• il y a 6 mois
Transcription
00:00Parfait, je suis tout à fait ravie de venir en personne vous présenter ce nouveau roman.
00:11Certains libraires me connaissent peut-être, d'autres peut-être m'ont déjà lu.
00:16Alors autant vous le dire tout de suite, Les Sœurs et autres espèces du vivant, titre
00:24trouvé par mon éditrice, je précise, et la matière est fortement autobiographique.
00:30Je travaillais en effet il y a trois ans à une biographie possible d'une artiste oubliée
00:38de l'histoire, encore une vous allez me dire, qui s'appelait Madeleine Françoise Bassport.
00:42Alors elle m'intéressait à trois titres, parce que sa vie avait couvert l'ensemble
00:47du siècle des Lumières, parce qu'elle avait été la première femme en charge des
00:52vélins royaux de botanique, la première et l'unique femme de l'histoire, et parce
00:57qu'après avoir été célébrée par Rousseau, par Diderot, d'Alembert, elle avait sombré
01:03dans l'oubli.
01:04Donc je travaille à cette biographie quand ma sœur, unique, m'annonce un soir qu'elle
01:10quitte tout, qu'elle plaque tout et qu'elle part à Dubaï avec une valise.
01:13Alors ceux d'entre vous qui ont vécu ce choc, c'est-à-dire quand un proche sort
01:20du cadre, comme on dit, quitte les rails, et bien on se pose toujours cette question
01:25mais pourquoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ? Alors ce choc était d'autant plus important,
01:31avait d'autant plus d'impact pour moi, que j'étais moi-même en train de réfléchir
01:35à une autre vie que la mienne.
01:36Alors ce roman s'articule, vous l'avez compris, entre deux époques, le XVIIIe et
01:42puis le XXIe siècle, entre plusieurs lieux, Dubaï, Versailles, Paris, entre plusieurs
01:49motifs, le motif de la fuite, le motif de l'absence, le motif de l'oubli, et autour
01:54de quelques questions.
01:55La première, de quelle matière mystérieuse est faite la relation entre sœurs ? Quelles
02:01sont ses splendeurs ? Quelles sont aussi ses limites ? Les limites, c'est aussi moi,
02:07les miennes, en tant que biographe, jusqu'où peut-on aller dans l'entreprise biographique,
02:13jusqu'où peut-on se fondre dans la recherche de l'autre ?
02:16Et pourquoi, en fait, à la fin, pourquoi certaines personnes, certains êtres, choisissent
02:25plutôt la disparution que la présence, et plutôt l'oubli que la lumière ? Voilà,
02:33je pense que c'est suffisant pour vous peut-être donner le goût de le lire, merci.
02:46Voilà, vous m'entendez ? Donc, on publie également un premier roman dans la collection
02:59Premier Mille, d'une auteure qui s'appelle Coralie Griment, qui est lyonnaise.
03:05Quand j'ai reçu ce texte, j'ai été assez alertée et étonnée par la puissance de
03:13l'écriture, qui est extrêmement moderne, simple, mais qui nous entraîne immédiatement
03:22dans un monde qui est en fait celui d'Anne, qui a une cinquantaine d'années, qui a été
03:28une femme assez puissante, qui a réussi sa vie professionnelle, mais qui vit une période
03:35de chômage, et qui est confrontée à la maladie neurologique de sa mère, sa mère
03:44est atteinte de Parkinson, qui va de plus en plus vite, et donc comme elle est au chômage,
03:50elle va être dans la situation de l'enfant adulte qui rentre chez ses parents pour s'occuper
03:57de ses parents vieillissants.
03:59Donc elle rentre dans sa maison d'enfance, en fait d'adolescence, et elle va essayer
04:06de s'occuper le mieux possible de son père, qui lui aussi vieillit, et lui aussi a des
04:13absences, et surtout de sa mère, avec qui elle a toujours une relation très privilégiée,
04:22elle a toujours admiré sa mère, elle a toujours essayé de se faire aimer plus d'elle, alors
04:29que sa mère était finalement assez absente dans les gestes, dans les démonstrations
04:35affectives, et il va y avoir ce renversement, elle se trouve au moment où elle va devenir
04:42la mère de sa mère.
04:44Il se trouve que ce huis clos reconstitué de la famille, en fait la fratrie est composée
04:50d'un frère et d'une sœur, mais comme souvent dans ces moments-là, une personne de la fratrie
04:57prend sur elle finalement la lourde tâche de la présence, donc d'aider, de devenir
05:05un aidant, entre guillemets, et le huis clos va se reformer dans une maison qui a été
05:14pour elle la maison de son adolescence, mais qui, comme si c'était une sorte de pendant
05:21à la chute de la mer, devient une maison qui se déglingue, où le ménage n'est plus
05:30fait, et où les objets finalement reprennent, sont doués d'une sorte de vie qui échappe
05:41à la surveillance des humains qui habitent dans cette maison.
05:46C'est pour ça d'ailleurs que ça s'appelle « Inventaire du matrimoine », parce que
05:50Coralie Grimand a décidé de faire en sorte que chaque chapitre de son texte était une
05:58pièce, la chambre, la cuisine, la salle à manger, le jardin, où elle va décrire dans
06:07la décrépitude, la lente évolution donc vers quelque chose qui n'est pas du tout
06:13sympathique des objets, elle va en même temps parler de la décrépitude neurologique de
06:20sa mère, des relations donc exacerbées qu'elle aura avec le couple, le père, la
06:27mère, la mère, et c'est un texte qui moi m'a profondément touchée.
06:36Il y a quelque chose comme de l'organique qui tout d'un coup se délite.
06:43Le père était vétérinaire rural, il y a également l'invasion dans le jardin de certains
06:54animaux qui tout d'un coup viennent, prennent un peu le contrôle de ce jardin qui au départ
07:01était le jardin où le père faisait très attention que les choses soient taillées.
07:07Donc là les écureuils, même un sanglier, on sent que la nature reprend ses droits et
07:15c'est vraiment aussi un texte qui nous questionne beaucoup sur pourquoi les rôles dans la famille
07:25sont-ils mouvants ? Qui finalement prend l'ascendant sur l'autre à un moment donné ? Qu'est-ce
07:34qui ressort et qu'est-ce qui revient ? Qu'est-ce qui affleure ? Justement dans ce moment de
07:40fragilité familiale, ils vont revivre beaucoup de choses qu'ils ont vécues, qu'ils ont des
07:51secrets de famille, des problèmes entre eux, elles replongent finalement dans un passé
08:00assez douloureux pour elles mais ils vont quand même s'en sortir, c'est-à-dire que
08:07le texte, évidemment je vous parle de ça, ça a l'air d'être un texte assez lourd,
08:13mais en fait pas du tout parce qu'il y a aussi dans ce texte des moments burlesques
08:19où tout d'un coup la démence, la folie devient quand même quelque chose d'assez
08:25étonnant qui tranche sur le quotidien et il suffit que la fille décide d'accepter
08:33cet état de démence pas de côté de sa mère pour que les choses soient vécues de
08:38manière plus légère. Donc voilà, inventaire du patrimoine et c'est aussi, je rajoute
08:44ça parce que c'est un peu une sorte de livre à la Pérec pour les choses, elle a photographié
08:51les années 80 dans ce que les années 80 ont fait entrer comme objet dans les maisons
08:59et c'est une sorte d'inventaire justement de tous ces objets, enfin si vous êtes de
09:08cette génération-là, ça parlera à tout le monde, elle parle de la cuisine, elle parle
09:12des produits, des ustensiles ménagers, elle parle des façons dont l'architecture a changé
09:20quand on faisait construire une maison dans les années 80, c'est tout ça ce texte, mais
09:26c'est aussi et surtout un texte d'amour, voilà. Donc j'espère que vous aurez autant de plaisir
09:33à le lire que j'ai eu à le choisir et à le publier. Elle s'appelle Coralie Griment
09:42et c'est son premier roman, voilà.
09:44Alors vous l'aurez compris, nous ne publions que des textes d'amour, je voudrais donc sous
09:56ce biais dire un mot pour Elisabeth aussi parce que quand on est éditeur, on aime porter
10:01ses livres et là j'ai été à la fois ravie de sa présentation qui est pour vous en ligne
10:07et direct, mais il faut aussi en tant qu'éditeur dire un mot quand on aime un livre. Donc je
10:12me permets de rajouter juste un petit mot, c'est un livre extraordinairement touchant
10:17aussi par la présence des femmes dans les villes, la présence de la nature, il y a une
10:23femme qui dessine sur des plantes, ça on le sent beaucoup, il y en a une qui vit dans
10:29Paris, il y a une grande présence des lieux parisiens qui voyagent, qui vont en Bretagne,
10:33il y a une présence de la nature aussi très très forte dans les sœurs, Dubaï bien sûr, dans la fuite.
10:39Donc ça c'est pour le livre d'Elisabeth, mais le livre qui suit dans la même collection
10:44de La Rencontre, c'est l'histoire fantasque d'un homme au corbeau. Alors vous n'avez
10:50pas tout à fait le dernier état de la couverture, c'est de notre faute, on l'a eu très tardivement,
10:55mais cet homme au corbeau c'est un photographe qui s'appelle Foucazé et c'est le photographe
11:01le plus fantasque qui soit donné dans l'histoire de la photographie japonaise. Il est né en
11:071934 à Hokkaido et dès l'âge de 10 ans il a photographié en permanence tout ce qu'il
11:14voyait, mais tout ce qu'il voyait. Donc il s'est attaché beaucoup à ses chats, il a
11:19fait des milliers et des milliers de photos de ses chats qui se suspendaient dans des endroits
11:23terribles, il a photographié sa femme jusqu'à ce qu'elle parte parce qu'elle n'en pouvait
11:28plus. Il a inventé le selfie puisqu'il se met en gros plan sur la plupart de ses photos,
11:34alors on voit soit un doigt de pied, soit un doigt, soit son nez, de lui partout dans
11:39les espaces. Et puis il a aussi photographié Tokyo qui renaît de l'après-guerre, donc
11:47le Tokyo pauvre. Il a fait énormément de photos d'oiseaux et ce qu'il a rendu célèbre,
11:54ce sont les corbeaux. Il a guetté les corbeaux du soir au matin et il a eu vraiment un grand
11:59grand succès après une exposition de photos de corbeaux. Donc Sophie Gallet a imaginé
12:05les confidences de ce terrible et très sympathique Foukazé, fantaxe, excentrique, solitaire
12:17au cœur tendre pour aller vite et donc elle imagine les confidences de cet homme-là à
12:21son corbeau. Voilà pour Foukazé. Et puis le dernier livre, c'est un premier roman,
12:30donc là c'est un premier roman mais avec une trame biographique pour Foukazé. Et le
12:36dernier, donc vous avez la couverture, mais c'est aussi une nouvelle collection qui s'appelle
12:40Une journée particulière, en hommage bien sûr à Éthier Escolat. Qu'est-ce qui se
12:46passe quand une journée devient roman ? Qu'est-ce qui se passe quand vous vivez une journée
12:53dans votre vie plus forte que les autres ? Alors celle dont je vais vous parler, c'est un
12:59petit peu délicat parce que parler d'un crime, ça n'est jamais facile et c'est sans doute
13:04ce qui a taraudé Mathieu Gounel pour ce premier roman. Mathieu Gounel, certains d'entre vous
13:09le connaissent sans doute, c'est un grand spécialiste des météorites. Il a écrit
13:13beaucoup de choses sur les météorites et le voilà donc, il s'intéresse à une affaire
13:17criminelle. Et au travers de cette affaire criminelle, en fait, il a appris qu'une femme
13:23avait déposé un bébé au bord de la mer et attendu que la marée l'emporte. Mais ça
13:28n'est pas cette affaire qu'il nous relate, c'est ce qui s'est passé quand lui a appris
13:33ça. C'est le choc profond, intime, qu'il a ramené à sa propre histoire qui n'est
13:40fort heureusement pas la même histoire. Mais ce qu'il a voulu décrire, c'est au travers
13:44d'un crime, le lien indéfectible qui unit une mère et son enfant. Comment on peut, jusque
13:54dans le geste le plus terrible qui soit au monde, comment on peut croire qu'on protège,
14:02croire qu'on aime ou comment on peut aimer ? Qu'est-ce qui subsiste de l'amour ? Là
14:08encore, qu'est-ce qui subsiste quand on s'éloigne ? Qu'est-ce qui subsiste quand on perd ? Toujours
14:14l'aimer, c'est une façon de dire l'amour bien singulière.

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