Les urinoirs et les cuvettes de wc - qui viennent jusqu’à toucher les parties les plus intimes des hommes et des femmes pour mieux leur permettre d’évacuer leurs déjections dans d’immenses infrastructures souterraines - sont les seuls éléments de l’architecture à entretenir des relations de proximité aussi intenses avec les corps.
Avec leurs formes ergonomiques et leurs multiples modèles conçus pour épouser au mieux les courbes des bas-ventres et des fesses, les sanitaires poussent l’architecture, par essence prude et coercitive, à s’aventurer hors de ses frontières...
Au corps glorieux luttant contre la pesanteur promis pas les colonnes, elles substituent un corps accroupi et recroquevillé sur lui-même qui force pour accompagner l’expulsion de ses excréments comme s’il était entièrement soumis à la gravité...
Une pesanteur très bien exprimée dans la salle des fêtes du restaurant Les Cols à Olot réalisée par l’agence espagnole RCR. Lancés entre deux soutènement massifs, distants de plus de trente mètres, des longs tubes d’acier portant une toiture légère s’infléchissent sous leur propre poids pour dessiner des des guirlandes tandis que les toilettes creusées comme des grottes dans les masses porteuses livrent sans médiation les clients accroupis au bruit et à la fureur du monde extérieur...
Mais nous reviendrons aussi sur la dernière biennale de Venise ou plusieurs pavillons nationaux notamment ceux de la Finlande et de l’Allemagne présentaient des toilettes sèches et préconisaient le recyclage des excréments en introduisant un nouveau rapport au corps et à la nature...
Avec leurs formes ergonomiques et leurs multiples modèles conçus pour épouser au mieux les courbes des bas-ventres et des fesses, les sanitaires poussent l’architecture, par essence prude et coercitive, à s’aventurer hors de ses frontières...
Au corps glorieux luttant contre la pesanteur promis pas les colonnes, elles substituent un corps accroupi et recroquevillé sur lui-même qui force pour accompagner l’expulsion de ses excréments comme s’il était entièrement soumis à la gravité...
Une pesanteur très bien exprimée dans la salle des fêtes du restaurant Les Cols à Olot réalisée par l’agence espagnole RCR. Lancés entre deux soutènement massifs, distants de plus de trente mètres, des longs tubes d’acier portant une toiture légère s’infléchissent sous leur propre poids pour dessiner des des guirlandes tandis que les toilettes creusées comme des grottes dans les masses porteuses livrent sans médiation les clients accroupis au bruit et à la fureur du monde extérieur...
Mais nous reviendrons aussi sur la dernière biennale de Venise ou plusieurs pavillons nationaux notamment ceux de la Finlande et de l’Allemagne présentaient des toilettes sèches et préconisaient le recyclage des excréments en introduisant un nouveau rapport au corps et à la nature...
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Art et designTranscription
00:00:00 Les toilettes.
00:00:02 Avant de partir de chez moi, je suis allé au moins trois fois aux toilettes.
00:00:07 Et à peine arrivé ici, j'y suis retourné avant de m'asseoir devant vous.
00:00:13 Les toilettes.
00:00:15 On peut s'imaginer, vous voyez, se consoler, s'amuser,
00:00:19 mais on ne peut pas s'imaginer.
00:00:21 On ne peut pas s'imaginer.
00:00:23 On ne peut pas s'imaginer.
00:00:25 Les toilettes. On peut s'imaginer, vous voyez, se consoler sans toilettes,
00:00:32 puisqu'en fait c'est quelque chose d'assez récent.
00:00:35 Les gouts parisiens, ça date du 19e siècle, c'est pas très...
00:00:40 C'est pas très... Il n'y a pas très longtemps.
00:00:42 Les sanisettes, c'est très... Tout ça, ça date du 19e siècle, c'est très récent.
00:00:51 Et c'est vrai qu'on peut se demander ce que seraient nos corps, vous voyez,
00:00:55 sans toilettes, sans les cuves de WC, sans les urinoirs.
00:01:00 On serait toujours tendu, on aurait des vapeurs,
00:01:04 on serait toujours en train de se retenir, vous voyez.
00:01:07 Et donc, on est presque connecté, donc constamment, à ces instruments.
00:01:16 Et ces instruments, c'est vrai que je ne vais pas montrer d'image,
00:01:19 d'ailleurs c'est le livre d'Henri Guéran, "Les lieux", que je vous conseille de lire,
00:01:24 c'est sûrement le plus intéressant de mon cours d'ailleurs,
00:01:26 mais qui le rappelle, vous voyez,
00:01:30 puisque avant les toilettes, avant les WC,
00:01:37 effectivement il y avait des tas d'instruments, vous voyez,
00:01:40 qui avaient un rapport intime au corps, vous voyez,
00:01:44 pour recueillir les urines, pour recueillir aussi les excréments,
00:01:49 quand on ne pouvait pas faire autrement,
00:01:51 puisqu'effectivement, il y avait, au XVIIIe siècle par exemple,
00:01:55 très très peu, il n'y avait pas de toilettes.
00:01:57 C'était des seaux, c'était des, qu'on appelle ça, des chaises percées,
00:02:04 mais il y avait très très peu de toilettes.
00:02:08 En tout cas, ce n'est pas du tout un cours d'histoire,
00:02:10 mais je voudrais bien qu'on rentre là-dedans,
00:02:13 vous voyez, sur, d'abord, cette dépendance,
00:02:17 cette dépendance à tout ce système
00:02:21 qui vient donc recueillir nos urines ou nos excréments
00:02:27 pour pouvoir nous libérer.
00:02:29 D'ailleurs, c'est vrai que ce cours, sur les toilettes,
00:02:32 je le fais dans le cadre des éléments de l'architecture,
00:02:36 c'est vrai que je me suis inspiré de l'exposition d'Oma et de Remcolas
00:02:47 à Venise en 2014, puisque dans ces éléments de l'architecture,
00:02:52 même si ça n'a pas beaucoup de rapport avec ce que je dis,
00:02:54 mais il avait intégré les toilettes.
00:02:56 Et c'est vrai que ce cours, il aurait pu, disons, s'inscrire,
00:03:00 dans le cours que j'avais fait il y a quelques années,
00:03:03 sur les actes fondamentaux.
00:03:06 Et d'ailleurs, il a beaucoup de rapport avec le cours "Manger".
00:03:12 On va le voir, puisque pour manger,
00:03:14 effectivement, c'est un truc de fou, si vous voulez.
00:03:17 Parce que pour qu'on n'ait pas faim, jamais pratiquement,
00:03:22 pourquoi fasse-t-on trois repas par jour, le matin, le midi, le soir ?
00:03:25 Putain, on a colonisé toute la planète, on a tout déforesté,
00:03:30 on a créé des champs partout,
00:03:33 et après, on a créé des infrastructures qui mènent des pays les plus lointains,
00:03:37 des aéroports, des pistes d'aviation, des voies maritimes,
00:03:41 pour que jamais, jamais, nous n'ayons faim.
00:03:45 Et quelque part, c'est pareil pour les toilettes.
00:03:49 Pour que jamais nous ayons des envies,
00:03:52 pour que jamais nous ne nous retenions,
00:03:55 il y a ce réseau qui vient drainer,
00:03:59 après vous avoir apporté à manger,
00:04:03 il y a ce réseau qui vient drainer vos excréments.
00:04:07 C'est plutôt l'image un peu de base.
00:04:09 C'est la première image.
00:04:11 Je vais revenir dessus tout de suite.
00:04:13 Et l'autre image, c'est un peu ce que je dis dans mon article
00:04:16 que j'ai publié dans le dernier "Archiscopide", sur ce thème-là.
00:04:19 Ça s'appelle "Non-lieu".
00:04:21 Pourquoi "non-lieu" ?
00:04:23 Pourquoi ? Parce qu'on dit "toilette", mais...
00:04:26 Il y a mille noms, il y a mille mots.
00:04:29 C'est toujours des périphrases pour exprimer ces lieux.
00:04:34 Mais il n'y a pas vraiment de mot juste.
00:04:36 Il y a la salle à manger, bon d'accord,
00:04:38 mais il n'y a pas... Excusez-moi, la salle à chier, ça existe pas.
00:04:41 Donc il n'y a pas le mot juste pour qualifier ce lieu.
00:04:46 C'est un lieu qui n'a pas de nom,
00:04:49 qui n'est pas nommable,
00:04:52 comme, effectivement, un autre être
00:04:55 qui ne peut pas être nommé, qui n'est pas nommable.
00:04:58 Et donc c'est vrai qu'il y a aussi, si vous voulez,
00:05:01 quelque chose de presque sacré,
00:05:04 à la fois dans cet acte
00:05:08 et puis dans le lieu qui le permet.
00:05:11 Nous allons voir ça dans le courant du cours.
00:05:17 Je commence par ça, "corps connecté".
00:05:20 On est connecté, on est connecté comme...
00:05:23 Le mec, dans "Matrix",
00:05:26 c'est la plus fabuleuse image du film, je trouve,
00:05:29 où il est dans sa capsule,
00:05:32 et il est donc complètement connecté
00:05:35 par tous ses organes à la matrice.
00:05:39 Et puis il s'aperçoit effectivement que tous les autres humains,
00:05:44 bien qu'ils soient comme lui,
00:05:47 sont connectés par des câbles
00:05:50 qui viennent se brancher sur son corps, sur son cerveau,
00:05:53 sur tous ses organes,
00:05:56 pour qu'il puisse vivre dans sa capsule,
00:05:59 tout en étant à la fois nourri
00:06:02 et puis aussi, bien sûr,
00:06:05 libéré de ses excréments.
00:06:10 Voilà, on voit très bien la connexion du corps.
00:06:15 Et quelque part, je vous demande, quand vous irez aux toilettes,
00:06:18 de voir ça, de réfléchir à ça tout à l'heure.
00:06:22 Comment on est connecté et comment, effectivement, c'est vital.
00:06:26 Je ne suis pas du tout, moi, dans le côté, disons...
00:06:31 Enfin, je ne suis pas contre la société de contrôle,
00:06:34 mais c'est évident que, voilà, on est...
00:06:37 L'homme, c'est vrai qu'il est, disons, couvé inconstamment
00:06:40 pour pouvoir être le plus intelligent possible,
00:06:44 pour avoir l'esprit le plus libéré possible,
00:06:47 pour pouvoir travailler le mieux possible,
00:06:50 pour pouvoir faire évoluer la société le mieux possible.
00:06:53 Et donc, effectivement, il est libéré de la faim
00:06:56 et puis il est libéré de la retenue
00:06:59 quand il doit aller déféquer ou uriner.
00:07:04 Voilà, donc, là, maintenant, on va rentrer un tout petit peu dans l'architecture.
00:07:08 Mais c'est vrai que je n'ai pas tellement d'exemples à vous faire voir.
00:07:12 Et c'est ça qui est un peu terrible, finalement, c'est que...
00:07:15 Vous voyez, quand j'ai fait le cours sur manger,
00:07:18 c'est vrai qu'il y a des salles à manger qui sont extraordinaires,
00:07:21 il y a des salles à manger de Wright,
00:07:24 il y a des choses comme ça qui sont vraiment formidables.
00:07:27 C'est des espaces qui sont vraiment totalement étonnants.
00:07:32 Vous les avez tous en tête.
00:07:34 Et par contre, les toilettes, non.
00:07:37 On va revenir là-dessus tout à l'heure,
00:07:39 il y a très peu de choses.
00:07:42 Mais par contre, il y a, si vous voulez,
00:07:45 c'est Viollet-le-Duc qui l'a découvert,
00:07:48 il y a beaucoup, justement, dans l'architecture médiévale.
00:07:52 Parce que dans l'architecture médiévale, effectivement,
00:07:55 dans les châteaux, dans les bâtiments fortifiés,
00:07:59 les toilettes, les latrines, étaient rejetées à la périphérie
00:08:06 et puis donc on faisait ces excréments dans des tourettes
00:08:11 et les excréments étaient rejetés ensuite dans les fossés.
00:08:16 Je trouve ça poétiquement très beau parce que ça met en place deux choses.
00:08:21 D'abord, effectivement, l'intérieur du château, il est propre,
00:08:26 puisque personne ne le fait à l'intérieur.
00:08:28 Et en même temps, l'intérieur du château est protégé
00:08:32 par d'énormes murailles en pierre.
00:08:34 Et puis en même temps, sur ce dispositif,
00:08:37 vient se greffer un autre dispositif,
00:08:40 c'est celui du marquage du territoire par ces excréments.
00:08:45 Donc il y a à la fois un dispositif architectural
00:08:48 et puis un dispositif complètement animal.
00:08:52 Ça veut dire que, d'un côté, il y a l'intériorité,
00:08:56 il y a l'intimité, il y a le territoire protégé,
00:08:59 et puis de l'autre, il y a l'ailleurs.
00:09:02 Et c'est à la fois marqué par des murs en pierre
00:09:05 et puis par l'odeur des excréments qui tombent dans le fossé.
00:09:11 Voilà un autre exemple.
00:09:13 Il a beaucoup réfléchi là-dessus parce que finalement,
00:09:15 au 19e siècle, comme je l'ai dit en début du cours,
00:09:18 il y avait très peu de...
00:09:20 C'était un impensé complet.
00:09:23 C'était toujours des pots de chambres, des chaises percées,
00:09:27 c'était des tas d'instruments.
00:09:29 Il y avait quelques fois des toilettes
00:09:33 avec des canalisations qui menaient dans des fosses sceptiques.
00:09:37 Il y avait des fosses sceptiques, mais il n'y en avait pas tout le temps.
00:09:41 Et c'est vrai que les rues étaient d'une puanteur démente.
00:09:45 Et donc c'est pour ça qu'il a été fasciné en tant que rationaliste,
00:09:49 en tant qu'humaniste, en tant que cérémonien,
00:09:52 je ne sais quoi encore, vous voyez,
00:09:54 en tant que progressiste, en tant qu'hygiéniste.
00:09:57 Il a été complètement fasciné par le château-fort.
00:10:01 Donc là encore, vous voyez, une latrine qui est en porte-à-faux
00:10:05 sur un mur.
00:10:07 Ce qui est intéressant, c'est que la latrine,
00:10:10 comme je le disais tout à l'heure,
00:10:12 c'est à la fois un lieu d'aisance,
00:10:14 mais c'est aussi un élément qui peut rentrer dans la défense du château-fort.
00:10:18 Les deux systèmes sont totalement imbriqués.
00:10:23 Autre exemple des latrines du château de Marcousy,
00:10:27 toujours décrites par Viollet-le-Duc
00:10:31 dans le dictionnaire raisonné de l'architecture française.
00:10:34 Il faut le voir à la fois comme quelque chose d'historique,
00:10:38 mais il faut le voir aussi à la fois comme un manifeste,
00:10:42 vous voyez, à ses dessins,
00:10:44 un manifeste pour une réflexion sur l'hygiène et sur la propreté.
00:10:49 Là, vous voyez, ce sont des courcives qui sont en espalier
00:10:54 et qui sont reliées non pas par l'extérieur au fossé,
00:10:58 mais qui sont reliées par des colonnes.
00:11:01 Ça aussi, c'est intéressant.
00:11:03 Vous voyez, quand on voit le cours sur la colonne,
00:11:07 vous voyez la colonne, le cours que j'ai fait la dernière fois,
00:11:11 c'est la colonne qui porte, vous voyez.
00:11:14 Et puis ça correspond aussi à un corps glorieux.
00:11:17 Tandis que là, c'est la colonne qui est creusée
00:11:20 et par laquelle tombent les déjections
00:11:23 et sur laquelle s'assit, vous voyez,
00:11:27 non pas le corps glorieux du Doric ou de Dionyque,
00:11:33 je ne sais pas quoi, mais c'est le corps accroupi,
00:11:36 presque animal.
00:11:38 Voilà, encore un exemple aussi intéressant.
00:11:41 Là, on le voit, c'est donc à Pierrefonds,
00:11:44 complètement repensé, redessiné et reconstruit par José-Helduc.
00:11:49 Vous voyez, on voit, là, c'est une tour de toilettes
00:11:53 où les toilettes sont superposées de latrines,
00:11:56 où elles sont superposées d'étage en étage.
00:11:59 Et puis, au rez-de-chaussée,
00:12:01 les excréments qui sont recueillis
00:12:05 ne tombent pas dans le fossé,
00:12:08 mais sont recueillis dans une fosse d'aisance.
00:12:15 Cette fosse d'aisance, elle est faite aussi
00:12:18 pour être nettoyée.
00:12:21 C'est pour ça qu'on voit un bloc en pierre
00:12:26 au centre de la fosse d'aisance.
00:12:28 C'est pour aider à l'évacuation des excréments
00:12:34 quand il faut nettoyer cette fosse.
00:12:38 Autre exemple, là, on voit Viollet-le-Duc,
00:12:42 qui est fasciné par ces dispositifs médiévaux.
00:12:46 Peut-être qu'il les a aussi fantasmés, quelque part.
00:12:49 C'est un regard critique,
00:12:52 un regard de constructeur sur une période du passé.
00:12:56 Et là, c'est un autre regard critique,
00:12:59 un autre regard de constructeur sur l'architecture du passé.
00:13:03 Ça, ce sont les maisons fortifiées d'Écosse,
00:13:07 les maisons-tours.
00:13:09 C'est le château de Cumblogon.
00:13:12 C'est un bâtiment fortifié qui permettait
00:13:15 de marquer le territoire,
00:13:18 parce qu'on revient aussi sur les cours précédents,
00:13:21 de marquer la frontière entre le territoire de l'Écosse
00:13:24 et le territoire de l'Angleterre.
00:13:27 Et là aussi, bien sûr, il y a un système.
00:13:31 Mais simplement, c'est vrai que ce système-là,
00:13:34 les toilettes, les latrines,
00:13:37 elles sont prises totalement dans l'épaisseur du mur.
00:13:41 Et ce qu'il y a aussi de fou, c'est que, voyez,
00:13:44 au centre, il y a une grande pièce totalement polyvalente.
00:13:48 Et puis, à la périphérie, dans l'épaisseur du mur de pierre,
00:13:51 il y a des chambres qui bénéficient de la lumière,
00:13:55 notamment les toilettes, les circulations,
00:13:58 les espaces pour lire, les espaces pour discuter.
00:14:05 Tout ça, c'est autour du grand espace central.
00:14:08 Et là, le regard sur ce château,
00:14:12 c'est ce qui a permis au grand architecte américain,
00:14:15 Lewis Kahn, de théoriser la question
00:14:18 des espaces servants et des espaces servis,
00:14:21 la séparation des espaces servants et des espaces servis.
00:14:25 Notamment, là, par exemple, dans la bibliothèque d'Exeter,
00:14:29 il reprend le dispositif, la typologie du château écossais.
00:14:35 Donc, on a un vide central,
00:14:37 un vide où il ne se passe strictement rien.
00:14:39 Et puis, après, à la périphérie,
00:14:41 il y a des anneaux comme ça, avec des activités.
00:14:45 D'abord, effectivement, les étagères
00:14:50 et les réserves avec les livres.
00:14:52 Et puis, ensuite, au bord des fenêtres,
00:14:55 les espaces de lecture.
00:14:57 Et bien sûr, les toilettes viennent rentrer dans ce dispositif,
00:15:01 puisqu'aux quatre angles, vous avez deux cages d'escalier,
00:15:05 un petit bâtiment pour les conférences,
00:15:10 et bien sûr, les toilettes.
00:15:13 Voilà.
00:15:15 J'ai fait tout ça pour parler d'un projet
00:15:18 dont j'ai déjà parlé, ici, je crois, dans le cours sur manger.
00:15:20 Parce que je le trouve vraiment extraordinaire.
00:15:22 Il n'a pas du tout été construit.
00:15:27 C'est une recherche par le projet,
00:15:30 qui a été financée par une agence,
00:15:32 c'est Yvelion et puis Leclerc,
00:15:34 qui est foncée à Leclerc en 1987, il y a déjà longtemps.
00:15:37 Donc, ils ont fait des recherches là-dessus.
00:15:39 Ils ont repris le schéma Cagnan,
00:15:43 avec les toilettes, avec les activités
00:15:46 à la périphérie et le vide au centre.
00:15:49 Et putain, ils l'ont appliqué au logement.
00:15:52 C'est-à-dire qu'on voit, sur la perspective,
00:15:57 vous avez des bandes, au niveau des fenêtres,
00:16:00 et dans ces bandes, vous avez toutes les activités,
00:16:02 que ce soit la cuisine, la salle de bain, la baignoire, la douche,
00:16:06 les toilettes, vous voyez.
00:16:08 Et au centre, c'est complètement vide.
00:16:11 Autant plus que, pourquoi ils ont fait ça aussi ?
00:16:13 Parce qu'en fait, à cette époque-là,
00:16:15 ils étaient amenés à construire en banlieue parisienne.
00:16:18 Et c'est vrai qu'en banlieue parisienne,
00:16:20 quand on passe dans les rues, on a l'impression
00:16:22 que les bâtiments, ils ne sont pas habités.
00:16:24 Parce que, effectivement, les gens travaillent,
00:16:26 ils rentrent tard le soir,
00:16:28 quand ils rentrent, ils font la cuisine,
00:16:30 la cuisine, elle est plutôt à l'intérieur.
00:16:32 Le matin, quand ils se lavent dans leur salle de bain,
00:16:36 qui est plutôt à l'intérieur.
00:16:38 Et le soir, ils regardent la télévision plutôt à l'intérieur.
00:16:40 Et là, l'idée, c'était d'inverser complètement le processus
00:16:43 et de reporter toutes les activités en façade.
00:16:47 Et notamment, les toilettes.
00:16:49 On les voit sur la photo,
00:16:51 elles sont dans la bande bleue.
00:16:53 Donc on revient, c'est une manière de revenir quelque part,
00:16:57 mais d'une autre façon.
00:16:59 Au château fortifié de Viollet-le-Duc,
00:17:02 où les toilettes étaient rejetées à la périphérie.
00:17:05 Mais là, le sens a changé.
00:17:07 Ce n'est pas vraiment pour rejeter les excréments
00:17:11 à la périphérie, pour marquer le territoire,
00:17:14 mais c'est au contraire pour ramener toute l'activité en façade,
00:17:20 pour qu'il y ait une interface entre la rue qui est déserte,
00:17:23 en général, dans certaines banlieues parisiennes,
00:17:28 et puis des appartements où l'activité se concentre trop au centre.
00:17:33 Là, le centre est vide.
00:17:35 C'est les chambres, c'est le séjour,
00:17:38 où on s'assoit, on regarde la télé.
00:17:40 Et par contre, c'est la périphérie, on peut prendre sa douche.
00:17:43 Donc en façade, où on peut faire ses besoins,
00:17:46 ou prendre son bain dans la façade.
00:17:50 Autre vision aussi,
00:17:53 c'est un peu le dispositif architectural.
00:17:56 Comment on gère cette question des toilettes
00:18:00 quand on dessine un plan ?
00:18:02 Autre dispositif,
00:18:04 c'est le...
00:18:06 Un autre bâtiment dont j'ai déjà parlé aussi,
00:18:08 c'est le faministère de Guise, de Jean-Baptiste de Gaudin.
00:18:12 C'est une utopie aspirée du faministère de Fournier,
00:18:17 lui-même inspiré de Versailles.
00:18:20 C'est un Versailles pour le peuple,
00:18:22 c'est une idée qui a toujours travaillé les constructeurs, les architectes.
00:18:26 Mais simplement, c'est vrai que là,
00:18:28 peut-être mieux que Versailles,
00:18:30 les questions d'hygiène étaient vraiment mises en évidence.
00:18:34 Notamment, on va voir les toilettes.
00:18:38 Ça, c'est le bâtiment principal,
00:18:41 avec une gigantesque cour centrale,
00:18:44 fermée par une verrière,
00:18:46 et puis des coursives qui permettaient de rentrer,
00:18:49 qui permettent toujours, parce que c'est toujours habité,
00:18:51 qui permettent aux habitants d'entrer dans leurs appartements.
00:18:55 Je vous conseille vraiment d'aller voir ce truc,
00:18:57 c'est un truc complètement sidérant.
00:18:59 Les appartements étaient à double orientation,
00:19:01 il y avait des portes et des fenêtres sur la cour et sa verrière,
00:19:06 et puis des fenêtres vers l'extérieur.
00:19:10 Ça, c'est le plan.
00:19:12 En général, les appartements faisaient deux chambres,
00:19:16 deux pièces, une sur la cour et une sur le jardin.
00:19:22 Le système permettait de relier deux pièces pour faire un cas de pièce.
00:19:30 Mais surtout, ce qui est important, c'est les toilettes.
00:19:33 Donc elles sont ici, dans un angle du bâtiment,
00:19:38 elles sont ventilées,
00:19:40 elles sont à proximité de l'escalier,
00:19:42 parce que c'est des flux qui sont prêtés.
00:19:47 C'est ça qui est intéressant dans ce projet,
00:19:49 c'est qu'on raisonne en termes de flux.
00:19:51 Flux de personnes qui montent et qui descendent
00:19:54 pour rejoindre les coursives et pour aller à leur appartement,
00:19:57 et flux des excréments, des étrons, des crottes,
00:20:01 qui tombent dans la fosse septique.
00:20:06 Ça, c'est l'appareil qui est fabriqué par l'entreprise Godin.
00:20:11 C'était une fonderie,
00:20:13 ils faisaient des éléments en fonte, notamment des poêles.
00:20:17 Là, c'est un toilette.
00:20:19 Ce n'est pas un water closet,
00:20:21 parce qu'il n'y a pas de siphon.
00:20:24 Mais il y a un mécanisme assez complexe,
00:20:26 avec une trappe,
00:20:28 qui permet de faire disparaître et tomber des excréments.
00:20:31 Il y a aussi de l'eau, qui permet le nettoyage de la cuve.
00:20:35 Il y a à la fois la cuve,
00:20:39 et ensuite, la mise en réseau.
00:20:41 Parce qu'avant, c'était comme ça.
00:20:43 C'est une image des camérons de Bocasse.
00:20:47 On voit une construction en bois,
00:20:52 au-dessus de la rue, avec une latrine.
00:20:55 Les gens faisaient directement au-dessus de la rue.
00:20:58 Il y avait certaines rues, dans lesquelles il ne fallait surtout pas aller.
00:21:01 C'est ce qu'on raconte dans la légende de l'histoire.
00:21:04 On était pris dans une sorte de déluge de merde.
00:21:08 C'est ça.
00:21:11 Après, c'est un plan de...
00:21:14 J'ai pris celui-là, parce que je ne suis pas du tout ingénieur.
00:21:18 Je ne veux pas faire un cours d'histoire, ni d'ingénierie.
00:21:22 Je ne suis pas plombier, ni de plomberie.
00:21:24 Je vais rester, mais quand même, malgré tout, traiter cette question-là.
00:21:27 Parce que, bien sûr, au XVIIIe siècle, notamment Pierre Pate,
00:21:31 d'autres architectes, d'autres ingénieurs,
00:21:34 se sont penchés sur la question des égouts.
00:21:37 Ils ont commencé à réfléchir aux égouts,
00:21:39 et comment, effectivement, arriver à connecter les immeubles aux égouts.
00:21:44 Et là, vous voyez, on voit, sur le bâtiment à gauche,
00:21:47 on voit une latrine, qui donne directement sur un conduit,
00:21:51 qui mène à l'égout qui se trouve au-dessous de la rue.
00:21:56 Donc, le système, il se rationalise.
00:21:59 Et puis, ensuite, bien sûr, ça permet de libérer
00:22:03 les espaces publics de l'odeur pestinentielle.
00:22:08 Et ça permet aussi de les traiter.
00:22:11 De les traiter presque comme des intimités.
00:22:14 Ça, c'est le plan de Pate.
00:22:16 C'est un plan totalement utopique,
00:22:18 mais il y a certaines places qui existent.
00:22:20 La place des Victoires, la place des Vosges,
00:22:23 la place de la Concorde, mais il y a d'autres places.
00:22:28 Parce qu'effectivement, à partir du moment où on libère la ville
00:22:33 des fosses sceptiques, et puis de tous les artisans
00:22:38 qui étaient attachés, si vous voulez, à les nettoyer,
00:22:42 à porter dans les wagonnets les déjections,
00:22:48 et à les vendre aux paysans pour qu'ils puissent,
00:22:50 là aussi, le système mangé et le système déféqué,
00:22:54 ils se rejoignent ou ils se superposent
00:22:57 pour les vendre aux paysans, pour qu'ils puissent
00:22:59 épander leur champ.
00:23:02 Tout ça, petit à petit, ça va disparaître
00:23:05 et ça va permettre de libérer complètement la ville
00:23:09 de l'odeur, des déjections, et aussi, quelque part,
00:23:13 c'est aussi la naissance d'un espace, je pense,
00:23:17 sans extériorité, un espace sans dehors.
00:23:21 Aujourd'hui, c'est vrai qu'il y a très peu de dehors.
00:23:24 Dans le château Fort, c'est sûr que tu es en dehors.
00:23:26 Parce que si tu vas dans le fossé, tu vas savoir
00:23:28 ce que c'est que l'extérieur.
00:23:30 Tandis qu'ici, non. Quelque part, tu es toujours chez toi.
00:23:33 Tout est propre, tout est parfaitement pacifié.
00:23:37 Et donc, c'est vrai qu'on voit apparaître
00:23:42 la ville contemporaine qui est une ville
00:23:45 sans extériorité, sans dehors.
00:23:49 Donc là, je vais revenir, comme je l'ai dit,
00:23:52 à la biennale de Colas,
00:23:55 qui s'appelait "Element".
00:23:58 Il y avait effectivement une salle réservée aux toilettes.
00:24:03 Cette salle, elle est intéressante parce que
00:24:06 il dit bien, quelque part, qu'à un moment donné,
00:24:09 une fois qu'on a inventé...
00:24:11 D'ailleurs, je remercie Alice Grégoire,
00:24:13 qui devait venir aujourd'hui, avec laquelle j'ai parlé
00:24:16 avant la conférence.
00:24:18 J'ai reparlé, parce que je l'avais déjà parlé avant.
00:24:22 En tout cas, elle m'a remis des choses en mémoire.
00:24:25 Et c'est vrai qu'on a confié...
00:24:27 C'est ça, ce que je disais tout à l'heure.
00:24:29 On a confié le problème aux plombiers.
00:24:33 Les toilettes, non, ça ne concerne pas l'architecture.
00:24:36 Ce qu'il y a, c'est qu'il faut
00:24:39 généraliser le "water closet", c'est-à-dire le siphon,
00:24:42 qui permet que les odeurs ne remontent pas
00:24:46 par la descente.
00:24:48 Et puis, après, bien connecter la cuvette
00:24:51 à la descente, la descente à l'égout.
00:24:54 Et puis, après, c'est fini.
00:24:56 Il suffit de dessiner des pièces d'environ
00:24:59 2 mètres carrés, 1 mètre de large,
00:25:01 et puis 2 mètres de profondeur.
00:25:03 Et puis, la question est réglée.
00:25:05 Et ce qui est fascinant dans cet expo,
00:25:07 c'est qu'il met toutes les toilettes les unes à côté des autres.
00:25:10 Il met pratiquement une toilette d'un terme romain,
00:25:12 je ne sais pas lequel, à côté d'une toilette japonaise.
00:25:15 Je pense que c'est Toto, puisque c'est la grande entreprise
00:25:19 qui a finalement volé la question
00:25:22 de l'architecture, de la déjection aux architectes.
00:25:26 Regardez-là, elle est noire, on dirait une Mercedes.
00:25:30 C'est un peu ça, c'est la Mercedes de la toilette.
00:25:33 C'est-à-dire que vous vous asseyez dessus,
00:25:36 tout ce qui pourrait être spatialisé,
00:25:41 excusez-moi, bien sûr que c'est embêtant de rentrer dans les terres,
00:25:45 mais les gens dans les terres, ils se torchent les fesses, tout ça.
00:25:48 Tout ça, c'est absorbé par l'objet.
00:25:51 Cet objet noir, puisqu'il y a tout un système électronique,
00:25:59 on appuie sur des boutons, et puis vous vous asseyez,
00:26:03 vous ressortez, vous êtes propre et parfumé.
00:26:06 D'ailleurs, je me rappelle que j'avais été invité un jour en Corée
00:26:09 avec d'autres personnes, et avec ces personnes,
00:26:12 le soir, quand on parlait ensemble,
00:26:15 en tout cas, elle, moi, je n'avais rien compris de toute façon,
00:26:18 donc je n'ai même pas cherché à comprendre,
00:26:20 mais elle ne parlait que des toilettes, s'il vous plaît,
00:26:22 parce que personne ne comprenait comment ça marchait.
00:26:24 C'était en Corée, il y avait des tas de boutons,
00:26:26 et personne n'a compris.
00:26:28 Il suffisait d'appuyer sur un bouton,
00:26:30 on pouvait l'enranger ton bébé.
00:26:32 C'était un délire.
00:26:34 D'ailleurs, c'est vrai que...
00:26:36 Je voudrais revenir là-dessus, mais je dis pour ce moment,
00:26:38 mais le rapport aussi, c'est un peu...
00:26:40 Vous me direz que c'est un peu osé,
00:26:42 mais je ne pense pas tant que ça.
00:26:44 Le rapport aussi, disons, d'efféquer et d'enfonter.
00:26:47 D'ailleurs, je crois que c'est Roger Henri Véran,
00:26:50 vous ne pouvez pas le voir directement,
00:26:52 mais il parle justement de toute la poésie sur les crottes.
00:26:55 Tous les poètes du 16e siècle,
00:26:57 ils ont tiré complètement sur les étrons de leur bien-aimé.
00:27:00 Et là, c'est pareil.
00:27:03 Dans les poètes japonaises, quand on va au Japon,
00:27:06 vous voyez, c'est des systèmes complètement délirants,
00:27:08 parce qu'on voit exactement ce qu'on fait.
00:27:10 Tout est fait pour que l'étron,
00:27:13 quand il tombe de votre derrière,
00:27:15 il reste tel quel.
00:27:17 Il prenne la meilleure forme possible.
00:27:19 Et après, quand vous trouvez le bouton pour tirer la chasse,
00:27:23 eh bien, ça part, il fait une sorte de valse dans un tourbillon,
00:27:27 et puis il disparaît, vous voyez.
00:27:29 Il y a tout un travail comme ça.
00:27:31 C'est presque...
00:27:33 Enfin, on pourrait dire...
00:27:35 Oui, c'est vrai, on pourrait dire un enfoncement,
00:27:37 ou aussi un avortement, vous voyez.
00:27:39 C'est un truc.
00:27:41 C'est fou.
00:27:43 Mais c'est intéressant, effectivement, de dire ça.
00:27:46 C'est intéressant, parce que, vraiment,
00:27:49 cet acte-là,
00:27:51 il est extrêmement intéressant.
00:27:53 D'ailleurs, je voulais commencer par ça,
00:27:55 puis j'ai oublié, mais...
00:27:57 Je me rappelle, quand j'étais au lycée,
00:27:59 un copain m'avait dit, "Tu devrais lire Aragon,
00:28:01 "Traité du style."
00:28:03 Et effectivement, chez Aragon,
00:28:05 je crois que ça commence comme ça,
00:28:07 je ne l'ai pas relu avant de venir ici,
00:28:09 mais il dit la phrase, "Faire, enfoncer, se dischier."
00:28:12 Et donc, voilà, on peut...
00:28:14 Il y a beaucoup de...
00:28:16 Ça comprend, finalement, énormément de choses.
00:28:19 C'est vrai que c'est complétement sidérant
00:28:21 que ce soit, disons, que ce lieu-là,
00:28:23 qui pourrait être un lieu
00:28:25 vraiment totalement extraordinaire,
00:28:27 eh bien, il soit, disons,
00:28:29 confiné
00:28:31 dans un espace blanc
00:28:33 de 1 m par 2 m.
00:28:35 Voilà, toutes les toilettes.
00:28:37 Bien sûr, les toilettes, c'est...
00:28:39 Il y a, en plus, aussi, dans les toilettes,
00:28:41 ce qui est intéressant, c'est que...
00:28:43 Dans les cabinets de toilettes,
00:28:45 dans les cubes de toilettes,
00:28:47 c'est que, finalement, vous voyez,
00:28:49 quand vous rentrez dans un appartement,
00:28:51 vous avez... Bien sûr,
00:28:53 quand vous appuyez sur la poignée de la porte,
00:28:55 vous lui serrez la main, ça, c'est un contact physique.
00:28:57 Mais après, quand vous rentrez dans les toilettes,
00:28:59 c'est des contacts pratiquement indécis,
00:29:01 si vous voulez, c'est presque des contacts,
00:29:03 disons, sexuels que vous avez dans les toilettes.
00:29:05 Même on pourrait y réfléchir, vous voyez.
00:29:07 Parce que vous vous asseyez
00:29:09 dans la cuvette,
00:29:11 donc vous pouvez régler la température.
00:29:13 D'ailleurs, les toilettes Toto,
00:29:15 elles ont la température exacte que vous souhaitez.
00:29:17 Mais, bon, en France, il suffit d'abattre
00:29:19 la lunette pour que ce soit
00:29:21 plus agréable, au contraire, si vous préférez,
00:29:23 vous pourrez rentrer
00:29:25 directement en contact avec la porcelaine.
00:29:27 Et tous ces instruments, vous voyez,
00:29:29 donc, ils ont quelque chose de presque
00:29:31 obscène, vous voyez.
00:29:33 Je crois que c'est comme ça qu'il faut les regarder.
00:29:35 Voilà, parce que, voilà,
00:29:37 en général,
00:29:39 une maison, un appartement,
00:29:41 un logement, une habitation,
00:29:43 c'est un contenant, mais avec les toilettes,
00:29:45 vous avez une relation
00:29:47 intime avec ce contenant.
00:29:51 Voilà, le schéma, surtout, qui est hyper important,
00:29:53 dans cet expo
00:29:55 de Remcolas
00:29:57 à Venise, en 2014,
00:29:59 c'est de dire que, voilà,
00:30:01 la solution, elle est réglée.
00:30:03 C'est la solution finale, vous voyez.
00:30:05 Le toilette en porcelaine,
00:30:07 le WC en porcelaine,
00:30:09 avec le siphon,
00:30:11 qui permet de résoudre
00:30:13 tous les problèmes, et on ferme la porte
00:30:15 et on ne se coute plus de ça.
00:30:17 Enfin, si ! Elle revient,
00:30:19 dans le musée !
00:30:21 Et après, voilà, parce que,
00:30:23 on la retourne, et puis,
00:30:25 des critiques d'art ont dit, je ne me rappelle plus,
00:30:27 "Ah, oui, cette toilette,
00:30:29 elle est formidable, parce qu'elle rappelle
00:30:31 un Bouddha antique." Vous voyez,
00:30:33 et donc, toutes les correspondances,
00:30:35 enfin, toutes les correspondances,
00:30:37 sont possibles,
00:30:39 à partir de cet objet,
00:30:41 et à partir de cet objet,
00:30:43 qui entretient des relations
00:30:45 presque indicibles,
00:30:47 avec le corps.
00:30:49 Voilà, manger,
00:30:51 déféquer, bon, je n'ai pas pu résister
00:30:53 à mettre cette image de cet artiste que je trouve
00:30:55 vraiment le plus grand aujourd'hui,
00:30:57 c'est Wilm Delvoye,
00:30:59 c'est Cloaca Maxima,
00:31:01 donc c'est une machine à faire de la merde,
00:31:03 donc, d'un côté,
00:31:05 on met des aliments, et de l'autre,
00:31:07 on a des excréments.
00:31:09 Et peut-être, effectivement, nous sommes tous
00:31:11 des Cloaca Maxima.
00:31:13 Je reviens, là, sur
00:31:17 le Tokyo Eat de Mopin,
00:31:19 donc c'était un restaurant
00:31:21 qui a été malheureusement détruit,
00:31:23 où on pouvait manger une cuisine un petit peu globale,
00:31:25 à base,
00:31:27 disons, de plats,
00:31:29 tout était un peu mélangé,
00:31:31 tous les pays du monde, il y avait Thaïlande,
00:31:33 la Chine, le Maroc,
00:31:35 il y avait toutes sortes de...
00:31:37 c'est vraiment la cuisine des années
00:31:39 des années 2010,
00:31:41 tout était cuisine globale.
00:31:43 Et puis, ensuite,
00:31:45 les toilettes de Mopin,
00:31:47 elles aussi, elles étaient
00:31:49 globales, puisqu'il avait choisi
00:31:51 sur catalogue
00:31:53 les toilettes les plus exotiques.
00:31:55 Effectivement, le chef faisait
00:31:57 peut-être des nems, donc il avait pris
00:31:59 en Thaïlande, vous voyez, des
00:32:01 toilettes fabriquées par un
00:32:03 fabricant thaïlandais,
00:32:05 ou d'autres de Chine,
00:32:07 et donc il y avait toute une collection,
00:32:09 vous voyez, totalement délirante,
00:32:11 de toilettes.
00:32:13 D'ailleurs, je n'ai pas remis l'image,
00:32:15 je suis désolé, j'avais une image
00:32:17 qui l'ai montrée,
00:32:19 bon, c'est pas grave.
00:32:21 Bien sûr, le fantôme de la liberté de Louis Bunuel,
00:32:23 où
00:32:25 les
00:32:27 bourgeois,
00:32:29 au lieu de faire un repas,
00:32:31 donc, eh bien,
00:32:33 ils défaient
00:32:35 ensemble, et après, une autre image
00:32:37 où un mec se lève et demande
00:32:39 à la servante
00:32:41 où sont les toilettes,
00:32:43 non, où est la chambre à manger,
00:32:45 et puis il va dans une petite
00:32:47 pièce de 2 mètres par 1 mètre,
00:32:49 et il se bafre littéralement
00:32:51 de nourriture.
00:32:53 L'animalité, c'est vrai que
00:32:59 ça aussi, quand on voit aux toilettes,
00:33:01 c'est ça qu'on est,
00:33:03 on est un animal,
00:33:05 c'est un loup qui marche son territoire,
00:33:07 et quelque part, le loup,
00:33:09 quand il fait,
00:33:11 avec la définition d'Aragon,
00:33:13 puisqu'il fait,
00:33:15 quand il fait,
00:33:17 il a quelque chose d'humain,
00:33:19 parce qu'il est pratiquement
00:33:21 accroupi, il force,
00:33:23 et donc, il a quelque chose
00:33:25 d'humain,
00:33:27 il est juste d'humain chez le chien,
00:33:29 tout d'un coup, et ça, on ne le retrouve pas,
00:33:31 on ne le retrouve pas quand il mange, par exemple,
00:33:33 quand il baise, c'est pas vrai,
00:33:35 et par contre, là, oui, là, il est humain,
00:33:37 ou là, aussi,
00:33:39 nous, quand nous allons aux toilettes,
00:33:41 et c'est pour ça, peut-être, qu'elles sont
00:33:43 aussi, disons,
00:33:45 aussi, je dirais,
00:33:47 neutres, aussi cachées
00:33:49 dans les logements,
00:33:51 nous devenons des animaux,
00:33:53 comme Grégoire Samsa,
00:33:55 qui devient, dans la nouvelle de Kafka,
00:33:57 un cancrelat,
00:33:59 c'est un moment,
00:34:01 aussi, où on se
00:34:03 transforme, on se transforme
00:34:05 en animal,
00:34:07 regardez-le, le pauvre,
00:34:09 il nous ressemble,
00:34:11 c'est sûr, on est exactement
00:34:13 dans la même position que lui,
00:34:15 et surtout, maintenant, je vais revenir un peu
00:34:17 sur quelques projets, je trouve, assez intéressants,
00:34:19 parce qu'ils posent vraiment la question
00:34:21 autrement, et notamment,
00:34:23 vous voyez, c'est l'agence
00:34:25 l'agence RCR, l'agence espagnole
00:34:29 RCR,
00:34:31 et je ne sais pas s'ils ont réfléchi
00:34:33 à ça, mais en fait, ce sont des gens qui réfléchissent
00:34:35 énormément à ce qu'ils font,
00:34:37 c'est ça qui m'a frappé,
00:34:39 chaque fois que j'ai pu
00:34:41 parler avec eux, ils sont des gens
00:34:43 hyper réfléchis,
00:34:45 parce qu'ils sont dans une toute
00:34:47 petite ville, je vous en ai déjà parlé,
00:34:49 dans le cours, sur le sol,
00:34:51 donc, au-dessus,
00:34:53 près de Géronne,
00:34:55 à Oulottes, et
00:34:57 ils ont presque tout construit,
00:34:59 en tout cas, tout ce qui est le plus intéressant, ils l'ont construit à Oulottes,
00:35:01 enfin, non, ils ont beaucoup construit
00:35:03 à Oulottes, parce qu'il y a beaucoup de choses intéressantes quand même,
00:35:05 parce que c'est une ville culturelle, en fait,
00:35:07 c'est pas n'importe quelle ville, même si c'était une petite ville
00:35:09 qui devait faire, je sais pas,
00:35:11 20 000 habitants, un truc comme ça, mais c'est une ville culturelle,
00:35:13 donc, ils sont des gens
00:35:15 qui réfléchissent, vous voyez,
00:35:17 et là, c'est le restaurant,
00:35:19 l'école à Oulottes,
00:35:21 et c'est assez fascinant, parce que,
00:35:23 quand on mange dans le restaurant,
00:35:25 on est assis, mais on est à moitié enterrés,
00:35:27 parce qu'en fait, on est plus bas que le sol,
00:35:29 on est à peu près à 80 cm du sol,
00:35:31 et surtout, quand on mange,
00:35:33 on voit les animaux, comme ça,
00:35:35 qui courent, on voit la poule, là, par exemple,
00:35:37 elle est là, là,
00:35:39 et peut-être, la poule, qui est là,
00:35:41 toi, tu as sa cousine dans ton assiette,
00:35:43 et t'es en train de la manger, tu vois,
00:35:45 ça, c'est un truc, déjà, ça met l'ambiance,
00:35:47 tu vois, voilà.
00:35:49 Ensuite, à côté du restaurant,
00:35:51 enfin, jouxtant le restaurant, dans la propriété du restaurant,
00:35:53 ils ont fait une salle des fêtes,
00:35:55 dont j'ai déjà parlé, dans le cours sur le Bal d'Aquin,
00:35:57 c'est une grande
00:35:59 salle des fêtes,
00:36:01 avec, vous voyez, il y a deux
00:36:03 massifs de fondations, et après, c'est des tubes
00:36:05 en cortène, qui soutiennent
00:36:07 donc une toiture très, très
00:36:09 légère,
00:36:11 et, voilà, donc ça,
00:36:13 c'est ça, et là, c'est la
00:36:15 coupe, et là, on voit sur la coupe,
00:36:17 vous voyez, donc, le grand espace,
00:36:19 là, c'est un espace
00:36:21 où les gens, un espace pour les réceptions,
00:36:23 pour les fêtes, pour les mariages,
00:36:25 pour les premières communions, vous voyez, donc,
00:36:27 les gens sont là, ils sont,
00:36:29 c'est un truc festif, et d'ailleurs, effectivement,
00:36:31 les
00:36:33 poutres, ça fonctionne un peu comme
00:36:35 les guirlandes, des guirlandes
00:36:37 sous lesquelles on fait la fête,
00:36:39 mais on imagine, vous voyez, on est
00:36:41 avec sa famille, ses amis, son
00:36:43 cousin qu'on n'a pas vu depuis
00:36:45 des années, on s'interpelle,
00:36:47 on chante, on danse, on mange très bien,
00:36:49 parce qu'effectivement, le chef, il est très
00:36:51 connu, c'est un restaurant
00:36:53 qui a plusieurs étoiles au Guy de Michelin,
00:36:55 donc là, c'est un truc fou,
00:36:57 et après, vous voyez, quand
00:36:59 tout d'un coup, on a un besoin pressant,
00:37:01 on va aux toilettes, et c'est vrai
00:37:03 que c'est fou, parce que c'est vraiment
00:37:05 traité comme une sorte de
00:37:07 parcours initiatique,
00:37:09 voilà, donc, parce que, là,
00:37:11 on va vers, justement,
00:37:13 un des massifs de fondation qui est recouvert de cailloux,
00:37:15 et qui soutiennent, donc,
00:37:17 les guirlandes
00:37:19 en cortène,
00:37:21 et voilà, on passe par un passage,
00:37:23 on prend un couloir, éclairé génitalement,
00:37:25 et après, il y a des portes
00:37:27 en inox,
00:37:29 et là, vous voyez,
00:37:31 on rentre, voilà, dans
00:37:33 la toilette, et la toilette, c'est vrai
00:37:35 que, voilà, il y a un, comme ça,
00:37:37 et ça, c'est ce qu'on voit, on est complètement
00:37:39 rejeté,
00:37:41 un peu comme dans les châteaux tout à l'heure,
00:37:43 on est rejeté à la périphérie,
00:37:45 on est devant un tas
00:37:47 de cailloux, là, la barre
00:37:49 qu'on voit, c'est
00:37:51 le lavabo qui fonctionne
00:37:53 comme une sorte de poutre, et là, on entend
00:37:55 les bruits de la ville,
00:37:57 et puis, donc,
00:37:59 on s'accroupit, voilà, exactement, vous voyez,
00:38:01 comme le chien tout à l'heure, ou comme la poule
00:38:03 qu'on a vue, qu'on a peut-être
00:38:05 mangée, et on va
00:38:07 ensuite, peut-être, retourner
00:38:09 avec ses amis.
00:38:11 Voilà, autre exemple,
00:38:13 ça, c'est la transformation,
00:38:15 c'est l'oragence à
00:38:17 Haulotte, c'est une ancienne fonderie de cloches,
00:38:19 je viens d'y parler dans le cours
00:38:21 sur le sol, c'est l'entrée,
00:38:23 et là, vous voyez, c'est assez fascinant
00:38:25 parce qu'il y a des toilettes, donc, qui sont
00:38:27 au rez-de-chaussée, on les voit,
00:38:29 enfin, on les voit pas très... excusez-moi,
00:38:31 on les voit sur le plan, mais...
00:38:35 en fait, on les voit pas, elles sont au milieu, pratiquement,
00:38:37 du plan, elles donnent sur
00:38:39 un petit jardin, et en fait, elles ne sont,
00:38:41 c'est pas indiqué sur le plan, mais elles ne sont
00:38:43 séparées du jardin, non pas
00:38:45 par un mur, ou par
00:38:47 une fenêtre, mais simplement par un rideau,
00:38:49 vous voyez, et donc, quand vous rentrez
00:38:51 dans les toilettes, vous voyez à travers
00:38:53 le rideau, il est en jute, comme ça,
00:38:55 et, bien sûr, vous entendez tous les bruits de la cour,
00:38:57 vous entendez des discussions, vous entendez...
00:38:59 voilà, et aussi,
00:39:01 ce qui est fascinant, donc, vous voyez,
00:39:03 c'est ça qui est intéressant, c'est que, voilà,
00:39:05 c'est ça qui est bien de l'architecture,
00:39:07 c'est ça qui est... c'est-à-dire que,
00:39:09 tout d'un coup, ils font des toilettes,
00:39:11 et putain, ils brassent toute l'histoire de l'architecture,
00:39:13 parce que, vous voyez, on revient
00:39:15 aux latrines, là, que, par exemple,
00:39:17 on avait, sans doute, à l'époque de la fonderie,
00:39:19 il y avait une cabane en bois, au fond du jardin,
00:39:21 avec une faute septique,
00:39:23 on allait là-bas, la porte était mal fermée,
00:39:25 ou elle fermait à peine,
00:39:27 ou elle restait ouverte, vous voyez,
00:39:29 on était en contact avec la nature,
00:39:31 donc on retrouve ça, et puis, ensuite,
00:39:33 on retrouve aussi autre chose,
00:39:35 on retrouve aussi que,
00:39:37 on va le voir tout de suite, mais on retrouve que, longtemps,
00:39:39 les toilettes, ça a été
00:39:41 un meuble, vous voyez,
00:39:43 j'ai parlé du pot de chambre, c'est un meuble,
00:39:45 on le rangeait, la chaise percée,
00:39:47 c'est aussi un meuble, d'ailleurs, on l'a rangée
00:39:49 dans un espace qui s'appelait la garde-rome,
00:39:51 donc, tous ces noms,
00:39:53 tous ces noms qui font complètement
00:39:55 oublier la chose, mais, voilà,
00:39:57 c'était un meuble, et donc, là, c'est un peu
00:39:59 pareil, vous voyez, parce que vous rentrez,
00:40:01 il n'y a rien, là, on voit à droite le rideau en jute,
00:40:03 qui communique avec le jardin,
00:40:05 et là, vous êtes
00:40:07 confrontés à cette paroi
00:40:09 en acier cortène,
00:40:11 et puis, tout d'un coup, vous voyez, le toilette bascule,
00:40:13 il était pris dans la...
00:40:15 pris dans le mur,
00:40:17 vous vous asseyez, vous faites vos
00:40:19 besoins, et quand vous vous levez,
00:40:21 la chasse se tire toute seule,
00:40:23 et puis, le...
00:40:25 la cuve
00:40:27 rebascule et disparaît
00:40:29 complètement dans le mur.
00:40:31 C'est un espace, vous voyez, il y a tout,
00:40:33 parce qu'il y a à la fois, je vous dis, la latrine,
00:40:35 donc,
00:40:37 traditionnelle, dans ces
00:40:39 petites villes de campagne,
00:40:41 dans ces villages de campagne, la campagne,
00:40:43 il y a aussi, donc, effectivement,
00:40:45 l'espace
00:40:47 japonais, c'est un espace
00:40:49 très simple, ils ont beaucoup de relations avec le Japon,
00:40:51 où il n'y a rien, et puis on apporte,
00:40:53 on apporte, vous voyez, il n'y a pas de chambre
00:40:55 au Japon, il y a des tamis partout,
00:40:57 et puis vous prenez votre...
00:40:59 on appelle ça...
00:41:01 oui, voilà, très bien,
00:41:03 et puis on le déplie, et après,
00:41:05 quand on a fini de dormir, on le...
00:41:07 on le replie,
00:41:09 on le range, et puis c'est fini, la pièce
00:41:11 sert à autre chose. Donc, vous voyez, il y a
00:41:13 à la fois, là, le truc
00:41:15 traditionnel,
00:41:17 quelque chose d'un peu
00:41:19 plus global, l'histoire du Japon,
00:41:21 et puis aussi, bon, aujourd'hui,
00:41:23 c'est quoi ? Un espace de travail, par exemple,
00:41:25 l'espace de travail, l'espace dans un bureau,
00:41:27 il faut voir qu'aujourd'hui,
00:41:29 disons, le...
00:41:31 là où se ponce l'espace,
00:41:33 c'est pas chez toi,
00:41:35 c'est au bureau,
00:41:37 et au bureau, qu'est-ce qui se passe aujourd'hui ? C'est vrai qu'il n'y a plus de...
00:41:39 on n'a plus de place attribuée, on vient
00:41:41 avec son ordinateur, on le pose,
00:41:43 après on le replie, on s'en va, donc vous voyez, ça...
00:41:45 et même, voilà,
00:41:47 la question des toilettes, quelque part,
00:41:49 elle est aussi pensée, vous voyez, comme
00:41:51 l'espace du bureau
00:41:53 contemporain. Bon, bien sûr,
00:41:55 dans les toilettes,
00:41:57 c'est sûr qu'il y a un dressage,
00:41:59 c'est vrai. Moi, je me souviens, quand j'étais petit,
00:42:01 le cauchemar que c'était,
00:42:03 parce que vous me mettez sur mon pot et il fallait le faire,
00:42:05 tu vois. Voilà, c'était...
00:42:07 donc c'est un dressage,
00:42:09 tu vas pas faire dans ta culotte, tu vas pas faire n'importe où,
00:42:11 n'importe quand, donc il faut prévoir,
00:42:13 il faut déjà avoir...
00:42:15 donc c'est le monde,
00:42:17 tout un... oui, tout un...
00:42:19 une stratégie, voilà, pour pas...
00:42:21 pour pas être confronté,
00:42:23 voilà, à un besoin...
00:42:25 à un besoin pressant. Et là, c'est vrai,
00:42:27 cet...
00:42:29 ce...
00:42:31 ce dressage, on le ressent
00:42:33 très fortement dans les toilettes,
00:42:35 là aussi, d'une maison dont j'ai parlé cette année,
00:42:37 la Casa Horizonte,
00:42:39 toujours de RCR, c'est une maison
00:42:41 donc qui est en Corten,
00:42:43 vous voyez, avec
00:42:45 les blocs de Corten, ça correspond
00:42:47 aux chambres,
00:42:49 le bloc central qui donne sur le bassin,
00:42:51 c'est le séjour,
00:42:53 l'autre bloc important,
00:42:55 avec...
00:42:57 avec...
00:42:59 le grand dégagement,
00:43:01 c'est la cuisine et la salle à manger,
00:43:03 et puis donc, à droite, c'est la
00:43:05 chambre de la propriétaire,
00:43:07 et puis à gauche, c'est les chambres
00:43:09 des enfants, c'est un truc
00:43:11 très cadré,
00:43:13 et c'est vrai que ce qui est fascinant aussi dans ce
00:43:15 travail, c'est la manière
00:43:17 dont est traitée la nature,
00:43:19 c'est d'une violence, vous voyez, on sent
00:43:21 très bien, le bord du bâtiment est en Corten,
00:43:23 c'est l'acier
00:43:25 dont on fait les guillotines,
00:43:27 et donc,
00:43:29 il vient s'insérer
00:43:31 assez violemment
00:43:33 dans le paysage, avec un certain...
00:43:35 il vient s'insérer
00:43:37 assez... bon, bien sûr,
00:43:39 c'est pas violent dans le sens où c'est du Corten,
00:43:41 c'est comme...
00:43:43 ça recouvre tout
00:43:45 d'une sorte de velours
00:43:47 qui peut rappeler
00:43:49 les feuilles en automne, mais il y a une violence
00:43:51 malgré tout, si vous voulez, parce que c'est vraiment des choses
00:43:53 qui viennent s'insérer, qui viennent
00:43:55 s'inscrire très fortement
00:43:57 dans le sol, et là, vous voyez,
00:43:59 c'est toute la partie enterrée, parce que
00:44:01 quand on arrive en voiture,
00:44:03 il y a toute une partie qui est enterrée,
00:44:05 où, disons,
00:44:07 le terrain,
00:44:09 il est creusé, et ensuite,
00:44:11 c'est un mur
00:44:13 en galets,
00:44:15 qui est retenu par
00:44:17 des lames de
00:44:19 Corten.
00:44:21 Bon, ça, c'est la salle,
00:44:23 là, c'est la chambre,
00:44:25 et là, vous voyez, c'est les toilettes, les toilettes publiques,
00:44:27 enfin publiques, les toilettes communes,
00:44:29 qui sont pas perpendiculaires,
00:44:31 mais qui sont, comme les autres pièces,
00:44:33 mais qui sont parallèles
00:44:35 à la circulation,
00:44:37 et vous voyez, tout est en Corten,
00:44:39 tout est resserré complètement,
00:44:41 c'est un espace, on a l'impression que c'est une sorte de...
00:44:43 un espace qui a été conçu par Edgar Poe,
00:44:45 vous voyez, où les murs
00:44:47 se rapprochent, vous voyez,
00:44:49 pour vous aider dans votre
00:44:51 travail de déjection,
00:44:53 vous voyez.
00:44:55 Bon, autre exemple,
00:44:57 ça, c'est la maison de Raphael
00:44:59 Aranda,
00:45:01 qui est un des membres
00:45:03 du RCR, c'est le premier R,
00:45:05 et donc, il a construit
00:45:07 une maison,
00:45:09 et cette maison, si vous voulez,
00:45:11 c'est une maison qui existait,
00:45:13 c'est une maison du XVIIIe siècle,
00:45:15 il y avait une façade sur rue,
00:45:17 une toiture, une façade sur jardin,
00:45:19 il a gardé la façade sur rue,
00:45:21 il a gardé la toiture, qui reposait sur les mitoyens,
00:45:23 et il a
00:45:25 fait couper, enlevé tous les planchers,
00:45:27 et enlevé la façade arrière,
00:45:29 qui est pratiquement totalement vitrée,
00:45:31 et qui donne sur le jardin,
00:45:33 pour établir une continuité parfaite
00:45:35 entre l'habitation et le jardin.
00:45:37 Et ensuite,
00:45:39 il a créé
00:45:41 tout un mur structurel, toujours
00:45:43 en lames d'acier,
00:45:45 il a créé deux parois
00:45:49 comme ça, structurelles,
00:45:51 qui sont parallèles
00:45:53 aux murs mitoyens,
00:45:55 et ces parois,
00:45:57 elles permettent de tenir
00:45:59 les différents niveaux en mezzanine,
00:46:01 parce qu'il n'y a pas de porte,
00:46:03 c'est sa maison à lui,
00:46:05 il vit avec sa femme, mais il reçoit des amis,
00:46:07 tout est fait pour recevoir des gens,
00:46:09 puisque les différentes mezzanines,
00:46:11 celle du bas,
00:46:13 celle du sol, en bas,
00:46:15 elle lui sert de chambre,
00:46:17 mais après, toutes les autres,
00:46:19 elles sont totalement polyvalentes,
00:46:21 elles peuvent recevoir des amis,
00:46:23 mais il n'y a strictement aucune porte,
00:46:25 et c'est vrai qu'il n'y a pas de porte, non plus,
00:46:27 dans les toilettes,
00:46:29 parce que les toilettes, ils sont dans l'entre-deux,
00:46:31 le mur métallique et le mur mitoyen,
00:46:33 on le voit d'ailleurs, le mur mitoyen, à gauche,
00:46:35 et aussi, il y a cette liaison
00:46:37 avec les circulations,
00:46:39 comme on en a parlé tout à l'heure,
00:46:41 à propos de...
00:46:43 du feministère,
00:46:45 puisque, en fait,
00:46:47 la rampe, là,
00:46:49 elle permet de monter
00:46:51 d'une mezzanine à l'autre,
00:46:53 voilà, c'est ouvert,
00:46:55 c'est complètement ouvert,
00:46:57 il n'y a pas de porte,
00:46:59 et on passe, là, directement,
00:47:01 des toilettes, de la salle de bain,
00:47:03 du lavabo, à la chambre.
00:47:05 Et là, on voit, les deux murs,
00:47:07 avec cet espace
00:47:09 complètement libre,
00:47:11 complètement ouvert.
00:47:13 Là, c'est le plan,
00:47:15 il faut le comprendre,
00:47:17 à droite, c'est le
00:47:19 demi-sous-sol, quelque part,
00:47:21 à droite, vous avez la rue,
00:47:23 après, il y a une cave, et puis après,
00:47:25 il y a la chambre,
00:47:27 au niveau du jardin,
00:47:29 les toilettes sont dans la bande en haut,
00:47:31 et ce qui est intéressant aussi,
00:47:33 c'est qu'il y a un bassin,
00:47:35 mais il n'est pas à l'extérieur,
00:47:37 il est dans la chambre,
00:47:39 et il permet, effectivement,
00:47:41 le reflet de la Lune et du Soleil
00:47:43 dans l'espace.
00:47:45 Les différents plateaux,
00:47:47 et cet espace
00:47:49 totalement
00:47:51 ouvert,
00:47:53 et là aussi, c'est un espace architectural,
00:47:55 on voit à la fois,
00:47:57 vous voyez,
00:47:59 disons,
00:48:01 le côté,
00:48:03 on retrouve le côté
00:48:05 canien, dont je parlais tout à l'heure,
00:48:07 à propos des châteaux écossais,
00:48:09 la séparation
00:48:11 des espaces servants,
00:48:13 qui sont la périphérie, qui concernent effectivement
00:48:15 les toilettes, les salles de bain,
00:48:17 et les circulations, et puis les espaces servis,
00:48:19 qui sont ces
00:48:21 grandes plateformes
00:48:23 en lévitation,
00:48:25 et la séparation, elle n'est pas
00:48:27 marquée par
00:48:29 une porte, un bâton de porte,
00:48:31 mais elle est simplement conceptuelle.
00:48:33 Il y a des espaces,
00:48:35 et les espaces servants sont extrêmement
00:48:37 marqués, puisqu'effectivement, vous voyez, on voit
00:48:39 ce rideau de métal
00:48:41 qui est porteur,
00:48:43 qui porte les mézanines,
00:48:45 et qui protège
00:48:47 les espaces servants.
00:48:51 Voilà, bien sûr, les toilettes,
00:48:53 ça permet de méditer,
00:48:55 c'est sûr.
00:48:57 C'est là où tu es...
00:48:59 D'abord, les toilettes, c'est peut-être la...
00:49:01 Voilà, tu es toujours seul dans tes...
00:49:03 Enfin, vraiment, de très rares
00:49:05 exceptions. Tu es seul dans tes toilettes, c'est clair.
00:49:07 C'est fait pour une personne, quoi.
00:49:09 Donc, c'est là où tu te...
00:49:11 Tu vas te... Tu vas rentrer,
00:49:13 tu vas être seul pendant un certain moment,
00:49:15 pendant, je ne sais pas, deux, trois, cinq,
00:49:17 dix minutes, tu vas t'enfermer
00:49:19 dans un... Tu vas être loin de ta...
00:49:21 Peut-être tes enfants qui t'emmerdent, ta femme qui te fait chier.
00:49:23 Pardon. Tu vas rentrer
00:49:25 là-dedans, tu vas...
00:49:27 Ou l'inverse, ton mari
00:49:29 qui est hystérique.
00:49:31 Et donc, voilà, tu t'enfermes.
00:49:33 Tu t'enfermes
00:49:35 là-dedans. C'est l'endroit
00:49:37 de la maison qui
00:49:39 permet ça.
00:49:41 Voilà, ça, c'est... C'est un Jérôme
00:49:43 en méditation, on le voit,
00:49:45 on voit son corps, là, complètement...
00:49:47 Il n'est pas en train de faire, mais il médite,
00:49:49 il réfléchit, on voit... Le corps est pratiquement
00:49:51 dénudé. En plus, il y a toujours cette idée
00:49:53 du crâne, du squelette, vous voyez.
00:49:55 Il y a l'idée de la vanité aussi,
00:49:57 de la vanité humaine, mais c'est vrai que la vanité,
00:49:59 voilà, c'est... On peut la voir
00:50:01 quand on est dans les toilettes, parce que...
00:50:03 Dans les toilettes, excusez-moi, mais
00:50:05 c'est difficile de ne pas être grossier quand on est encore sur les toilettes.
00:50:07 Mais, voilà, on ne sait pas... Vous voyez,
00:50:09 les toilettes, ce n'est pas "je pense, donc
00:50:11 je suis". C'est "je pense, mais
00:50:13 je chie". Vous voyez, c'est tout à fait
00:50:15 différent. C'est tout à fait différent.
00:50:17 Donc,
00:50:19 Saint-Jérôme, en méditation,
00:50:21 il est là... Vous voyez, c'est ça,
00:50:23 vous voyez, méditer, c'est
00:50:25 méditer aussi sur la vanité, sur
00:50:27 disons,
00:50:29 la...
00:50:31 la fragilité
00:50:33 du corps,
00:50:35 de la vie
00:50:37 humaine. Tout ça, c'est vrai que
00:50:39 c'est un endroit... Les toilettes, c'est un endroit
00:50:41 où on peut y réfléchir.
00:50:43 Que ce soit Saint-Jérôme
00:50:45 ou que ce soit Marie-Madeleine.
00:50:47 Moi, j'ai pris des tableaux de Caravage parce que
00:50:49 la lumière est
00:50:51 trop géniale parce que c'est vrai que c'est de la lumière
00:50:53 zénithale et latérale.
00:50:55 Et c'est un peu la lumière qu'on va voir maintenant
00:50:57 par ce type-là que je trouve
00:50:59 très bonbon. C'est Edoardo Sosolimoa.
00:51:01 Il a fait une maison,
00:51:03 c'est la Casa Nevo Gilde
00:51:05 en
00:51:07 83-88.
00:51:09 Puis, elle a été reprise ensuite. Moi, je l'ai vue
00:51:11 avant. Elle est un petit peu différente d'avant.
00:51:13 Et donc, c'est une maison-mur.
00:51:15 C'est deux murs comme ça.
00:51:17 Voilà.
00:51:19 Deux murs. D'abord,
00:51:21 il y a toute la partie...
00:51:23 C'est aussi très antique quelque part.
00:51:25 Il y a toute la partie familiale avec les chambres,
00:51:27 les salles de bain.
00:51:29 Et après, il y a toute la partie, disons, publique de la maison
00:51:31 où il y a le bureau, où on reçoit
00:51:33 les gens. Vous voyez, comme
00:51:35 dans la maison romaine
00:51:37 traditionnelle, on reçoit ses clients.
00:51:39 Il y a l'autre
00:51:41 partie. Et même dans l'autre partie,
00:51:43 elle intègre des sortes de termes
00:51:45 puisqu'à l'origine, il y avait une piscine
00:51:47 qui était totalement intégrée
00:51:49 dans le bâtiment. Bon, ça, le nouveau propriétaire
00:51:51 l'a
00:51:53 fait remplacer, l'a fait démolir.
00:51:55 Mais on va la voir quand même un tout petit peu.
00:51:57 Voilà, vous voyez, là, c'est
00:51:59 l'actionnométrie. Donc, on voit, comme je l'ai dit,
00:52:01 d'abord, les chambres.
00:52:03 Ensuite, c'est toute... Enfin, les chambres, c'est
00:52:05 toute la partie, disons,
00:52:07 la partie privée, totalement privée
00:52:09 de l'appartement. Et l'autre,
00:52:11 la partie publique, avec des termes.
00:52:13 Le terme, c'est le
00:52:15 grand espace qui est tout en haut de l'image.
00:52:17 Voilà, ça, c'est
00:52:21 aujourd'hui, c'est l'autre façade, avec
00:52:23 la piscine qui a été sortie. Avant, elle était dans le bâtiment
00:52:25 que l'on voit
00:52:27 à gauche.
00:52:29 Et là, c'était l'ancienne piscine.
00:52:31 C'est vrai que c'était un truc de fou parce que
00:52:33 c'est sûr que c'est pas la même chose.
00:52:35 C'est cette piscine-là, et puis la piscine
00:52:37 que le mec a fait faire.
00:52:39 C'est Soto-Nimura
00:52:41 qui l'a construite. Mais là, c'était
00:52:43 vraiment autre chose parce que, en même temps,
00:52:45 la colonne qui était porteuse
00:52:47 de la maison, du toit,
00:52:49 elle traversait le bassin. C'est un truc de fou, je trouve.
00:52:51 Parce que, vous voyez, c'est pas...
00:52:53 C'est aussi une réflexion sur l'eau.
00:52:55 L'eau qui sert aux ablutions.
00:52:57 L'eau, c'est pas...
00:52:59 C'est pas quelque chose de...
00:53:01 Voilà, qui est totalement
00:53:03 à notre service. C'est un truc de...
00:53:05 C'est... L'eau...
00:53:07 Vous voyez, quand on se baigne dans l'eau, par exemple,
00:53:09 dans une piscine, dans sa baignoire,
00:53:11 quand on boit de l'eau,
00:53:13 l'eau qu'on boit, elle a traversé des corps, et des corps,
00:53:15 et des corps, et des corps.
00:53:17 D'ailleurs, dans les années 90, il y avait un scientifique
00:53:19 un peu...
00:53:21 de la plaque, qui disait qu'il y avait
00:53:23 une mémoire de l'eau.
00:53:25 C'est une sorte d'escroquerie scientifique délirante.
00:53:27 Mais on comprend ça.
00:53:29 On comprend ça. L'eau,
00:53:31 c'est pas...
00:53:33 La publicité, on voit Evian, c'est l'eau fraîche, etc.
00:53:35 Non, c'est pas frais du tout.
00:53:37 C'est là, depuis des milliers d'années,
00:53:39 ça a traversé des corps, et des corps,
00:53:41 des corps peut-être pustuleux,
00:53:43 avant d'arriver chez toi.
00:53:45 Et donc, quelque part,
00:53:47 juste en mettant le pilier,
00:53:49 dans la piscine, il donne
00:53:51 une autre dimension
00:53:53 à cette eau.
00:53:55 Voilà, donc là, c'est la partie
00:53:57 des chambres. Et ça, c'est des toilettes.
00:53:59 C'est tout bête, vous allez me dire.
00:54:01 Mais tu te fous de notre gueule.
00:54:03 C'est pas... Si, si, parce qu'il y a
00:54:05 juste un éclairage zénital.
00:54:07 C'est ça qui change tout.
00:54:09 Il y a une lumière zénitale
00:54:11 qui transforme
00:54:13 complètement l'espace.
00:54:15 Et lui, je sais pas, il faudrait peut-être
00:54:17 un jour lui poser la question, mais c'est vrai que je trouve que
00:54:19 ce type, c'est vrai qu'il a
00:54:21 très tendance, souvent,
00:54:23 à transformer la lumière
00:54:25 en quelque chose de presque
00:54:27 religieux, vous voyez, voilà.
00:54:29 Et là, dans les toilettes,
00:54:31 je trouve que c'était bien trouvé,
00:54:33 de transformer justement cet espace
00:54:35 qui est un espace hygiénique, simplement,
00:54:37 ou un...
00:54:39 qui travaille au corps sain,
00:54:41 en faire un autre
00:54:43 espace,
00:54:45 beaucoup moins défini,
00:54:47 un espace où on peut méditer,
00:54:49 on peut avoir une sorte de révélation,
00:54:51 parce qu'il y a justement
00:54:53 cette lumière, comme ça,
00:54:55 zénitale, qui tombe latéralement
00:54:57 et qui éclaire les visages.
00:54:59 Pour terminer, peut-être, enfin pas tout à fait,
00:55:03 faire retour
00:55:05 à Tokyo, parce que c'est vrai qu'il y avait
00:55:07 ce film de Wenders,
00:55:09 comment il s'appelait déjà ?
00:55:11 - "Perfect Days"
00:55:13 - "Perfect Days", voilà.
00:55:15 Donc, voilà,
00:55:17 il parle de ce programme
00:55:19 à Shibuya, là, avec
00:55:21 les grands architectes de Tokyo qui ont fait des toilettes.
00:55:23 Enfin, je trouve que c'est...
00:55:25 Bon, le film, bien sûr, c'est un film de Wenders,
00:55:27 il est formidable, mais ce Tokyo Toilet,
00:55:29 je trouve ça totalement sans intérêt,
00:55:31 parce que les architectes,
00:55:33 ils ont fait des coquilles,
00:55:35 donc, j'en bref, Tadohando, il a fait une sorte de
00:55:37 rotonde,
00:55:39 Kengo Kuma, il a fait des petites cabanes en bois,
00:55:41 et puis après, on rentre, et qu'est-ce qu'on a ?
00:55:43 Toto, voyez ? Toto partout, quoi, tu vois ?
00:55:45 Donc, ça va, quoi, ça va.
00:55:47 Donc, voilà. Mais lui, ce mec-là,
00:55:49 je trouve qu'il a fait...
00:55:51 Il a bien trouvé le truc, il a fait autre chose.
00:55:53 Il n'a pas fait de coquilles,
00:55:55 donc, c'est
00:55:57 Masashimi Katayama,
00:55:59 il n'a pas fait de coquilles, il a fait un truc
00:56:01 assez bien, je trouve, parce que,
00:56:03 voilà, c'est des toilettes
00:56:05 publiques à Tokyo, c'était pour
00:56:07 dire que, voilà, c'était avant les Jeux Olympiques,
00:56:09 on va faire de Tokyo
00:56:11 une ville propre, donc on va
00:56:13 empêcher les gens de faire leurs besoins dehors,
00:56:15 mais quelque part, voilà,
00:56:17 quand on...
00:56:19 Qu'est-ce qu'on fait quand on est dehors ? En tout cas,
00:56:21 un homme, ça va, les femmes, c'est très différent, mais qu'est-ce qu'on fait
00:56:23 quand on est dehors ? Quand on est pris d'un
00:56:25 besoin pressant, voyez ?
00:56:27 Quand on a bu, et qu'on rentre chez soi, quoi,
00:56:29 complètement bourré, quoi, et qu'on ne peut pas se retenir,
00:56:31 et donc, on se met devant un mur
00:56:33 et on urine, quoi.
00:56:35 Et qui n'a jamais fait ça
00:56:37 ne va pas comprendre le plaisir qu'on peut trouver à ça.
00:56:39 Et donc, lui,
00:56:41 il a
00:56:43 compris ça, voilà, il a compris ça.
00:56:45 Et donc, il a fait des murs,
00:56:47 des murs au fer,
00:56:49 et donc, aux déjections,
00:56:51 aux déflécations,
00:56:53 et il a fait...
00:56:57 C'est tout un système hyper intéressant, c'est des très beaux
00:56:59 murs en béton,
00:57:01 et donc,
00:57:03 ces murs, voyez, c'est comme une roue
00:57:05 qui vient chercher les gens, et qui les trie,
00:57:07 quoi, parce qu'en plus,
00:57:09 il y a des toilettes pour femmes,
00:57:11 des toilettes pour hommes, des toilettes pour
00:57:13 adultes avec enfants,
00:57:15 et/ou
00:57:17 personne à
00:57:19 mobilité réduite,
00:57:21 tout ça, c'est classé.
00:57:23 Et donc, voilà, c'est une roue,
00:57:25 soit tu rentres, la première,
00:57:27 c'est pour
00:57:29 les personnes avec des enfants,
00:57:31 ou la mobilité réduite, celle du haut,
00:57:33 c'est des hommes, et celle à droite,
00:57:35 c'est des femmes.
00:57:37 Et il y a des pictogrammes, justement,
00:57:39 qui permettent de, disons,
00:57:41 de régler les flux,
00:57:43 et donc chacun sait exactement
00:57:45 où il va.
00:57:47 Voilà, donc on suit les murs, et c'est vrai que
00:57:49 les appareils pour les abductions,
00:57:51 et notamment pour
00:57:53 les urinoirs, donc ils sont
00:57:55 posés, bien sûr, on va pas faire sur
00:57:57 les murs, mais ils sont posés,
00:57:59 c'est encore Toto, bien sûr, bien sûr, mais c'est du Toto
00:58:01 intelligemment, disons,
00:58:03 intelligemment
00:58:05 composé, voilà.
00:58:07 Et donc, l'urinoir, il est contre
00:58:09 le mur,
00:58:11 là c'est pareil, donc ça c'est pour
00:58:13 les femmes,
00:58:15 c'est pareil, donc là,
00:58:19 c'est des petits cabinets qui sont,
00:58:21 qui rentrent dans un renforcement
00:58:23 du mur. Et donc il y a à la fois ça,
00:58:25 mais il y a aussi, bien sûr,
00:58:27 le mythe, vous voyez, du
00:58:29 labyrinthe, c'est une sorte de labyrinthe,
00:58:31 et puis on rentre dedans,
00:58:33 et justement, on devient pas le
00:58:35 Minotaur, ni le
00:58:37 Cancrolla
00:58:39 de Kafka, mais on devient,
00:58:41 on peut devenir animal,
00:58:43 dans ce
00:58:45 labyrinthe, et après on peut
00:58:47 en ressortir.
00:58:49 Voilà, autre exemple japonais,
00:58:55 c'est des
00:58:57 toilettes publiques pour
00:58:59 femmes de Fujimoto
00:59:01 à Chiba, et là aussi c'est
00:59:03 intéressant parce que, voilà, il y a un côté presque
00:59:05 sacré, finalement,
00:59:07 parce que ça renvoie un petit peu au
00:59:09 coup que j'avais fait, là, sur le
00:59:11 sol, avec cette histoire
00:59:13 de Téménos, vous la voyez,
00:59:15 un espace sacré.
00:59:17 Donc là, c'est en pleine nature,
00:59:19 enfin en pleine nature, oui, il y a des
00:59:21 trains, il y a des, enfin nature
00:59:23 telle qu'on peut la voir aujourd'hui, il y a une
00:59:25 voie ferrée avec des Michelines qui passent,
00:59:27 il y a des voitures,
00:59:29 mais il y a de la végétation,
00:59:31 donc il a tenu compte de la végétation, il a simplement fait
00:59:33 un mur d'enceinte en bois
00:59:35 avec une porte, voilà, et une clé,
00:59:37 donc on rentre,
00:59:39 enfin, avec un verrou,
00:59:41 réservé uniquement aux femmes,
00:59:43 et voilà,
00:59:45 on est, vous voyez, dans un espace,
00:59:47 voilà, ce qui qualifie
00:59:49 l'espace sacré, c'est-à-dire que, voilà,
00:59:51 c'est un
00:59:53 espace fermé, complètement différent
00:59:55 de l'espace profane, en plus il a une forme
00:59:57 comme ça, ovoïde,
00:59:59 qui est assez, finalement, bienvenue,
01:00:01 voilà, la porte est dans l'axe, voilà,
01:00:03 tout ça, c'est des rondins
01:00:05 en bois, là, qui sont
01:00:07 parfaitement ajustés, et qui définissent
01:00:09 donc l'enceinte,
01:00:11 et puis au centre, donc,
01:00:13 dans un cristal, là,
01:00:15 la toilette, et
01:00:17 il y a tout un parcours,
01:00:19 qui mène de la porte
01:00:21 à la toilette, et qui permet,
01:00:23 vous voyez, ensuite, donc,
01:00:25 aux femmes, en plus c'est intéressant, parce que,
01:00:27 voilà, c'est comme une prêtresse, vous voyez, parce que c'est pas tout le monde
01:00:29 qui peut rentrer là, il faut être femme, il ne faut pas être
01:00:31 autre homme, vous voyez, donc on
01:00:33 rentre, et puis, ensuite, on peut
01:00:35 faire ses besoins,
01:00:37 quelque part, en communion,
01:00:39 voilà, avec la nature.
01:00:41 Voilà, et pour terminer,
01:00:45 c'est vrai que,
01:00:47 c'est peut-être,
01:00:49 ouvrir la porte vers autre chose,
01:00:51 c'est, je vais me faire voir le travail
01:00:53 de mes étudiants,
01:00:55 il y a deux ans,
01:00:57 oui, en 2022,
01:00:59 voilà, je leur avais demandé,
01:01:01 je leur avais déjà parlé un tout petit peu, mais je n'avais pas
01:01:03 fait voir leurs travaux, mes étudiants
01:01:05 de première année, donc je leur avais demandé de
01:01:07 réfléchir sur
01:01:09 tous les objets
01:01:11 connectés, canalisés,
01:01:13 donc,
01:01:15 de l'habitation,
01:01:17 et puis, plutôt que de,
01:01:19 comme on fait d'habitude, vous voyez, en général, quand on fait une habitation,
01:01:21 on met le séjour,
01:01:23 on met la chambre, et puis après, entre eux,
01:01:25 on met les espaces servants.
01:01:27 En général, pas la lumière, on les met à l'intérieur,
01:01:29 parce qu'effectivement, on préfère
01:01:31 que soient éclairés les espaces
01:01:33 de vie plutôt que ces espaces-là.
01:01:35 Et là, c'était renverser le problème
01:01:37 complètement, et définir
01:01:39 l'habitation uniquement, vous voyez,
01:01:41 en définissant
01:01:43 ces objets connectés, et puis
01:01:45 leurs connexions. Voilà, elles, par exemple,
01:01:47 donc c'était
01:01:49 un plan,
01:01:51 un plan théorique,
01:01:53 je crois,
01:01:55 de 12 par 12,
01:01:57 donc, il y avait
01:01:59 deux parties qui donnaient sur l'extérieur,
01:02:01 donc qui étaient vitrées, et après,
01:02:03 deux parties mitoyennes, avec des murs porteurs,
01:02:05 et puis, au centre, donc, trois colonnes,
01:02:07 et au centre, surtout, donc, une trémie
01:02:09 qui permettait à la fois
01:02:11 les descentes d'eau, et puis
01:02:13 les arrivées d'eau.
01:02:15 Voilà, donc, elle a fait ça
01:02:17 comme une sorte de théâtre,
01:02:19 avec un grille technique
01:02:21 qui soutient, vous voyez,
01:02:23 les tuyaux, les arrivées d'eau,
01:02:25 qui soutient aussi tout ce qui est
01:02:27 ventilation mécanique,
01:02:29 et puis qui soutient
01:02:31 aussi les rideaux,
01:02:33 comme un théâtre, et ensuite,
01:02:35 les différentes pièces connectées,
01:02:37 elles viennent prendre place,
01:02:39 le toilette, par exemple, tout de suite,
01:02:41 à droite, comme un trône,
01:02:43 où, effectivement, avec le rideau,
01:02:45 finalement, on peut avoir
01:02:47 une sorte de mise en scène maximale,
01:02:49 donc, dans l'habitation,
01:02:51 de l'acte d'effetquer,
01:02:53 et puis ensuite, donc, il y a la cuisine,
01:02:55 il y a la baignoire, bien sûr.
01:02:59 Autre exemple,
01:03:01 c'était un petit peu la même chose,
01:03:03 mais, simplement, elle, elle a vraiment,
01:03:05 disons, il n'y a pas de rideau,
01:03:07 ce sont des meubles
01:03:09 dans lesquels
01:03:11 viennent s'incruster, donc,
01:03:13 ces objets connectés, les toilettes,
01:03:15 les baignoires,
01:03:17 et il n'y a pas de
01:03:19 tuyaux au sol,
01:03:21 comme dans l'autre cas,
01:03:23 où on le voyait,
01:03:25 parce qu'il y a un faux plancher
01:03:27 qui permet des évacuations,
01:03:29 et donc, voilà, vous voyez,
01:03:31 mais on voit quand même les tuyaux
01:03:33 par transparence,
01:03:35 et donc, on a
01:03:37 la baignoire, les toilettes,
01:03:39 qui sont, tout d'un coup,
01:03:41 on change,
01:03:43 on change les choses,
01:03:45 on retourne, disons, la logique de l'habitation
01:03:47 comme un gant, et puis,
01:03:49 on met en exergue
01:03:51 tous ces espaces cachés,
01:03:53 les espaces de méditation,
01:03:55 les espaces
01:03:57 d'épuration,
01:04:01 le bain, et le dernier,
01:04:03 il avait fait comme une sorte de station spatiale,
01:04:05 et donc, c'était des
01:04:07 éléments
01:04:09 qui pouvaient bouger,
01:04:11 et qui étaient connectés, donc,
01:04:13 avec des tuyaux
01:04:15 souples, pour pouvoir
01:04:17 bouger, un peu comme une station spatiale,
01:04:19 et vous voyez, c'est pareil, on pouvait se mettre
01:04:21 en évidence, là, donc,
01:04:23 dans chacun
01:04:25 de ces modules.
01:04:27 Voilà, tout était connecté.
01:04:31 Corps connecté.
01:04:35 Merci.
01:04:37 (Applaudissements)
01:04:39 (...)