies, mais qu'elles sont fausses.
06:41Et donc, elles peuvent encore progresser.
06:44Vous auriez d'autres…
06:47Je pense à Bachelard aussi, étant donné l'orientation, j'allais dire, épistémologique
06:54du sujet, c'est ces auteurs-là qui me viennent en tête.
06:57D'accord.
06:58Et alors, sur quoi on pourrait conclure ?
06:59On pourrait conclure, me semble-t-il, sur l'idée que la science ne peut pas satisfaire
07:07notre besoin de vérité, parce que qui dit satisfaction, dit contentement, dit cessation
07:17de recherche.
07:18Or, la science est une recherche constante de vérité.
07:23Et donc, elle ne se satisfait jamais de la vérité, en fait.
07:26Merci beaucoup, en tout cas, pour ce premier corrigé.
07:29Alors, on va passer tout de suite au deuxième.
07:32Je le rappelle, le deuxième sujet de dissertation était « L'État nous doit-il quelque chose ? ».
07:36Comment jugez-vous ce sujet par rapport au premier ?
07:40Ce sujet, me semble-t-il, est plus difficile que le premier.
07:48Déjà parce qu'il est condensé et la seule notion que nous avons au programme est l'État.
07:55Et il ne nous donne pas grand-chose, mais il en dit beaucoup.
07:58Et de ce point de vue, me semble-t-il, par rapport au premier, il était assez redoutable.
08:05Qu'est-ce qu'il fallait noter, relever dans ce sujet ?
08:08Du coup, il y a des notions clés à relever et à définir ?
08:13La notion que nous étudions avec les élèves, c'est l'État.
08:19Mais la notion seule ne vous donne pas la problématique.
08:22C'est-à-dire qu'il faut trouver des termes dans un sujet de philosophie à confronter.
08:27Et quand on regarde ce sujet, en fait, on n'a que des questions, on n'a pas de réponse.
08:34L'État nous doit-il quelque chose ?
08:38Mais c'est quoi, ce quelque chose ?
08:41Dans la suite de la réflexion, il faudra dire ce que c'est.
08:44De prime abord, c'est très vague, c'est quelque chose.
08:49On pourrait tout aussi dire rien, vous voyez.
08:52Et donc, ce qui a attiré mon attention à la lecture de ce sujet, c'est le terme « nous ».
08:58Parce que je pense que c'est là où résiderait une forme de problématique.
09:05C'est-à-dire que quand nous disons « l'État », en fait, nous sommes déjà partie prominente dans l'État.
09:10On ne peut pas se demander si l'État nous doit quelque chose,
09:15comme si je pourrais dire « Marine me doit quelque chose ».
09:19Et encore plus, le sujet ne dit pas « l'État me doit-il quelque chose ? »
09:24Le sujet nous dit « l'État nous doit-il quelque chose ? ».
09:27Donc, il y a la prise en compte de l'aspect communautaire dans cette question,
09:33et c'est ça qui le rend difficile.
09:35C'est-à-dire que l'État n'est pas en dehors de moi, en dehors de nous.
09:39Nous sommes l'État.
09:41Et quand on se demande « l'État nous doit-il quelque chose ? »,
09:44on a envie de demander « est-ce que nous nous devons quelque chose à nous-mêmes ? ».
09:47Vous voyez ? Donc, c'est pour ça que je trouve que ce sujet est assez compliqué, assez complexe.
09:54Alors, comment on peut essayer de surmonter cette difficulté ?
10:00On peut, dépendant de l'État duquel on pense, essayer de trouver ce que c'est quelque chose.
10:07Si vous prenez le cas de l'État de Hobbes, par exemple,
10:11on pourrait dire « l'État nous doit la sécurité », par exemple, « la garantie de nos libertés ».
10:17Ça, c'est l'État de Hobbes.
10:19Mais si vous prenez un autre philosophe comme Adam Smith,
10:22vous pourrez dire « l'État nous doit la répartition des richesses », par exemple.
10:28Si vous prenez un philosophe comme John Rawls,
10:31on dira « l'État doit augmenter les salaires les plus faibles », par exemple.
10:37Et on peut même aller aussi à penser qu'il y a des philosophes qui pensent que l'État est de trop.
10:46On les appelle les partisans de Hayek, « l'État minimal »,
10:51qui pensent que l'État ne doit pas trop se montrer.
10:55Et vous vous rappelez certainement cette discussion lors de la crise de Soprense en 2008,
11:02qui nous a surpris en France.
11:03La question était de savoir « est-ce que l'État doit donner de l'argent aux banques pour renflouer les caisses ? ».
11:10Et nous, en France, ça nous semblait tout à fait normal.
11:12Ben oui, mais aux États-Unis, ça a fait tout un débat,
11:14parce que l'État n'a pas à s'occuper de l'économie, par exemple.
11:18L'État doit rester en dehors des affaires.
11:21C'est la théorie de la fameuse « main invisible » chez Adam Smith.
11:26Il faut que le marché en lui-même s'auto-régule,
11:30et donc que l'État se montre le moins.
11:33Donc l'État nous doit-il quelque chose ?
11:36Mais de quel État parlons-nous ?
11:38Est-ce que c'est l'État d'Hobbes, par exemple ?
11:39Est-ce que c'est l'État de John Rawls ?
11:41Est-ce que c'est l'État d'Adam Smith, par exemple ?
11:43Est-ce que c'est l'État de Friedrich Hayek ?
11:47Est-ce que c'est en fonction de toutes ces théories d'auteurs qu'on peut remonter,
11:53que ça va nous donner des parties de développement que l'on peut,
11:57en fonction de l'État et ceci ?
11:59Donc ma première partie, je vais développer, ensuite vous pensez que c'est vrai ?
12:02Il me semble que c'était un traitement possible.
12:05Ce n'est pas le seul, mais c'était un traitement possible.
12:07C'est-à-dire que quelque chose s'est défini en fonction de comment vous voyez l'État.
12:13C'est-à-dire que dans un État libéral,
12:16vous n'allez pas demander à un État libéral de faire les choses comme le ferait,
12:19j'allais dire, un État qui se soucie de la cohésion sociale,
12:24par exemple, de la disparité entre les plus riches et les plus pauvres, par exemple.
12:31Très bien, écoutez, merci beaucoup en tout cas pour ce deuxième corrigé.
12:35On va peut-être passer à l'explication de texte.
12:37Alors, il s'agissait donc d'un texte de Simone Veil, « La condition ouvrière ».
12:41Alors, il y avait un petit risque de confusion, peut-être,
12:45des élèves avec Simone Veil, « Femme politique ».
12:48On est d'accord que non, là, il s'agit bien d'une philosophe française.
12:54Est-ce que c'est très grave si, malheureusement, on a confondu les deux ?
12:58Je pense que ça ne porte véritablement pas à l'incidence.
13:02C'est minime, c'est une confusion minime.
13:04Elle est regrettable, mais elle n'est pas de nature à remettre en cause
13:08le travail de compréhension qu'aurait fait un élève.
13:11Tout à fait, parce que c'est effectivement la compréhension du texte qui est notée.
13:16Oui, d'accord.
13:17Et alors, du coup, est-ce que, selon vous, ce texte présentait quelques difficultés ?
13:22À la lecture, vous savez, un texte de philosophie présente toujours des difficultés,
13:28d'autant plus un texte qui est présenté au baccalauréat, il est difficile.
13:34Je ne pourrais pas dire qu'il est facile.
13:35Mais il m'a semblé que le problème dont il parle n'était pas très compliqué à trouver, me semble-t-il.
13:47Il faut déjà noter que Simone Veil était une philosophe assez particulière.
13:52Parfois, on reproche aux philosophes d'écrire sur des choses qu'ils ignorent ou qu'ils ne maîtrisent pas très bien.
13:59Mais en fait, c'est une femme qui a travaillé dans les usines.
14:02Elle a donc côtoyé, je dirais, le quotidien des travailleurs.
14:08Et on peut dire, avec très peu de risque de se tromper, qu'elle sait de quoi elle parle.
14:13Donc, elle raconte ce qu'elle a vécu dans les ateliers industriels.
14:20Et le problème du texte, me semble-t-il, c'est qu'on demande toujours aux élèves d'essayer de relever le problème du texte,
14:27c'est les conditions de déshumanisation du travail, me semble-t-il, si j'ai tout compris.
14:34Le texte décrit un peu le processus d'aliénation du travail,
14:39c'est-à-dire comment le travailleur arrive à s'oublier comme homme et arrive donc même à se couper de ses semblables
14:51et à ne plus être, j'allais dire, affecté par ce qui arrive à ceux qui lui sont proches dans l'atelier.
14:58Il ne se passe pas autour de nous, on n'est plus en capacité de capter, en fait, on est tellement...
15:06Tout à fait, oui, parce que j'ai remarqué que le mot mobile est assez présent dans le texte,
15:14il définit le mobile comme l'énergie qui nous pousse à poser des actions.
15:21Et, me semble-t-il, dans ce texte, cette énergie, j'allais dire, nous coupe des autres aussi,
15:28parce que c'est une énergie qui ne nous pousse qu'à chercher la survie.
15:36On devient étranger à soi-même, mais on devient étranger même à ceux qui sont tout autour de nous.
15:41Dans ce cadre-là, je pense que le texte n'avait pas beaucoup de pièges, en fait, comme on dit dans ce texte.
15:50Il y avait des choses qui étaient importantes à relever selon vous ?
15:54Disons qu'il fallait, ce à quoi peut-être feront attention les correcteurs,
16:03je ne suis pas manaté pour donner des recommandations,
16:06mais si l'élève est capable de montrer ce processus de déshumanisation,
16:12c'est-à-dire comment le travail nous éloigne de ce que nous sommes,
16:16avec l'hypothèse que nous ne sommes pas que des êtres qui voulons nourrir le corps.
16:20Il y a un aspect de l'homme qui s'oublie dans le travail ouvrier.
16:26Ça m'a fait penser à beaucoup de textes qu'a écrits Max, qui décrit l'aliénation de l'homme par le travail.
16:35Et je trouve que, de ce point de vue, le texte n'avait pas beaucoup de pièges.
16:41Mais le texte décrit aussi une condition assez particulière.
16:46Il est vrai qu'aujourd'hui, ces conditions-là demeurent,
16:51mais ce n'est pas l'expérience que nous avons du travail, je suppose, vous et moi.
16:55Si j'avais à composer sur ce texte,
17:00peut-être que, à ma conclusion, j'aurais rappelé les points de vue d'un philosophe comme Kant ou Hegel,
17:06qui nous dit aussi que ce n'est pas le travail que nous nous transformons et que nous transformons le monde.
17:13Kant, notamment, dit que ce n'est pas le travail que l'homme s'humanise,
17:18et que le travail est un défi pour notre humanisation.
17:24Décrit comme ça, ça ne donne pas très envie, en fait.
17:27En effet, c'était un peu noir comme mot.
17:30Oui, tout à fait.
17:32Merci beaucoup, Laurent, pour ce corrigé.
17:34J'espère que ça vous a permis d'avoir quelques billes,
17:37petites informations sur votre propre travail sur ce sujet.
17:42Et je vous dis, en tout cas, à très bientôt pour une prochaine vidéo sur l'étudiant.fr.
17:47Sachez également que sur notre site, vous retrouvez plein d'informations sur le bac.
17:54Sous-titrage Société Radio-Canada