Natures Urbaines - Un nouveau contrat social ?

  • il y a 3 mois
Pourquoi toujours plus de nature en ville ?

Les impératifs de promotion de la biodiversité et d'adaptation au changement climatique n'expliquent pas à eux-seuls l'importance prise par les rues végétalisées, les parcs, les corridors écologiques et les forêts urbaines. La biophilie contemporaine se conjugue fréquemment avec le désir de redéfinir des liens sociaux altérés par les modes de vie actuels et l’isolement qu’ils provoquent. En partant des formes nouvelles prises par la présence de la nature dans les villes, la conférence interrogera ce désir de faire société autrement.
Transcript
00:00:00Bonsoir, bienvenue au pavillon de l'Arsenal. Je suis Marion Valère, directrice du pavillon
00:00:20de l'Arsenal et très heureuse de vous accueillir pour cette soirée autour du contrat social,
00:00:27du nouveau contrat social autour des natures urbaines. C'est un thème qui pour nous
00:00:32résonne un petit peu avec l'actualité parce que finalement on a choisi cet angle
00:00:36pour parler de la nature, c'est-à-dire comment est-ce que la nature en ville permet
00:00:41de créer du lien social et quel est le contrat social, c'est un terme qui a été proposé
00:00:46par Antoine Picon qui est commissaire de cette exposition, quel est le contrat social
00:00:51qu'on peut inventer autour de cette nature en ville. On accueille l'exposition natures
00:00:56urbaines au premier étage du pavillon depuis quelques temps désormais et c'est un des
00:01:01thèmes vraiment mis en avant dans cette exposition pour montrer que la nature en ville, elle
00:01:06a une histoire sociale, elle a une histoire technique aussi, mais elle a une histoire
00:01:10sociale très forte, c'est ce que montre l'exposition. Selon les époques, la nature
00:01:14en ville correspond à différents liens entre les classes sociales, différentes conceptions
00:01:20aussi de ce qu'est l'espace public, ce qu'est l'espace privé et on a voulu ce soir
00:01:25interroger ce que peut être cet aspect social de la nature aujourd'hui. Pour cela, je remercie
00:01:31toutes les intervenantes et les intervenants qui sont avec nous ce soir, qui vont en parler
00:01:36de différents points de vue, puisque vous le verrez, il y a des points de vue de praticiens,
00:01:41de chercheurs et puis également le point de vue de la directrice des espaces verts
00:01:46de la ville de Paris. Merci à toutes et tous d'être là et merci également à Pierre
00:01:52qui a accepté de modérer cette soirée, qui est un grand expert aussi du végétal
00:01:57dans la ville. Et en dernier lieu, je voulais remercier nos mécènes qui nous permettent
00:02:03de faire tous nos projets d'exposition et de livres, et donc en l'occurrence EDF,
00:02:07Île-de-France et sa directrice Hélène Milot, et puis Astrédor, qui sont nos deux mécènes
00:02:13pour cette exposition. Voilà, très bonne soirée au pavillon de l'Arsenal et je passe
00:02:17la parole à nos intervenants. Bonsoir à toutes et à tous. Merci Marion
00:02:21pour cette introduction. On va rentrer dans le vif du sujet puisque, pour des raisons
00:02:25d'agenda, nous allons tenter de conclure vers 20h30 de façon à pouvoir avoir un échange
00:02:33question-réponse avec vous d'un quart d'heure. Et Henri Bava nous quittera précipitamment
00:02:40pour prendre un train. Voilà, ceci étant dit, nous sommes très heureux d'être avec
00:02:44vous et honneur à vous mesdames. Nous avons au tour de cette estrade Alexandra Aren. Alexandra
00:02:53vous êtes architecte, membre du studio SOC, c'est la Société d'Objets Cartographiques,
00:02:59et par ailleurs vous menez un postdoc à l'Institut de Physique du Globe, l'IPGP. Comme l'a dit
00:03:07Marion, il y a aussi les parties prenantes opérationnelles et jardinières. Avec vous,
00:03:13Marine Salove-Coste, vous êtes directrice des espaces verts et de l'environnement à
00:03:17la ville de Paris. Henri Bava, on a fait presque une introduction, vous êtes paysagiste-concepteur,
00:03:23co-fondateur de l'agence Terre et vous êtes également président de la Fédération Française
00:03:29du Paysage qui fédère tous les, on peut le dire, les architectes du paysage. C'est un
00:03:34autre débat. Et puis enfin, Antoine Picon, vous êtes directeur de recherche à l'école
00:03:39des ponts Paris Tech et professeur, attention à mon accent, à la Graduate School of Design
00:03:45de l'université Harvard et vous êtes le commissaire de l'exposition Natures Urbaines.
00:03:50Alors cette table ronde va se dérouler en deux grandes phases avant les questions. Tout
00:03:56d'abord une présentation de chacune et de chacun, une petite carte blanche, et puis
00:04:01ensuite nous aurons trois axes de questionnement principaux avec la parole qui sera donnée
00:04:07à nos intervenantes et nos intervenants à la cantonade avant de vous laisser la parole
00:04:12et puis ensuite de poursuivre jusqu'à une heure avancée si vous le souhaitez des discussions
00:04:16plus informelles. Antoine, c'est à vous que revient l'introduction puisque vous êtes
00:04:22à l'initiative de cette table ronde et de cette expo. Merci. Le pavillon m'a suggéré
00:04:29de dire quelques mots à propos de l'exposition et des questions dont elle est issue puis
00:04:34d'essayer d'introduire le thème de ce soir à un nouveau contrat social. Alors le point
00:04:39de départ de l'exposition c'est bien sûr l'actualité pressante de la question de la
00:04:44nature en ville, une actualité qui est bien sûr liée à un désir de contact des habitants
00:04:48des villes avec des séquences naturelles, désir que les confinements successifs de
00:04:53la crise sanitaire récente n'ont fait qu'amplifier. Elle est par-dessus tout liée à une crise
00:04:59environnementale qui rend urgente l'adaptation des villes et on sait que la nature constitue
00:05:05une des voies importantes pour essayer d'opérer cette transition. Alors ceci dit, il y a d'autres
00:05:11raisons derrière cette exposition en ce qui me concerne. L'une d'entre elles, étrangement,
00:05:16c'est un ensemble d'études sur les villes intelligentes que j'avais faites il y a à
00:05:22peu près une dizaine d'années. Je rappellerai qu'autour des années 2010, les villes intelligentes
00:05:29c'était le grand truc et c'était censé résoudre tous les problèmes de la terre
00:05:32et que les questions environnementales étaient même censées être solubles dans le numérique.
00:05:35On se rend compte aujourd'hui, une quinzaine d'années plus tard, qu'il n'en est rien
00:05:39et que c'est plutôt la question de la nature qui est montée très fortement en régime.
00:05:43Les villes sont devenues intelligentes mais les problèmes environnementaux et la question
00:05:46de la nature se posent plus que jamais. Alors à l'instar de ce que j'avais fait sur ville
00:05:52et numérique, j'ai essayé de replacer finalement l'actualité au sein d'une perspective plus
00:05:57longue, de prendre le contre-pied d'une certaine forme de présentisme qui imprègne nos sociétés
00:06:06afin finalement à la fois de mieux comprendre le présent au travers de l'histoire mais
00:06:11aussi d'achever, de révéler en quoi il est plein de potentiel de changement. Alors il
00:06:18y a un fil conducteur dans cette exposition qui renvoie aussi à un ensemble de travaux
00:06:23que j'ai fait il y a plus longtemps, c'est-à-dire un intérêt pour les techniques. J'ai beaucoup
00:06:26travaillé sur l'histoire des ingénieurs et en fait les techniques et la nature, ça
00:06:32sont des choses qui ont partie liées. Un dernier motif d'intérêt pour la question
00:06:38qui nous occupe ce soir, c'est les utopies. J'ai aussi passé pas mal de temps à travailler
00:06:44sur les utopies, notamment du XIXe siècle, sur le Saint-Simonisme en particulier et sur
00:06:49la façon dont les utopies ont annoncé des transformations profondes de la société
00:06:55mais aussi de l'attitude par rapport aux techniques, à la conception des villes et
00:07:00des territoires. Alors la question de la nature aujourd'hui est inséparable de questionnements
00:07:05regardant l'humain et sa capacité à faire société, je reviendrai sur cela vers la
00:07:12fin de cette introduction. Alors juste quelques mots sur l'introduction, j'ai décidé pour
00:07:16des raisons de brièveté de ne pas faire défiler en vous disant « alors ici c'est une belle
00:07:20bleue, ici c'est une belle rouge » mais plutôt de prendre quelques photos de l'exposition
00:07:25pour vous en donner une idée. Quelques mots peut-être simplement « nature » au pluriel
00:07:29parce qu'évidemment il n'y a pas une nature mais des natures, il y a des rapports à la
00:07:34nature, etc. Ça me semble important de le noter, une diversité de pratiques qui se
00:07:38rapportent à la nature en ville. Et finalement l'exposition raconte une des histoires possibles,
00:07:44donc des natures, une histoire, avec plusieurs fils conducteurs. La première c'est un intérêt
00:07:51pour la question du projet et de l'imaginaire, la nature en ville c'est finalement beaucoup
00:07:56à quel projet avons-nous sur la ville. La dimension technique, je l'ai déjà mentionné,
00:08:01ainsi que la dimension sociale et politique. Alors ensuite l'exposition suit un rythme
00:08:06plutôt chronologique, on démarre au cours de la seconde moitié du XVIIe siècle quand
00:08:10la question de la nature dans l'espace public commence à se poser, par opposition à une
00:08:16nature surtout privée au cours des siècles précédents. Le XVIIIe siècle, période très
00:08:21importante parce qu'on voit naître le lien fort entre la question de la nature en ville
00:08:27et la question du lien social. Le XIXe siècle et le rapport entre plantation, parc, jardin
00:08:34et infrastructure. Ensuite le premier XXe siècle et le désir de la ville moderne d'être
00:08:40une ville dans un jardin. Le second XXe siècle et la montée de nos angoisses environnementales
00:08:46pour en arriver enfin à l'actualité et d'essayer de proposer une lecture de ce tournant que
00:08:53nous sommes en train de vivre dans la question de la nature et de la ville avec cette importance
00:08:58beaucoup plus grande qu'auparavant. Alors la dernière partie de l'exposition s'appelle
00:09:04vers un nouveau contrat social et je voudrais maintenant en venir, je crois que j'ai respecté
00:09:09mon temps, au thème général de cette soirée. Alors il ne vous a pas échappé que depuis
00:09:15dimanche, il y a une certaine forme d'ironie plutôt cruelle à nous parler d'un nouveau
00:09:22contrat social en même temps que la France politique, le moins qu'on puisse dire, se
00:09:27déchire et que la notion finalement de consensus social et politique semble tout de même assez
00:09:33lointaine. Alors il y a une ironie mais je voudrais peut-être repartir de ce que j'ai
00:09:38mentionné à un moment qui est mon intérêt pour les utopies. Il se trouve que les Saint-Simoniens
00:09:43sur lesquels j'ai beaucoup travaillé qui étaient des gens qui pensaient que l'âge
00:09:46d'or n'est pas derrière nous mais devant nous etc. Le mouvement a démarré pendant
00:09:50la restauration qui n'était pas une période particulièrement enthousiaste à l'égard
00:09:57d'innovation sociale et politique. Comme son nom l'indique, elle tentait de restaurer
00:10:01la monarchie. Tout ça pour dire que les attentes et les espoirs ne sont pas forcément douchés
00:10:08par un contexte politique aussi difficile soit-il. Je crois qu'il y a toujours des
00:10:13attentes et des espoirs extrêmement importants attachés au désir de restauration d'un
00:10:18contact avec la nature. Des attentes et des espoirs qui se distribuent bien au-delà des
00:10:23clivages politiques et surtout, je dirais, ils n'ont pas forcément besoin de majorité
00:10:30pour constituer des germes de renouveau. Un autre exemple pour moi qui me semble très
00:10:34frappant c'est la pensée roussoïste au 18ème siècle. Ça démarre avec peu de monde
00:10:39et puis au moment de la révolution française, il y a même un roussoïsme populaire. Donc
00:10:45je dirais, le destin des grandes idées n'est pas forcément mesurable au nombre de gens
00:10:50qui les embrassent au début. Alors évidemment, seul l'avenir nous dira ce qu'il en est.
00:10:54Alors ce qui est clair c'est que la présence de la nature dans les villes va de pair avec
00:10:59le désir d'une authenticité retrouvée, de rythme de vie plus apaisé, dont témoignent
00:11:05par exemple le succès des jardins partagés mais aussi de certaines formes d'agricultures
00:11:09urbaines. Alors une des questions évidemment derrière ça c'est comment concrètement
00:11:14contribuer à cela par nos aménagements mais aussi nos ménagements, c'est-à-dire parfois
00:11:19il faut savoir se retenir d'aménager et apprendre à ménager. Comment se ressourcer pour faire
00:11:26société, c'est pas une question complètement nouvelle. Encore une fois, le XVIIIe siècle
00:11:31se l'était beaucoup posé. L'une des raisons pour lesquelles les édiles et les aménageurs
00:11:36du XVIIIe siècle ont tenté de mettre de la nature dans la ville, c'était déjà pour
00:11:39essayer de pacifier, pour créer les conditions d'un échange social plus harmonieux. Alors
00:11:46je mentionne le XVIIIe siècle, ça rejoint une des questions que je pose dans l'exposition
00:11:50qui est celui du rapport à la modernité. Non seulement, et alors il est de bon ton
00:11:54aujourd'hui, de tout critiquer. Alors évidemment la modernité nous a conduit aux impasses
00:11:59de l'anthropocène mais nous devons en même temps assumer son héritage et non pas s'imaginer
00:12:05qu'on peut le rejeter comme un vêtement usagé qu'on mettrait au rebut. Cela dit, les modalités
00:12:11pour penser le contrat social ont changé. Comment prendre notamment en compte les multiples
00:12:17solidarités avec le non-humain ? Faut-il l'associer aux délibérations comme le suggérait
00:12:23Bruno Latour et comme le thème qui a été repris par pas mal de penseurs du vivant.
00:12:29Mais comment fait-on cela ? C'est pas très simple. En termes concrets aussi, au nom de
00:12:36la biodiversité, il y a tout un retour de l'idée d'une nature qui ne serait pas forcément
00:12:40planifiée, enrégimentée. Comment on arbitre ces questions ? Alors je terminerai simplement
00:12:47en disant que la nature en ville, elle vient nous rappeler que finalement il s'agit de
00:12:54politique au sens le plus noble du terme, c'est-à-dire dans quelle société voulons
00:12:59nous vivre, dans quelle ville voulons-nous vivre. Et la nature en ville, ça pose cette
00:13:03question. Pour des raisons diverses, cette exposition, le sous-titre c'est une histoire
00:13:09technique et sociale mais l'idée c'est quand même une histoire technique et politique
00:13:13au sens beaucoup plus général du politique qui est comment voulons-nous vivre ensemble,
00:13:19dans quelle société, dans quelle ville. Et je vous remercie, je crois que j'ai à peu
00:13:22près respecté mon timing. Même anticipé sur le planning, nous allons
00:13:27désormais parler très lentement pour une meilleure assimilation. Je plaisante, merci
00:13:32beaucoup Antoine. Comme nous vous l'avions annoncé, nous avons maintenant quelques cartes
00:13:38blanches avec des regards croisés différents sur ce thème avant d'entrer dans la phase
00:13:43de débat. Et on va commencer par vous Alexandra avec une approche à la fois d'architecte
00:13:48puisque vous exercez aussi toujours en tant qu'architecte mais aussi cartographique.
00:13:53Et je vous laisse la parole pour un petit temps de présentation avant de passer à
00:14:00Henri. Merci pour l'invitation. C'est vrai que la
00:14:03question que pose Antoine est assez difficile. Je n'ai pas la réponse, je vais plutôt
00:14:07essayer de décaler un petit peu peut-être la question, de se demander en fait quelle
00:14:12est notre compréhension de la nature aujourd'hui ou des natures. Parce qu'on n'a pas dit le
00:14:18mot, le gros mot peut-être c'est l'anthropocène. On est dans une période où effectivement
00:14:28les activités humaines sont devenues aussi un agent aussi puissant que la transformation,
00:14:33l'érosion des sols par exemple ou bien le volcanisme aussi. Donc on a une échelle un
00:14:38peu démesurée par rapport aussi à ce que pouvait être la nature auparavant. Et moi
00:14:44en fait j'étais paysagiste, architecte dans une agence de paysage et à un moment j'avais
00:14:51l'impression de ne pas avoir les bons concepts pour penser la nature ou pas les bons outils
00:14:56en fait pour essayer d'aménager ou de ménager justement ou de ne pas aménager. Donc c'est
00:15:01pour ça qu'à un moment j'ai un peu arrêté cette pratique et je me suis dirigée vers
00:15:06la recherche en cherchant de nouvelles alliances auprès de philosophes, d'ethnographes mais
00:15:12aussi de sciences de la terre. Et notamment des scientifiques de la zone critique. Donc
00:15:19je vais passer quelques diapos mais je vais plutôt essayer d'élaborer une réponse. Et
00:15:25ces scientifiques de la zone critique, qu'est-ce qu'ils font ? Ils instrumentent par des capteurs
00:15:31des paysages. Donc c'est des capteurs environnementaux qui retracent la circulation de l'eau, l'érosion
00:15:37des sols, l'altération des roches, la chimie de la rivière. Beaucoup de choses en interaction
00:15:45qui nous montrent en fait que la nature, ce qu'on appelle la nature, est beaucoup plus
00:15:49complexe et dynamique et a une certaine agentivité que ce qu'on pourrait avoir l'habitude de
00:15:56composer avec. Donc comment aussi on arrive à faire projet avec ces différents êtres,
00:16:03entités de nature qui ont leur propre dynamisme. Donc voilà. Et tout ça en fait nous mène
00:16:12aussi à la question que pose le contrat social. Donc est-ce qu'on va vers un projet cosmopolitique
00:16:19au sens de... C'est un terme qui a proposé Isabelle Stengers qui est philosophe pour
00:16:25se dire finalement on élargit la politique à un ensemble d'autres êtres ou alternatifs,
00:16:31l'ensemble du cosmos finalement pour faire politique. Et comment on fait ? Ça, ça pose
00:16:36aussi la question de quels sont les existants ou les entités avec lesquelles une société
00:16:41va composer le monde. Et pour cela effectivement, pour pouvoir détecter ces existants, il nous
00:16:48faut un certain nombre de capteurs que développent les scientifiques pour pouvoir simplement
00:16:53les comprendre, les détecter, nous rendre conscients de leur existence et puis ensuite
00:17:02trouver les bons moyens pour les représenter. Donc c'est là où vient le travail sur la
00:17:06cartographie. Donc comment on peut représenter cette diversité d'existants, d'êtres en
00:17:10interaction les uns avec les autres et notamment la profondeur des sols qui ne l'est plus trop
00:17:18aujourd'hui mais qui le reste un petit peu, la profondeur des sols jusqu'à l'altération
00:17:23des roches puisque c'est la lente altération des roches des profondeurs qui remonte à
00:17:26la surface et qui permet de créer les sols. Donc c'est une série de cartographies qui
00:17:32visent à détecter les organismes habitants, natifs du sol et puis les objets hébergés
00:17:40qu'on a pu aussi enterrer ou qu'on développe à la surface. Donc c'est la question de la
00:17:47technologie, des technosols, de la technique. Juste une petite diapo pour vous montrer un
00:17:52peu plus concrètement les paysages sur lesquels on a l'habitude de concevoir, c'est industriel,
00:17:58un peu altéré, on nous demande de requalifier et puis ici quelques photos sur l'instrumentation
00:18:05déployée par ces scientifiques qui essayent de comprendre les perturbations de nos écosystèmes.
00:18:13Quelques cartes aussi d'un observatoire, je n'ai pas forcément le temps de détailler,
00:18:21je ne sais d'ailleurs pas combien il me reste, peut-être juste pour vous donner quelques
00:18:27clés de lecture des cartes. Au centre est signifié l'atmosphère et plus on va vers
00:18:36les profondeurs, plus on va vers la périphérie et donc ce qu'on retrouve vers les bords
00:18:41de la carte, ce sont les roches profondes, là on va jusqu'à à peu près 100 m. Et
00:18:46donc ça c'est un observatoire de la zone critique dans les Vosges, dans la forêt des
00:18:50Vosges, dans le Strembach. Ce que vous voyez en bleu, ce sont les instruments des scientifiques,
00:18:59par exemple ici c'est un river lab qui étudie la composition chimique de la rivière. Il
00:19:05faut savoir qu'une rivière ce n'est pas seulement un flux d'eau mais c'est aussi un flux de
00:19:09calcium, un flux de phosphore, un flux de magnésium, tous ces éléments chimiques
00:19:15qu'on n'avait pas forcément l'habitude de détecter, comment on les prend en compte,
00:19:20comment ils rentrent dans la composition de notre monde finalement. Donc voilà, à soc
00:19:28et avec le livre Terraforma on essaye de développer un petit peu des cartographies alternatives
00:19:33pour visualiser ces existants, leurs mouvements, leur territoire, leur façon de vivre. Donc
00:19:40c'est des cartes souvent qui sont animées et qui sont proposées à un workshop de façon
00:19:45aussi à pouvoir se saisir de l'outil. Et ce sont aussi des cartes qui sont faites à
00:19:49partir d'entretiens, sur le terrain, d'ethnographies, de suivis un petit peu et puis d'informants
00:19:57avec des personnes de ressources pour pouvoir nous donner ces informations. Et juste une
00:20:01dernière, sur les cycles bio-géochimiques, in fine en fait les scientifiques veulent comprendre
00:20:09comment les cycles bio-géochimiques sont perturbés ou pas. Alors en fait ils sont
00:20:12assez importants ces cycles parce que le cycle de phosphore par exemple, il conditionne la
00:20:16possibilité d'une végétation, une végétation aussi en ville. Or ils sont méconnus dans
00:20:22les systèmes urbains. On a très peu d'informations sur ça et le scientifique avec qui je travaille,
00:20:28Jérôme Gaillardet, qui a écrit un très beau livre d'ailleurs, je vous conseille
00:20:31de le lire si vous êtes intéressés sur la zone critique, propose en fait qu'on désynchronise
00:20:38les cycles. Nos activités humaines désynchronisent quelque part, par exemple le carbone qu'on
00:20:44voit ici. Je vous passe un petit peu l'explication mais en gros ça c'est les cycles naturels
00:20:50et puis il y a un moment une extraction très forte des profondeurs des roches de carbone
00:20:57qu'on amène dans l'atmosphère et donc c'est cette désynchronisation qu'on essaye
00:21:02de faire apparaître sur ces cartes. Et voilà sur aussi le fait que l'anthropocène pourrait
00:21:09se comprendre aussi par le fait qu'on désynchronise un certain nombre de cycles géochimiques.
00:21:15Merci beaucoup Alexandra. Alors on va changer d'horizon, on va aller dans le paysage par
00:21:25la pratique du paysagiste-concepteur. Merci pour cette exploration du sol, mais c'est
00:21:30aussi un socle utilisé par le paysagiste Henri.
00:21:34On essaye, oui on essaye de travailler effectivement avec les sols et les sols vivants, c'est un
00:21:39peu ce que vient de dire Alexandra. Mais juste, nous n'avons pas de position théorique, je
00:21:47dirais initiale, au sein de l'agence Terre, donc c'est une agence qui a été créée
00:21:53par trois fondateurs, donc Michel Oestler, Olivier Philippe et moi-même. Aujourd'hui
00:21:58on est rejoint par à peu près 80 personnes, pas uniquement paysagistes d'ailleurs, différents
00:22:04métiers. On se pose ensemble, lieu par lieu, la question de l'expérimentation du territoire,
00:22:12du visible, de l'invisible, et comment nous pouvons développer en fonction des questions
00:22:16qui se posent. Donc nous n'avons pas une démarche universelle, mais à chaque fois
00:22:23très locale. Les trois fondateurs, ils sont issus de l'école de Versailles, ou en tout
00:22:30cas de cette mouvance qui tournait autour de Michel Corajou au départ, qui a enseigné
00:22:35pendant 30 ans une génération, une génération un peu vieillissante aujourd'hui, mais il
00:22:40y a d'autres professeurs bien sûr. Mais à l'époque, son credo, c'était effectivement
00:22:47de parler du paysage, de la ligne d'horizon, l'endroit où le ciel et la terre se touchent.
00:22:54C'était une idée de l'étendue, et de construire l'étendue de proche en proche, de voisinage
00:23:01en voisinage, d'horizon en horizon, au pluriel, jusqu'à cet horizon ultime. Et donc le paysage
00:23:10étant le lieu d'interrelation entre énormément de composantes humaines, non humaines, vivantes,
00:23:19non vivantes, et n'étant pas centré directement sur les composantes elles-mêmes, sur les
00:23:24objets. Et en même temps, il y avait cette approche initiale, générale des paysagistes,
00:23:33dont nous avons bien, nous constations comme tout le monde, sur la planète, et après
00:23:39cette première image de la planète entière, de la terre, qui nous est apparue, qui était
00:23:46un peu choquante, dans le fait qu'il y a une prise de conscience que c'est un monde
00:23:52clos, c'est un jardin planétaire, comme disait Gilles Clément, mais c'est en même temps
00:23:58jardin dans le sens où il est clos. Il est fruit d'énormément de mouvements, de vents,
00:24:03liés à l'eau, et autres. Énormément de mouvements, de dynamiques, et en même temps,
00:24:10l'anthropocène, dont parlait tout à l'heure Alexandra, on a une démographie galopante,
00:24:16et donc la présence de l'urbanisation de villes qui recouvrent de plus en plus cette
00:24:22planète. Et ces villes étaient extrêmement minérales. Il y avait le concept de Mario
00:24:31Gandalsonas de Pau de Léopard. Les villes étaient une sorte de couche qui est complètement
00:24:38continue, avec quelques trous, ou quelques trous plus larges pour les parcs, ou des tout
00:24:43petits trous pour les arbres d'alignement et autres, mais en fait on avait une stérilisation
00:24:51des sols extrême. Donc aujourd'hui, on change un peu d'objectif, et on a essayé d'aller
00:24:59un peu plus loin, ou alors différemment, sans renier cet apport de Michel Corajou.
00:25:05Nous nous sommes dit très vite que cette ligne d'horizon, c'est beaucoup plus qu'une
00:25:09ligne, c'est une épaisseur d'horizon. Cette épaisseur d'horizon, on l'a vu tout à l'heure
00:25:12dans vos présentations, elle est tout autour de la planète. Cette épaisseur, différentes
00:25:20composantes vivantes, c'est le lieu de rencontre, certes, du ciel et de la terre, mais c'est
00:25:29la rencontre entre l'air et le substrat qui autorise la vie avec énormément de complexité,
00:25:37comme on l'a vu tout à l'heure. C'est avec ça que nous travaillons aujourd'hui, avec
00:25:41le sous-sol. On n'est plus uniquement sur le paysage comme nous pouvons l'appréhender
00:25:47par la vue, mais aussi le sous-sol, le paysage invisible. Ce paysage invisible, ce n'est
00:25:52plus la photo ou la perspective qui peut nous le montrer, c'est la coupe, y compris si
00:25:58on ne le repère pas directement aujourd'hui, si on ne le voit pas, il faut l'imaginer
00:26:02en coupe, ou alors il faut créer réellement des coupes dans le territoire, ou des carottages,
00:26:07comme on dit, pour apprécier cette diversité du vivant. Donc on a un autre mode de représentation
00:26:13où on n'est plus au-dessus, où on est à distance des choses, on est presque dedans,
00:26:17je dirais, on est aussi dans le sol, dans le sol vivant. D'où cette coupe, je dirais,
00:26:24un peu générique qu'on retrouve souvent dans nos projets, que l'idée que ces horizons
00:26:31dont on parlait avant avec Michel Corajou, ils s'étagent dans l'espace, mais on a
00:26:37aussi des horizons géologiques, donc on a différents horizons géologiques jusqu'à
00:26:43la roche-mer tout en dessous, et puis au-dessus on a la canopée des arbres, on a l'anthropocène,
00:26:50donc les bâtiments, les différents étages, les constructions, donc on a tout un étagement
00:26:56important dans nos villes, mais l'important c'est de considérer cette vie souterraine,
00:27:01certes invisible, mais essentielle. Donc à partir de là, nous avons énormément, dans
00:27:05tous nos projets, nous commençons par une coupe, ici c'est un grand espace carrière
00:27:11sous Poissy, c'était considéré comme un parc à développer, et finalement nous avons
00:27:15eu des interventions très limitées, avec finalement très peu cher, pour conserver
00:27:21la faune existante, et la faune existante c'était des insectes. Là le travail passe
00:27:27par la dénomination du site, on l'a appelé le peuple de l'herbe, les insectes, avec
00:27:32les habitants qui peuvent se promener dans le site, il y a un insectarium avec nos amis
00:27:38architectes de HHF, donc il y a tout un engouement de la population, et là on retrouve, je ne
00:27:43sais pas si c'est un contrat social, on peut l'appeler contrat naturel peut-être aussi,
00:27:48en référence à Michel Serres, qui était aussi un ami de Michel Corajou à l'époque,
00:27:54où en tout cas ce n'est pas uniquement anthropocentré, on n'est pas uniquement en train de servir
00:28:00la société humaine, on établit des rencontres, entre une société humaine, certes, et un
00:28:08biotope actuel. Et puis il y a d'autres modes de travaux qui permettent d'implanter l'architecture,
00:28:16parce que finalement nous travaillons quand même pour des maîtres d'ouvrage, et donc
00:28:21cette société, ce contrat social, il doit s'établir certes avec des gens qui ont besoin
00:28:26d'habitat aussi, d'habiter quelque part. Donc où habitent-ils, et comment on décide
00:28:31d'implanter les constructions, c'est-à-dire la stérilisation des sols quand même, quand
00:28:35on construit sous le bâtiment, on stérilise. Donc ces constructions, par exemple à Strasbourg
00:28:40ici, c'était l'idée par rapport à la question posée qui était de suivre le tram,
00:28:45qui était une infrastructure, on n'a pas suivi le tram, mais on a décidé d'élargir,
00:28:51de dézoomer, et de se rendre compte que par rapport à la question posée, si on élargit
00:28:55un petit peu la focale au nord et au sud du site, on retrouve des forêts alluviales
00:29:01qui sont les dernières forêts après la canalisation du Rhin, et donc faire ce nouveau
00:29:06quartier, c'était aussi se brancher, reconnecter des éléments qui avaient été déconnectés
00:29:11par le passé. Jusqu'à retrouver des grands traversées, des grands systèmes de plantation
00:29:20qui prennent le pas sur des anciens tracés de canaux qui ont été comblés, j'en passe,
00:29:27et qui retrouvent le chemin de ces forêts alluviales toujours présentes à Strasbourg.
00:29:34Et donc quand on implante ici, c'est un projet au Véziné, ça s'appelle le Parc
00:29:41Princesse, c'est l'implantation dans un parc lié à un hôpital, l'implantation
00:29:46d'un quartier avec des constructions ponctuelles, et là ici le respect, il vient du respect
00:29:54par rapport aux parcs existants, aux arbres existants, aux arbustes, et là on s'implante,
00:29:59on s'immisce, je dirais, entre la végétation. Donc il faut aussi savoir s'immiscer entre
00:30:04la végétation et ne pas déployer, ne pas stériliser le sol, et de travailler avec l'architecture
00:30:11qui est aussi élaborée avec des matériaux biosourcés et autres. Donc il y a tout un respect, je dirais,
00:30:17de ces interrelations qu'on implante sur site, et le projet peut-être assez connu, celui-ci
00:30:25de Barcelone, qui est sur la place des gloires catalanes, ici c'est la maîtrise d'ouvrage,
00:30:31c'est la ville de Barcelone qui a eu l'idée finalement, non pas de faire une ville sur
00:30:37dalles, comme on a fait à une époque, où on voulait oublier les infrastructures,
00:30:41ici les infrastructures, la décision était de les mettre dans le sol, mais tout autour
00:30:48des infrastructures, de créer un sol vivant à la place d'un grand échangeur autoroutier,
00:30:52et d'avoir cette canopée urbaine, ce grand parc central, nous sommes au centre-ville,
00:30:59et de déployer des sortes d'îles écologiques, sur les méthodes un peu stepping stones,
00:31:06d'avoir des relais écologiques en plein coeur de ville, en plein centre, et des relais
00:31:11écologiques qui sont eux-mêmes, je dirais, vraiment interdits à la population, on ne
00:31:16voit pas les clôtures, elles sont intégrées à la végétation, mais on ne peut pas les
00:31:20traverser, donc y compris en centre-ville, on peut avoir des îles complètement écologiques,
00:31:26et l'idée de la ville de Barcelone, c'était aussi de développer cette idée sur le thème
00:31:33de super blocs, d'enlever énormément de voies à la circulation automobile, et donc
00:31:39on a gagné une de ces voies qui redevient piétonne, qui est plantée, il y a la ville
00:31:46de Paris aussi, que vous allez peut-être en parler tout à l'heure, avec les oasis
00:31:49et autres, donc voilà, on a l'idée d'envahir aussi les rues de la ville. Donc ce même
00:31:59travail, il est développé à Besançon, donc là aussi nous sommes en centre-ville,
00:32:04où l'idée est de passer, c'est un projet en cours, bien sûr de se brancher sur le
00:32:11fleuve, de créer un quartier, et en même temps de désimperméabiliser les sols, donc
00:32:16de passer à 75% d'imperméabilisation, jusqu'à 15%, donc d'ouvrir les sols, on aime
00:32:22beaucoup cette idée de sols ouverts, donc de ne pas recouvrir les sols, mais de les
00:32:26ouvrir, à la vie, à l'air, à l'eau, et donc ça, ça se fait avec la population,
00:32:31il y a un contrat social en tout cas, ou je ne sais pas si c'est un contrat, il y a une
00:32:35interaction avec la population, et je dois dire qu'il y a beaucoup d'engouement autour
00:32:41de ces questions, donc heureusement, nous sommes aussi portés par les gens, c'est
00:32:45ma dernière diapo, et voilà, ici nous sommes dans un parc à Boulogne, où peut-être on
00:32:55peut parler d'utopie, mais c'est une utopie réalisée quand on arrive justement à ces
00:33:01interrelations, ces proximités, où on arrive à loger énormément d'habitants, et en
00:33:06même temps de développer une nature en ville.
00:33:09Merci beaucoup Henri, alors avec vos deux témoignages, on a parlé de pensée, de cartographier
00:33:16des interrelations, on s'est ancré dans le sol, on a regardé aussi les horizons plus
00:33:22lointains, cette ligne d'horizon chère à Michel Corajou que vous avez citée, on
00:33:26a parlé de paysage, au fond on évoque le lien entre l'habitant, le maître d'ouvrage,
00:33:34vous avez cité ce nom, le maître d'oeuvre que vous êtes, on parle d'existant, de projet,
00:33:39on parle d'aménager, mais aussi de ménager, ménager c'est une référence étymologique
00:33:45aussi au théâtre d'agriculture et du ménage des champs d'Olivier Dessert, l'un des fondateurs
00:33:51de l'agronomie, de l'agronomie à l'horticulture il n'y a qu'un pas, et nous allons faire
00:33:55maintenant un zoom avec les horticulteurs, les jardiniers qui sont devenus jardiniers
00:34:03paysagistes, puis paysagistes concepteurs, avec vous au fond les gestionnaires de nature
00:34:08en ville, je salue la présence de la présidente de l'association Hortis qui les fédère
00:34:12partout en France, avec vous Karine Salovkost, un service dit des espaces verts, a des prérogatives
00:34:20très larges et est à l'interface de tout ça, comment est-ce que la question qui nous
00:34:25est posée par Antoine résonne dans votre pratique ici à Paris ?
00:34:31Ce qui est très intéressant aux écoutants c'est de voir qu'en effet la pratique est
00:34:36totalement percutée par la théorie et qu'aujourd'hui on n'est plus dans des discours, en réalité
00:34:41c'est quelque chose qu'on observe réellement, et vous parliez par exemple des super blocs
00:34:46à Barcelone, il faut savoir qu'avec le changement de municipalité, ces projets ont été complètement
00:34:51stoppés, et que donc ça reboucle sur cette question de contrat social, c'est-à-dire
00:34:56que le choix de la nature en ville, c'est encore une fois un choix extrêmement politique,
00:35:02et notamment au niveau des collectivités locales, c'est un choix d'allocation de l'espace
00:35:08sur une typologie, et on pourrait choisir de faire une rue, un jardin, un habitat, et
00:35:15donc à chaque fois cette question se pose. Donc moi je vais rester assez pragmatique,
00:35:21je vais essayer de vous montrer quelques typologies d'actions qu'on mène à la ville de Paris,
00:35:27et essayer de faire un petit zoom sur en effet qu'est-ce que ça a touché, qu'est-ce
00:35:32qui s'est passé avec les citoyens, parce qu'aujourd'hui de toute façon on ne peut
00:35:35plus construire la ville tout seul, on le fait systématiquement dans des dispositifs
00:35:40de concertation, et donc je vais essayer de vous montrer à travers des exemples, des
00:35:45photos, très simples, les questions qui se sont posées. Donc moi je voulais juste dire
00:35:50aussi en préalable, c'est qu'on est vraiment à un tournant, alors attendez, c'est moi
00:35:54qui dois faire tourner mes slides, donc non non, je vais y aller, pardon, voilà. Donc
00:36:01par exemple Paris, comme ça a été dit, on est une ville quand même assez minérale,
00:36:06surtout le coeur de Paris, alors on a deux énormes bois qui sont juste à côté, mais
00:36:10Paris lui-même est quand même très minérale dans son sol, et on était une ville principalement,
00:36:16enfin c'est l'héritage d'Alphand, avec des jardins, des jardins qui étaient des points
00:36:20qui ont été pensés en effet dans la ville comme des espaces de respiration, mais qui
00:36:24étaient très cantonnés, qui souvent d'ailleurs avaient des grilles autour, et donc qui étaient
00:36:31très cantonnés dans l'espace, et même moi quand j'étais petite, je suis parisienne,
00:36:35on avait, le parisien n'avait même pas le droit d'aller dans les pelouses, voilà.
00:36:39Donc c'était une nature certes de respiration, mais on restait à côté, elle avait une fonction
00:36:46aussi décorative, esthétique, mais on était beaucoup moins sur un rôle d'usage comme
00:36:52aujourd'hui. Donc là je vous montre maintenant nos parcs, ça c'est le parc des Buttes-Chaumont,
00:36:57en pleine canicule, et donc voilà, tout le monde est là, tout le monde utilise cette
00:37:03nature, est dedans, y vit, et c'est pas uniquement une nature qu'on regarde. Et ça c'est un
00:37:08changement vraiment énorme d'ailleurs pour les équipes de la ville de Paris, pour qui
00:37:13c'est beaucoup plus compliqué d'entretenir une nature aussi utilisée que celle que nous
00:37:20pouvons avoir. Et donc il y a une espèce, on est actuellement dans une espèce d'urgence
00:37:26végétale, de nature, on a besoin de nature en ville, pour des raisons qui ont été déjà
00:37:32évoquées, le réchauffement climatique, le besoin pendant les canicules, donc typiquement
00:37:37à Paris on ouvre les espaces verts toute la nuit pendant les périodes de canicule,
00:37:43le besoin aussi d'être beaucoup plus dehors parce que certains appartements sont pas très
00:37:47bien rafraîchis, le besoin aussi de faire sortir ses enfants et jouer dans l'espace,
00:37:53et tous ces besoins sont exprimés, du coup nous nous sommes lancés dans une politique
00:37:59massive de production de nature dans la ville. Et donc c'est un véritable changement. Donc
00:38:05d'une part, la première étape j'ai envie de dire ça a été d'essayer d'embarquer
00:38:10les citoyens avec notamment les permis de végétaliser, où on embarque le citoyen qui
00:38:16lui-même devient un acteur au fond de l'entretien de la nature qu'il a en bas de chez lui. Donc
00:38:23ça c'est une politique qu'on a développée. On a développé aussi ce qu'on appelle les
00:38:28dispositifs embellir votre quartier, où après des concertations avec les habitants,
00:38:33donc on fait des marches dans les quartiers, on définit les endroits où on souhaite une
00:38:39évolution de l'usage. Donc typiquement le choix politique là et le choix social c'est
00:38:45de réduire, de supprimer des places de parking, des places de stationnement pour la voiture
00:38:51pour planter des arbres et créer un espace végétal dans lequel on pourrait envie de
00:38:58s'asseoir au bord ou juste contempler. J'étais dans une conférence la semaine dernière à
00:39:04Rotterdam où il y a une étude qui est sortie dans Lancet qui dit que pour améliorer la
00:39:12santé mentale des habitants, il faut voir de sa fenêtre trois grands arbres, avoir
00:39:19une couverture en canopée de 30% et être à 300 mètres d'un espace vert de qualité.
00:39:26Donc voilà, on essaye de se porter mieux en ville en plantant des arbres. Un autre exemple
00:39:33c'est les rues aux écoles. Donc là typiquement on ferme complètement à la circulation la
00:39:39rue et quelque part la cour d'école passe dans la rue et du coup l'espace public devient
00:39:47à la fois une extension quelque part de l'école, les parents peuvent rester quand
00:39:55ils vont chercher leurs enfants, les enfants jouent à l'extérieur de l'école. De même
00:40:00qu'on travaille aussi sur les... j'ai vu que dans l'exposition il y avait des photos
00:40:05de cours oasis, on travaille aussi, on a tout un programme de végétalisation des cours
00:40:09d'école à l'intérieur. Donc l'idée c'est qu'il y ait une continuité, on va dire naturelle
00:40:14et végétale entre l'intérieur et l'extérieur de l'école et en effet on a des très très
00:40:20bons retours. Donc on a commencé de façon expérimentale typiquement à en produire
00:40:24quelques-unes, des cours aux écoles, des rues aux écoles et on a eu une explosion
00:40:29des demandes des mairies d'arrondissement pour en développer plus. Autre type de modification
00:40:40qu'on fait c'est sur les grandes promenades, donc ça c'est des grandes promenades héritées
00:40:45de l'époque d'Alphand avec un grand alignement d'arbres très classique, donc on les végétalise
00:40:53ce qui en fait des promenades beaucoup plus agréables, on peut aussi en faire des promenades
00:40:58sportives donc on développe les usages dans ces espaces verts nouveaux où c'est agréable
00:41:04au fond de s'arrêter et pas juste de passer dans la rue, la rue change de fonction.
00:41:11Autre très bel exemple c'est la rue de la Chapelle qui a été complètement transformée,
00:41:16je vous invite à aller la voir, elle vient d'être livrée juste à côté du deuxième
00:41:22aréna qui vient d'être aussi livrée et c'est vraiment un changement spectaculaire
00:41:28et aujourd'hui l'espace a été livré il y a quelques mois et on observe qu'il y a
00:41:34vraiment un respect par les habitants de ce nouvel aménagement.
00:41:43Autre exemple, la Petite Ceinture, donc là c'est peut-être pour évoquer aussi les
00:41:49questions aux égards à la biodiversité, par exemple la Petite Ceinture c'est vraiment
00:41:54un des grands réservoirs de Paris en termes de biodiversité, donc là se posent peut-être
00:41:59d'autres questions, c'est-à-dire qu'on souhaite l'ouvrir au public pour qu'il y ait évidemment
00:42:03ça augmente l'accès à la nature des parisiens mais en effet comme ça a été dit il faut
00:42:09veiller à ce qu'il n'y ait pas de dégradation de la biodiversité, il y a certains endroits
00:42:14où c'est un des plus grands repères européens pour les chauves-souris par exemple, donc
00:42:21on essaye de le préserver tout en l'ouvrant au public. Alors, deuxième exemple, enfin
00:42:28dernier exemple, je crois que c'est mon dernier, c'est la Place de Catalogne, donc je vous
00:42:34invite, ça a été inauguré hier, c'est très réussi et pour moi c'est aussi un exemple
00:42:41du changement de paradigme dans la typologie d'espace vert qu'on livre, c'est-à-dire
00:42:46que là, c'est l'idée d'une forêt urbaine, ce qu'on appelle une forêt urbaine, c'est-à-dire
00:42:51qu'on voit une densité très forte d'arbres avec l'idée encore une fois qu'ici on va
00:42:56réussir à créer un milieu vivant qui va pouvoir vivre tout en donnant également l'accès
00:43:05au public puisqu'il y a une zone clairière qui permet quelque part d'être dans la forêt,
00:43:11dans une zone aménagée, tout en gardant cette zone un peu comme vous l'avez cité
00:43:15là sur Barcelone où on a une zone par contre où on regarde, on profite et on laisse la
00:43:22faune et la flore se développer. Donc voilà, je m'arrête là.
00:43:29Merci beaucoup, on le voit vous avez cité la fameuse règle des 3, 30, 300, c'est le
00:43:38nouveau slogan du moment. Effectivement, il y a des injonctions comme ça, des claims
00:43:44comme dirait les communicants qui nous invitent à passer à l'action, à avoir des grands
00:43:49mots. Vous l'avez dit, il y a aussi un dessin EIN et IN comme ça avait été le cas sous
00:43:56Haussmann et Alfand avec une architecture paysagère, une politique, vous avez cité
00:44:03ce mot et puis l'image de ce que vous nous avez également montré, des petites touches,
00:44:09certains parlent de points d'acupuncture, Henri parlait de territoire par territoire,
00:44:14site après site et on voit bien qu'il y a parfois une tension entre les deux. Maintenant
00:44:20je voudrais qu'on rentre dans le vif du sujet, un nouveau contrat social, point d'interrogation
00:44:25après ce panorama. Donc l'exercice est périlleux puisque la question posée par Antoine Picon,
00:44:30vous l'avez compris, n'est pas tout à fait simple à appréhender même si on sent
00:44:34tous qu'il y a un lien avec ce sujet. Et donc nous allons aborder trois grandes thématiques
00:44:40tout à fait arbitraires mais qui vont nous permettre de tourner autour du sujet et probablement
00:44:46de poser plus de questions que de réponses définitives. Les liens, les formes et puis
00:44:52les questions de densité société. A propos des liens, vous avez parlé d'expérience
00:44:57Karine participative, on est frappé de voir ce que certains tournaient en dérision en
00:45:06disant les enfants ne savent plus d'où viennent les carottes râpées et ne les associent pas
00:45:10aux carottes. Soyons plus scientifiques, ça a été décrit par Robert Pyle au début
00:45:16des années 70, l'extinction de l'expérience de nature. Le fait que nous n'ayons plus
00:45:22d'une manière générale dans des sociétés occidentalisées, dans des villes, de rapport
00:45:27sensible avec le vivant, probablement accentué par le fait qu'après guerre, pour sortir
00:45:33du rationnement alimentaire, on a développé massivement des filières agricoles qui ont
00:45:38fait que, quel que soit le milieu social, on s'est massivement détourné de la culture
00:45:43potagère qui était un espace très contraint de nature. Comment est-ce que vous, vous voyez
00:45:49les uns et les autres, avec vos prismes différents, l'état de ces liens individuels entre les
00:45:56citoyens, ou le citoyen, peut-être que vous êtes, ou ce que vous observez, et les natures
00:46:02qui nous entourent, en particulier en ville ? Le micro est là Antoine, pardon.
00:46:11Moi je pense que bon, il faut garder des généralisations à l'échelle de la planète, mais en tout
00:46:17cas dans nos pays, dans un pays comme la France, je crois qu'il y a un désir quand même de
00:46:23renouer effectivement un lien qui s'est distendu. C'est vrai que, bon, on considérait que le
00:46:29poisson arrive sous forme de par les pipèdes avec de la panure dessus, c'est un drôle
00:46:36de rapport au monde animal et vivant, je pense qu'il y a effectivement ce désir. Mais j'insiste
00:46:44sur ces implications. Le rapport à la nature, ça prend du temps, et donc ces solidaires
00:46:49cultivés, ça prend du temps. Entretenir, ça prend du temps. Je crois qu'un des enjeux
00:46:54par exemple très clair, c'est plus on aura de nature dans les villes, plus à un moment
00:46:57on ne pourra pas uniquement se reposer sur le personnel technique des villes, mais il
00:47:01faudra aussi que ça soit pris en compte par les citoyens. Donc moi le lien, je le vois
00:47:05aussi dans le temps et dans la nécessité de reformuler finalement la façon dont on
00:47:10vit dans les villes. Je pense qu'une des grandes limites aujourd'hui, je dirais, à
00:47:14Paris, dans de ces espaces qu'on veut faire cultiver par les habitants, c'est le temps
00:47:20qu'ils peuvent y consacrer. Donc je crois qu'il y a toute une réflexion à mener sur
00:47:23les rythmes de nos sociétés, etc., qui va bien au-delà même simplement des affects
00:47:28que l'on peut développer au contact de la nature.
00:47:31Karine, à ce sujet ?
00:47:32Oui, en effet, il y a le temps qu'on peut y consacrer et il y a aussi le respect par
00:47:38les autres de l'espace public produit. C'est-à-dire que, par exemple les permis de végétaliser,
00:47:46dans l'idée c'est bien, donc d'ailleurs il y en a qui marchent très bien, et puis
00:47:49il y a des endroits où c'est beaucoup plus fréquenté, où d'autres personnes jettent
00:47:54tous leurs déchets dedans, et pour le citoyen motivé, au bout d'un moment c'est juste
00:48:02épuisant et il n'a plus envie de le faire. Donc c'est aussi le respect par les autres
00:48:08et donc comment on vit du coup avec cette nature. Et puis sinon ce que je voulais dire
00:48:14c'est qu'il y a énormément, en tout cas, on fait des expérimentations, nous par exemple
00:48:19au Bois de Vincennes on crée des brigades avec des volontaires pour justement entretenir
00:48:25le bois, et puis la ville de Paris met en place tout un tas de dispositifs pour rapprocher,
00:48:34en lien avec la nature, on a créé aussi l'académie du climat qui est pas loin d'ici,
00:48:40il y a tout un tas d'activités, il y a la maison du jardinage, la maison Paris Nature,
00:48:45et qui rencontrent un succès énorme. Donc je pense qu'aujourd'hui aussi, peut-être
00:48:50la différence avec il y a quelques années, c'est que, en effet, on est un peu, enfin
00:48:55on en parlait avant cette table ronde, mais à la fois on est en plein dans la technologie
00:49:01mais aussi on est vraiment dans le retour à la nature, d'ailleurs on parle de nature
00:49:05based solution, et ça c'est quelque chose qui existe, il y a une demande en tout cas,
00:49:14peut-être qu'on n'avait pas avant.
00:49:16Antoine, citez les jardiniers et l'entretien, juste pour qu'on ait l'ordre de grandeur,
00:49:21il y a combien d'agents dans votre service à la ville de Paris qui prennent soin de
00:49:25tout ce qui nous entoure ?
00:49:27Donc il y a 1000 personnes, ma direction au total fait 3000 agents, il y a 1000 personnes
00:49:33dédiées à l'entretien quotidien des espaces verts, il y en a 800 sur des espaces verts
00:49:39particuliers qui sont les cimetières, qui font partie aussi de ma direction, il y a
00:49:44une centaine d'agents aussi qui produisent les plantes, on ne le sait pas forcément
00:49:48mais la ville de Paris produit ses propres plantes, avec une pépinière qui est basée
00:49:54à Rungis, et puis il y a à peu près 800 personnes qui s'occupent des deux bois, Vincennes
00:50:04et Boulogne, et de l'ensemble des arbres d'alignement.
00:50:09Derrière chaque plante, il y a des femmes et des hommes, il se plaît à le dire.
00:50:15Je voulais juste mentionner, lorsqu'on a eu l'idée des grands ensembles, beaucoup
00:50:20d'architectes, d'urbanistes etc, ont rêvé de les mettre au milieu de jardins, et puis
00:50:25quelques années plus tard, il y a notamment un ingénieur qui écrit, malheureusement
00:50:30ça coûte trop cher, on n'a pas les moyens etc, et je dirais bon, oui la nature, il
00:50:36faut être prêt à en prendre soin, il faut être prêt aussi à avoir les moyens de la
00:50:42déployer, et c'est pas toujours simple, et bon, un des grands problèmes de l'urbanisme
00:50:47moderne, c'est d'avoir échoué sur ce point là.
00:50:50Karine, Henri peut-être ? Allez-y Karine.
00:50:53Sur le sécherre, ça se discute en réalité, je pense que peut-être c'était une époque
00:51:00où justement la nature et l'entretien de celle-ci étaient quelque chose qu'on n'estimait
00:51:06pas forcément clé et qui venait en fin de budget.
00:51:09Ce qui est moins le cas aujourd'hui, même moi je l'observe, par exemple ma direction
00:51:14aujourd'hui, on a plus de budget que sous d'autres mandatures ou avant.
00:51:19Donc encore une fois, c'est une question de choix, et de penser est-ce que c'est important
00:51:24ou pas.
00:51:25Et je pense qu'aujourd'hui on a les moyens de le défendre.
00:51:27Henri, vous nous avez montré le parc du peuple de l'herbe, j'en profite.
00:51:30Il y a là-bas donc la maison des insectes qui est animée par l'OPI, l'Office pour
00:51:36les insectes et leur environnement.
00:51:38Ce sont les plus grands spécialistes en France, trop peu connus de tous les insectes.
00:51:41Allez les voir à Carrière-sous-Poissy.
00:51:43Henri.
00:51:44Oui, donc il y a cette maison des insectes, je pense qu'il faut aider, il y a un engouement
00:51:51de la population pour tout ce qui est, en général, on le voit sur tous les sites, il y a un engouement
00:51:56pour tout ce qui est naturel, notamment dans ce site de Carrière-sous-Poissy.
00:52:00Il y a des associations qui s'occupent, qui s'approprient finalement, sans être eux-mêmes
00:52:04forcément les jardiniers, parce que là c'est assez sauvage, je dirais, la manière dont
00:52:09on a développé les plantations.
00:52:11Mais le fait qu'il y ait des associations qui s'implantent, qui se développent et qui
00:52:17prennent en compte le site, c'est important.
00:52:19Par exemple, un autre parc, c'est le parc des Docks à Saint-Ouen, c'est un parc public,
00:52:24mais on a implanté des jardins partagés, prêtés à des associations, qui cultivent
00:52:33aussi, qui vendent leur miel, il y a toute une serre aussi, où les gens peuvent se rencontrer,
00:52:41apporter les légumes, il y a des cours de cuisine, il y a des événements.
00:52:47Donc finalement, cet engouement pour le paysage, la nature et autres, ça crée un engouement
00:52:54et une partie des terrains n'est pas forcément entretenue par la ville, elle peut être entretenue
00:53:00directement par ces associations, par les habitants.
00:53:03Donc l'idée de jardin partagé.
00:53:05Alexandra, vous vouliez dire un mot ?
00:53:07Oui.
00:53:08Ce qui est frappant, en fait, quand on regarde les projets, ou les termes utilisés, c'est
00:53:15qu'on essaie finalement d'emporter quelque part ce qui était extérieur à la ville,
00:53:19dans la ville.
00:53:20On parle de forêt, c'est un terme qui ne pertenait pas à la ville, on parle de l'agriculture
00:53:25urbaine aussi, et quelque part on se pose la question aussi de...
00:53:30Les forêts en France, elles périclident, la forêt que j'ai montrée dans les Vosges,
00:53:34c'est une forêt industrielle, elle a été endommagée par les pluies acides, le sulfure
00:53:41qui arrive, il y a des problèmes avec OneF, c'est plein aussi de questions vraiment importantes,
00:53:50et on voit aussi le résultat des élections, les territoires ruraux, comment aussi on les
00:53:55prend en compte dans les territoires urbains, parce que la ville, elle se sert quand même
00:53:59de ces ressources, de ces externalités, qui ne sont en fait pas trop des externalités,
00:54:04c'est des ressources, de ces territoires fantômes, comme certains les appellent.
00:54:09Voilà, quel contrat aussi, social, végétal, mais pas que urbain, mais étendu...
00:54:18C'est important de le rappeler, parce que dans une période, je fais une petite parenthèse,
00:54:22où on a tendance à opposer différents pans de la société, et villes et campagnes,
00:54:26on est bien d'accord que ce soir nous sommes autour du sujet des natures urbaines, c'est
00:54:29le thème de l'exposition, mais qu'il ne s'agit pas de donner quelques leçons que ce soit,
00:54:34et d'opposer, comme c'est fait très souvent les territoires ruraux, aux territoires urbains.
00:54:39La parenthèse est fermée.
00:54:40Mais surtout, en fait, ils sont liés, on ne peut pas les dissocier.
00:54:44Henri, vous vouliez ajouter ?
00:54:46Antoine parlait des grands ensembles, en fait, l'architecture des modernes, les quartiers,
00:54:52qui étaient très verts, effectivement, mais c'était un vert pauvre, très pauvre.
00:54:57Ça dépend des cas.
00:54:59Je parle à la grande majorité, il n'y avait pas d'arbustes, quasiment pas, on était dans la pelouse,
00:55:07qu'il fallait tondre, donc entretenir, donc il y avait beaucoup d'entretiens,
00:55:11une gamme d'arbres très limitée, et donc certains les appellent les déserts verts.
00:55:18Effectivement, c'était vert, et ça demandait beaucoup d'entretiens,
00:55:22et en même temps, ça n'apportait pas de biodiversité.
00:55:24Donc il y a aussi ce thème de la biodiversité qu'il faut développer,
00:55:28et plus on a de biodiversité, plus on a ces relations complexes,
00:55:32finalement, entre les organismes, le sous-sol, les plantes,
00:55:35et ça limite énormément l'entretien.
00:55:38Antoine ?
00:55:39Oui, je pense qu'un des grands enjeux qui est en train de se dessiner,
00:55:42c'est que pendant, finalement, des siècles, la nature en ville, c'était une nature essentiellement dessinée.
00:55:48Et aujourd'hui, une des questions qui est posée,
00:55:51c'est comment on fait coexister une nature qui restera dessinée dans un certain nombre de cas,
00:55:56et puis une nature dont on espère qu'elle va proliférer, qu'elle va vivre finalement par elle-même, etc.
00:56:02Et je crois que ça, finalement, ça renvoie à ce que je disais au tout début,
00:56:06la frontière entre l'aménagement et le ménagement.
00:56:10Et je crois que c'est ça, peut-être, une des choses les plus compliquées aujourd'hui,
00:56:14c'est comment, parfois, ne pas dessiner, et dans d'autres cas, dessiner,
00:56:20et je crois que c'est une des questions compliquées.
00:56:23C'est, finalement, comment dépasser Alphand et, finalement, toute la période héroïque,
00:56:30où, finalement, le parc haussmanien, tout est dessiné,
00:56:33et les plantes elles-mêmes sont produites en serre, etc.
00:56:37Comment passer à quelque chose de beaucoup plus complexe,
00:56:40qui mélange du planifié et du non-planifié ?
00:56:43Et ça, je crois que c'est une des grandes tâches qui nous attendent.
00:56:46Et c'est d'ailleurs un des sujets, je vous conseille d'aller regarder les travaux d'Anne-Caroline Prévost,
00:56:51au Muséum National d'Histoire Naturelle,
00:56:53qui avait notamment popularisé le sujet des expériences de nature avec Cynthia Fleury,
00:56:58la philosophe bien connue, et qui nous dit quelque chose qui fait écho à ce que vous avez indiqué, Antoine,
00:57:05c'est qu'il est beaucoup plus facile de perdre l'expérience du vivant que de le gagner, que de la regagner.
00:57:11Et donc, il y a cette notion de temps,
00:57:13et on a abordé quelque chose, pour moi, qui est un triptyque,
00:57:18entre les habitants et leur rapport direct avec le vivant,
00:57:23qui n'est pas forcément automatique,
00:57:25le jardinier, qui est parfois dans l'ombre, mais qui peut aussi être un médiateur,
00:57:28et puis, n'ayons pas peur des mots, puisqu'on parle un peu de politique,
00:57:32des corps intermédiaires que peuvent être les associations,
00:57:35qui permettent de mettre en lien des spécialistes du sujet avec des citoyens amateurs,
00:57:41et ce temps est aussi utile pour retrouver cette expérience.
00:57:46Alors, on a parlé de l'individuel, mais on le voit bien, il y a un sujet collectif,
00:57:49je voudrais qu'on fasse un peu, désolé pour le jeu de mots, un état des liens collectifs.
00:57:54On a tendance à dire qu'en ville comme ailleurs, les liens sont distendus entre les individus.
00:58:02L'individualisme gagne, l'hyper-connexion à nos petits doudous électroniques
00:58:08nous détournerait cette hyper-connexion digitale d'une collection végétale,
00:58:15mais aussi d'une connexion interpersonnelle, on parle même d'isolement.
00:58:20Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce que, via la nature, justement, via le paysage,
00:58:27on retrouve ou on trouve des espaces de liens interpersonnels, de liens sociaux ?
00:58:35Moi, je pense que ce n'est pas une question si récente que ça.
00:58:39C'est-à-dire, on a quand même, je dirais, la technique, c'est quelque chose qui nous rend plus autonomes
00:58:44et d'une certaine façon plus solitaires.
00:58:47Je dirais, dans les civilisations traditionnelles, vous ne pouvez pas vivre très longtemps seul, etc.
00:58:52La technique, ça nous permet finalement de vivre plus longtemps seul,
00:58:55donc ça nous déconnecte des autres d'une certaine façon.
00:58:59Mais là où je reste un optimiste, c'est que ça nous fournit aussi des moyens de nous connecter différemment.
00:59:06Je crois que, bon, en termes clairs, moi, je fais partie des gens qui pensent que le numérique,
00:59:10ça représente quand même quelque chose qui présente de nombreux aspects positifs,
00:59:15mais il est vrai qu'aujourd'hui, il y a des phénomènes d'addiction,
00:59:18il y a des phénomènes de solitude provoqués par le numérique,
00:59:21des phénomènes aussi de perte, finalement, du contact avec la vie matérielle.
00:59:26Donc je pense qu'il faut retrouver des équilibres,
00:59:28et je pense que la place de la nature là-dedans est importante.
00:59:32Mais ce qu'on peut noter aussi, c'est qu'un peu partout dans le monde,
00:59:34se sont développées des plateformes qui permettent justement de redécouvrir la nature dans les villes,
00:59:39des plateformes numériques, etc.
00:59:41Donc je crois qu'il faut servir du mal comme médicament, parfois.
00:59:46Alexandra.
00:59:48Je rebondis justement parce que c'est scientifique de la Terre qui instrumente avec des capteurs,
00:59:53donc c'est de la technique aussi, ça génère des données,
00:59:55et il y a certains capteurs qui peuvent être aussi utilisés dans le cadre pour les citoyens.
01:00:00Donc c'est les projets de sciences participatives.
01:00:02Et donc là, vraiment, on a une possibilité avec la technique, avec les outils numériques,
01:00:07de pouvoir reconsidérer la biodiversité, ou bien aussi la question des nitrates,
01:00:11tout cet ensemble de choses.
01:00:15Alors Karine, vous disiez tout à l'heure que parfois,
01:00:18le collectif vient empêcher des projets de connexion aux vivants,
01:00:24par exemple la végétalisation de pieds d'arbres avec le non-respect.
01:00:28Vous nous avez aussi montré une image d'une densité significative en période de canicule dans les parcs.
01:00:34Comment est-ce que vous observez concrètement ces liens ?
01:00:37On pense évidemment aux jardins partagés, avec le réseau mains vertes qui est né il y a quelques années,
01:00:42ce serait quoi le panorama des liens observés dans vos espaces ici à Paris ?
01:00:49En fait, il y en a énormément.
01:00:51Comme évoqué, il y a tout le réseau des jardins partagés,
01:00:56où là, vraiment, c'est des associations de citoyens qui gèrent,
01:01:00et qui aussi se connectent avec des gens qu'ils connaissent, etc.
01:01:04Il y a des équipements de la ville,
01:01:07et puis après, c'est un peu ce que j'évoquais avec les différents usages dans les parcs et jardins.
01:01:12Les parcs et jardins, c'est vraiment des lieux de mixité, de rencontres,
01:01:17des jeunes, des vieux, il y a des airs de jeu, pour les petits, pour les grands.
01:01:23Donc c'est vraiment des lieux de rencontres, en réalité,
01:01:27et des lieux dans l'espace public, et par définition,
01:01:30quand on est dans l'espace public, on est dans quelque chose qui est public,
01:01:33mais avec les autres, on n'est pas dans son jardin.
01:01:38C'est peut-être d'ailleurs ça qu'a de particulier la nature en ville, d'une certaine façon.
01:01:44Donc il y a énormément, je dirais qu'aujourd'hui,
01:01:48il y a énormément d'initiatives qui se développent.
01:01:51Il y a aussi tous les acteurs de l'occupation temporaire
01:01:55qui occupent des friches,
01:01:58et qui font des activités de type citoyenne,
01:02:03et qui sont souvent liées avec soit de l'agriculture urbaine,
01:02:09soit des problématiques de nature en ville.
01:02:13Henri ?
01:02:15Tous les exemples que donne Karine nous montrent l'intérêt de cette dynamique
01:02:20qui est créée par la prise en compte de la nature en ville.
01:02:24Plus on respecte cette nature, plus on lui donne de la place,
01:02:30on l'augmente parfois, on lui donne de l'ampleur,
01:02:34et plus il y a cet engouement, cette dynamique,
01:02:37aidé par des associations d'ornithologues,
01:02:40il y a énormément d'intérêts scientifiques, ludiques,
01:02:45différents usages qui ont été évoqués ici.
01:02:48Moi personnellement, je ne m'inquiète pas,
01:02:50enfin en tout cas ce n'est pas mon rôle de dire
01:02:52est-ce que les gens sont isolés ou autre,
01:02:54si on arrive à enlever le maximum de voitures dans les quartiers,
01:02:59à avoir des espaces, des sols ouverts,
01:03:02que cette nature se déploie,
01:03:04il y a ce besoin d'émerveillement aussi, de tous,
01:03:09qui s'opère, et qui s'opère sans qu'on fasse pas grand chose,
01:03:13donc les gens s'associent, se promènent,
01:03:16il y a toute l'idée de promenade en ville,
01:03:19qui est liée aux nouveaux déplacements,
01:03:22à vélo, à pied,
01:03:24la société change énormément,
01:03:27et s'intéresse réellement au contexte,
01:03:30au contexte vivant,
01:03:32alors l'idée de, est-ce que c'est de la nature,
01:03:34est-ce que c'est artificiel ou pas,
01:03:36finalement on est dans un mélange,
01:03:39on ne se pose même plus toutes ces questions
01:03:41qui sont parfois stériles,
01:03:43mais ce qui est important c'est le vivant,
01:03:45ce qui est important c'est le développement du vivant
01:03:47et de toutes les connexions possibles.
01:03:49Antoine ?
01:03:50Oui, juste une petite réflexion sur le changement
01:03:53qui s'amorce des espaces publics,
01:03:55on avait une vision un peu caricaturale,
01:03:58mais l'espace public c'était un espace plutôt minéral,
01:04:01du type forum, etc.,
01:04:03où on vient prendre des positions tenitruantes
01:04:06devant la foule, etc.,
01:04:09et aujourd'hui je crois qu'on a une vision d'espace public
01:04:11qui est en train de se transformer,
01:04:13dans lequel l'espace public, oui,
01:04:15il y a toujours un côté place publique,
01:04:17mais c'est une place publique où il y a des arbres,
01:04:19c'est une place publique où il y a des oiseaux,
01:04:21où il y a toute une série d'autres acteurs
01:04:24que les sociologues aujourd'hui appellent parfois les non-humains,
01:04:28bon, un peu jargon,
01:04:30mais je crois qu'il y a une espèce de transformation finalement,
01:04:33je dirais même un peu des topos de la démocratie,
01:04:36c'est-à-dire que la démocratie c'est plus uniquement
01:04:38une pièce de théâtre sur un endroit un peu minéral,
01:04:41ça devient quelque chose d'un peu différent,
01:04:43dans lequel la présence de la nature joue un rôle,
01:04:46et je crois qu'il faut un peu réfléchir
01:04:48au changement qui s'amorce un peu comme ça.
01:04:51Alors, il y a quelque chose qui a été un peu abordé,
01:04:54mais vous avez parlé d'aménager, de ménager,
01:04:58on a parlé d'époques successives,
01:05:01il y a la question de la forme concrète que ça prend,
01:05:04je vais être caricatural,
01:05:06est-ce que nécessairement il faut,
01:05:09pour qu'on développe ce lien,
01:05:12une forme d'aménagement particulière ?
01:05:16Est-ce que les dynamiques
01:05:19où on va favoriser la biodiversité,
01:05:23mélanger le cultivé et le spontané,
01:05:27où on va favoriser l'appropriation citoyenne,
01:05:31c'est la fin de la beauté, de l'esthétique paysagère,
01:05:35à certains, et ce que qualifiaient,
01:05:38de manière un peu condescendante,
01:05:40peut-être certains, mais parfois assez réalistes,
01:05:42dans un enthousiasme, un paysage palette,
01:05:45on a entendu ce mot-là à un moment donné,
01:05:48quid de la forme ?
01:05:50Là, je m'adresse à celles et ceux qui font les projets,
01:05:54quelles sont les formes
01:05:56qui, aujourd'hui, incarnent ces natures urbaines,
01:06:00est-ce qu'il y a des formes bien déterminées,
01:06:02ou est-ce que, finalement,
01:06:04toutes les formes existantes
01:06:08sont propices à créer ce lien social
01:06:12entre les habitants et ce lien avec le vivant ?
01:06:16La question doit être mal formulée,
01:06:18je les vois sourciller,
01:06:20mais on va se débrouiller, grâce à Antoine.
01:06:22Comme on a dit que la théorie et la pratique
01:06:24allaient de pair,
01:06:26je dirais qu'on est face à des impératifs
01:06:28un peu difficiles à concilier,
01:06:30mais on va y arriver.
01:06:32Il y a d'un côté, très clairement,
01:06:34le désir de dépasser le laic du passé,
01:06:36la plantation d'alignements,
01:06:38le jardin bien rangé, etc.
01:06:40Il faut aller au-delà.
01:06:42Inventer, par exemple, les corridors écologiques,
01:06:44ce ne sont pas des compositions
01:06:46au sens traditionnel.
01:06:48Il y a cette question qui se pose
01:06:50de comment aller au-delà,
01:06:52peut-être raisonner plutôt en termes de cloud,
01:06:54avec des points d'intervention
01:06:56que nécessairement des axes à l'ancienne.
01:06:58Il y a tout ce volet-là.
01:07:00En même temps, je fais partie des gens
01:07:02qui ont tendance à penser que le spontanéisme
01:07:04généralisé peut aussi conduire
01:07:06au chaos,
01:07:08pas forcément dans un sens positif,
01:07:10il y a aussi des chaos positifs,
01:07:12et qu'il faut trouver en même temps
01:07:14un moyen de concilier une certaine expressivité,
01:07:16une intention, etc.
01:07:18Quand on dit que la nature en ville,
01:07:20c'est politique,
01:07:22il y a aussi besoin parfois d'expressions plastiques.
01:07:24Il y a ces deux choses,
01:07:26c'est comment dépasser la forme
01:07:28et quand même, en même temps,
01:07:30continuer à faire de la forme.
01:07:32Et vous ayant lancé ce ballon,
01:07:34mesdames et messieurs les praticiens,
01:07:36à vous de jouer.
01:07:38C'est bientôt l'euro, je crois,
01:07:40pour les amateurs de sport.
01:07:42On a des exemples dans l'histoire.
01:07:44On a en mémoire Frédéric Lowe.
01:07:48Frédéric Lowe-Holmstedt, bien sûr.
01:07:50Antoine a montré Central Park.
01:07:52C'était un des points de départ,
01:07:54mais après, il a développé
01:07:56l'idée de paysages en réseau,
01:07:58donc les parcs-systèmes.
01:08:00C'est une idée de nature,
01:08:02même si c'est complètement artificiel.
01:08:04Mais aujourd'hui, on prend ces espaces
01:08:06comme des espaces de nature qui traversent
01:08:08et qui relient l'ensemble
01:08:10de la ville existante, future.
01:08:12C'était vraiment un vecteur d'urbanisation.
01:08:14C'était à chaque fois fait
01:08:16avant l'urbanisation.
01:08:18Aujourd'hui, les USA, mais nous aussi,
01:08:20on s'est largement développé.
01:08:22On a plus ces espaces.
01:08:24C'est beaucoup moins facile
01:08:26d'avoir ces grands parcs traversants.
01:08:28Et donc, on est plus
01:08:30dans des sites
01:08:32dont je parlais tout à l'heure.
01:08:34On est plus sur des territoires
01:08:36où il faut travailler
01:08:38lieu par lieu.
01:08:40Et quand on travaille lieu par lieu,
01:08:42il faut penser
01:08:44dans la forme
01:08:46le rapport entre densité,
01:08:48la quantité de sol ouvert
01:08:50qu'on va pouvoir développer.
01:08:52S'ils ne sont pas
01:08:54végétalisés aujourd'hui,
01:08:56comment on crée les sols ?
01:08:58Vous parliez de tectosols tout à l'heure.
01:09:00Parce qu'aujourd'hui, on sait créer
01:09:02des médiums
01:09:04pour plantations.
01:09:06On sait créer des sols
01:09:08au lieu d'aller chercher
01:09:10quand on crée un quartier,
01:09:12au lieu d'aller chercher des sols
01:09:14à la campagne, dans l'agriculture,
01:09:16on reconstitue des sols
01:09:18avec des démolitions,
01:09:20avec des choses assez incroyables,
01:09:22même du béton, je dirais,
01:09:24mélangé à des matières organiques
01:09:26et autres.
01:09:28Quelle forme ça doit avoir ?
01:09:30La forme doit autoriser
01:09:32le maximum de sol ouvert.
01:09:34C'est ça, le plus important.
01:09:36On a aussi les architectures
01:09:38aujourd'hui qui essayent d'avoir
01:09:40des paysages sur les toits.
01:09:42Pourquoi pas ? C'est une surface.
01:09:44Je dirais que c'est pas la solution.
01:09:46C'est pas la solution du tout.
01:09:48Ça peut être un relais
01:09:50de tout ce qui est écologique,
01:09:52toujours dans les méthodes stepping stones,
01:09:54mais c'est pas la base.
01:09:56La base, c'est un sol profond.
01:09:58Il faut vraiment développer les sols profonds.
01:10:00A partir de là, on a différentes solutions.
01:10:02La demande sociale
01:10:04la plus importante aujourd'hui,
01:10:06c'est sur les lotissements.
01:10:08Si vous faites des pourcentages,
01:10:10vous questionnez les Français,
01:10:12où est-ce qu'ils veulent vivre ?
01:10:14C'est dans le lotissement.
01:10:16C'est là où on a le plus de voiries
01:10:18au mètre carré.
01:10:20C'est la forme la pire, finalement.
01:10:22Non seulement elle est éloignée
01:10:24des lieux de travail et autres,
01:10:26qui demandent de se déplacer en voiture,
01:10:28mais dans le lotissement même,
01:10:30on a le plus de voiries,
01:10:32de sols minéralisés possibles.
01:10:34Ça marche pas.
01:10:36Il nous faut,
01:10:38pour cette idée d'avoir le maximum de sol ouvert,
01:10:40il faut concentrer
01:10:42l'architecture, l'habitat,
01:10:44peut-être lui donner des formes plus sympathiques
01:10:46que les grandes tours,
01:10:48certes, mais limiter l'empreinte
01:10:50de l'architecture
01:10:52dans des terrains,
01:10:54dans des sols ouverts.
01:10:56Avec un peu de travail,
01:10:58c'est réversible, y compris
01:11:00dans ces barreaux
01:11:02et ces espaces
01:11:04d'habitat,
01:11:06on va dire, pavillonnaires.
01:11:08Carine, vous vouliez réagir ?
01:11:10Évidemment, on les a,
01:11:12entre paysagistes, jardiniers,
01:11:14ceux qui veulent que des plantes horticoles,
01:11:16ceux qui nous disent qu'il faut
01:11:18des plantes régionales,
01:11:20il y en a qui disent qu'on ne peut pas faire
01:11:22quelque chose de beau avec des plantes régionales.
01:11:24Évidemment, il y a ces débats,
01:11:26mais en réalité,
01:11:28en tout cas, pour ce qui est de la production
01:11:30d'un paysage, je pense qu'on peut le faire
01:11:32avec,
01:11:34soit en respectant
01:11:36plus de biodiversité
01:11:38et de permettre à celle-ci
01:11:40de se développer.
01:11:42Et comme ça a été dit, c'est vrai que par contre,
01:11:44il y a le souhait de sortir un peu
01:11:46du jardin architecturé comme on a.
01:11:48Mais je dirais, ce qui est
01:11:50vraiment génial à Paris, c'est qu'il y a
01:11:52toutes ces typologies, on va dire,
01:11:54d'espace vert, c'est peut-être le terme le plus générique,
01:11:56ou de nature en ville.
01:11:58Mais la nouveauté, c'est peut-être aussi
01:12:00d'essayer de recréer, comme ça a été dit,
01:12:02un espace dit naturel, mais qui est au fond...
01:12:04Et très travaillé.
01:12:06Qui est artificiel complètement.
01:12:08Du sol au...
01:12:10Je vous invite à lire un ouvrage qui s'appelle
01:12:12Artefact naturel d'une certaine Marion Valeur,
01:12:14parue il y a quelques années.
01:12:16Vous vouliez peut-être ajouter quelque chose,
01:12:18Alexandra, à propos des formes.
01:12:20Rapidement, je crois que finalement,
01:12:22le débat s'est un peu
01:12:24déplacé, c'est plus la forme qui importe, mais c'est le process.
01:12:26C'est le processus, c'est comment
01:12:28on met ça en place, avec qui ?
01:12:30Avec les citoyens, mais aussi avec
01:12:32les experts, les horticoles,
01:12:34les insectes.
01:12:36Voilà, toutes ces choses.
01:12:38Finalement, je viens aussi
01:12:40d'une tradition où j'ai été formée
01:12:42par des paysagistes, après
01:12:44mes études d'architecture.
01:12:46C'est vrai que le process et les dynamiques
01:12:48et les forces du paysage priment
01:12:50sur la façon dont on va
01:12:52urbaniser. Après, je suis aussi architecte.
01:12:54Sur les bâtiments,
01:12:56c'est vrai que le rapport au sol
01:12:58devient de plus en plus important.
01:13:00C'est important aussi
01:13:02sur les typologies qui nous permettent
01:13:04d'accéder à
01:13:06un jardin ou à
01:13:08quelque chose de proximité.
01:13:10Oui, Henri.
01:13:12Dans les formes, bien sûr.
01:13:14Alexandra parle du rapport au sol.
01:13:16C'est important.
01:13:18On parlait tout à l'heure avec Karine des usages.
01:13:20C'est important dans ces sols
01:13:22ouverts
01:13:24où la biodiversité se développe,
01:13:26d'accueillir les usages,
01:13:28d'avoir des continuités entre
01:13:30certains rez-de-chaussée,
01:13:32comment on approche l'architecture,
01:13:34comment on va hiérarchiser
01:13:36les espaces. C'est important.
01:13:38Ce qui est nouveau aussi,
01:13:40c'est le dessous. On a parlé tout à l'heure
01:13:42du sous-sol
01:13:44et des micro-organismes,
01:13:46des systèmes racinaires et autres.
01:13:48Mais on a aussi
01:13:50une nouvelle idée de l'infrastructure.
01:13:52Antoine parlait tout à l'heure
01:13:54d'Alphand.
01:13:56Je sens
01:13:58un certain regret
01:14:00du paysage d'Alphand, que j'adore aussi,
01:14:02qui était dessiné,
01:14:04mais il était dessiné aussi
01:14:06parce qu'il y avait des objectifs
01:14:08de santé au départ, de réseaux
01:14:10souterrains, d'éviter
01:14:12d'avoir les égouts et autres.
01:14:14Les égouts, on les a toujours,
01:14:16mais il y a énormément de réseaux d'eau pluviale
01:14:18notamment, qu'on ne fait plus
01:14:20aujourd'hui. On a une réinvention
01:14:22non visible,
01:14:24de l'idée même
01:14:26d'infrastructure, des réseaux d'eau pluviale
01:14:28où c'est le sol lui-même
01:14:30qui infiltre,
01:14:32qui stocke, au profit
01:14:34de la végétation, de la biodiversité,
01:14:36au profit du rafraîchissement aussi.
01:14:38On l'a vu, je pense, tout à l'heure
01:14:40dans la forêt urbaine de Michel Devigne.
01:14:42On a une nouvelle idée
01:14:44qui nous ouvre
01:14:46des possibilités. On n'est plus
01:14:48forcément dans le linéaire des réseaux.
01:14:50On peut travailler avec des poches
01:14:52de végétation, on peut avoir
01:14:54des constructions plus ponctuelles.
01:14:56On est moins en train de suivre
01:14:58la voirie.
01:15:00Antoine.
01:15:02Deux choses. La première, je n'ai aucune nostalgie
01:15:04d'Alphand.
01:15:06Je pense que la pire chose
01:15:08c'est d'être nostalgique,
01:15:10c'est de se servir de l'histoire
01:15:12pour être nostalgique. L'histoire, pour moi,
01:15:14c'est plutôt une façon de préparer l'avenir.
01:15:16Je pense qu'Alphand,
01:15:18il était de son époque,
01:15:20effectivement, ses solutions
01:15:22n'ont plus lieu aujourd'hui.
01:15:24Donc ça, ça me paraît quand même quelque chose
01:15:26d'essentiel à noter. La deuxième chose
01:15:28que je voulais dire, c'est
01:15:30à quel point dans les écoles d'architecture,
01:15:32on a eu des débats
01:15:34assez animés à Harvard
01:15:36cette année, au moment
01:15:38de regarder
01:15:40les projets pour essayer de déterminer
01:15:42qui allait avoir tel prix, etc.
01:15:44On sent bien chez les étudiants d'architecture
01:15:46aujourd'hui qu'il y a une espèce de tension
01:15:48entre produire des objets, ou effectivement
01:15:50réfléchir en termes de process,
01:15:52de paysages plus vastes, etc.
01:15:54C'est une vraie question qui se pose
01:15:56un petit peu partout dans le monde, dans les écoles
01:15:58d'architecture, et je crois que
01:16:00c'est quand même assez
01:16:02typique de l'évolution
01:16:04qu'on a tous évoquée.
01:16:06Alors, vers quoi on va ? Ça, ça reste quand même
01:16:08pas complètement clair
01:16:10aujourd'hui. Mais en tout cas, il faut le noter.
01:16:12Karine ?
01:16:14D'ailleurs, par rapport à ça, c'est vrai que
01:16:16finalement, le développement de la nature
01:16:18en ville, ça percute beaucoup
01:16:20la direction des espaces verts, mais aussi la direction
01:16:22de la voirie, parce que eux,
01:16:24ils doivent vraiment intégrer ça. C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
01:16:26on doit concevoir
01:16:28l'espace public, comme en plus on ne veut
01:16:30plus abattre du tout d'arbres,
01:16:32on doit concevoir
01:16:34l'espace public autour
01:16:36du végétal existant.
01:16:38Et donc, et aussi
01:16:40prévoir les conditions du développement
01:16:42du végétal futur.
01:16:44Ça crée une vraie contrainte,
01:16:46vous parliez de contrainte sur les formes,
01:16:48ça fait une vraie contrainte,
01:16:50surtout dans une vie de danse où il n'y a pas beaucoup d'espace.
01:16:52Et où les réseaux se sont
01:16:54empilés au fil des années.
01:16:56Oui, Henri, et puis après...
01:16:58Un mot très court,
01:17:00effectivement, le
01:17:02dessin,
01:17:04tout le monde dessine encore aujourd'hui, mais ce n'est plus
01:17:06effectivement la question essentielle. Vous parliez du
01:17:08processus, je dirais qu'aujourd'hui
01:17:10c'est la transformation physique
01:17:12importante. Il faut réellement transformer,
01:17:14adapter nos villes,
01:17:16qui ont vraiment un développement de la biodiversité.
01:17:18On le réussit, on ne le réussit pas.
01:17:20Donc après, que ce soit une forme
01:17:22ou une autre, bien sûr,
01:17:24je préfère des espaces agréables,
01:17:26mais il y a un côté vraiment
01:17:28aussi quantitatif.
01:17:30Les écologues
01:17:32complets
01:17:34diront, voilà, c'est la quantité qui compte,
01:17:36je ne suis pas de ce côté-là, je pense qu'il faut dessiner.
01:17:38Mais ils ont raison sur ce
01:17:40plan. Il y a la transformation physique
01:17:42qui est numéro un dans l'ordre des
01:17:44priorités. Il faut y arriver.
01:17:46Alors je vais tenter une reformulation. Avant,
01:17:48je voulais partager avec vous deux informations.
01:17:50La première chose, c'est que si vous vous
01:17:52intéressez à Alphand, il y a eu un anniversaire
01:17:54qui a été célébré, si je ne dis pas de bêtises, en
01:17:562017, et je vous invite à
01:17:58lire les actes
01:18:00d'un colloque qui avait eu lieu à l'hôtel de ville,
01:18:02coordonné par Chiara Santini
01:18:04et monsieur Michel Audouy qui est ici dans la salle.
01:18:06Comme ça, vous pourrez avoir une lecture historique
01:18:08et remettre tous ces travaux dans leur contexte.
01:18:10La deuxième chose, effectivement,
01:18:12il y a quelque chose d'assez
01:18:14frappant aujourd'hui sur
01:18:16les fonctions que l'on demande
01:18:18à la nature de
01:18:20remplir, ce que l'on projette
01:18:22sur elle.
01:18:24L'objectif de biodiversité, la
01:18:26nature pour elle-même, de
01:18:28créer ou de recréer
01:18:30des continuités écologiques
01:18:32avec ce que ça peut avoir
01:18:34parfois d'interprétations
01:18:36très
01:18:38radicales, l'indigénat
01:18:40versus les végétaux
01:18:42cultivés, doit-on demander son
01:18:44passeport aux végétaux ? C'est peut-être
01:18:46une réflexion à avoir aussi vis-à-vis d'autres
01:18:48êtres vivants, suivez mon regard.
01:18:50Et puis,
01:18:52un objectif serviciel,
01:18:54ce que vous évoquiez, Henri,
01:18:56certains parlent d'infrastructures vertes,
01:18:58certains de vos confrères,
01:19:00j'étais avec l'un d'entre eux
01:19:02à Valence tout à l'heure, disent
01:19:04qu'il faut d'abord infiltrer avant de
01:19:06planter, donc on vienne à cette notion
01:19:08d'adaptation de la ville par la
01:19:10nature, les fameuses
01:19:12nature-based solutions, les solutions
01:19:14fondées sur la nature, ça n'est pas
01:19:16la même forme, ça ne sont pas
01:19:18les mêmes attendus. Et puis enfin,
01:19:20ce sujet de la connexion individuelle
01:19:22et du lien social,
01:19:24le projet est une synthèse de tout ça, et comme le disait
01:19:26Alexandra, c'est le processus qui va être important
01:19:28et probablement le zoom des zooms
01:19:30entre le génie du lieu
01:19:32avec sa petite surface,
01:19:34parce qu'elle est parfois
01:19:36une portion congrue
01:19:38extrêmement réduite, et puis une vision
01:19:40d'ensemble, on a toujours besoin
01:19:42d'assistants à maîtrise d'ouvrage,
01:19:44de paysagistes conseils aussi pour nous
01:19:46projeter sur des grands plans, ce ne sera pas
01:19:48forcément que des grandes lignes tracées
01:19:50au cordeau, mais une vision
01:19:52d'ensemble, et ça c'est aussi
01:19:54un sujet de projet,
01:19:56pour ne pas dire politique.
01:19:58Alors, on a parlé des liens, on a parlé des formes,
01:20:00on arrive à la dernière partie, avant de vous libérer
01:20:02vers 23h,
01:20:04où on va parler de densité,
01:20:06je plaisante évidemment,
01:20:08moi j'ai envie de vous poser une question,
01:20:10j'étais frappé au moment du confinement, je ne l'ai pas
01:20:12vécu à Paris, très égoïstement,
01:20:14mais de voir la manière dont
01:20:16certains reportages
01:20:18pointaient le non-respect
01:20:20des règles de confinement par
01:20:22un certain nombre de nos concitoyens,
01:20:24dans des quartiers où
01:20:26la densité, pour moi, la dispute
01:20:28à la promiscuité.
01:20:30Est-ce que la nature en ville,
01:20:32c'est un remède à la densité ?
01:20:34Est-ce qu'il nous faut
01:20:36absolument des espaces de respiration
01:20:38de nature,
01:20:40pour compenser
01:20:42cette densité très
01:20:44forte ? On parle de Paris, on est en
01:20:46quête des fameux 300 hectares
01:20:48pour atteindre les 10m2
01:20:50d'espace vert par habitant. Le Monde a exhumé
01:20:52une citation
01:20:54de 1973, d'une circulaire
01:20:56du gouvernement de Pierre Mesmer,
01:20:58disant qu'il nous faut atteindre ces 10m2,
01:21:00on est à 8,6 et il faudrait
01:21:02ouvrir 300 hectares. C'est
01:21:04colossal par rapport à l'état
01:21:06de surface disponible.
01:21:08On parle même d'intensification d'usage.
01:21:10Certains élus, comme
01:21:12le président de la métropole de Lyon, soulignent
01:21:14parfois à juste titre que
01:21:16l'espace public en matière
01:21:18de nature est aussi limité,
01:21:20puisque, d'après des calculs de la métropole,
01:21:2270% des espaces
01:21:24de nature sont privés. Les jardins des
01:21:26pavillons, les cours de copropriété,
01:21:28des espaces publics mais à usage
01:21:30un peu privatif, vous parliez des cours d'école.
01:21:32Donc voilà, comment est-ce qu'on fait ?
01:21:34Est-ce qu'il y a cette tension et est-ce que vous le ressentez ?
01:21:36Ça accentue
01:21:38cette volonté d'accès à la nature
01:21:40comme une compensation à la densité ?
01:21:44Je commencerais peut-être par une remarque.
01:21:46La densité, c'est des chiffres,
01:21:48mais c'est aussi des questions...
01:21:50La densité, ça se dessine de façon différente.
01:21:52Je dirais, entre le pavillonnaire
01:21:54dont parlait Henri
01:21:56et, je dirais, les row houses
01:21:58anglaises,
01:22:00il y a de très grandes
01:22:02différences, je dirais, au niveau du vécu
01:22:04et pour parfois des densités
01:22:06qui peuvent être
01:22:08plus fortes parfois du côté des row houses,
01:22:10des maisons en bande
01:22:12anglaise. Donc je pense que la densité, ça se dessine,
01:22:14ça peut se dessiner de façon
01:22:16assez diverse.
01:22:18Je dirais en plus que le cas de Paris
01:22:20est quand même très, très particulier.
01:22:22Je dirais, Paris, c'est un peu comme Manhattan,
01:22:24c'est des situations urbaines,
01:22:26ou Cologne, c'est des situations urbaines paroxystiques.
01:22:28Il ne faut quand même pas oublier
01:22:30que quand même, bon, maintenant,
01:22:32le gros des populations vivent quand même en Europe
01:22:34dans du périurbain, et donc
01:22:36la question de la densité, elle se pose
01:22:38assez différemment dans le périurbain.
01:22:40Encore une fois, je pense que Paris,
01:22:42c'est une situation tout à fait exceptionnelle.
01:22:44C'est une espèce d'île
01:22:46très, très particulière, etc.
01:22:48Donc, moi, j'ai tendance
01:22:50à penser qu'en France, bon, on est dans
01:22:52un discours sur la densité qui est un peu schizophrène
01:22:54depuis quasiment le début
01:22:56du XXe siècle. Dès le début du XXe siècle,
01:22:58vous avez les élites politiques et planificatrices
01:23:00qui veulent plus de densité.
01:23:02Enfin, le pavillonnaire est oni
01:23:04dès les années 1920, et les Français
01:23:06ont de manière consistante
01:23:08voté pour la maison
01:23:10individuelle depuis
01:23:12l'entre-deux-guerres. Donc il y a quand même un problème.
01:23:14Donc je me dis, par exemple,
01:23:16mieux dessiner les lotissements,
01:23:18ça serait quand même
01:23:20une véritable tâche d'intérêt public.
01:23:22Comme tu le dis, essayer de réfléchir
01:23:24sur avoir des voiries
01:23:26qui soient moins dommageables, etc.,
01:23:28ce qui est un problème de conception.
01:23:30Là, on en revient quand même à des problèmes de forme.
01:23:32Alors, sur cette question de la densité,
01:23:34est-ce qu'elle est mal posée ? Est-ce qu'elle vous semble
01:23:36une réaction ?
01:23:38On passe à la suivante, on s'approche
01:23:40de la conclusion. Quand on pense densité,
01:23:42on pense le nombre d'habitants
01:23:44et le nombre de logements, d'architecture.
01:23:46Mais je reviens sur l'idée
01:23:48du pavillonnaire.
01:23:50Il y a la densité de la voirie aussi,
01:23:52la quantité de voirie qui pose problème.
01:23:54La densité du non-bâti ?
01:23:56Du non-bâti, quand c'est de la voirie,
01:23:58quand c'est imperméabilisé, c'est un problème.
01:24:02On travaille à Détroit
01:24:04depuis quelques années, donc à Détroit,
01:24:06aux Etats-Unis, donc c'est
01:24:08une ville où il y a dix fois plus de
01:24:10surface de voirie par habitant
01:24:12que Paris.
01:24:14Ça pose des problèmes pour la biodiversité,
01:24:16mais ça pose aussi des problèmes, y compris
01:24:18pour les poubelles.
01:24:20Pour la gestion, je dirais, de toutes ces voiries,
01:24:22c'est important de réduire
01:24:24le nombre de voiries.
01:24:26La densité,
01:24:28c'est une question, mais il y a aussi
01:24:30cette idée de diminuer
01:24:32l'imperméabilisation des sols.
01:24:34Et sur la question de la densité,
01:24:36il y a un peu ce que disait Antoine tout de suite,
01:24:38c'est une question de perception.
01:24:40Il y a la densité perçue.
01:24:42On travaille à Strasbourg actuellement,
01:24:44dans un quartier où il y a
01:24:4670% d'espaces
01:24:48non construits,
01:24:50mais comme on est dans
01:24:52des bâtiments avec du R
01:24:54plus 5, 6 ou 7,
01:24:56les Strasbourgeois qui vivent au centre,
01:24:58qui est très dense,
01:25:00ils pensent que c'est trop dense,
01:25:02alors qu'on est beaucoup moins dense que le centre-ville
01:25:04où il y a très peu d'espaces
01:25:06publics en pourcentage.
01:25:08Donc la perception est importante.
01:25:12Et puis, je dirais, la densité,
01:25:14elle a parfois du bon aussi.
01:25:16Ce n'est pas un repoussoir.
01:25:18Énormément de personnes viennent à Paris,
01:25:20les touristes et autres. C'est une ville la plus dense d'Europe.
01:25:22Et c'est l'attractivité
01:25:24aussi pour nous,
01:25:26humains,
01:25:28y compris pour la végétation.
01:25:30Parfois, la densité,
01:25:32ça descend de la composition,
01:25:34mais elle crée
01:25:36des conditions bioclimatiques
01:25:38favorables
01:25:40ou non à la végétation,
01:25:42mais elle peut créer des conditions favorables.
01:25:44On a travaillé récemment,
01:25:46on est encore dessus, sur le village olympique
01:25:48qui était très dense,
01:25:50mais le fait que
01:25:52Dominique Perrault ait mis
01:25:54ces grands paquebots, comme il dit,
01:25:56perpendiculaires à la Seine,
01:25:58ça fait en sorte que
01:26:00les vents d'Ouest pénètrent
01:26:02dans les intervalles
01:26:04et comme on est vers
01:26:06la Seine en pente, il y a aussi les eaux de pluie
01:26:08qui dévalent, et donc il y a tout un travail
01:26:10par les vents et les eaux
01:26:12qui rafraîchissent l'ensemble
01:26:14et qui créent un contexte
01:26:16intéressant pour la pente.
01:26:18Ça peut être très dense
01:26:20et quand même attractif pour les humains,
01:26:22voire pour la végétation.
01:26:24On arrive au terme
01:26:26de cet échange,
01:26:28et en plus, on a deux contraintes
01:26:30horaires, notamment Karine qui doit nous
01:26:32quitter. Je vais demander un mot de la fin
01:26:34à chacune et à chacun, avec une petite
01:26:36question, prenant appui
01:26:38sur les paroles d'une chanson d'Yves Jammet qui dit
01:26:40« Ce monde-là, mes coeurs, regardez-les, nos chefs,
01:26:42qui font pousser des fleurs au bord des SDF. »
01:26:44C'est dans Jean-Louis,
01:26:46le monologue du comptoir.
01:26:50Les natures urbaines, est-ce que c'est
01:26:52l'apanage d'urbains privilégiés ?
01:26:54On peut se poser
01:26:56la question, face aux murs climatiques,
01:26:58face aux difficultés
01:27:00d'ordre divers auxquelles nous faisons face ?
01:27:02Ou est-ce que, au fond,
01:27:04comme beaucoup d'autres sujets, c'est une nouvelle donne
01:27:06qui intéresse le plus grand nombre ?
01:27:08Karine, puisque
01:27:10vous nous laissez la première.
01:27:12Je pense que
01:27:14l'espace public,
01:27:16c'est le bien commun.
01:27:18En tout cas, développer
01:27:20la nature en ville,
01:27:22ce qu'on appelle
01:27:24la nature urbaine,
01:27:26c'est pour le bien commun.
01:27:28C'est un nouveau
01:27:30bien public.
01:27:32On pourrait peut-être le définir comme ça.
01:27:34De même qu'on a les transports,
01:27:36on aurait les espaces verts.
01:27:38Je reviens sur le fait que c'est cher.
01:27:40Non, ce n'est pas cher.
01:27:42On pourrait faire un quiz
01:27:44sur combien représente la direction
01:27:46des espaces verts dans le budget de la ville de Paris.
01:27:48Alors que c'est une compétence absolument
01:27:50capitale, ce n'est pas vraiment
01:27:52beaucoup.
01:27:54Avec un petit peu plus de sous en plus,
01:27:56on fera encore plus d'intérêts.
01:27:58Merci Karine.
01:28:00Alexandra,
01:28:02mot de la fin, réponse à cette question,
01:28:04ou non, vous avez carte blanche
01:28:06de manière synthétique.
01:28:08Peut-être pour ne pas que ça devienne un privilège
01:28:10des urbains,
01:28:12peut-être qu'on est responsable aussi de
01:28:14c'est un sujet qui m'habite
01:28:16un peu, de ces cycles biogéochimiques.
01:28:18On n'a pas trop parlé.
01:28:20On a parlé beaucoup de végétales, de biodiversité.
01:28:22Mais les minéraux, les roches,
01:28:24les matériaux aussi qu'on va utiliser,
01:28:26ils ont un impact
01:28:28chimique.
01:28:30Aussi,
01:28:32la végétation qu'on va
01:28:34ramener, si elle est
01:28:36de pépinières ou de cerfs.
01:28:38C'est plutôt cette question.
01:28:40Comment être responsable
01:28:42de ce qu'on crée
01:28:44et de l'impact que ça peut avoir sur les limites
01:28:46planétaires.
01:28:48On parle notamment de biodiversité
01:28:50grise, de la même manière qu'il y a
01:28:52l'énergie grise pour produire des
01:28:54biens. Henri,
01:28:56avant le mot de la fin d'Antoine,
01:28:58et vos questions.
01:29:00S'il y a un mot, pour moi, c'est adapter.
01:29:02Adapter nos villes à ce
01:29:04changement climatique qui est en cours
01:29:06mais qui va s'intensifier.
01:29:08Ce n'est pas un drame.
01:29:10C'est juste qu'il faut
01:29:12bouger, il faut s'adapter,
01:29:14il faut transformer.
01:29:16Il faut adapter nos comportements,
01:29:18pas uniquement nos villes, notre manière de
01:29:20vivre, pour
01:29:22réussir à
01:29:24continuer de vivre en société
01:29:26avec ce
01:29:28contrat social ensemble et ce
01:29:30contrat, je redis
01:29:32ce mot naturel, avec Longue Planète
01:29:34pour qu'on puisse continuer
01:29:36à
01:29:38vivre ensemble, à développer ensemble.
01:29:40Antoine, vous avez cette
01:29:42lourde tâche d'être le dernier mot.
01:29:44Je prendrais peut-être un mot que je vais
01:29:46décliner de deux
01:29:48façons, qui est élargir.
01:29:50Il me semble qu'une des questions qui est posée
01:29:52aujourd'hui, c'est comment élargir
01:29:54la focale, comment élargir
01:29:56le contrat social.
01:29:58Alors, élargir la focale, j'ai
01:30:00fait exprès que la dernière image
01:30:02de l'exposition soit
01:30:04en fait vienne de l'Inde.
01:30:06C'est-à-dire que je crois que la
01:30:08question de la nature en ville ne doit pas être
01:30:10une question uniquement de pays riches
01:30:12qui peuvent se permettre de se
01:30:14poser cette question. C'est une question
01:30:16qui commence à se poser un peu partout.
01:30:18J'ai eu cette année un étudiant
01:30:20qui m'a remis un mémoire tout à fait intéressant
01:30:22sur ce qui se passe à Hyderabad
01:30:24dans l'Inde, etc. Je crois que ça bouge
01:30:26un peu partout dans le monde, de façon très différente,
01:30:28avec des situations économiques et sociales
01:30:30et politiques extrêmement
01:30:32différentes, mais je crois qu'il faut élargir
01:30:34la focale, même si, bon,
01:30:36l'exposition prend
01:30:38un biais plutôt européen. Un deuxième
01:30:40élargissement, bon, Alexandra en a parlé
01:30:42de façon éloquente à propos du sol,
01:30:44c'est comment élargit-on au-delà des humains ?
01:30:46C'est-à-dire que le contrat social
01:30:48rousseauiste, c'est un contrat social
01:30:50entre humains. Aujourd'hui, on
01:30:52est face à une question, c'est
01:30:54comment, finalement, on réalise de plus
01:30:56en plus que nos relations entre humains,
01:30:58en fait, elles impliquent toute une série,
01:31:00elles impliquent des plantes, des animaux,
01:31:02du sol, etc. Donc,
01:31:04comment on repense le contrat
01:31:06social pour intégrer,
01:31:08finalement, toutes ces présences
01:31:10qui sont, en fait, indispensables
01:31:12au fait de faire société ?
01:31:14Et je crois que ça, c'est une des questions.
01:31:16Ça passe pas forcément par les parlements des choses
01:31:18de la Tour ou autre, mais en tout cas,
01:31:20c'est une des réponses
01:31:22qui a été apportée, mais c'est peut-être pas la seule.
01:31:24Mais en tout cas, la question est posée.
01:31:26Comme vous avez dû noter
01:31:28que le numérique est une chose qui m'intéresse,
01:31:30je pense que la question va aussi se poser
01:31:32avec les intelligences artificielles
01:31:34de demain, c'est-à-dire comment on fabrique
01:31:36une société qui est à la fois
01:31:38une société pour les humains, mais aussi une société
01:31:40dans laquelle il y a beaucoup de présences non humaines
01:31:42qui concourent, finalement,
01:31:44à faire société avec nous.
01:31:46Voilà, je terminerai là-dessus.
01:31:48Merci beaucoup, Antoine. On peut applaudir nos intervenantes
01:31:50et nos intervenants.
01:31:52Applaudissements
01:31:54Applaudissements
01:31:56Et Karine, qui a dû nous quitter,
01:31:58je préfère vous prévenir,
01:32:00Henri doit filer dans quelques minutes,
01:32:02donc ne lui en tenez pas rigueur.
01:32:04Et l'élargissement, ça passe aussi
01:32:06par vos questions, l'élargissement du panel.
01:32:08Donc on va faire passer
01:32:10un micro dans la salle pour celles et ceux qui auraient
01:32:12des questions.
01:32:14Alors je rappelle juste la règle, on est dans la question,
01:32:16pas dans l'interpellation, et on essaie
01:32:18de faire une question relativement courte
01:32:20pour que la réponse puisse l'être également.
01:32:26Ah, on vous a séché.
01:32:30Ah oui, il y a un bras qui se lève
01:32:32au dernier rang. Je ne sais pas si quelqu'un peut faire passer
01:32:34un micro.
01:32:36Le micro arrive, c'est parfait.
01:32:44Bonsoir.
01:32:46Ma question est toute simple et toute bête,
01:32:48c'est construire sur des pilotis,
01:32:50est-ce que ça permet de ne pas stériliser le sol ?
01:32:56Construire sur des pilotis,
01:32:58est-ce que ça permet de ne pas
01:33:00stériliser le sol ?
01:33:02Oui.
01:33:04En partie oui.
01:33:06On travaille depuis pas mal de temps
01:33:08en Guyane, Guyane française.
01:33:10C'est la France, mais c'est la France tropicale.
01:33:12Et une des constructions
01:33:14historiques,
01:33:16là-bas, c'est
01:33:18effectivement de l'habitat
01:33:20sur pilotis,
01:33:22mais très haut, pour être
01:33:24au niveau quasiment de la couronne des arbres,
01:33:26donc éviter d'avoir
01:33:28trop d'insectes, justement,
01:33:30quand on dort, d'avoir trop de moustiques
01:33:32et autres.
01:33:34Effectivement, ça marche
01:33:36quand on est isolé, je dirais,
01:33:38dans la nature.
01:33:40Par contre, y compris en Guyane,
01:33:42ils interdisent aujourd'hui de créer
01:33:44ces maisons sur
01:33:46hauts pilotis parce que
01:33:48très vite,
01:33:50quand il y a agglutination
01:33:52de construction côte à côte,
01:33:54les habitants utilisent le dessous
01:33:56pour mettre leurs anciennes machines à laver
01:33:58qui ne marchent plus et autres.
01:34:00Donc d'une bonne idée de départ
01:34:02de conserver les sols
01:34:04fertiles et de ne pas les stériliser,
01:34:06ça devient à la fin
01:34:08très vite un dépotoir
01:34:10et on n'arrive pas à faire ville.
01:34:12Donc ça peut être
01:34:14une bonne idée à condition d'être
01:34:16très limité,
01:34:18de faire attention à ce qui se passe
01:34:20dessous. Vous avez à Romand-Rentin,
01:34:22un quartier assez intéressant en lien avec
01:34:24la problématique de la gestion de l'eau
01:34:26au niveau des anciennes usines Matra que je vous invite à visiter,
01:34:28c'est plutôt bien géré de ce point de vue là.
01:34:30Alors d'autres questions ?
01:34:32On va faire la conclusion de la conclusion.
01:34:34Une question également
01:34:36dans le fond de la salle.
01:34:38Les premiers rangs sont plus timides apparemment.
01:34:42Bonjour, merci de votre exposé.
01:34:44Vous avez dit
01:34:46l'espace public, autrefois
01:34:48c'était une place minérale,
01:34:50aujourd'hui c'est une prairie.
01:34:52L'espace minéral
01:34:54était là pour que la pensée
01:34:56se dirige
01:34:58vers la conduite de la cité.
01:35:00Est-ce que la prairie ne va pas nous conduire
01:35:02à nous intéresser qu'aux pâquerettes ?
01:35:06Je n'ai pas dit tout à fait ça.
01:35:08J'ai dit que l'espace,
01:35:10je dirais, bon, pour moi,
01:35:12un des plus beaux espaces qui existent encore en Europe
01:35:14c'est la Plaza Mayor de Madrid.
01:35:16Une espèce d'espace si vieux
01:35:18que complètement minéral.
01:35:20Je ne suis pas sûr que ce soit la prairie.
01:35:22En tout cas c'est un espace dans lequel la nature est présente.
01:35:24Et je dirais,
01:35:26ça ne veut pas dire
01:35:28qu'il y a uniquement de l'herbe
01:35:30et des arbres.
01:35:32La ville, ça reste quand même un lieu
01:35:34de l'artificialité partielle.
01:35:36C'est simplement qu'aujourd'hui
01:35:38cette présence de la nature, elle nous accompagne
01:35:40y compris dans nos délibérations publiques.
01:35:42C'est plutôt ça que je voulais signifier.
01:35:44Voilà.
01:35:46Peut-être aussi,
01:35:48j'ai mal posé ma question,
01:35:50c'est-à-dire, est-ce qu'on risque
01:35:52bien s'intéresser à la gestion
01:35:54de la ville, à la politique
01:35:56en général, en s'intéressant
01:35:58trop à la nature ?
01:36:00Moi je répondrais simplement
01:36:02qu'on fera de la politique
01:36:04partiellement au travers du fait
01:36:06de s'intéresser à la nature.
01:36:08La nature en ville,
01:36:10je dirais, une des choses
01:36:12qu'essaye de montrer l'exposition,
01:36:14c'est que la nature en ville, c'est quelque chose
01:36:16qui met en jeu le bien commun,
01:36:18cela dès le XVIIe, XVIIIe siècle.
01:36:20Donc je dirais qu'on continue
01:36:22à faire de la politique,
01:36:24lorsqu'on met de la nature en ville.
01:36:26Donc non, on ne va pas s'arrêter.
01:36:28Je crois que la ville, de toute façon,
01:36:30c'est un lieu où il est impossible
01:36:32de ne pas faire de politique.
01:36:34Je voulais juste reprendre, par rapport
01:36:36à votre question, l'exemple de Barcelone.
01:36:38Quand on a fait ce concours
01:36:40de la place des gloires catalanes,
01:36:42ça s'appelait la place des gloires catalanes,
01:36:44et nous nous sommes dit,
01:36:46effectivement c'est la question que vous posez,
01:36:48parce qu'ils ont proposé une place,
01:36:50mais ils ont tellement de places à Barcelone,
01:36:52magnifiques d'ailleurs, avec des arcades
01:36:54autour, avec quelques palmiers,
01:36:56mais très minérales.
01:36:58Ont-ils besoin d'une énième place,
01:37:00même si elle est très bien dessinée,
01:37:02à cet endroit ?
01:37:04Ou alors, ont-ils besoin,
01:37:06on l'appelait la place parc,
01:37:08mais qui en fait est plutôt un parc aujourd'hui.
01:37:10Est-ce qu'ils ont besoin d'être au frais l'été,
01:37:12et d'avoir
01:37:14d'autres rapports en ville
01:37:16que d'être sur une place minérale
01:37:18qui chauffe sur le Cagnard,
01:37:20comme on dit dans le sud de la France.
01:37:22Donc on a fait ce pari-là,
01:37:24et le jury a dit,
01:37:26nous avons choisi ce projet
01:37:28parce que nous avons décidé de changer de paradigme.
01:37:30Ils l'ont changé
01:37:32sur cette place,
01:37:34ça ne veut pas dire qu'ils vont
01:37:36démolir les autres places.
01:37:38Ils ont des places magnifiques qu'ils vont garder,
01:37:40mais ils n'avaient pas besoin d'une énième,
01:37:42et surtout, dans le changement de paradigme,
01:37:44l'idée de développer
01:37:46cette déminéralisation,
01:37:48non seulement des places, mais des voiries,
01:37:50des rues de la ville.
01:37:52Une dernière question peut-être ?
01:37:54Ah, ça se bouscule maintenant.
01:37:56Je ne sais pas où est le micro.
01:37:58Pour rebondir avec la question
01:38:00de la politique et la nature,
01:38:02je me posais plus la question de quand la nature
01:38:04est majoritairement réservée
01:38:06aux populations plus favorisées,
01:38:08que celles moins favorisées sont soumises à l'agentification,
01:38:10où est le social dans la ville-nature ?
01:38:12Vous avez des pains.
01:38:14Je crois qu'un enjeu,
01:38:16depuis assez longtemps,
01:38:18c'est d'offrir de la nature à tous.
01:38:20Il ne faut pas oublier
01:38:22que même chez Alphand,
01:38:24le Second Empire est un
01:38:26régime autoritaire, mais dont la politique
01:38:28de plantation, les parcs et jardins
01:38:30haussmanniens, veulent s'adresser
01:38:32à toutes les couches de la population.
01:38:34Les buts chaumonts sont implantés dans un quartier
01:38:36plutôt misérable à l'époque,
01:38:38comme une espèce de démonstration de cette capacité
01:38:40de la nature pour tous.
01:38:42Ensuite, évidemment,
01:38:44il y a des études, par exemple,
01:38:46sur la canopée en Afrique du Sud.
01:38:48Comme par hasard, la canopée est infiniment
01:38:50plus dense dans les quartiers blancs
01:38:52que dans les quartiers noirs,
01:38:54il y a une inégalité de fait
01:38:56par rapport aux ressources en nature,
01:38:58mais je crois que c'est un des enjeux
01:39:00aujourd'hui que de démocratiser
01:39:02la présence de la nature en ville.
01:39:04Il y avait une autre
01:39:06question devant.
01:39:08C'est la réponse d'Alexandra.
01:39:10Peut-être qu'il faut dissocier
01:39:12nature et écologie aussi.
01:39:14Effectivement, la nature,
01:39:16c'est peut-être lié à un historique
01:39:18de décors, de quelque chose
01:39:20qui était fait pour des personnes aisées,
01:39:22mais l'écologie,
01:39:24l'écologie politique,
01:39:26ça existe, c'est la convergence
01:39:28aussi du social et de l'écologie
01:39:30qui arrive aussi aujourd'hui.
01:39:32Vous voyez, il y a quand même...
01:39:34On va prendre la toute
01:39:36dernière question,
01:39:38mais ça n'est pas la fin de l'histoire.
01:39:40Je vais vous donner quelques rendez-vous
01:39:42et puis on va pouvoir poursuivre
01:39:44pour celles et ceux qui le souhaitent
01:39:46de manière plus informelle. Madame, c'est à vous.
01:39:48Merci. Bonsoir.
01:39:50Ma question va être influencée
01:39:52par ma formation de juriste.
01:39:54Quand j'ai vu le terme contrat social,
01:39:56je voulais vous demander
01:39:58est-ce que vous pensez qu'il y a un droit
01:40:00à la nature et plus encore,
01:40:02est-ce qu'il y a un devoir
01:40:04pour l'humain ?
01:40:06Je ne suis pas un juriste,
01:40:08mais je suis persuadé que ces questions...
01:40:10Moi, j'ai été très frappé par plusieurs choses.
01:40:12La première, c'est que vous prenez par exemple
01:40:14les droits des animaux.
01:40:16Il n'y a encore
01:40:18pas si longtemps que ça,
01:40:20vous pouviez massacrer votre animal domestique
01:40:22au sein d'une indifférence quand même assez générale.
01:40:24Aujourd'hui, ce n'est plus possible.
01:40:26Je dirais, il y a...
01:40:28Alors, je dirais, il y a des droits de la nature
01:40:30et il y a aussi un droit
01:40:32à la nature. Oui, les questions juridiques
01:40:34sont extrêmement importantes.
01:40:36Elles ne sont pas présentes dans l'exposition
01:40:38parce que je ne suis pas juriste,
01:40:40mais il est évident que ce sont des questions qui vont se poser.
01:40:42Je note d'ailleurs
01:40:44que là aussi, ce que je trouve
01:40:46parfois assez amusant,
01:40:48c'est que l'intelligence artificielle va poser
01:40:50des problèmes du même genre.
01:40:52Est-ce qu'il y a un droit des algorithmes ?
01:40:54Vous connaissez ça mieux que moi,
01:40:56mais actuellement,
01:40:58sur le droit et le numérique,
01:41:00il y a beaucoup de choses qui se passent en liaison avec la montée
01:41:02en puissance de l'intelligence artificielle.
01:41:04Je dirais, le non-humain, ses droits,
01:41:06ses devoirs, entre guillemets,
01:41:08etc., ce sont des questions
01:41:10aujourd'hui qui sont sur la table.
01:41:12Est-ce que je peux juste préciser ma question ?
01:41:14Je voudrais revenir à la notion de droit naturel.
01:41:16Est-ce qu'il y a un droit naturel
01:41:18de droit à la nature, en fait ?
01:41:20Est-ce que c'est...
01:41:22Ça, c'est une question philosophique.
01:41:24Personnellement,
01:41:26en tant qu'historien, j'ai tendance à penser
01:41:28que le droit naturel d'une époque
01:41:30se révèle construction sociale
01:41:32pour une autre.
01:41:34Donc non, je ne pense pas forcément
01:41:36que c'est un droit naturel.
01:41:38En tout cas, je pense qu'aujourd'hui, nous sommes dans une situation
01:41:40où il y a
01:41:42cette idée que nous avons
01:41:44droit à la nature dans les villes.
01:41:46Juste, il y a un ouvrage
01:41:48super intéressant de Sarah Van Hoeksen,
01:41:50je ne sais pas si vous la connaissez,
01:41:52sur la propriété du sol
01:41:54et sur le fait que peut-être le sol
01:41:56peut avoir son propre doigt.
01:41:58Son ouvrage est assez fin,
01:42:00mais hyper dense
01:42:02et hyper intéressant
01:42:04sur ces questions.
01:42:06Merci beaucoup.
01:42:08Henri, la dernière réponse.
01:42:10C'est très sentencieux de dire ça.
01:42:12Tu m'inquiètes.
01:42:14Est-ce qu'on a un droit
01:42:16à la nature ? Moi, je me méfie, en fait,
01:42:18d'avoir le droit
01:42:20sur des éléments vivants.
01:42:22Tu parlais des chats tout à l'heure,
01:42:24c'est vrai qu'on a cette tradition
01:42:26de penser que nous avons le droit
01:42:28parce que nous sommes au centre du monde
01:42:30et que tout doit nous rendre service.
01:42:32On parlait de service
01:42:34écosystémique, donc tout revient vers nous.
01:42:36En fait, non.
01:42:38Le premier point, c'est d'abord de respecter
01:42:40la vie qui est autre,
01:42:42on parlait de non-humain tout à l'heure,
01:42:44et de ne pas penser qu'on a le droit
01:42:46tout de suite de prendre ou de tuer
01:42:48ou de casser.
01:42:50C'est vraiment l'idée
01:42:52de vivre ensemble, de cohabitation,
01:42:54d'intelligence collective
01:42:56à la fois avec
01:42:58des biotopes et nous-mêmes.
01:43:00C'est comment
01:43:02vivre ensemble,
01:43:04développer de l'urbanité,
01:43:06de la campagne,
01:43:08différents systèmes urbains,
01:43:10mais qui
01:43:12interagissent avec le milieu, avec le contexte
01:43:14à chaque fois.
01:43:16Merci. Natures urbaines, un nouveau contrat
01:43:18social. Merci d'avoir passé
01:43:20près de deux heures avec nous pour poser
01:43:22cette question, ouvrir d'autres
01:43:24tiroirs de cette
01:43:26grande commode que nous avons
01:43:28construite ensemble aujourd'hui.
01:43:30Je voudrais que l'on remercie chaleureusement
01:43:32Karine Salovkost, Alexandra
01:43:34Aren, Henri Bava et Antoine Picon.
01:43:36Vous pouvez les applaudir.
01:43:42Évidemment, continuons
01:43:44à nourrir le débat, à pratiquer,
01:43:46à passer à l'expérience. N'oubliez pas,
01:43:48ici, au pavillon de l'Arsenal, très régulièrement,
01:43:50avec la Fédération française du paysage,
01:43:52les expériences de paysage.
01:43:54A noter dans vos agendas aussi, je le signale,
01:43:56l'ancien président
01:43:58de la FFP, Michel Pena,
01:44:00si vous vous intéressez aux jardins hors sol.
01:44:02Fait un colloque, je crois,
01:44:04à l'Académie du climat, le samedi 22 juin,
01:44:06à propos du jardin atlantique,
01:44:08ce jardin qui a été construit il y a 30 ans
01:44:10au-dessus de la gare Montparnasse.
01:44:12Et évidemment, n'hésitez pas
01:44:14à venir voir cette exposition jusqu'à
01:44:16la fin septembre et à parcourir
01:44:18et à acquérir l'ouvrage
01:44:20qui en a été issu.
01:44:22Merci à toutes et à tous et à très bientôt.

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