La ville et les territoires sont sous tension. Il y a quinze ans, il était coutumier d’affirmer, face aux utopies urbaines déclarées et aux récits journalistiques enflammés, que l’essentiel de la ville du futur était déjà là. L’objectif était de faire « la ville sur la ville », de réhabiliter les centres, de prolonger raisonnablement (et avec talent) le canevas de la trame et des réseaux existants.
Nous savons aujourd’hui que cet urbanisme sage, équilibré, raisonné, n’est pas une réponse à la mesure du changement climatique et des mutations technologiques. Même si la démarche de décarbonation pousse à la conservation de l’existant, l’ampleur des défis écologiques va produire à grande échelle des bouleversements spatiaux, sociaux et sociétaux que nous pressentons sans pouvoir encore en mesurer la nature, le rythme et la dimension systémique.
La conscience de l’incertitude invite à l’expérimentation, à la mobilisation des sciences et de l’imaginaire.
La recherche de réponses requiert une œuvre collective et une haute exigence, intégrant un éventail de disciplines de plus en plus large dans une combinatoire urbaine originale.
Cette ligne de conduite est depuis 2008 celle d’Une Fabrique de la ville. Ce livre en est le reflet au travers de quelques exemples de missions urbaines et territoriales caractérisées par une temporalité longue et une grande diversité des échelles et des lieux d’intervention. Avec une conviction constante : la ville est le bien commun par excellence.
Plus loin, plus proche : tenir le cap environnemental et climatique impose de regarder au loin dans le temps et dans l’espace et, simultanément, d’être plus attentif à la proximité, aux usages, aux conditions de vie, en particulier des personnes les plus vulnérables.
Cette double injonction, rendre la ville durable et solidaire, est un grand défi démocratique.
Nous savons aujourd’hui que cet urbanisme sage, équilibré, raisonné, n’est pas une réponse à la mesure du changement climatique et des mutations technologiques. Même si la démarche de décarbonation pousse à la conservation de l’existant, l’ampleur des défis écologiques va produire à grande échelle des bouleversements spatiaux, sociaux et sociétaux que nous pressentons sans pouvoir encore en mesurer la nature, le rythme et la dimension systémique.
La conscience de l’incertitude invite à l’expérimentation, à la mobilisation des sciences et de l’imaginaire.
La recherche de réponses requiert une œuvre collective et une haute exigence, intégrant un éventail de disciplines de plus en plus large dans une combinatoire urbaine originale.
Cette ligne de conduite est depuis 2008 celle d’Une Fabrique de la ville. Ce livre en est le reflet au travers de quelques exemples de missions urbaines et territoriales caractérisées par une temporalité longue et une grande diversité des échelles et des lieux d’intervention. Avec une conviction constante : la ville est le bien commun par excellence.
Plus loin, plus proche : tenir le cap environnemental et climatique impose de regarder au loin dans le temps et dans l’espace et, simultanément, d’être plus attentif à la proximité, aux usages, aux conditions de vie, en particulier des personnes les plus vulnérables.
Cette double injonction, rendre la ville durable et solidaire, est un grand défi démocratique.
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00:00:00 Bonsoir, bienvenue au pavillon de l'Arsenal.
00:00:25 Je suis Marion Valère, directrice du pavillon de l'Arsenal
00:00:27 et très heureuse de vous accueillir pour cette fête,
00:00:30 puisqu'on fête ce soir, je crois, les 15 ans d'une fabrique de la ville.
00:00:35 Et on est très heureux au pavillon d'accueillir ce moment,
00:00:39 parce que l'histoire de Paris, c'est aussi l'histoire de tous les professionnels
00:00:45 qui travaillent pour faire évoluer cette ville,
00:00:49 que ce soit les architectes, les urbanistes, les paysagistes
00:00:52 et des entreprises, des agences comme une fabrique de la ville
00:00:56 qui sont là pour accompagner les projets et les grandes transformations de la ville.
00:01:00 Donc, on est très honorés d'accueillir ce moment et d'autant plus dans les termes
00:01:05 qui ont été posés par une fabrique de la ville sur ce moment.
00:01:10 Plus loin, plus proche, je trouve que ce titre est très beau,
00:01:14 parce qu'il pose la question,
00:01:17 il pose une question à laquelle on est tous confrontés,
00:01:19 je crois, au quotidien dans notre pratique.
00:01:21 C'est le grand paradoxe du temps dans l'urbanisme,
00:01:24 où le moment où un projet arrive, on aimerait déjà changer énormément de choses.
00:01:30 Le moment où un plan local d'urbanisme est voté,
00:01:33 on sait que ça prend du temps pour s'appliquer, etc.
00:01:35 On est tous confrontés à cette question des temps et des échelles au quotidien.
00:01:39 On fait de notre mieux et je pense que c'est essentiel d'avoir des acteurs
00:01:44 comme une fabrique de la ville pour accompagner les collectivités
00:01:47 et les acteurs privés dans ces moments.
00:01:50 Donc, à l'échelle parisienne,
00:01:51 mais je pense que vous ne parlerez pas que de Paris ce soir,
00:01:55 une fabrique de la ville a notamment joué un rôle majeur
00:01:57 pour le plan local d'urbanisme bioclimatique,
00:02:00 mais aussi pour les abords de Notre-Dame.
00:02:02 Et votre rôle pour accompagner des compétitions est aussi important.
00:02:06 Moi, je l'ai connu dans mon ancienne casquette à la ville de Paris.
00:02:11 Et c'est, je pense, aussi important quand on répond à des concours,
00:02:14 de savoir qu'il y a cette expertise,
00:02:16 qu'il y a un sérieux dans l'analyse des dossiers.
00:02:18 Et cela, c'est aussi vous qui le permettez.
00:02:21 Donc, voilà, ravie d'accueillir les personnes
00:02:23 qui vont débattre de tout cela ce soir
00:02:26 aux côtés des associés d'une fabrique de la ville.
00:02:29 Bienvenue. Bienvenue à vous.
00:02:32 Voilà, donc, je vous souhaite d'excellents débats.
00:02:34 Merci encore une fois d'être ici si nombreux.
00:02:38 Et bonne soirée à tout le monde.
00:02:41 Bonsoir à toutes et tous.
00:02:48 Merci à Marion Valère pour ses sympathiques mots d'accueil.
00:02:52 Donc, moi aussi, je suis très heureux d'être ici
00:02:55 pour animer cette soirée débat qui va se poursuivre
00:02:58 par un pot de l'amitié.
00:03:01 Donc, je suis ici aussi par amitié pour Jean-Louis, Guillaume
00:03:06 et l'équipe d'une fabrique de la ville.
00:03:07 Donc, moi, je suis Antoine Loubière.
00:03:09 Certains d'entre vous m'ont connu comme rédacteur en chef
00:03:11 de la revue Urbanisme.
00:03:12 Je suis maintenant journaliste indépendant.
00:03:16 Et ce qui explique ma présence ici,
00:03:18 c'est que j'ai un peu aidé à concevoir
00:03:21 et à concevoir cet ouvrage magnifiquement édité
00:03:26 par notre ami Dominique Carré,
00:03:29 aux éditions La Découverte Dominique Carré.
00:03:31 Et puis, j'ai un peu aidé nos amis pour l'écriture de certains textes.
00:03:36 Et comme ça, j'ai pu aussi mesurer
00:03:38 comment fonctionnait une fabrique de la ville.
00:03:41 Et par exemple, le fait tout bête que d'ailleurs,
00:03:45 les associés qui ont écrit,
00:03:47 mais aussi les autres membres de l'équipe,
00:03:49 écrivent justement sur ce qu'ils font.
00:03:51 C'est-à-dire que la montée en généralité n'est pas abstraite,
00:03:56 mais elle est ancrée dans leur pratique,
00:03:58 dans un certain nombre de territoires,
00:04:00 des territoires qui ne sont pas tous particulièrement favorisés.
00:04:03 Il n'y a pas que la ville de Paris,
00:04:05 même si la ville de Paris ne se réduit pas à un îlot favorisé.
00:04:08 Mais il y a le 93, le 9-3, comme on dit,
00:04:13 et l'ancien bassin minier de Lens-Lievain, Euralens, etc.
00:04:19 Donc, je crois que ce soir,
00:04:23 on va rebondir sur l'ouvrage,
00:04:28 sur le titre de cet ouvrage, donc "Plus loin, plus proche",
00:04:31 et puis "Planifier une ville durable et solidaire".
00:04:34 Et on l'abordera à travers deux temps distincts de débats.
00:04:38 Un premier temps avec les personnes ici, là,
00:04:42 que je vais présenter tout à l'heure.
00:04:43 Pourquoi planifier à grande échelle ?
00:04:45 Et puis, nous aurons un deuxième temps sur comment aménager autrement.
00:04:51 Question de fonds aujourd'hui face aux défis climatiques en particulier.
00:04:56 Donc, pour cette première table ronde,
00:04:59 j'ai la chance d'avoir Jean-Louis Subilo,
00:05:02 fondateur avec Guillaume Hébert d'Une Fabrique de la Ville,
00:05:06 Emmanuel Kos, qui a été ministre du Logement et de l'Habitat durable,
00:05:10 qui est toujours du président de l'Union sociale pour l'Habitat,
00:05:13 qui est, comme vous le savez,
00:05:14 l'expression du monde HLM dans sa diversité.
00:05:17 Sébastien Arlot, associé d'Une Fabrique de la Ville,
00:05:22 et Martin Vannier, qui sera un peu notre contradicteur,
00:05:27 qui est géographe, professeur à l'École d'urbanisme de Paris,
00:05:32 consultant à la coopérative Acadie,
00:05:34 et qui publiera en janvier un ouvrage qui est appelé à faire date,
00:05:38 "Le temps des liens".
00:05:40 Ce n'est pas le sujet de la soirée.
00:05:43 Alors, je vais passer tout de suite la parole à Jean-Louis,
00:05:46 parce que c'est quand même lui qui est, je n'ose dire,
00:05:49 le mieux placé pour nous parler de ses 15 ans,
00:05:52 de ses 15 ans 2008-2023, d'Une Fabrique de la Ville,
00:05:56 et pour peut-être inscrire ses 15 ans, si ce n'est la longue durée,
00:06:00 en tout cas, à l'histoire urbaine sociale
00:06:04 de ce début de 21e siècle.
00:06:10 Merci. Merci, Antoine. Merci à tous d'être là.
00:06:13 C'est vraiment, pour nous, un moment chaleureux,
00:06:20 notamment de voir beaucoup d'amis et beaucoup d'ouvrages,
00:06:23 beaucoup de partenaires qui ont travaillé avec nous,
00:06:27 mais aussi beaucoup de jeunes,
00:06:30 qui seront ceux qui seront chargés de répondre aux questions
00:06:34 que l'on pose dans cette table ronde.
00:06:37 Alors, comme tu l'as dit, j'ai introduit le livre,
00:06:39 qui est une œuvre collective entre les associés.
00:06:42 On a tenu à ce que chacun s'exprime, exprime ses convictions
00:06:46 et demander à quelques partenaires de faire un contrepoint.
00:06:51 J'ai tenu à l'introduire en parlant de la longue durée,
00:06:54 parce que c'est vraiment, indépendamment de mon âge,
00:06:58 une de mes préoccupations majeures dans mon travail.
00:07:03 Depuis que j'étais ici, à l'Atelier parisien de l'urbanisme,
00:07:06 il y avait encore des archives dans cette salle,
00:07:08 et que nous l'avons libérée pour en faire ce magnifique lieu.
00:07:13 15 ans, c'est très peu en urbanisme.
00:07:17 Fêter ces 15 ans, normalement, ça devrait être une chose
00:07:21 qui passe sans commentaire, sans grand événement.
00:07:25 Et pourtant, il y a eu un changement d'air considérable.
00:07:29 Soudain, il y a eu une sorte de prise de conscience collective
00:07:35 de nouveaux défis, les défis écologiques au premier lieu,
00:07:39 les défis technologiques aujourd'hui,
00:07:42 et je pense que ce sera le cas de plus en plus,
00:07:44 les défis géopolitiques, les défis sociétaux,
00:07:49 qui étaient peut-être notamment les défis écologiques occultés
00:07:52 depuis quelques années.
00:07:54 Ma génération ne soufflate pas d'avoir pas compris
00:07:58 dans les années 70 l'alerte qui était faite,
00:08:04 notamment par le Club de Rome.
00:08:10 Et puis, bon, tous ces défis sont venus s'ajouter
00:08:14 à des défis non réglés,
00:08:17 notamment ceux du logement social
00:08:21 et ceux des quartiers en difficulté.
00:08:25 Alors, j'ai vécu un grand basculement d'époque
00:08:30 au début de ma vie professionnelle,
00:08:31 comme on rappelle ces lieux.
00:08:34 C'était en 68, à Royaumont, le 1, 2 et 3 mai 68.
00:08:39 Vous voyez, le ministère de l'équipement,
00:08:43 dont j'étais consultant, avait organisé
00:08:46 un grand colloque sur urbanisme et sociologie
00:08:50 avec toutes les équipes d'urbanisme et de sociologie
00:08:53 des universités françaises.
00:08:55 Et soudain, il y a eu un chahut extraordinaire.
00:08:59 Les maires qui étaient là, les ingénieurs des ponts
00:09:01 n'ont rien compris. Les gens sont montés sur la table.
00:09:05 Et on dit bon, arrêt au grand ensemble,
00:09:11 arrêt à la politique hyper technicienne.
00:09:15 Et même, messieurs les architectes qui brandissaient
00:09:19 vos crayons comme des phallus,
00:09:23 tous les grands prix de Rome, construire 3, 5 000 logements,
00:09:27 arrêter, c'est fini. On veut le retour à la ville.
00:09:31 Et tout le monde, en quelques années,
00:09:37 à La Pure ou partout, ça s'est mis progressivement en place.
00:09:40 C'est devenu finalement la nouvelle ère.
00:09:41 On avait tourné la page. C'est très long de tourner la page.
00:09:45 Ça a continué longtemps, mais on avait tourné la page.
00:09:49 Et j'ai éprouvé un même sentiment de basculement idéologique
00:09:54 de la manière dont les uns et les autres font la ville.
00:09:58 Aux dernières rencontres du club Ville Aménagement,
00:10:00 dont le président Eric Bazard est ici ce soir,
00:10:05 j'ai assisté à ces rencontres.
00:10:09 Martin Vannier y était. Il animait les tables rondes.
00:10:12 Et là, finalement, le chasseur de carbone,
00:10:16 je l'ai écrit en revenant dans le train, est devenu le chef de la mode.
00:10:20 La décarbonation était devenu l'impératif catégorique de la ménagère.
00:10:26 La forme urbaine, c'était à peine évoqué.
00:10:30 Les problèmes sociaux, un peu plus, mais pas beaucoup plus non plus.
00:10:34 Il y avait un impératif, la décarbonation.
00:10:39 Donc, il y a une différence substantielle entre ces deux moments de basculement que j'ai évoqué.
00:10:44 C'est que le premier, il s'opérait, comme je l'ai dit,
00:10:47 vers un retour à la ville, une confiance dans la ville qui avait disparu dans les années précédentes.
00:10:53 Et finalement, c'était un terrain connu, même s'il y allait avoir beaucoup d'adaptation,
00:10:58 beaucoup de changements dans la manière de faire et déjà une précaution,
00:11:06 un management, un ménagement, comme on dirait aujourd'hui, par rapport à la génération précédente.
00:11:12 Mais le second basculement, celui d'aujourd'hui, ça me saisissait en revenant de Clermont-Ferrand.
00:11:17 C'est un saut dans l'inconnu, au milieu de beaucoup d'incertitudes.
00:11:24 En réalité, nous devons avoir l'humilité de dire que nous ne savons pas bien comment faire.
00:11:31 Donc, je pense que dans ce moment de basculement, il nous apparaît qu'il était utile à la fabrique
00:11:38 de prendre du recul, de réfléchir à notre pratique et de regarder notre pratique.
00:11:44 Ce que nous avions fait dans les 15 dernières années, dans les projets avec les maîtres d'ouvrage,
00:11:48 avec nos nombreux partenaires qui sont ici, pouvait être jugé en fonction des attentes de demain.
00:11:56 Est-ce qu'on était sur la bonne voie ? En quoi avions-nous progressé ?
00:12:02 Qu'est-ce qu'il nous restait à faire ? Que devions-nous changer ? Quelle piste devions-nous explorer ?
00:12:10 Et ça, c'est – si vous voulez – le but du livre et peut-être du débat de ce soir.
00:12:15 Alors quelques enseignements que nous tirons de notre pratique d'une fabrique de la ville.
00:12:21 Vous les entendrez au travers des – je pense – des interventions de chacun de nos assistants et de nos partenaires.
00:12:30 Quand nous avons créé une fabrique de la ville avec Guillaume, en fait, nous l'avons créée après l'échec de Lietzeguin.
00:12:39 Donc finalement, la fabrique de la ville, c'est une résilience. On redémarre. Bon.
00:12:45 On n'avait pas échoué. Surtout, le trapèze s'est fait. Et nous avions démontré que même quand on possédait pas les terrains,
00:12:53 qu'il y avait un grand groupe comme Renault, qui était un grand groupe de promoteurs, les plus grands promoteurs de la place,
00:12:58 on pouvait reprendre le contrôle sans posséder le terrain, à condition de faire une alliance avec les élus politiques
00:13:06 et de bien dire la programmation, la définition des projets, les jurys. C'est aux élus démocratiquement représentant la population de le faire
00:13:19 et non aux propriétaires du terrain ou aux promoteurs qui avaient acheté de Renault tout ce terrain.
00:13:25 C'est le fameux système des macrolos qui a été très mal compris. C'est pas le sujet de ce soir.
00:13:29 Mais c'est un sujet privé public. Je crois que dans la table ronde suivante, on y reviendra.
00:13:36 Donc nous croyons fermement. Et ça, c'est un caractéristique vraiment d'intervention de notre équipe, à la primauté du public
00:13:45 dans la définition de la stratégie et à l'encadrement du privé dans l'opérationnel et dans la gestion de la ville.
00:13:55 Et ça, c'est une conviction forte qui nous guide. À ce moment-là, nous souhaitions, quand nous avons créé une fabrique de la ville,
00:14:05 nous porter vers des territoires qui n'étaient pas des territoires urbains centraux, mais des territoires défavorisés.
00:14:11 C'était volontaire, parce qu'il y a un manque dans nos métiers, notamment dans l'assistance à maîtrise d'ouvrage,
00:14:18 de force pour traiter en banlieue et en province de ces zones en plus grande difficulté, en plus grande écarté.
00:14:31 Et donc nous avons fait ce choix volontairement. Nous avons eu la chance de pouvoir travailler tout de suite sur Rallent.
00:14:40 Ça demande Daniel Percheron. C'est ce qui explique le choix de la couverture du livre. Cette couverture, qui a un beau dessin des Val-aux-Rois,
00:14:50 ça exprime bien notre nouvelle aventure sur un site emblématique. Et ça explique le renversement de tendance,
00:14:58 puisque là, on est dans un site minier et ce site minier devient un symbole d'une transformation, d'une transition écologique et sociale.
00:15:13 Et comme l'a dit Michel Devigne, ici présent, qui est un camarade avec qui nous travaillons depuis de longues dates en complicité,
00:15:21 l'archipel noir devient l'archipel vert. C'est aussi un symbole du thème que nous développons. On n'a pas le temps de dire comment aujourd'hui,
00:15:31 mais ça nous a permis autour de la culture, avec l'arrivée du musée du Louvre-Lens, autour de l'éducation, de la formation,
00:15:40 de la rénovation des cités minières. Emmanuelle Coffre a beaucoup aidé quand elle était ministre pour ce programme,
00:15:47 vraiment de passer finalement du charbon à une économie décarbonée, enfin d'aller vers une économie décarbonée.
00:15:57 Donc les 15 ans de l'histoire de la fabrique de la ville nous ont permis à la fois sur ce territoire de ralentisse et sur le territoire de pleine commune,
00:16:08 qui a été un des territoires sur lequel nous avons beaucoup travaillé, de travailler sur la longue durée et d'expérimenter un continuum
00:16:18 d'intervention urbaine. Et je voudrais insister là-dessus parce que c'est une des forces, à mon avis, du travail que nous pouvons faire
00:16:25 tous ensemble, professionnels et avec les maîtres d'ouvrage, vraiment d'agir à plusieurs aisselles, de traverser les aisselles
00:16:35 et d'enrichir les unes par les autres. C'est un point très important. Ça permet de connaître les acteurs, de connaître les territoires
00:16:45 et au-delà du zapping, vraiment de confronter et de voir comment opérationnellement, les idées sont réalisées.
00:16:57 L'autre élément qu'on a souligné, comme dans notre expérience de la fabrique, c'est le fait que nous avions choisi une sorte de ligne de crête.
00:17:08 Ça est venu progressivement entre la maîtrise d'ouvrage urbaine, l'assistance à maîtrise d'ouvrage et la conception urbaine, la maîtrise d'œuvre urbaine.
00:17:17 Là aussi, je pense que c'est très important. C'est un croisement un peu comme le précédent entre les diverses échelles.
00:17:25 Il nous met au contact de beaucoup de partenaires et on met à l'épreuve des faits avec les équipes de constructeurs les idées générales.
00:17:37 Et dans une période de basculement comme nous vivons aujourd'hui, où nous devons mettre en œuvre ces transitions,
00:17:45 c'est très important de pouvoir les tester et de revenir de manière à ce que, comme l'a dit tout à l'heure Antoine,
00:17:56 vraiment ce que nous réalisons soit conforme aux idées que nous avons. La mise, le réel est une excellente épreuve pour les idées générales.
00:18:10 Trop d'idées simplistes circulent aujourd'hui. Bon, j'aime bien le livre disant qu'il faut que la ville soit aujourd'hui stable, le livre de Bewix.
00:18:26 Mais je pense pas que ce soit une solution. Et ils le reconnaissent eux-mêmes dans le livre en disant « Bon, on ne sait pas forcément comment faire ».
00:18:35 Alors que cache le titre énigmatique « Plus loin, plus proche » ? Il cache, je pense, dans notre idée, l'idée qu'il est nécessaire de voir plus loin
00:18:45 dans l'espace et dans le temps pour préserver le vivant, pour affronter le défi climatique, les défis sociaux, les défis sociétaux et technologiques,
00:18:55 et que deuxièmement, il faut se tenir plus près des personnes, plus près des pauvres, plus près des laissés-pour-compte.
00:19:05 Et c'est ces deux objectifs qu'il faut arriver à tenir en même temps. Vous aurez noté que le sous-titre du livre, c'est « Planifier la ville durable et solidaire ».
00:19:19 Au cours des 40 dernières années, la planification, qui était une ordre d'obligation, a été décriée. Et aujourd'hui, beaucoup disent « Fie des périmètres,
00:19:36 vive les alliances à géométrie variable, les objectifs stratégiques glissants ». La planification, elle s'est beaucoup affaiblie en se résumant souvent
00:19:46 à une liste de vœux pieux. Nous, nous pensons qu'il faut planifier à grande échelle, qu'il faut revoir les gouvernances pour rendre démocratiques
00:19:57 les arbitrages qui sont indispensables. C'est ce que j'appelle selon nous des réformes absolument radicales de l'organisation territoriale.
00:20:10 Comme l'écrit Pierre Vels, réinventer la ville vivante en phase avec la bifurcation écologique, c'est un voyage exaltant.
00:20:20 Mais nous ne savons pas où le voyage va nous conduire. Moi, je pense que nous pouvons parvenir à accomplir ce voyage, en tous les cas à l'entamer,
00:20:30 à l'engager, au prix de 3 efforts. Être ouvert sur les connaissances scientifiques, plus qu'on les est, nous tous, sur les avancées technologiques,
00:20:40 sur les connaissances géographiques et sociales. Interpeller sans relâche les élus pour qu'ils aient ce souci de planifier à grande échelle,
00:20:53 ce souci d'avoir une gouvernance efficace à une échelle permettant des arbitrages et surtout la lecture démocratique de ces choix et de ces arbitrages
00:21:04 et contribuer à faire en sorte que la sobriété soit répartie équitablement. Ceci, ça renvoie encore à une question de gouvernance permettant des choix à bonne échelle.
00:21:19 Sans cela, je crains que ce soit la lutte de tous contre tous.
00:21:25 (Applaudissements)
00:21:38 – Emmanuel, je vous passe la parole. Sachant que dans la contribution que vous avez écrite pour cet ouvrage, vous parlez d'un moment vivifiant.
00:21:50 Dans la société française aujourd'hui, vous constatez une forme de prise de conscience aiguë des défis, justement, climatiques, énergétiques, écologiques,
00:22:01 qu'il faut affronter et qu'aujourd'hui, 50 ans après René Dumont, la société française est enfin en phase, en tout cas dans une sorte de conscience avec le réel.
00:22:14 La question, c'est quand même comment on passe de cette prise de conscience à des réponses politiques pertinentes.
00:22:20 C'est un peu la voie que trace Jean-Louis avec l'idée de repenser aussi l'organisation territoriale,
00:22:27 de penser une planification à grande échelle, mais en même temps très spatialisée.
00:22:34 Je pense que tout à l'heure, Sébastien nous en dira plus sur la manière de passer à cette étape.
00:22:40 Mais vous, on a envie, puisque vous êtes président de l'USA, vous avez été ministre, de nous dire comment vous voyez,
00:22:49 je n'ose dire des perspectives politiques, mais une manière pour la société française de réellement mettre en œuvre les changements nécessaires.
00:22:59 Merci, Antoine. Je sais pas si je vais être capable de répondre à cette question ambitieuse.
00:23:03 Oui, j'ai parlé d'un moment vivifiant parce que moi, j'ai quand même connu ce moment de bascule entre des écologistes dont je fais partie,
00:23:13 qui ont défendu des argumentaires mis en alerte et qui étaient pas du tout entendus, à une prise de conscience collective très forte
00:23:24 qu'amènent y compris des mouvements de société, mais qui est là, qui est dans le réel et qui oblige les politiques à...
00:23:30 Enfin, un politique qui ne voit pas ça, c'est qu'il ne voit rien. Donc c'est en ça que c'est vivifiant.
00:23:34 Je veux dire aussi quand même que ce qui est très vivifiant, c'est la salle qui est pleine ce soir.
00:23:40 Je vous le dis parce que moi, mon quotidien, quand même, c'est de défendre du logement social face à des gens qui, en fait,
00:23:44 n'en ont rien à faire dans la période, mais à un point que moi-même, j'avais pas envisagé que ça serait comme ça.
00:23:50 Et c'est très vivifiant de se dire qu'on est aussi nombreux à s'intéresser à ce qu'est la ville, à ce qu'elle produit et ce qu'elle va produire
00:23:57 politiquement dans les années qui viennent et comment on va contribuer à ça collectivement.
00:24:01 Donc je le dis parce qu'il y a une pauvreté actuellement de la réflexion politique sur le sujet par rapport aux crises que,
00:24:11 Jean-Louis, tu crains si on n'arrive pas à des sursauts sur ce sujet-là.
00:24:16 Et je pense qu'il est important d'en avoir conscience et de surtout pas abandonner le combat de ces sujets-là.
00:24:23 Je voudrais aussi, avant de répondre à la question, Antoine, quand même remercier Jean-Louis et Guillaume pour leur confiance,
00:24:28 parce que ça fait deux fois qu'ils me proposent de participer à un ouvrage sur leurs 10 ans, puis leurs 15 ans.
00:24:34 Je suis extrêmement, extrêmement touchée parce que, vous le savez, je ne suis pas du tout de formation de ces sujets-là.
00:24:43 C'est la politique qui m'a amenée à travailler sur le logement et les enjeux d'aménagement et d'urbanisme.
00:24:48 Et je voudrais quand même dire que ma rencontre avec Jean-Louis subit l'eau parce que je ne t'avais pas nommé.
00:24:54 Moi, j'avais repris une mission où ma prédécesseuse t'avait nommé pour une mission sur le renouveau du bassin minier.
00:25:03 C'est les discussions que j'ai eues avec Jean-Louis qui m'ont aussi appris à apprendre à regarder un territoire
00:25:10 et à voir ce qu'il était possible de faire dans un territoire, quel qu'il soit.
00:25:14 Et j'ai appris en discutant avec Guillaume et en lisant et en fréquentant une fabrique pour de la ville.
00:25:22 C'est aussi là, voilà, c'est important de dire comment est-ce qu'on peut s'investir sur un territoire à ce point-là et produire des effets.
00:25:29 Pourquoi je dis ça ? Parce qu'il y a trois semaines, j'étais à Pécancourt, Jean-Louis, pour visiter dans le nord des logements miniers
00:25:36 qu'on sentant qui ont bénéficié des rénovations que toi et moi avions promues.
00:25:42 Ce plan envisage une rénovation de 20 000 logements bassins miniers qui sont maintenant des rénovations de très haut niveau,
00:25:50 y compris avec une volonté qu'ils ne soient pas démolis. Il y avait des enjeux très importants.
00:25:56 Et pourquoi je parle de ça ? Parce qu'il y a eu un moment favorable d'une ambition politique pour un territoire.
00:26:06 C'était une commande politique du président de la République et du Premier ministre de l'époque de travailler sur ce territoire
00:26:12 qui était en très grande difficulté et d'y mettre de l'expertise et de l'ambition construite avec les élus, avec la société civile,
00:26:23 avec les corps enseignants, avec les entreprises. Et ça marche. Et c'est ça aussi que je veux dire.
00:26:29 C'est qu'y compris avec des tas de difficultés dans un territoire qui, par ailleurs, est extrêmement malmené politiquement,
00:26:35 notamment par l'extrême droite, ça marche. Pourquoi je vous dis ça ? C'est parce que quand j'étais ministre,
00:26:38 il y avait deux territoires sur lesquels j'avais un peu des feuilles de route à construire. C'était le bassin minier.
00:26:44 Puis c'était Marseille. Donc le bassin minier, on a avancé. Marseille, on a échoué pour des tas d'autres raisons.
00:26:53 Mais pourquoi je vous dis ça ? C'est parce que la force de la politique, quand même, c'est que ça marche pas toujours.
00:27:00 Mais on peut aussi construire un avenir pour des territoires. Et on peut le faire si, justement, on a l'approche
00:27:10 qui est, je crois, développée par Jean-Louis et par l'ensemble de ses associés et de ses équipes, et notamment sur ce qui a été dit
00:27:20 et ce qui est beaucoup dans le livre sur la question de comment on fait avec la bifurcation. Si on reprend ce terme,
00:27:25 on peut en prendre d'autres. Ce qui est certain, c'est qu'on vit un moment clé sur plusieurs années, sur peut-être 2 décennies.
00:27:34 Mais cette bifurcation, si elle n'est pas accompagnée par de la planification, par de la démocratie, par des lieux de médiation
00:27:40 et de dialogue, par une volonté de faire avec l'autre, ces bifurcations, ça va devenir des crises extrêmement violentes.
00:27:49 Et c'est un des enjeux, en fait, de faire face aux dérèglements climatiques. La solution, elle n'est pas juste technique
00:27:56 ou de dire "Vous devez faire telle chose, avoir tel comportement" ou "L'État doit changer ça". C'est comment est-ce qu'on fait
00:28:02 pour qu'une société continue à vivre et de manière démocratique, pour faire face aux enjeux environnementaux,
00:28:08 et notamment la bataille de l'eau, la bataille de l'alimentation et la question, évidemment, des inégalités.
00:28:16 Et en plus, j'ai déjà fait un débat là-dessus, ici, là-dessus. Mais moi, c'est une conviction que j'ai totalement...
00:28:28 Enfin, sur laquelle je ne démords pas. C'est impossible de penser qu'on va faire... qu'on va évoluer, qu'on va faire face
00:28:38 aux enjeux du dérèglement climatique et qu'on va construire une société, je prends n'importe quel thème, décarbonée, résiliente,
00:28:44 sobre, tout ça, si on ne s'affronte pas et on ne résout pas les enjeux d'inégalité sociale.
00:28:52 Sincèrement, et je le redis, et je pourrais le dire cent fois, mais c'est impossible. Et c'est d'ailleurs ça, une des crises actuellement
00:28:59 sur la difficulté à comprendre les grandes mutations que demandent ces enjeux environnementaux. Et par exemple,
00:29:07 la zéro artificialisation, mais tous les enjeux sur les rénovations, tous les enjeux sur les mobilités. C'est que si, à côté de ça,
00:29:15 on n'est pas capable de répondre aux enjeux d'inégalité sociale, eh bien ces enjeux-là deviennent, pour les populations
00:29:21 les plus défavorisées, plus qu'une contrainte. C'est un rejet. Et ça rajoute aux enjeux de ségrégation. Et je voudrais...
00:29:32 Parce que je ne veux pas, évidemment, être trop longue, mais je pense que ce qui est très important, et notamment quand tu défends
00:29:37 dans ton introduction, je dirais, l'amour, la défense de la ville, c'est aussi que derrière, et moi, il me semble que c'est important,
00:29:46 c'est que la ville, c'est aussi ce qui permet de faire société. Si on le souhaite. La ville peut être aussi un outil formidable
00:29:52 de ségrégation et d'exclusion. Mais ça peut être aussi un outil de cohésion et un lieu de cohésion, de construction de l'autonomie,
00:30:01 du bien-être, évidemment avec des conditions que l'on se donne les moyens de répondre aux enjeux d'inégalité sociale, de réguler,
00:30:09 de se poser la question des inégalités liées au logement, mais aussi liées à la mobilité et au travail, et liées à l'adaptation.
00:30:16 Et notamment aujourd'hui, et ça va être ça un de nos grands combats politiques des années qui viennent, c'est pour s'adapter face
00:30:22 au dérèglement climatique. Est-ce que tout le monde est égaux ? Face aux sécheresses, la réalité, c'est qu'en fonction de vos niveaux de vie,
00:30:29 vous n'êtes pas du tout dans les mêmes situations. En fonction de la qualité urbaine dans laquelle vous vivez, de votre quartier, du logement,
00:30:36 de votre résidence à une échelle plus loin, vous n'allez pas vivre les choses de la même manière. Et je pense qu'aujourd'hui, c'est ça une des difficultés.
00:30:45 On a en effet de nouveau un retour à une planification. On nous parle de planification écologique. Moi, je vois ce que c'est.
00:30:52 C'est des tableaux XL, des injonctions, mais c'est vraiment aussi idiot que ça. Il y a des choses très intéressantes, par ailleurs,
00:30:58 qui sont portées dans ces projets gouvernementaux, mais c'est aussi beaucoup une planification. Voilà, c'est formidable.
00:31:05 On remplit des tableaux, des objectifs et on va comptabiliser si on les a faits bien ou pas. Mais comment se construit dans ça le lien social,
00:31:13 la question de l'éducation, la question de l'émancipation ? Rien du tout. Et pourquoi je vous parle de ça ? Parce qu'en juillet dernier,
00:31:20 à la suite de la mort du jeune Naël, qui a été donc tué par un policier, des émeutes urbaines que beaucoup d'entre nous connaissons,
00:31:34 enfin, avons déjà vu, qui resurgissent comme ça, qui sont très courtes, mais d'une très, très grande violence, qui, je le dis,
00:31:42 n'ont lieu majoritairement pas dans les quartiers en politique de la ville, mais dans les quartiers qui ne sont pas de la politique de la ville,
00:31:47 notamment la ville moyenne, voire la petite ville. Et il y a des tas de raisons qui expliquent ça, mais on fait comme si, en fait,
00:31:56 d'un seul coup, on redécouvrait qu'il y avait 17% de la population qui est sous le seuil de pauvreté, qu'il y a toute une génération
00:32:04 qui n'a pas accès à l'éducation et à l'emploi, qui a des enjeux, des grandes difficultés d'égalité sociale.
00:32:12 Et je pense qu'on peut pas mettre ça de côté quand on pense la ville d'aujourd'hui et de ce qu'elle sera dans 30 ans.
00:32:20 Et c'est pour ça qu'en effet, je pense que la planification, pour accompagner ces mutations et ces bifurcations, c'est ce qui nous permet aussi de faire face.
00:32:30 Je ne dis pas d'empêcher les crises. Je pense qu'il y en aura, malheureusement, mais en tout cas, peut-être de les atténuer ou de les compléter.
00:32:38 Enfin, sur les questions de gouvernance, parce que si j'en parle pas, Jean-Louis va me dire que j'ai évité la question.
00:32:45 Oui, la gouvernance politique par rapport aux territoires, ces enjeux-là, elle est lamentable.
00:32:52 On va le dire. Non, mais moi, par ailleurs, je suis élue régionale de l'île de France depuis... C'est mon troisième mandat,
00:32:58 donc mon deuxième dans l'opposition. Donc j'ai connu... Voilà. On a quelque chose d'assez paradoxal.
00:33:06 C'est qu'en même temps, on a un discours de plus en plus fort sur décentraliser des compétences à un moment où, en fait,
00:33:12 l'Etat a plutôt tendance à les centraliser ou à les concentrer. On a un retour du niveau municipal comme... Voilà.
00:33:22 La commune serait le coeur de la réflexion, faisant complètement fi des réflexions qu'on a depuis des années sur les bassins de vie,
00:33:31 la mobilité, les interactions entre les territoires et la question qu'on a portée beaucoup d'entre nous sur les enjeux de coopération,
00:33:40 collaboration entre territoires, c'est-à-dire qu'on puisse travailler, construire ensemble sur du long terme n'y est pas du tout.
00:33:49 Donc on est plutôt dans un moment de recul, je trouve extrêmement fort, même si on nous explique qu'on va continuer à décentraliser des choses,
00:33:54 ce qui, à mon avis, est fausse. Et par ailleurs, ce moment de recul, il s'accompagne aussi par une impensée des enjeux de la ville aujourd'hui.
00:34:01 Et ça, je pense... Alors là, je parle moins en tant qu'élu. Là, très clairement, je pense que beaucoup d'élus ont abandonné cette question-là
00:34:09 dans les grands projets pour leur territoire. Et pourtant, la question de l'aménagement dans sa globalité, dans ce terme-là générique,
00:34:19 est absolument essentielle. Et d'ailleurs, c'est derrière les enjeux de logement, et y compris pour faire face au dérèglement climatique,
00:34:26 il faut voir loin dans le long temps et il faut voir large. Il faut agrandir la focale. Et donc, il faut faire de l'interaction,
00:34:33 il faut travailler entre territoires. Et donc, un moment où, justement, tout appelle à une collaboration entre les territoires
00:34:39 et à un échange perpétuel, on est plutôt dans un retour sur soi, voire un séparatisme, parce que tout à l'heure,
00:34:46 j'ai parlé des mots d'inégalité, de ségrégation, mais il y a des territoires qui vraiment revendiquent le séparatisme social.
00:34:52 Et c'est pas des territoires... C'est les territoires riches. C'est les territoires les plus riches de France qui revendiquent
00:34:58 la non-application de la loi SRU, le non-partage des enjeux de mixité sociale, le refus d'inscrire l'ensemble des enfants
00:35:04 des centres d'hébergement dans les écoles. C'est une réalité de tous les jours. Et c'est ça, en fait, qui est assez fou.
00:35:11 C'est un moment où il faudrait collaborer beaucoup plus pour avancer ensemble. On est plutôt dans cette phase-là.
00:35:16 Donc oui, la gouvernance est en effet un sujet majeur, mais on doit pas utiliser cette défaillance comme la raison de ne pas avancer.
00:35:30 Et pour terminer, dans le cadre de l'ERBM, donc l'Ensemble pour le Renouveau du bassin minier, où la gouvernance était quand même
00:35:38 totalement défaillante avec toutes ces petites agglos, ça n'a pas empêché d'une part d'avancer, de que, au final, même à ma grande surprise,
00:35:45 beaucoup d'agglomérations décident de fusionner, de partager des outils d'ingénierie. Donc il a fallu du temps.
00:35:51 Mais c'est sûr qu'aujourd'hui, c'est une grande difficulté et qu'on a beaucoup de mal à reconstruire une vision très positive
00:35:58 de ces questions-là, y compris pour les prochaines échéances électorales, en tout cas locales, qui vont démarrer dès 2026.
00:36:08 Merci, Emmanuelle.
00:36:10 [Applaudissements]
00:36:17 On a fait un tour d'horizon complet. Alors on va avec Sébastien Harlot, qui est associé d'une fabrique de la ville,
00:36:25 qui est particulièrement impliquée justement sur des exercices de planification innovants, avec notamment le PLU Bioclimatique de Paris.
00:36:33 On va peut-être essayer de cerner comment aujourd'hui, on peut justement planifier une ville durable et solidaire
00:36:41 en adoptant des stratégies territoriales, disons, à grande échelle. C'est un peu ça, votre credo planificateur, si je puis dire.
00:36:51 Mais vous allez nous expliquer ça.
00:36:53 Merci, Antoine. Je vais essayer de répondre rapidement à cette question vaste.
00:36:58 Mais effectivement, déjà, peut-être dire ce qu'on constate, tout cet affaiblissement de la stratégie qui a déjà été évoquée,
00:37:06 ce séparatisme, y compris sur les questions de gouvernance.
00:37:09 Donc on a voulu, à travers ce livre, aussi déjà réhabiliter la stratégie, l'existence de la planification en tant que telle.
00:37:17 Parce qu'on voit bien qu'il y a un mouvement de recul sur ces sujets-là. On est très convaincus de l'importance de la planification.
00:37:24 Je ne vais pas revenir sur la puissance des transitions qui sont à opérer, mais c'est des transitions qui impliquent forcément des choix
00:37:31 en termes d'allocation du foncier, en termes de priorisation des investissements des collectivités,
00:37:37 et avec un équilibre très délicat à trouver entre eux, c'est les questions environnementales, les questions sociales.
00:37:43 Et je suis très convaincu que face à toutes ces urgences simultanées, on ne peut pas se contenter d'additionner des projets individuels
00:37:52 ou des actions communales, aussi vertueuses soient-ils, sans avoir un cadre commun.
00:37:57 Et on ne peut pas laisser, même à chaque commune, le soin d'essayer de résoudre à son échelle toutes les injonctions contradictoires de l'époque.
00:38:07 Parce qu'en fait, il faut tout faire bien. Il faudrait tout faire bien.
00:38:10 Il faut produire du logement, produire de l'emploi, arrêter d'artificialiser, créer des espaces verts, restaurer les milieux, etc.
00:38:18 Et c'est une sorte d'équation impossible à résoudre à l'échelle locale de façon satisfaisante.
00:38:25 Et je crois que c'est comme ça qu'on conçoit le rôle de la stratégie territoriale, c'est d'arriver à former un cadre de cohérence commun,
00:38:33 engagé, qui soit aussi militant sur certains aspects, mais adapté aux besoins du territoire,
00:38:39 et dans lequel chaque projet, dans le temps, pourra venir s'inscrire progressivement, mais avec un cap commun et un horizon commun partagé.
00:38:50 Bien sûr, il ne s'agit pas de dire qu'on va se remettre à planifier au mètre carré près la programmation de toutes les opérations d'aménagement.
00:39:00 Il faut bien sûr laisser de la place à la participation citoyenne, à une approche contextuelle.
00:39:05 Mais il faut quand même un cap, et je ne crois pas non plus à une programmation qui émergerait entièrement des données du terrain,
00:39:15 pour laquelle l'existence de documents de planification serait une sorte de carcan insupportable qui viendrait obéir à la qualité du projet.
00:39:24 Et enfin, ce sont des discours qu'on entend, mais que je pense très caricatureux.
00:39:31 Pour arriver à ça, je voudrais insister sur au moins un point qui est important pour nous,
00:39:36 c'est le fait qu'une stratégie territoriale ou un document de planification, un SCOT, un PLU, c'est un projet spatial.
00:39:42 Parce qu'on fait ça en tant qu'urbaniste, c'est-à-dire qu'il faut quantifier et surtout spatialiser les objectifs qu'on se fixe,
00:39:51 en testant leur atterrissage au niveau local, en faisant des allers-retours entre la grande échelle et la petite échelle.
00:39:58 En tout cas, nous, c'est la seule méthode qu'on a trouvée pour essayer d'arriver à résoudre globalement les injonctions contradictoires dont je parlais,
00:40:07 tout en apportant des réponses satisfaisantes à l'échelle locale.
00:40:11 Parce que sinon, on se contente, dans un PLU par exemple, d'empiler des objectifs thématiques parallèles, sans jamais tester la résolution de l'équation.
00:40:22 Et je crois que c'est un dispositif un peu incantatoire qu'on voit dans beaucoup de documents de planification et qu'il faut absolument essayer d'éviter.
00:40:30 Donc ça, c'est un travail qui prend du temps, qui est exigeant en termes de temps d'étude, en termes d'arbitrage aussi à opérer par les élus.
00:40:40 Donc on est dans notre travail forcément très sensible, je crois, à certains territoires qui font l'effort d'engager cette démarche de planification.
00:40:49 On travaille actuellement à pleine commune sur les études de projets urbains territoriales.
00:40:54 Il y a eu le travail sur le PLU bioclimatique de Paris que tu as évoqué Antoine.
00:41:01 On constate que ces temps d'élaboration de la stratégie, c'est vraiment des moments assez riches et précieux de réflexion sur la trajectoire des territoires.
00:41:10 Et c'est ce qui fait, je crois, de la stratégie territoriale un champ de conception urbaine à part entière,
00:41:20 qui est peut-être un pan un peu oublié de la maîtrise d'œuvres urbaines, mais que nous aussi on s'emploie à essayer de réhabiliter.
00:41:28 Et on essaie tant qu'on peut d'engager toutes les collectivités à se saisir de ces questions,
00:41:34 à le faire si possible en amont de l'élaboration des documents à portée réglementaire.
00:41:39 Parce qu'une fois qu'on a démarré une révision de SCOT ou de PLU, on traduit les objectifs, mais on est pris par les délais, par la procédure.
00:41:47 Et en tout cas, notre expérience montre que ce ne sont pas ces moments-là qui sont des vrais moments de réflexion prospective.
00:41:53 Et donc, il faut que cette vision stratégique d'ensemble vienne avant.
00:41:57 Et peut-être juste pour finir en deux mots, évoquer moi aussi la question de la gouvernance,
00:42:03 qui est évidemment déterminante, qui est un sujet sur lequel nous, souvent, on n'a pas la main.
00:42:08 Donc on peut en appeler aux élus. Mais ce rôle des élus, il est évidemment majeur pour procéder aux arbitrages,
00:42:17 avoir ce rôle de péréquation entre les parties plus ou moins riches d'un même territoire,
00:42:24 et assurer la mise en œuvre de la stratégie dans la durée, s'ils peuvent, bien sûr.
00:42:29 Et voilà, on voit bien que les "vrais" PLU intercommunaux, par exemple, montrent bien,
00:42:36 je trouve l'intérêt de procéder à ce changement d'échelle.
00:42:40 Et on pourrait dire, sur le PLU de Paris, que son plus grand défaut, c'est de ne pas être métropolitain.
00:42:47 Et on voit bien qu'on est enfermé dans cette échelle communale et que ça pose plein de questions.
00:43:03 Merci, Sébastien. Je vais passer la parole à Martin Vannier, qui a dû reconnaître,
00:43:07 notamment dans les propos d'Emmanuel Kos, ce thème qui lui est cher de l'interterritorialité.
00:43:14 C'était un peu ça, la coopération aux différentes échelles.
00:43:19 Mais vous les doyez aussi pour une planification spatialisée.
00:43:24 Alors je sais qu'au niveau d'Acadie, vous êtes plutôt du côté des Scots et des Sradet,
00:43:30 donc d'une planification à une échelle parfois inopérante, si je puis m'exprimer ainsi.
00:43:39 Et donc je voulais avoir votre regard sur ce premier échange.
00:43:44 Tu me vouvoies maintenant ?
00:43:45 Oui, je sais pas très bien. Normalement, un animateur doit vous voyer.
00:43:49 Oui, d'accord. Non, j'étais juste pour t'en parler.
00:43:51 L'animateur doit vous voyer, de la distance, etc.
00:43:54 Vas-y, fais comme tu veux. Tu te souviens, Antoine, quand tu étais rédacteur en chef ?
00:44:00 Excuse-moi, on a fait un numéro de la revue Urbanisme qui s'appelait "La planification à bout de souffle".
00:44:07 C'est un peu emmerdant pour ce soir.
00:44:09 Il y a quelques années.
00:44:13 Alors, je vais redire à Jean-Louis et ses collègues, à Emma, et enfin à Madame Kos aussi,
00:44:21 ce que je disais après la lecture de cet ouvrage.
00:44:26 D'abord, je trouve que c'est un plaidoyer pour le politique ou pour la politique.
00:44:33 C'est un texte de professionnel qui raconte à quels affres il est confronté.
00:44:38 Et je disais qu'en Alpin, je sais que marcher sur une crête, c'est toujours un peu casse-gueule,
00:44:42 parce qu'il n'y a qu'effectivement du vide des deux côtés.
00:44:44 Donc c'est un cheminement naturel et en même temps très exigeant de vigilance.
00:44:50 Mais en même temps, au-delà de ça, dont on parlera sans doute à la deuxième table ronde,
00:44:53 il y a cette dimension très forte de dire un peu comme tu l'as dit, Jean-Louis,
00:44:58 la prise de conscience est accélérée.
00:45:02 Elle va tellement vite qu'elle va beaucoup plus vite que les transformations qu'elle appelle et qu'elle attend de ses voeux.
00:45:09 Et la plus lente de ces transformations, c'est la transformation politique.
00:45:13 C'est la capacité à avoir dans notre société un rapport à nos représentants et au mandat qu'on leur donne de façon démocratique.
00:45:20 Dans notre République, quelque chose qui soit transformé par rapport à l'héritage et nos pratiques de citoyens,
00:45:27 notamment le fait que le mandat est une transmission de pouvoir souverain sur lequel, à priori, on reviendra dans 6 ans, dans 4 ans, etc.
00:45:35 Mais enfin, pas beaucoup. On n'a pas trop prévu d'autres. Et qu'on attend d'ailleurs du politique que lui-même nous rassure par ses fameuses expressions de j'ai le cap, j'ai la vision, etc.
00:45:46 Comme disait Laurent Davis, les gens qui ont des visions, il faut qu'ils consultent. Mais nous sommes encore très attachés à cette fonction.
00:45:54 Il y a toute cette quand vous toute cet appel à la à une refondation politique qui, certes, comme tu viens de le dire,
00:46:02 Sébastien et pas votre votre champ d'expertise, mais en même temps, qui est extrêmement important dans tout ce que vous racontez,
00:46:09 puisque vous dites en permanence bon, ça marche à condition que qu'on soit du côté de l'AMO ou qu'on soit du côté de la maîtrise d'œuvre.
00:46:16 On a la capacité avec le politique de tenir, de tenir un cap et de tenir une boutique dont acte.
00:46:23 J'ai simplement dit dans la discussion et je le répète parce que je le réentends surtout de la part de Sébastien, peut-être qu'il faut faire attention
00:46:29 de ne pas faire comme si l'histoire pouvait repasser les plats et comme si on pouvait revenir à des attentes de cette planification,
00:46:37 reconfier à un prince éclairé qui manifestement n'est plus là ou alors éventuellement dans le meilleur des histoires.
00:46:43 Il y en a plus qu'un, mais il y en a beaucoup. Et c'est ça qui rend le système compliqué, parce que franchement,
00:46:47 des cadres stratégiques qui décident effectivement de faire un grand tour pour etc., etc. Le problème, c'est pas qu'on en manque.
00:46:54 C'est qu'on en a à tous les étages et qu'il y a une compétition politique sur ce marché de l'orientation,
00:47:02 ce qui est plutôt bien, puisque la politique, effectivement, faut que ça frotte, mais qu'à un moment donné,
00:47:06 on se retrouve défaillant quand, par exemple, effectivement, tire son épingle du jeu, le niveau communal qui décide de repartir
00:47:14 faire sa petite soupe à son échelle et de sortir de cette complexité avec tout le discours qu'on peut entendre.
00:47:20 Simplifions, revenons aux petits, revenons au local et on va sauver la planète.
00:47:25 Donc ça, je trouve que c'est important de se le dire parce que votre propos et à un moment donné, Jean-Louis, tu as dit dans ton intro,
00:47:34 tu as dit "c'est très lent de tourner la page". J'ai entendu si tu disais très long ou très lent, mais enfin, sérieux même, de tourner la page.
00:47:41 Je trouve que c'est une belle expression parce qu'il n'y a rien de plus rapide que de tourner la page.
00:47:44 C'est d'ailleurs le sens de l'expression. Mais tu nous dis fort, justement, que c'est très lent, c'est-à-dire que sur cette question de la longue durée,
00:47:50 le vrai défi, c'est notre capacité à faire dans l'urgence, à répondre tout de suite, pas dans 5 ans parce qu'on sait que etc., etc.
00:47:58 et à s'inscrire dans du 30 ans. Et de la même façon, la table ronde s'appelle planifier à grande échelle.
00:48:05 Mais enfin, vous n'avez cessé de dire que le vrai sujet, c'était de planifier d'une façon multiscalaire, pas seulement à la grande.
00:48:11 Et vous avez de magnifiques planches, pages 23 et 25, si je peux me permettre, qui le montrent sur Saint-Denis et sur Lens,
00:48:18 qui sont vos deux chantiers un peu emblématiques. C'est exactement ce travail là.
00:48:22 Et c'est pour ça que vous êtes sur la ligne de crête, du coup, parce que vous êtes du côté de la grande échelle sur les métiers du planeur
00:48:26 et du côté de la petite échelle du côté du concepteur, de la maîtrise d'œuvre. Voilà.
00:48:33 Et ça, je trouve que ça a une vraie puissance d'interpellation du politique, parce que c'est ce que m'a dit Madame Kos.
00:48:39 Du coup, effectivement, ça interpelle une posture coopérative, une posture de partage de la souveraineté politique à chaque échelon.
00:48:47 On s'astreint à défendre et à revendiquer ardemment pour en priver l'État juste sous l'attachant dessus.
00:48:52 Et c'est un changement radical de capacité à représenter la société, non pas à une échelle contre les autres,
00:48:59 mais comme étant une représentante de médiation entre etc. Bon, après, un dernier mot sur cette...
00:49:07 Bon, l'angoisse dont tu nous fais part, Jean-Louis, dans ton introduction, qui... Alors du coup, on n'en sait plus s'il fallait applaudir,
00:49:13 parce qu'il y avait un côté éloge funèbre de la société actuelle. On était un peu saisi par la gravité du moment.
00:49:21 Mais effectivement, la question écologique, compatibilité avec la question sociale. Mais la réponse, c'est qu'en fait, c'est la même.
00:49:31 Enfin, on a fini par comprendre, je crois, après avoir constaté qu'effectivement, la première, les solutions à la première question écologique
00:49:38 pouvaient aggraver les écarts sociaux et les inégalités, que la question écologique était fondamentalement une question sociale,
00:49:45 que c'est pas une capacité pour les hapichous à s'en sortir mieux, que c'est pas ça qui va sortir quoi que ce soit des équations dans lesquelles on est.
00:49:53 Et je trouve que cette reformulation doit nous amener à de la vigilance. La question sociale, c'est pas la première fois qu'on la rencontre,
00:50:00 quand même, dans l'histoire de la République, dans l'histoire de notre pays. On peut regarder ce qu'elle était comme mode structurant
00:50:06 des débats politiques sociétaux, je sais pas, moi, entre 1880 et 1936, par exemple, pour prendre des grossiers repas avec de très nombreuses batailles,
00:50:16 des progrès phénoménaux en matière de droits sociaux et de conditions sociales, mais aussi des baffes phénoménales, des marches arrières,
00:50:23 des allées, des retours, etc. Qu'est-ce que nous croyons tous qui va nous attendre dans les 30 prochaines années ?
00:50:28 Sinon exactement la même chose, mais dans une question sociale qui ira comme dimension non pas le travail des enfants la nuit et le repos dominical,
00:50:39 toute conquête de cette... Il y a donc plus d'un siècle aujourd'hui, mais les conquêtes écologiques dont nous venons de parler.
00:50:46 Moi, je dis juste ça pour dire que ça me semble être la même question, que nous savons qu'elle ne sera pas résolue autrement que dans des batailles,
00:50:53 des conflits, des luttes sociales et écologiques, etc., etc., que c'est toute l'histoire de la République, pas une raison pour se faire la guerre
00:51:00 et transformer le pays en un champ clos d'affrontements factieux, et que c'est ça, la grandeur d'une politique, c'est de faire vivre une société
00:51:10 dans cette conflictualité, mais pour en sortir quelque chose, ce que, finalement, on a pas mal su faire entre 1880 et 1940,
00:51:18 même s'il y a des moments... Je vois Antoine qui sourit. Il y a des moments difficiles. Il y a des effondrements. Mais enfin, Antoine, on en est héritier.
00:51:26 Et il y a un certain nombre de sujets sur lesquels on s'en porte pas mal, notamment celui du logement social, qui est quelque chose de très fortement ancré.
00:51:32 Donc voilà, je dis simplement, dans ce moment de vertige où on se demande notre incertitude, comment faire ? Saut dans le vide, as-tu dit ?
00:51:42 Oui. Sauf que l'histoire est jamais complètement en vide, n'est-ce pas ? Et que sur cette convergence-là entre la question écologique et la question sociale,
00:51:53 nous savons qu'il y a notre capacité à réinventer et réimposer une autre façon de passer un contrat politique. Avec tous les mots que vous avez utilisés,
00:52:03 ce contrat, ça ne peut être que celui de la coopération et pas l'exercice de la puissance, c'est sûr. Ça ne peut être que celui de la représentation
00:52:10 un peu multiscalaire, même s'il vient dire comme ça, ça ne va pas faire voter les masses. Mais enfin, n'empêche que ce n'est pas la question de savoir
00:52:17 si je donne le primat à tel ou tel des 5 étages de notre architecture républicaine. Et ça va être surtout la capacité à construire des médiations
00:52:26 et des compromis, parce qu'on ne s'en sortira pas sans cette question-là. Sinon, ça va être le bras de fer terrible et l'urbanisme en pâtira beaucoup.
00:52:34 Merci, Martin. Alors, je suis désolé, mais on va mettre fin à cette table ronde qui est un petit peu débordée et on va passer tout de suite
00:52:49 à la deuxième table ronde. Comment aménager autrement ? Sachant que je vous rassure, il y aura un petit temps de débat où vous pourrez prendre la parole
00:52:57 après les deux tables rondes. Voilà donc pour cette deuxième table ronde, j'ai le plaisir d'accueillir. Donc les noms s'inscrivent au tableau,
00:53:06 mais je vais vous présenter les personnes. Anna Kreminzer, qui est donc architecte de formation, qui est une des associées d'une fabrique de la ville.
00:53:15 Caroline Poulin, qui est architecte et elle, elle est associée et cofondatrice de l'AUC, qui a eu le grand prix de l'urbanisme en 2021.
00:53:27 Ensuite, Marine Linglard, qui est écologue, environnementaliste. Enfin, je ne sais pas comment il faut vous définir, mais vous dirigez une société
00:53:38 qui s'appelle justement UrbanEco. Et puis Guillaume Hébert, que tout le monde connaît, puisqu'il est un des fondateurs d'une fabrique de la ville.
00:53:45 Voilà. Alors on a un thème un peu vaste aussi. Comment aménager autrement ? Alors on ne va pas reprendre le débat précédent.
00:53:56 On verra peut-être tout à l'heure si on peut essayer d'élargir avec vos points de vue, vos prises de position, vos questions.
00:54:05 Mais j'ai envie de passer tout de suite la parole à Anna Kreminzer, dont je sais qu'elle porte avec conviction la question du développement durable au sein même d'une fabrique de la ville.
00:54:16 Donc je voudrais lui demander justement comment elle définit, elle esquisse justement un aménagement autre.
00:54:30 Merci, Antoine. Alors c'est vrai qu'en nous lançant dans l'écriture de ce livre, nous nous sommes vite trouvés confrontés à cette question de comment la crise climatique,
00:54:40 la crise écologique heurtait nos convictions que nous étions forgées au fil de nos projets et comment ça modifiait en fait notre façon de voir les choses.
00:54:52 On s'est posé la question, est-ce qu'il faut tout arrêter ? Certains ont eu des prises de position assez radicales sur le sujet.
00:55:02 Est-ce qu'il faut arrêter d'aménager ? Est-ce qu'il faut arrêter de construire ? Et très vite, nous avons convenu que si nous voulions continuer à vivre en société et en ville,
00:55:12 il fallait absolument continuer à aménager. Mais continuer à aménager, c'est quand même le faire tout à fait autrement et assez différemment.
00:55:23 Et on pense, et ce qu'on essaye de faire ressortir dans notre livre, c'est que le socle écologique doit désormais constituer la base de tout nouveau projet urbain.
00:55:34 Et que le projet, avant tout, doit viser à améliorer le socio-écosystème dans lequel il s'inscrit.
00:55:42 Et je trouve qu'on a quand même une chance avec l'aménagement, c'est que d'une part, on dispose et on connaît un certain nombre de leviers pour mettre en place cela.
00:55:51 On a des méthodes, on a des outils. Et puis en plus, on peut quand même considérer que la ville écologique et solidaire correspond assez bien aux aspirations de la société civile.
00:56:02 Une ville qui soit plus verte, qui fait plus de place à la nature, qui permet de se loger correctement, avec moins de pollution, qui soit moins brillante.
00:56:10 C'est quand même une aspiration qu'on peut tous partager. Ce n'est pas forcément le cas dans d'autres secteurs d'activité qui sont confrontés à cette crise d'autres manières.
00:56:18 Mais par contre, ce qu'on voit sur les projets sur lesquels on intervient, c'est que finalement, la mise en œuvre de ces objectifs, elle n'est pas si évidente.
00:56:27 Parce qu'en fait, la concrétisation et la réalisation, elle va finalement entrer en tension avec des intérêts économiques qui sont bien établis et avec des habitudes qui sont bien installées.
00:56:40 Et donc, je pense que c'est notre rôle en tant qu'urbaniste de développer des outils, de développer des arguments solides qui permettent aux décideurs et en particulier aux élus qui disposent de cette compétence
00:56:55 de porter auprès de la population et dans les projets, cette approche écosystémique et qui demande forcément une vision de plus long terme que celle de la prochaine échéance électorale.
00:57:08 Donc, sur les leviers, les outils dont on se dispose, on a quand même pas mal de choses à notre disposition.
00:57:17 Sur la construction, la RE2020 donne maintenant des objectifs assez clairs. Elle avait d'ailleurs été initiée par le label "E+C-", lorsqu'Emmanuel Kos était ministre.
00:57:27 On dispose de modélisation sur les îlots de chaleur. On dispose de calculs d'analyse de cycle de vie qui commence à s'étendre à l'aménagement, de coefficients de biodiversité, de très nombreux référentiels.
00:57:39 Mais pourtant, on n'y est pas encore et on a besoin d'aller plus loin. On a besoin pour cela probablement de croiser davantage les disciplines et pas de considérer l'écologie comme une couche
00:57:52 qui vient s'additionner à d'autres et qui vient permettre de prendre quelques décisions, mais pas forcément toutes.
00:57:58 Par exemple, on peut prendre l'exemple de la question de la végétalisation, qui est absolument centrale comme outil de résilience urbain,
00:58:07 à la fois, vous le savez bien, pour les îlots de chaleur, pour la gestion de l'eau, pour la biodiversité, pour le stockage carbone.
00:58:15 Par exemple, quand on travaille sur des territoires comme on l'a fait sur Plaine-Commune, sur Gentilly,
00:58:21 on a essayé d'aller voir assez finement comment on pouvait répondre concrètement, spatialement, à cet objectif un peu incantatoire de l'OMS des 10 à 12 m² d'espace vert par habitant.
00:58:33 Et en fait, pour ça, on fait un travail très précis de cartographie avec des isochrones d'accessibilité qui prennent en compte les coupures générées par les infrastructures,
00:58:42 qui prennent en compte les dénivelés et qui regardent aussi quels espaces verts sont existants, mais qui sont inaccessibles, qui pourraient être ouverts au public.
00:58:49 Je pense notamment aux cours d'école qui peuvent être transformés en cours oasis et ouverts, comme commence à le mettre en place un certain nombre de villes, dont la ville de Paris.
00:58:57 Mais aussi des espaces privés qui peuvent participer à ces espaces d'agrément.
00:59:02 Et à partir de là, définir et programmer assez précisément les nouveaux m² dont on a besoin et ensuite ancrer cette donnée dans la programmation urbaine
00:59:11 et s'atteler à la mettre en œuvre et à trouver les espaces pour le faire.
00:59:16 Mais après, pour que ces objectifs ne restent pas seulement incantatoires et puissent être réalisés, il va falloir les traduire en indicateurs et aussi travailler sur des évolutions.
00:59:27 Des évolutions à la fois d'ordre réglementaire, d'ordre juridique, d'ordre financier.
00:59:33 Et à ce titre, je pense que le PLU bioclimatique de Paris me semble une belle illustration d'avancer à la matière,
00:59:42 mais qu'on a des sujets à travailler encore et notamment comment est-ce qu'on pourrait contraindre beaucoup plus fortement l'obligation de réhabilitation versus la construction neuve.
00:59:51 Quand on sait bien que 80% du bâtiment est déjà là et qu'on doit le réhabiliter,
00:59:57 mais comment on fait techniquement pour imposer sur les territoires que l'immeuble ne soit pas démoli au profit d'un immeuble neuf ?
01:00:04 Comment est-ce qu'on peut imposer aussi lors de la conception initiale d'un projet que la réversibilité dans le temps soit anticipée ?
01:00:13 Donc on essaye d'y travailler sur les projets de la gare des Mines, du village olympique et dans les cahiers des charges et les consultations sur lesquels on travaille.
01:00:24 Et puis le dernier point sur lequel je voudrais insister, c'est l'importance d'aller beaucoup plus loin aussi dans l'élaboration partagée des projets avec la société civile à la bonne échelle territoriale
01:00:36 et pour constituer un véritable projet de ville au sens large, pas forcément cantonné à l'échelle de la ville,
01:00:42 qui soit vraiment travaillé avec les habitants pour qu'ensuite les actions et les projets qui s'y développent vont répondre aux besoins réels et essentiels
01:00:51 et puis afin qu'ils soient aussi compris, qu'ils soient acceptés et qu'ils soient réclamés aussi et donc mis en œuvre par les élus.
01:01:00 Merci, Anna.
01:01:02 (Applaudissements)
01:01:08 Je voudrais qu'on continue avec Marine Langlard à approfondir peut-être, vous avez aussi évoqué le socle écologique
01:01:18 dans sa contribution à l'ouvrage plus loin, plus proche, Marine Langlard, titre sur l'impératif de se reconnecter avec le socle écologique.
01:01:28 Donc peut-être que ce serait intéressant de bien cerner ce que cette notion recouvre et comment on peut mieux la prendre en compte pour aménager autrement.
01:01:38 Voilà, c'est un peu ma question, Marine.
01:01:42 Merci d'abord de m'inviter. Je suis écologue, pas environnementaliste.
01:01:46 C'est vrai que je me sens entourée d'urbanistes, de paysagistes, de gens de politique.
01:01:52 Moi, j'ai un métier scientifique, technique, je suis botaniste de formation et je pense que c'est ça qui fait la qualité de la ville.
01:02:00 C'est les petites plantes, les petites fleurs, les animaux qui sont présents et l'homme et tous les hommes qui peuvent y être.
01:02:07 Donc merci beaucoup à Jean-Louis et Guillaume et Sébastien, avec qui j'ai eu le plaisir d'oeuvrer sur de nombreux documents de planification à grande échelle,
01:02:17 les PLU et de projets à petite échelle, et puis aussi avec Michel Dévines sur différents projets aujourd'hui qui sont très porteurs pour nous, écologues.
01:02:28 Il y a 10 ans ou 15 ans, quand j'ai commencé à bosser sur ces sujets-là, on nous cantonnait à faire les études préalables.
01:02:39 On allait voir ce qu'il y avait sur le site. Donc il fallait qu'on compte absolument toutes les plantes, absolument tous les animaux qui étaient présents.
01:02:47 Et puis après, on prenait nos données et puis on faisait autre chose. Et puis nous, on allait compenser ailleurs parce que c'était pratique d'aller compenser ailleurs.
01:02:56 On nous disait "il y a de la place". Et puis peut-être parfois, et très souvent même, on ne compensait pas parce que ça se perdait dans le temps.
01:03:03 On oubliait, entre le dossier réglementaire initial et puis le beau projet qui sortait de terre, qui faisait la une des journaux, etc.,
01:03:10 on oubliait d'aller mettre en oeuvre les mesures compensatoires.
01:03:13 La politique a fait quand même beaucoup d'avancées. On a des textes réglementaires qui sont plus forts.
01:03:19 On a des autorités environnementales qui sont plus balèzes, parfois un peu casse-pieds, diront certains architectes ou urbanistes.
01:03:26 Mais en tout cas, c'est plus fort et on a la chance, parfois, pas toujours encore, de pouvoir être complètement associé au projet,
01:03:34 d'être co-réflecteur, co-imagineur d'espaces, de lieux, de nouveaux moyens de vivre la ville.
01:03:52 Donc finalement, on essaye de réfléchir avec les architectes, urbanistes, paysagistes, bureaux d'études techniques, VRD,
01:04:02 comment prendre en compte un existant, non plus simplement dans des gros dossiers réglementaires,
01:04:09 ces 300, 400, 500 pages, on adore écrire, mais vraiment dans une réalité.
01:04:16 Et on la regarde, cette réalité, à la différence d'il y a quelques années, en 3D, en regardant le sol, en regardant l'air,
01:04:26 et évidemment la végétation qui est présente, et les animaux qui ont le plaisir de pouvoir vivre dans ces conditions qui sont en place.
01:04:36 Et on le regarde à différentes échelles. On le regarde de manière très précise, avec le petit papillon protégé,
01:04:43 où même on a la chance aujourd'hui de regarder tous les végétaux et animaux ordinaires.
01:04:49 Et on le regarde aussi dans la fonctionnalité, la capacité des espèces, comme l'homme, de se déplacer à travers la ville,
01:05:00 à travers les espaces complexes, intenses, dangereux.
01:05:05 Dangereux quand un petit enfant traverse la route, mais je ne vous dis pas pour un cloporte, c'est encore beaucoup plus compliqué.
01:05:11 Donc on travaille à toutes ces échelles-là, d'un document de planification globale,
01:05:17 à un petit projet qui peut être assez simple, mais qui apporte le plus souvent beaucoup de plaisir, de bien pour les hommes.
01:05:29 Et donc nous, au sein d'UrbanEco, et grâce aux différents partenaires avec qui on travaille,
01:05:35 on essaie de marier la ville et la nature.
01:05:42 On a encore beaucoup de défis à porter.
01:05:48 Aujourd'hui, vous l'avez dit, dans les discours, tous les bons mots y sont.
01:05:54 Un peu trop souvent, on les entend même.
01:05:57 Parfois, avec pas beaucoup de réalité, encore derrière, quand même, le développement, le mot durable, ça date de 92,
01:06:03 et ça n'a pas tant bougé que ça depuis 92.
01:06:06 A notre grande déception, au quotidien, on observe la perte de biodiversité en Île-de-France,
01:06:13 en première couronne pérésienne à Paris, dans le bassin minier.
01:06:17 On la voit tous les jours dans nos inventaires.
01:06:21 Et donc il nous reste à concrétiser finalement tous ces objectifs qu'on s'est fixés il y a déjà 40 ans,
01:06:29 qui sont rentrés dans le langage courant, qui sont partagés.
01:06:33 Et peut-être qu'en travaillant complètement en interdisciplinarité,
01:06:37 tous ensemble, avec le politique, avec les spécialistes du social, de l'aménagement,
01:06:43 on va réussir à mieux intensifier la place de la nature,
01:06:48 au même titre qu'on intensifie la place de l'homme dans la ville.
01:06:52 On a ce défi à avoir autant ou plus de nature que d'hommes dans la ville.
01:07:04 À tous les étages, sur le sol, au milieu et en haut,
01:07:09 c'est pas la même nature, c'est pas pour les mêmes espèces,
01:07:12 mais on doit trouver ces différents lieux.
01:07:16 Et peut-être on arrivera à mieux vivre ensemble dans le futur.
01:07:22 J'ai été dans le petit texte que j'ai écrit, très modeste,
01:07:27 assez trash, parce qu'on râle, nous, beaucoup encore,
01:07:31 entre les phases de diagnostic, de premier début du projet,
01:07:36 puis vraiment ce qui sort de terre.
01:07:38 Nous on est encore déçus en tant qu'écologues.
01:07:42 On a des grands pas en avant qui sont faits,
01:07:44 on a des grandes inventions entre le coefficient de biotope,
01:07:46 si on parle des PLU, il y a maintenant une vingtaine d'années.
01:07:50 Tout ce qu'on a réussi à mettre en plus dans le PLU de Pleine-Commune,
01:07:54 qui est d'ailleurs tellement compliqué que même nous,
01:07:56 on n'arrive pas à mettre en place toute la nature qu'on a imposée
01:07:59 au sein des lots, au sein des parcelles.
01:08:02 Mais on a avancé, mais il manque encore des pas à franchir
01:08:08 pour qu'on fasse fi des grosses difficultés
01:08:16 qu'on rencontre aujourd'hui.
01:08:18 Ces difficultés, vous les connaissez aussi bien que moi,
01:08:21 on a trop de chaleur, on a trop de soleil, on a trop de pluie,
01:08:24 on n'a pas assez de plantes, on n'a pas assez d'animaux.
01:08:28 Et pour le moment, on est encore en grande souffrance.
01:08:31 Donc je ne veux pas être aussi défétiste que toi, Jean-Louis,
01:08:32 dans la fin de ta présentation, mais quand même un peu.
01:08:38 Peut-être un petit optimisme, c'est qu'on sait aujourd'hui
01:08:45 travailler à plusieurs.
01:08:48 On travaille avec les urbanistes, on travaille avec les paysagistes,
01:08:50 on travaille avec les architectes.
01:08:53 On sait se parler, on a trop des langages communs,
01:08:56 on a des mots qu'on sait partager.
01:08:58 Il nous faut encore qu'on arrive à tenir le crayon à plusieurs
01:09:02 pour que les conceptions soient vraiment jusqu'au bout,
01:09:07 intégrantes des enjeux sociétaux dans lesquels on vit
01:09:12 et qu'on ait encore plus de moyens.
01:09:16 Et ça, c'est peut-être le coup de pied vers les politiques,
01:09:21 les moyens techniques et financiers pour mettre en oeuvre
01:09:25 ces objectifs d'aménagement durable.
01:09:29 Il nous faut plus de moyens financiers parce que refaire
01:09:32 de la nature en ville, ça coûte cher.
01:09:36 Merci.
01:09:37 (Applaudissements)
01:09:43 Merci Marine pour ce plaidoyer d'interdisciplinarité,
01:09:46 de coopération.
01:09:48 Alors, je me tourne vers Caroline Poulain,
01:09:50 donc membre éminente de l'AUC avec François de Costaire
01:09:56 et Djamil Clou.
01:09:57 Et moi, ce qui m'a frappé dans l'ouvrage que vous avez écrit
01:10:00 pour le Grand Prix de l'urbanisme 2021, c'est que vous parlez
01:10:04 de la ville comme matière vivante.
01:10:06 Alors, il y a de grands débats, justement, sur le vivant.
01:10:09 Qu'est-ce que c'est le vivant aujourd'hui ?
01:10:10 Comment redonner toute sa place au vivant dans nos villes ?
01:10:14 Vous, vous prenez la ville comme une matière vivante,
01:10:17 ce qui est évidemment...
01:10:19 Mais moi, je desserre quand même peut-être...
01:10:24 En plus, vous êtes étiqueté hyper métropolitain,
01:10:28 vous intervenez vers la densité.
01:10:31 Et j'ai envie de vous savoir comment vous percevez
01:10:36 quand même ce changement de vocabulaire
01:10:39 que Marine Lenglard vient d'évoquer, ce changement,
01:10:42 mais qui va au-delà de ce changement de représentation
01:10:44 et même de représentation de l'avenir de nos villes.
01:10:48 Comment vous intégrez ça, vous, comme concepteur urbain,
01:10:51 confronté à l'hyper métropolisation ?
01:10:54 D'ailleurs, ce n'est pas vous qui l'avez choisi.
01:10:55 Vous la nommez fort, justement, mais vous devez faire avec.
01:11:00 Mais justement, comment l'apprivoiser peut-être
01:11:02 dans cette perspective d'aménager autrement ?
01:11:05 En fait, je pense que...
01:11:11 Les premiers moments où on a parlé de matière vivante,
01:11:18 je pense que ça remonte peut-être au projet de l'Ilfiv en 2005.
01:11:23 Peut-être on en parlait déjà avant, mais c'est lui qui me vient.
01:11:27 Et ça rejoint un peu la question de comment on pouvait
01:11:32 transformer une usine sidérurgique qui était vouée à la démolition
01:11:37 parce que ça n'avait pas été détecté comme un enjeu de patrimoine
01:11:43 que de conserver cette énorme usine.
01:11:45 Donc, il était question de la démolir.
01:11:48 Et nous, il fallait qu'on trouve les mots pour justifier
01:11:53 que peut-être la démolition n'était pas impréalable.
01:11:56 Et on parlait de matière vivante, d'espace capable.
01:12:00 Et ça, ça vient du fait que depuis le début,
01:12:04 depuis toute notre pratique à la UC,
01:12:06 on a toujours été très attentifs aux bâtiments déjà là.
01:12:10 On a beaucoup commencé plutôt par un travail sur les grands ensembles,
01:12:14 sur la question de comment on pouvait les transformer,
01:12:17 comment on pouvait même densifier certains espaces.
01:12:22 Bon, alors là, je vous choque sûrement,
01:12:23 mais c'est vrai que, notamment à Gentilly,
01:12:27 on se posait la question en se disant même,
01:12:29 il faudrait densifier et remettre du logement plus social
01:12:33 dans les nouvelles densifications et transformer les bars existants
01:12:37 pour faire du logement de luxe.
01:12:39 Alors là, je parle d'un quartier bien particulier.
01:12:42 Je ne dis pas que c'est une recette.
01:12:43 C'était à Gentilly à l'époque.
01:12:45 Et il y avait ces grandes bars Lénine qu'on voulait aussi conserver.
01:12:48 On se disait, ces bars ont des vues incroyables sur le grand paysage.
01:12:53 On est à deux pas de la porte d'Orléans.
01:12:55 Finalement, là, pourquoi pas inverser un regard aussi sur les grands ensembles ?
01:13:02 Donc voilà, nous, nos préoccupations,
01:13:04 elles ont toujours été sur la transformation de la ville,
01:13:08 mais dans l'existant de sa matière en tant que telle.
01:13:14 Et c'est vrai que quand on a été Grand Prix de l'urbanisme,
01:13:16 on s'est rendu compte que finalement,
01:13:17 mais franchement, je ne suis même pas sûre que c'était une stratégie.
01:13:21 On s'en est rendu compte.
01:13:22 C'est en fait, on a toujours travaillé sur la transformation
01:13:26 et jamais sur l'extension urbaine.
01:13:28 Et parce que voilà, on était plutôt intéressé
01:13:34 et avec un regard très attentif.
01:13:36 Et même si on nous traite de délicat,
01:13:40 on a toujours aussi inventé le terme 100% métropolitain, 100% délicat.
01:13:44 Donc, ce n'est pas parce qu'on travaille parfois aussi à la grande échelle
01:13:48 qu'on n'a pas un souci extrême du détail.
01:13:52 On a parlé là beaucoup des différentes échelles,
01:13:55 mais nous, on a la conviction que pour mener à bien effectivement un projet,
01:14:01 il faut le gérer à plusieurs échelles.
01:14:03 Alors, ce n'est pas forcément la grande et la petite.
01:14:05 Ça va dépendre des questions,
01:14:08 mais en tout cas, à plusieurs échelles, c'est sûr.
01:14:10 Et dans le détail, toujours.
01:14:12 Et c'est pareil, le détail, il prend une forme différente à chaque fois.
01:14:15 Si je reviens à Lille, par exemple,
01:14:18 donc dans les arguments également,
01:14:20 on avait dit il y a énormément de surfaces de halles.
01:14:24 Ces halles sont aussi un réservoir potentiel pour capter de l'eau,
01:14:28 la capter, la mettre dans des réservoirs,
01:14:32 puis la faire circuler pour irriguer tous les espaces publics,
01:14:38 comme des jardins d'eau.
01:14:40 Enfin, on appelait ça des jardins d'eau.
01:14:42 C'est à dire que toujours aussi,
01:14:44 comment on n'est pas non plus simplement dans la question purement spatiale,
01:14:50 mais là, c'est pareil.
01:14:51 C'était avec une équipe pluridisciplinaire,
01:14:55 parce qu'à la UC, on travaille toujours avec,
01:14:59 déjà en équipe au sein de notre agence,
01:15:02 et toujours en équipe avec,
01:15:04 bon, c'est pour ça que je pense que je suis invitée aussi ce soir,
01:15:07 parce qu'on a aussi toujours beaucoup, par exemple,
01:15:08 travaillé avec la fabrique de la ville,
01:15:10 mais on a aussi toujours travaillé avec des paysagistes.
01:15:12 Enfin, je ne vais pas faire le détail,
01:15:14 mais par exemple, pour Lille,
01:15:16 c'était Pascal Cribier à l'époque qui a eu cette idée de dire,
01:15:20 voilà, on va montrer, on va faire la démonstration de l'eau,
01:15:23 l'eau comme ressource.
01:15:24 C'était plutôt l'idée de Pascal Cribier à l'origine
01:15:27 que l'idée de la UC.
01:15:28 Et c'est pour ça que ce qui est intéressant,
01:15:30 c'est d'intervenir dans plusieurs registres.
01:15:34 Et effectivement, je pense avec plusieurs compétences.
01:15:37 Maintenant, je me tourne vers Guillaume Hébert,
01:15:48 qui est un peu l'homme de la synthèse,
01:15:52 avec le chapitre qui s'intitule "L'art de la mise en œuvre".
01:15:57 Alors justement, comment mettre en œuvre
01:15:59 un aménagement durable aujourd'hui ?
01:16:01 Par quoi ça peut passer ? Les étapes ?
01:16:05 Guillaume ?
01:16:07 Du coup, oui, quelques...
01:16:10 Revenir un peu sur le terme du débat,
01:16:11 comment aménager autrement ?
01:16:13 Peut-être redire ce qui a été dit par Sébastien un peu brièvement,
01:16:18 mais on voit qu'il y a quand même une vague
01:16:20 assez forte critique sur la planification,
01:16:23 l'aménagement, les AC, l'urbanisme de AC.
01:16:28 Il nous semble que malgré tout, l'aménagement,
01:16:32 ça a été dit par Caroline, peut être 100% délicat,
01:16:36 même si certains essayent d'inventer des notions différentes
01:16:39 qui sont utiles parce qu'elles amènent à s'interroger.
01:16:42 Mais comme le ménagement,
01:16:43 ou même certains parlent de zone de ménagement concertée,
01:16:47 ça ne semble pas être en changeant les mots
01:16:49 qu'on va résoudre les problèmes.
01:16:50 Par contre, je pense qu'il y a un enjeu à prendre acte
01:16:55 des nouveaux défis qui nous sont fixés
01:16:59 et qui ont été rappelés.
01:17:00 Moi, je vais plutôt insister peut-être sur trois convictions
01:17:04 qu'on a qui sont plus de l'ordre du processus,
01:17:07 qui est aussi une des singularités de notre équipe,
01:17:09 c'est de travailler aussi sur comment on fait
01:17:11 et on met en oeuvre les projets.
01:17:14 Le premier, c'est peut-être assez immodeste.
01:17:16 Il y a quelques aménageurs dans la salle,
01:17:19 mais on est convaincu à la fabrique que le processus
01:17:21 de mise en oeuvre de la ville, c'est un art.
01:17:23 C'est pour ça qu'on a appelé ça l'art de la mise en oeuvre
01:17:25 et que le fer, qui est très utilisé dans ces murs,
01:17:29 est une part de sa création.
01:17:32 Et on est convaincu de ça.
01:17:33 Et c'est pour ça qu'on aime bien travailler
01:17:36 avec les équipes de concepteurs,
01:17:37 parce qu'on a ces temps d'échange avec les écologues,
01:17:40 avec les sociologues, avec les élus,
01:17:44 qui ont pris beaucoup pour leur grade ce soir,
01:17:46 mais avec qui on a plaisir à travailler et à débattre.
01:17:50 La ville, elle se compose pas comme un objet
01:17:52 aussi complexe soit-il.
01:17:54 C'est pas une voiture où il y a un processus linéaire
01:17:56 planifié à l'avance.
01:17:57 Il y a des interactions, il y a des évolutions,
01:17:59 il y a des parties prenantes.
01:18:00 Et ça a été dit par Sébastien,
01:18:02 c'est rare qu'elles convergent toustes vers le même point.
01:18:05 Donc, il faut arriver à résoudre l'équation
01:18:07 ou en tout cas trouver une des solutions possibles
01:18:09 à cette équation.
01:18:11 Et dans ce processus, les habitants,
01:18:14 ça a été redit par plusieurs intervenants,
01:18:16 ils ont une place qui doit être grandissante
01:18:18 et sûrement aussi dans un processus
01:18:22 plus responsabilisant mutuellement,
01:18:24 c'est-à-dire dans un processus où il y a vraiment
01:18:25 un travail à faire ensemble,
01:18:27 où on s'est défini clairement des objectifs
01:18:29 et peut-être moins dans des grandes réunions publiques
01:18:31 que dans des ateliers de travail ensemble.
01:18:33 Et c'est ce qu'on essaye de faire dans certains projets.
01:18:35 Et comme l'a dit Jean-Louis en introduction,
01:18:37 et c'est aussi beaucoup de son fait,
01:18:41 on a, nous, choisi un chemin un peu particulier
01:18:45 sur lequel Martin Vannier a plaisanté,
01:18:47 qui est un peu casse-gueule,
01:18:49 puisque on est d'un côté ou de l'autre.
01:18:50 Et des fois, il faut arriver justement
01:18:51 à bien prendre le recul nécessaire.
01:18:53 Mais il nous semble que c'est dans cet espace
01:18:56 où on travaille avec toutes les équipes,
01:18:57 un peu des deux côtés,
01:18:59 sans...
01:19:02 Comment dire ?
01:19:02 Sans perdre le fil de quel côté on est,
01:19:06 que se joue,
01:19:07 on peut s'inventer une autre manière
01:19:10 de fabriquer la ville et de lui donner du sens.
01:19:13 La seconde conviction, c'est que...
01:19:16 Et ça, c'est important,
01:19:16 il y a un certain nombre d'opérateurs privés
01:19:19 dans cette salle,
01:19:20 et ça revient aussi à la question du rôle des élus,
01:19:23 c'est que la ville, c'est le fruit de la coproduction
01:19:25 entre des acteurs publics et des acteurs privés.
01:19:27 Et ça a toujours été le cas.
01:19:29 Mais néanmoins, il nous semble que tout
01:19:31 ne peut pas être négocié en urbanisme.
01:19:32 Et aujourd'hui, il y a une tendance quand même forte
01:19:34 à pousser un urbanisme négocié,
01:19:36 un urbanisme contractuel.
01:19:38 Certes, l'histoire, elle nous a légué
01:19:39 tout un nombre important de quartiers
01:19:42 qui sont le fruit de cette coproduction
01:19:43 entre les acteurs publics et les acteurs privés,
01:19:45 entre les percées haussmanniennes
01:19:46 et les immeubles de rapport,
01:19:47 entre les lotissements et les équipements
01:19:50 qui nous ont été livrés,
01:19:51 que ce soit des parcs, des théâtres.
01:19:53 Mais malgré tout, on assiste quand même,
01:19:55 du fait de la raréfaction des ressources financières,
01:19:58 à une tendance à penser que le privé
01:20:00 fera mieux que le public.
01:20:02 Peut-être que dans le cadre de cette crise qui arrive
01:20:05 et qui est bien présente,
01:20:06 les choses vont un peu s'inverser.
01:20:09 Et finalement, d'abandonner un certain nombre
01:20:11 d'objectifs régaliens,
01:20:14 mais au sens d'intérêt commun,
01:20:17 pas au sens de l'État qui fait atterrir
01:20:19 des objectifs de manière abstraite.
01:20:22 Et du coup, les promoteurs,
01:20:24 ils s'organisent pour maîtriser des fonciers,
01:20:26 ce qui est tout à fait normal.
01:20:27 Et il y a aussi des raisons d'être
01:20:29 qui sont parfois très littéraires
01:20:31 et qui expliquent l'ambition des promoteurs.
01:20:33 Donc, je ne dis pas que les promoteurs
01:20:34 et les opérateurs privés,
01:20:35 parce qu'on a eu ce débat en préparant aussi
01:20:37 le débat avec Martin Vannier,
01:20:39 n'ont pas de rôle dans la fabrication de la ville.
01:20:41 Pas du tout. Ce que je dis juste,
01:20:42 c'est que ce rôle-là, il doit être bien encadré
01:20:44 par la puissance publique
01:20:46 et qu'il y a un travail collectif à faire.
01:20:47 Ça a été cité dans le cadre du travail
01:20:49 avec les autres, entre les partenaires du projet.
01:20:53 Mais ce travail-là, il a affaire
01:20:55 avec quand même un centre de points
01:20:56 qui ne sont pas négociables
01:20:57 et qui sont les fondamentaux
01:20:59 de ce que veut la collectivité.
01:21:01 Et en général, le consensus
01:21:03 et la convergence entre les intérêts privés
01:21:05 et publics sont difficiles à obtenir.
01:21:07 On y travaille sur nombreux projets.
01:21:09 On y travaille sur Versailles-Piont,
01:21:10 on y travaille sur les EMGP Sud Plaine.
01:21:12 On y travaille notamment,
01:21:14 on y a travaillé sur Maines-Montparnasse,
01:21:16 mais parfois avec succès et parfois en échouant
01:21:19 parce qu'il n'y a pas de point de convergence.
01:21:21 Ils sont difficiles à maintenir dans le temps.
01:21:24 Et le dernier point de conviction,
01:21:27 et ça rejoint un peu ce que disait Anna tout à l'heure,
01:21:30 sur, voilà, il y a des outils,
01:21:32 mais ce que disait Marine,
01:21:35 il faut pouvoir mettre les moyens
01:21:37 pour financer une ville qui serait,
01:21:39 où le socle environnemental
01:21:41 ou la biodiversité serait au centre,
01:21:42 puisque c'est aussi ça que tu dis dans ton texte.
01:21:45 Et pour ça, il nous semble qu'il faut peut-être
01:21:47 dépasser une vision dépenses-recettes trop étriquées
01:21:51 que l'on mène,
01:21:52 même, enfin, je veux dire, c'est une autocritique aussi
01:21:55 parce qu'on fait des bilans d'aménagement
01:21:56 et il y a quelques aménageurs dans la salle
01:21:58 et souvent, on a des dépenses et des recettes
01:22:00 et c'est un peu, on va dire, des comptes dépiciers
01:22:03 avec ce que ça coûte et ce que ça rapporte.
01:22:05 Mais en réalité, les opérations d'aménagement,
01:22:07 elles sont rarement équilibrées.
01:22:08 Elles sont toujours en grande partie déficitaires.
01:22:11 L'équilibre de ces opérations est rare.
01:22:13 Et ce déficit, il a un sens
01:22:17 parce qu'il est là pour porter une ambition.
01:22:19 Et à ce titre-là, il nous semble qu'il faudrait pouvoir,
01:22:22 c'est ce que le philosophe et architecte,
01:22:28 je ne sais pas si l'architecte, Philippe Simet,
01:22:29 a qualifié de petite addition, dépasser la petite addition
01:22:33 pour aller au profit d'une grande addition
01:22:35 qui prenne en compte les retombées des projets à plus long terme.
01:22:38 Et il nous semblerait nécessaire de mieux valoriser
01:22:41 les externalités environnementales et sociales des projets
01:22:45 dans leur approche économique.
01:22:47 Alors, il ne s'agit pas de tout monétariser,
01:22:49 de tout financiariser, de rendre le logement social,
01:22:52 de dire que ça vaut tant d'euros et un arbre, ça vaut un autre euro,
01:22:56 mais de faire évoluer la fiscalité de l'aménagement,
01:23:00 parce qu'Anna a posé la question de comment on transforme davantage.
01:23:03 Et en fait, aujourd'hui, la transformation du bâti,
01:23:05 il ne permet pas de contribuer à des financements d'équipement.
01:23:07 Donc, il y a des enjeux financiers qui sont aussi à prendre en compte.
01:23:12 Et par ailleurs, comment des subventions,
01:23:15 elles peuvent être réellement fléchées et liées à des projets d'aménagement
01:23:21 qui sont vertueux et qui apportent en termes d'externalité
01:23:26 des éléments positifs en matière de biodiversité,
01:23:29 en matière de carbone, en matière de logement social
01:23:31 pour revenir sur les termes du premier débat
01:23:33 et de pouvoir aussi, quelque part,
01:23:36 faire financer ces investissements et ces externalités
01:23:40 et de manière plus structurée.
01:23:43 Et un petit dernier mot de conclusion de mon propos
01:23:47 et pas du débat,
01:23:51 on l'a énoncé dans le premier livre qu'on a déjà écrit avec Dominique Carré,
01:23:58 qui s'appelle le livre "La fabrique de la ville aujourd'hui"
01:24:00 qu'on a fait il y a cinq ans
01:24:02 et sur lequel on a essayé de regrouper des témoignages
01:24:04 pour montrer que la ville était une œuvre collective.
01:24:06 C'est un mot que Jean-Louis a utilisé tout à l'heure dans son propos.
01:24:10 Donc, il nous semble que finalement, dans les processus de projet,
01:24:14 c'est très difficile d'extraire pourquoi ce point là,
01:24:17 c'est ce que tu as essayé de faire quand tu as parlé de l'Ill5
01:24:20 sur l'Ill5, sur pourquoi on avait mis ce thème de la gestion de l'eau.
01:24:24 Le travail collectif rend finalement les décisions
01:24:28 difficiles à attribuer à quelqu'un.
01:24:30 Et c'est en ce sens qui nous semble que la ville est une œuvre collective.
01:24:34 Et du coup, c'est l'occasion de remercier logiquement
01:24:37 l'ensemble de l'équipe de la fabrique qui contribue à ces projets,
01:24:41 qu'elles soient pour ceux qui sont passés à la fabrique
01:24:44 il y a quelques années ou quelques mois
01:24:46 ou ceux qui sont encore dans l'équipe,
01:24:48 parce que c'est effectivement avec eux qu'on arrive à porter
01:24:52 les projets qui ont été présentés dans le livre
01:24:55 et à mettre en œuvre ces différentes opérations.
01:24:59 Peut-être que j'aimerais bien t'entendre, Martin,
01:25:15 si tu veux bien venir jusqu'à nous.
01:25:18 En particulier sur cette question du public et du privé.
01:25:22 À partir du moment où il y a marqué en titre ici
01:25:25 "plus proche", enfin "plus loin, plus proche",
01:25:29 et qu'on est d'accord qu'il faut ajouter à "plus loin, plus proche"...
01:25:33 Qu'est-ce que j'ai marqué ? Je n'ai pas mes lunettes.
01:25:36 "Plus ferme, plus souple".
01:25:39 Aussi. Et peut-être aussi "plus résolu et plus délicat".
01:25:46 Je trouve que c'est...
01:25:48 Ou encore "plus public, mais plus coopératif".
01:25:52 Je me suis simplement permis de dire que,
01:25:55 puisqu'on était dans la dialectique
01:25:57 et qu'on était dans la recherche de ces compromis,
01:26:00 il y en a un ici, et qu'on n'est plus dans le titre.
01:26:04 Non, non, pas dans la liste des autres.
01:26:08 Il me semble qu'on peut aussi continuer à construire
01:26:11 ce compromis avec les acteurs privés.
01:26:13 Ce que Guillaume vient de dire en disant
01:26:15 qu'il n'est pas question de ne pas le faire, bien entendu.
01:26:18 Et donc, voilà, on sentait à un moment donné,
01:26:22 peut-être dans le propos, mais je ne sais pas ce qu'en pense la salle,
01:26:24 que cette invocation à pouvoir se réindosser
01:26:28 à l'exercice salvateur de la planification
01:26:31 pouvait éventuellement nous faire regarder
01:26:33 un petit peu trop dans le rétroviseur.
01:26:35 C'était une façon de vous alerter sur le fait que,
01:26:39 dans ces conditions, il va falloir la réenchanter.
01:26:42 Comment c'était ? L'ardente obligation
01:26:44 qui est devenue quand même dans la plupart des exercices
01:26:47 une très pesante obligation.
01:26:49 Donc, si on veut la réinvestir
01:26:52 avec toutes les dialectiques que vous avez évoquées.
01:26:57 Oui, d'accord, bien sûr.
01:26:59 Le privé, il fera comme d'habitude.
01:27:01 Il va sentir le vent et puis il va sans doute sentir
01:27:03 à un moment donné qu'il faut qu'il suive et qu'il s'inscrive là dedans.
01:27:06 Je trouve que la condition majeure, c'est que ça,
01:27:09 je ne vais pas me répéter, mais c'est que ça réinterpelle
01:27:12 la capacité politique à le faire,
01:27:14 parce que dans l'état actuel des choses,
01:27:15 il y a comme une crise des ciseaux entre la volonté de redonner
01:27:20 du primat à la puissance politique et les constats
01:27:22 que nous avons fait tout à l'heure sur les évolutions récentes.
01:27:25 Il ne s'agit pas de se désespérer des élus.
01:27:26 Ce n'est pas le sujet.
01:27:28 Les élus ne sont pas fondamentalement le sujet.
01:27:30 C'est la culture politique de notre société qui est en jeu.
01:27:33 Et si elle tourne le dos aux organisations politiques
01:27:36 dont nous avons besoin, comme nous avons dit Jean-Louis,
01:27:39 vous me rappelez cette phrase tout à l'heure,
01:27:41 ça consiste à confier les clés du camion à des gens
01:27:46 qui ne savent pas conduire, ce qui, évidemment, est dangereux.
01:27:50 Je n'ai pas répondu au privé.
01:27:52 Merci, Baptiste.
01:27:53 Philippe Bonfanti, Agence Champs-Libres.
01:27:59 Deux petites questions ou interrogations.
01:28:02 La planification du RAP de la ville,
01:28:04 normalement, c'était les objectifs des Scots.
01:28:06 Or, on assistait à un grand fiasco,
01:28:09 qui était quand même les grands moments
01:28:12 de la mise en place d'une stratégie territoriale
01:28:15 à grande échelle.
01:28:16 Donc là, est-ce qu'on peut remettre ça un peu sur la table
01:28:20 et se poser la question, est-ce qu'il faut réenchanter les Scots
01:28:23 ou inventer autre chose dans la planification ?
01:28:25 Et deuxièmement, dans une gestion, finalement,
01:28:27 de l'intervention publique,
01:28:29 qui est dominée par l'appel à projets,
01:28:33 comment on fait pour pouvoir financer
01:28:36 ces déficits d'opération
01:28:38 dans lesquels l'écologie devrait retrouver
01:28:41 une place primordiale dans la conception ?
01:28:46 Bonsoir à toutes et tous.
01:28:47 Adrien Pétiot, je suis diplômé de Pierre-Emmerich-Fris,
01:28:50 donc en mécanique.
01:28:51 Il y a une grande distance, je pense,
01:28:53 avec l'architecture et l'urbanisme.
01:28:55 Une question un peu peut-être osée.
01:28:58 On parlait de mixité territoriale, de ségrégation.
01:29:03 Est-ce que le domaine de l'architecture et de l'urbanisme
01:29:05 en tant que discipline peut être également
01:29:08 d'un point de vue des études
01:29:09 et d'un point de vue également du langage
01:29:14 une première ségrégation dans ce qui va être justement
01:29:17 les personnes qui vont être décisionnaires
01:29:19 et qui vont constituer le territoire et les politiques ?
01:29:22 Je me permets cette question puisque je vois que l'assistance,
01:29:26 disons, est assez différente de la construction
01:29:28 que moi, je me fais du territoire
01:29:30 qu'on appelle le neuf-rois où j'ai grandi.
01:29:32 Donc voilà, c'était ma question.
01:29:33 Simon René, bureau d'études Orgeco.
01:29:35 Je voulais interpeller aussi bien Emmanuel Kos que Martin Vannier,
01:29:40 puisque ça fait quand même des années qu'on a essayé d'adapter
01:29:44 le système politique aux agglomérations, voire aux métropoles.
01:29:49 Et force est de constater,
01:29:51 je prends les exemples de Marseille et Paris, un échec complet.
01:29:54 Et là, c'est bien la politique,
01:29:58 puisqu'on a créé des lois, des dispositifs.
01:30:00 Ce sont les élus, au moins de ces agglomérations,
01:30:03 qui ont vidé de tout contenu le sens même
01:30:08 des lois et des dispositifs qui ont été mis en place.
01:30:11 Marseille, là, c'est le pompon,
01:30:13 mais la métropole de Paris et l'agglomération parisienne, c'est pareil.
01:30:19 Donc, Emmanuel Kos, vous êtes conseillère régionale,
01:30:22 vous avez été ministre,
01:30:24 vous avez vu de l'intérieur le fonctionnement de l'État.
01:30:28 Donc là, c'est quand même un vrai problème,
01:30:29 puisque je ne serai pas perdant 20 ans avec Pierre Mansart
01:30:32 pour construire cette métropole.
01:30:34 Elle a fini par émerger, elle est ce qu'elle est.
01:30:36 Mais ce qui est le plus fascinant, c'est de voir combien,
01:30:39 à partir d'un outil qui avait pour but,
01:30:43 principalement, d'établir aussi cette forme de solidarité,
01:30:47 les élus en charge l'ont systématiquement vidé de tout contenu.
01:30:52 Vous avez parlé tout à l'heure, Emmanuel, de l'échec de Marseille.
01:30:54 J'y travaille en ce moment.
01:30:56 C'est une caricature absolue de voir comment une réglementation
01:31:01 construite dans un certain objectif
01:31:04 a été systématiquement dévoyée.
01:31:07 Donc, on est un peu dans une impasse,
01:31:09 parce qu'on est tous là à avoir un espèce d'appel aux politiques.
01:31:14 Mais quand le politique prend les choses en main
01:31:18 pour faire juste le contraire de ce pour quoi ça a été pensé,
01:31:22 notre affaire tourne un peu en rond.
01:31:25 Et c'est vrai que le retour actuel au communalisme exacerbé,
01:31:30 c'est un peu comme un retour à la vie,
01:31:32 mais c'est un retour à la vie,
01:31:34 mais c'est un retour à la vie,
01:31:35 mais c'est un retour à la vie,
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01:43:33 mais c'est un retour à la vie,
01:43:43 mais c'est un retour à la vie,
01:43:53 mais c'est un retour à la vie,
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01:44:13 mais c'est un retour à la vie,