• l’année dernière
“Nature en ville”, “trames vertes et bleues”, “bas carbone”, “construction biosourcée”, “modes de transport doux”, "agriculture urbaine", "biorégionalisme"… Entre urbanisme et écologie, les initiatives et les approches se multiplient, dans une effervescence qui pose la question de leurs priorités et de leur mise en cohérence – pour plus d'effets. La question de la formation du plus large public à l’écologie urbaine devient cruciale.

Comment s'y retrouver dans la prolifération des propositions, des sujets, des échelles ? De quels types de boussoles disposons-nous pour envisager la mutation écologique des villes ? Quelles sont les pédagogies, les outils, les valeurs qui permettraient de créer une culture écologique, partagée par un ensemble de professionnels, pour penser et agir en commun ? Quelle formation et selon quels contenus, si nous voulons nous diriger vers la ville écologique ? Cette soirée sera l’occasion de partager un double regard pratique et théorique sur ces enjeux.
Une table ronde proposée à l'occasion du lancement du projet européen de formation en écologie urbaine "Villes terrestres".


Avec
Baptiste Lanaspeze, fondateur des éditions Wildproject
Paul-Hervé Lavessière, cofondateurs de l'Agence des Sentiers Métropolitains
Marion Schnorf, Directrice de la Cité de l'agriculture
Clara Simay, architecte
Philippe Simay, philosophe
Transcription
00:00:00 Bonsoir, bienvenue. Bienvenue au pavillon de l'Arsenal. Je suis Marion Valère, directrice
00:00:16 du pavillon de l'Arsenal et très heureuse de vous accueillir ce soir pour cette conférence.
00:00:20 Comment se former à la ville écologique de demain avec quatre intervenantes et intervenants
00:00:27 Philippe Simet, philosophe, Clara Simet, architecte de la SCOPE Grand 8, Baptiste Lanaspez, éditeur
00:00:36 et Paul-Hervé Lavessière, cofondateur des Sentiers métropolitains. On avait d'ailleurs
00:00:43 eu une exposition au pavillon de l'Arsenal sur les Sentiers métropolitains. Vous avez peut-être
00:00:47 eu l'occasion de la voir, qui retraçait l'histoire des Sentiers métropolitains de Marseille au Grand
00:00:54 Paris en passant par d'autres lieux. Donc, merci beaucoup à nos quatre intervenants.
00:00:59 L'idée de cette conférence, comment se former à la ville écologique de demain, est née
00:01:05 en lien avec un programme européen qui est mené, que vous avez lancé. Et vous l'expliquerez
00:01:13 mieux que moi sur la question, en fait, tout simplement, comme l'indique le titre, de comment
00:01:17 est ce qu'on se forme aujourd'hui à la ville écologique, puisque finalement, dans le milieu
00:01:22 de l'urbanisme, on en parle beaucoup, mais il y a un enjeu de formation grand public sur
00:01:27 ces sujets là. Et puis surtout de se dire finalement, parmi tous les mots qu'on entend,
00:01:33 comment aussi savoir quels sont les bons choix à faire? Je sais que vous avez aussi réalisé
00:01:38 un petit jeu de cartes où on doit s'imaginer maire et où on a plein d'options. Et je pense
00:01:44 qu'on est tous confrontés à ces questions là dans nos quotidiens. Se dire finalement
00:01:48 que ça se pose sur le sujet des déchets, de l'eau, de la construction. Quels sont
00:01:52 aujourd'hui les réels bons choix pour la ville écologique? Donc, c'est ce que vous
00:01:56 tentez de faire. Et je pense que l'expertise ce soir de Philippe Simet et Clara Simet,
00:02:03 qui réfléchissent à ces questions, qui ont aussi travaillé sur une école du réemploi
00:02:07 à Paris et qui ont l'expérience de la construction via, par exemple, le projet de la ferme du
00:02:13 rail dans le 19e arrondissement que je vous recommande. Si vous ne connaissez pas qu'il
00:02:17 y a un magnifique projet en matériaux locaux avec une ferme, etc. Je pense que votre éclairage
00:02:23 sera très utile. Voilà un mot pour vous dire qu'en lien avec ces sujets d'écologie,
00:02:30 nous avons actuellement une exposition au premier étage qui s'appelle Paris animal
00:02:34 et qui traite de la présence animale à Paris dans l'histoire et à l'avenir. Et c'est
00:02:40 vrai que le sujet des animaux, on en parle parfois aussi moins parmi les sujets écologiques
00:02:45 que d'autres. C'est un sujet essentiel. Et puis, au deuxième étage, nous nous inaugurons
00:02:52 mardi soir une exposition espace ferroviaire. Vous êtes toutes et tous les bienvenus sur
00:02:58 trois quartiers en mutation dans Paris. Donc le quartier Messagerie dans le 12e, le quartier
00:03:03 Jardin des Mécano, qu'on appelle aussi Ordinaire dans le 18e et le quartier Hébert également
00:03:09 dans le 18e. Donc voilà, n'hésitez pas à venir visiter ces expositions. Merci beaucoup
00:03:16 et je laisse la parole à nos intervenants. Merci. La petite particularité de la soirée,
00:03:21 c'est qu'elle est constituée d'un assemblage de deux tandems. C'est effectivement la soirée
00:03:27 de lancement de ce projet européen qui s'appelle Ville terrestre, qui est un projet de formation
00:03:31 à l'écologie urbaine ou à la ville écologique. On va parler de toutes ces nuances là tout
00:03:35 à l'heure, mais on s'est trouvé tellement de points de convergence avec ONS et l'équipe
00:03:41 de ce programme Ville terrestre, avec le travail réalisé par Clara et Philippe Simet, qu'on
00:03:47 a eu envie de montrer cette convergence, d'en témoigner publiquement, de se montrer ensemble
00:03:53 aussi parce que ce qu'on fait converge, mais n'est pas identique. Il y a plein de petites
00:03:57 nuances, mais on trouve que ça va tellement dans un sens. En fait, cette convergence nous
00:04:02 conforte beaucoup dans le projet qu'on a monté, nous. Et donc, on avait vraiment envie que
00:04:06 ces deux choses se rejoignent là. Donc, les villes terrestres d'un côté, l'école du
00:04:10 réemploi de l'autre, deux projets encore un peu balbutiant en train de se construire.
00:04:14 Mais on avait envie de se... Voilà, c'est la petite complexité juste à comprendre.
00:04:18 Il y a aussi un truc à signaler, c'est qu'on devait être avec notre collègue Marion Schnorf,
00:04:24 qui est une entrepreneuse assez extraordinaire, qui a monté à Marseille quelque chose qui
00:04:28 s'appelle la cité de l'agriculture, qui met en oeuvre de façon concrète dans le territoire
00:04:34 marseillais, plein d'outils pour faire en sorte que Marseille devienne une ville plus
00:04:39 autonome sur le plan alimentaire. C'est une association qui a 25 salariés en cinq ans.
00:04:43 C'est une grande belle aventure. Mais Marion est en congé maladie ce mois-ci, donc elle
00:04:50 ne peut pas être avec nous, mais elle sera avec nous en pensée. Et voilà. Et donc, sur
00:04:56 la question de le titre de cette rencontre, on le doit à Philippe, qui nous avait dit
00:05:02 mais attendez, attendez, avant de débouler avec des programmes de formation, il faut
00:05:06 faire un petit pas de côté. Il est philosophe, comme moi, de formation. On aime bien les
00:05:09 pas de côté. Et donc, il m'avait dit mais la question de la formation à l'écologie
00:05:14 urbaine, il faut poser le cadre. Tout ça ne va pas de soi. Ce n'est pas si simple.
00:05:21 Et il y a eu aussi quelque chose, c'est que notre projet à nous des villes terrestres,
00:05:26 il est vraiment tourné vers les acteurs de la fabrique de la ville et au pavillon de
00:05:29 l'Arsenal, dans la façon dont le pavillon nous a reçus, ils ont eu tendance à dire
00:05:32 mais c'est plutôt pour le grand public. Alors, il y a un petit flottement ici. C'est pour
00:05:36 tout le monde, on va dire. Mais c'est vrai que pour nous, la question ne concerne pas
00:05:41 que le grand public. En tout cas, c'est clair. Et donc, je vais laisser la parole à Philippe
00:05:46 pour problématiser un petit peu cette rencontre. Bonsoir à toutes et à tous. Voilà très
00:05:51 heureux d'être là ce soir parmi vous pour discuter de cette question de la formation
00:05:58 et puis j'espère qu'à la fin de nos interventions, on aura un temps d'échange, de réflexion
00:06:07 en commun. Je crois que cette question de la formation, elle est vraiment centrale
00:06:12 aujourd'hui. Comme vous le savez peut-être, les écoles d'architecture sont en grève
00:06:18 depuis plusieurs semaines. C'est un mouvement qui est porté par les étudiantes et les
00:06:24 étudiants pour des questions de budget bien évidemment, mais aussi pour des questions
00:06:29 de contenu d'enseignement et de modalité pédagogique. Et aujourd'hui, tous ces jeunes
00:06:40 étudiants ont le sentiment de passer à côté du rendez-vous de leur génération qui est
00:06:46 le rendez-vous écologique. Et en fait, ce qui se passe dans les écoles, c'est une formidable
00:06:50 caisse de résonance qui permet aussi d'éclairer la situation des jeunes diplômés qui se
00:06:57 reconnaissent de moins en moins dans le modèle des agences et dans le travail dans les agences.
00:07:03 Et une partie de ces jeunes diplômés ne se dirigent pas vers la maîtrise d'œuvre,
00:07:08 ne sont pas architectes au sens classique du terme. Est-ce un bien, est-ce un mal, on
00:07:12 peut en discuter, mais en tout cas, la façon de construire, l'idée même de construction
00:07:21 ne fait plus consensus. Quant aux architectes plus âgés, et qui voudraient s'engager
00:07:29 ou qui se sont engagés dans une architecture entre guillemets écologique, eh bien, ils
00:07:34 mesurent chaque jour la position minoritaire qui est la leur et la difficulté d'infléchir
00:07:41 des rapports de force qui concourent à la production du bâti. Et donc, on est dans
00:07:53 un moment de questionnement où on s'interroge sur le bien fondé de nos pratiques, la légitimité
00:08:03 de notre discipline, ou des disciplines de l'architecture et de l'urbanisme, et peut-être
00:08:10 bien parfois aussi de notre utilité sociale. C'est un moment de questionnement et de doute
00:08:15 qui parfois est joyeux, qui souvent, moi je le constate, est quand même douloureux.
00:08:21 Je crois que collectivement, en fait, on voit bien que les façons de penser et de faire
00:08:32 hériter de la révolution industrielle sont désormais caduques, qu'elles ont perdu
00:08:38 leur légitimité aux yeux de la société civile de plus en plus, qui n'a pas une image
00:08:44 positive du monde de l'architecture, et parfois aussi à nos propres yeux. Donc on voit cette
00:08:50 période qui semble se fermer derrière nous, mais on ne sait pas tout à fait, on a du
00:08:58 mal à identifier le monde qui vient, et donc on est dans une situation d'entre deux ou
00:09:05 de bascule qui est à la fois, qui est un peu fébrile, à la fois angoissante et excitante.
00:09:15 Et donc voilà, dans cette interrègne, pour reprendre un terme à la Gramsci, mais lui
00:09:21 disait que dans l'interrègne surgissaient des phénomènes morbides et pathologiques,
00:09:26 là je crois que c'est plutôt le contraire, dans cet entre deux, entre un monde qui est
00:09:30 en train de disparaître et puis un autre qui n'est pas encore né, on voit justement
00:09:36 cette question de la formation et des tentatives pour proposer des offres de formation se multiplier,
00:09:44 et en fait elles sont assez nombreuses et diverses, parce que je crois que finalement
00:09:51 chacune, chacun d'entre nous, on se sent mal préparé, mal équipé, mal outillé
00:10:01 pour opérer la bifurcation écologique des métiers de l'architecture, mais plus largement
00:10:08 de la société. Et donc voilà, si on regarde les offres de formation, je ne vais pas, on
00:10:13 n'a pas le temps, mais elles sont vraiment variées, il y a bien sûr une offre de formation
00:10:18 à l'intérieur des écoles d'architecture, et donc il y a des nouveaux contenus pédagogiques
00:10:25 qui sont apparus ces dernières années, puis qui ont été recensés, et puis il y a bien
00:10:30 évidemment une offre de formation conséquente dans le monde professionnel, qui porte plutôt
00:10:37 sur des savoirs pratiques, la construction en terre, la construction en paille, le réemploi,
00:10:45 d'autres types de formation professionnalisante. Et puis enfin il y a des formations pour un
00:10:55 plus large public, qui parfois sont très ouvertes, et voilà, ça va être l'occasion
00:11:01 aussi d'en parler ce soir, et puis qui d'autres fois s'adressent à un public de décideurs
00:11:10 ou d'acteurs plus restreints, mais pas exclusivement des architectes ou des urbanistes, et donc
00:11:16 c'est des formations qui sont beaucoup plus générales sur des workshops de la transition
00:11:23 écologique, des workshops de la ville résiliente, etc. Si on prend toutes ces formations ensemble,
00:11:29 on peut voir qu'en fait elles portent sur des contenus qui sont très différents, certains
00:11:35 sont très opérationnels et d'autres sont beaucoup plus spéculatifs, elles portent
00:11:41 aussi sur des modalités qui sont très différentes, certaines renvoient d'abord à un apprentissage
00:11:51 de savoir, de contenu proprement intellectuel, d'idées, et d'autres sont plus liées au
00:11:58 faire, le learning by doing, qui sont aussi d'autres façons d'apprendre intéressantes
00:12:07 qu'on essaye de développer dans les écoles, mais bon, ce que je trouve intéressant c'est
00:12:16 que toutes ces formations finalement nous interrogent sur ce qu'est la bonne formation pour aller
00:12:25 vers cette bifurcation écologique, et la formation c'est toujours trois choses, c'est
00:12:30 si on forme quelqu'un à quelque chose pour quelque chose, le philosophe John Dewey dit
00:12:36 que la formation c'est à la fois l'éducation, il dit ça dans "Démocratie et éducation"
00:12:40 en 1916, et puis après dans "Expérience et éducation" en 1936, excusez-moi, je ne
00:12:46 suis pas sûr de mes dates, mais voilà, il dit que c'est toujours des questions de développement,
00:12:51 de culture, et puis d'utilité sociale, les questions de formation. Donc bien évidemment
00:12:56 si vous avez une formation qui s'adresse à un large public, ou une formation qui est
00:13:00 plus professionnalisante, elle ne priorise pas ses entrées de la même manière. Alors,
00:13:08 quand on les met comme ça les unes à côté des autres, je trouve que ça pose une question,
00:13:12 c'est-à-dire qu'à la fois il y a un foisonnement qui est super enthousiasmant, et en même
00:13:17 temps il y a une parcellarisation, une espèce d'émiettement, et qui risque de poser problème,
00:13:24 parce que ok on se forme, mais on se forme pourquoi, et comment est-ce qu'on va pouvoir
00:13:31 travailler ensemble. Et donc je crois que ce dont nous avons besoin aujourd'hui, c'est
00:13:37 de réfléchir à un espace qu'on aurait en commun, quel est l'espace où on vient partager
00:13:42 en fait nos problématiques professionnelles et citoyennes, cet espace n'existe pas vraiment,
00:13:49 donc il y a une concurrence ou complémentarité possible des offres de formation, mais qui
00:13:57 reste encore très largement à opérer, et on a besoin aussi d'un cadre qui est un cadre
00:14:06 commun. Et ça, ça pose de nouvelles questions, parce que quand vous regardez aujourd'hui
00:14:14 les pensées de l'écologie, vous voyez qu'elles se sont cristallisées autour de grandes notions
00:14:23 qui veulent être des paradigmes, c'est-à-dire qui veulent subsumer, qui veulent réintégrer
00:14:27 toutes les autres questions possibles, vous avez l'anthropocène, et à partir de l'anthropocène
00:14:32 on pourrait tout expliquer, vous avez les pensées de l'effondrement, vous avez la question
00:14:39 de la matière, la question du vivant, voilà. Et donc quel paradigme choisir ? Et là encore
00:14:47 on se retrouve un petit peu perdus, on ne sait pas vers lequel on devrait se tourner,
00:14:54 et donc bien évidemment, chacune ou chacun d'entre nous avons des affinités qui intellectuellement
00:15:02 ou de façon pratique nous inscrivent plutôt dans tel ou tel paradigme. Mais le problème,
00:15:08 c'est le problème de l'horizon commun, c'est-à-dire que si on veut opérer une transformation
00:15:12 qui est une transformation collective, il faut pouvoir se parler, il faut pouvoir se
00:15:16 comprendre, donc on a besoin d'une culture commune. Et aujourd'hui, même s'il y a énormément
00:15:22 de choses qui sont en train de se faire, je trouve qu'on travaille encore beaucoup en
00:15:25 silo, c'est-à-dire qu'il y a plein de spécialistes de l'écologie, parce qu'il y a plein d'écologies
00:15:29 différentes et ce sont des gens qui se parlent peu ou qui ne se comprennent pas toujours
00:15:35 très bien. Et même dans la culture du projet, en fait vous trouvez des visions de l'écologie
00:15:41 qui ne sont pas tout à fait compatibles entre elles. Alors qu'est-ce qu'il faut faire ? Est-ce
00:15:46 qu'il faut faire comme ce qu'ont fait à un moment donné les sciences humaines et sociales
00:15:50 qui travaillaient tous sur des questions écologiques et qu'ont créé la grande bannière des humanités
00:15:57 environnementales en disant "ben voilà, on a un grand chapeau qui nous rassemble tous"
00:16:02 ou est-ce qu'il faut trouver d'autres formes d'assemblage ? Je crois que c'est une des
00:16:09 questions qu'on peut se poser aujourd'hui et donc moi je la reformulerais comme ça,
00:16:16 quel horizon, peut-être au pluriel, pour les pensées, quel horizon commun qui peut
00:16:24 naître de la fusion de plusieurs horizons, mais voilà, comment on s'achemine vers des
00:16:28 manières de penser et de faire qui reposent sur une synergie, qui vont nous permettre
00:16:34 de transformer les choses et surtout les rapports de force qui gouvernent la production du bâti
00:16:41 aujourd'hui. Donc si on n'est pas capable de s'unir, on risque pas beaucoup de les changer
00:16:46 vu la position subalterne dans laquelle les acteurs de l'écologie architecturale et urbaine
00:16:53 se trouvent aujourd'hui. On voulait partager avec vous cette vaste question parce que ça
00:16:58 nous semblait une belle et grande question, mais évidemment on va pas y répondre. Enfin
00:17:02 on va y répondre à travers deux projets, donc c'est Ville Terrestre d'un côté et
00:17:06 l'école du réemploi à travers la maison des canaux de l'autre, mais donc c'était
00:17:12 important que la question soit ouverte. Donc on va commencer par ce moment Ville Terrestre
00:17:18 avec Paul Hervé avant de laisser la parole à Philippe et Clara. Alors on va commencer
00:17:21 par un petit préalable justement qui est un préalable de cadrage de concept. Et donc
00:17:28 là faut juste que je me présente une seconde en disant que je dirige depuis 15 ans une
00:17:31 maison d'édition qui est spécialisée en écologie qui s'appelle donc Wild Project.
00:17:35 Et au départ c'est ça mon ancrage professionnel, donc c'est de là que je viens et ça me permettra
00:17:42 de gagner votre pardon et votre mensuétude sur mes lacunes en culture architecturale
00:17:48 et urbaine parce que ça je l'ai appris sur le tas ensuite. Donc le projet Ville Terrestre
00:17:53 qu'on va vous présenter est financé par un programme européen qui s'appelle Erasmus
00:17:57 Plus, ça n'est pas le programme Erasmus qu'on connait, qui a fait des films, où on se rend
00:18:01 compte quand on est jeune, c'est un programme qui finance l'innovation dans l'éducation
00:18:05 des adultes. L'éducation des adultes, je voulais en dire juste un mot parce que c'était
00:18:08 pas une notion dont j'étais familier avant de faire des projets Erasmus Plus avec Paul
00:18:13 Hervé. L'éducation des adultes c'est un truc assez chouette en fait parce qu'on appelle
00:18:16 aussi ça l'andragogie, même si Andros c'est l'homme masculin, enfin bref il y a un problème
00:18:21 étymologique là, mais c'est tout ce qu'on apprend au cours de sa vie en dehors de l'école
00:18:27 et donc Dieu sait qu'on apprend des choses heureusement une fois qu'on quitte l'école.
00:18:30 Et donc c'est ce qu'on apprend plus en tant qu'élève par un prof, c'est ce qu'on apprend
00:18:33 entre adultes ou d'ailleurs en adulte on apprend avec des enfants, tout ce qu'on apprend
00:18:38 en dehors de l'école. Donc il y a une forte dimension horizontale, une dimension aussi
00:18:41 d'auto-formation et donc nous quand on mène des projets Erasmus Plus avec 5 partenaires
00:18:46 en Europe, c'est évidemment aussi pour nous des projets d'auto-formation, donc on se lance
00:18:50 dans des trucs où on n'a pas la réponse avant, quand on fait un programme ville terrestre
00:18:54 en disant on va faire un programme de formation à la ville écologique de demain, évidemment
00:18:58 en fait c'est précisément pour ça qu'il faut un financement européen et deux ans
00:19:02 de travail et cinq partenaires, c'est parce qu'on va élaborer ces contenus. Donc c'est
00:19:06 pour dire que ce qu'on va partager ce soir avec vous, pour l'essentiel, c'est des choses
00:19:10 qu'on a appris pendant l'élaboration de ce programme. Et un point important aussi à
00:19:14 dire c'est que ce que finance l'Europe dans ce genre de programme, c'est un contenu intellectuel
00:19:19 qui prend dans notre cas la forme d'un manuel qui est dans les mains de Marion, une maquette,
00:19:23 et d'un jeu et qu'ensuite ce manuel et ce jeu sont donnés au monde, c'est le but de
00:19:28 cette soirée aussi, de le donner au monde et ça peut se retrouver ensuite pour nourrir,
00:19:32 on peut faire des conférences dans des écoles, on peut faire des workshops ailleurs, on
00:19:36 peut faire des trucs d'éducation populaire, ces contenus sont donnés au monde, publiquement,
00:19:40 gratuitement sur des sites qu'on vous indiquera tout à l'heure. Et c'est une petite phrase
00:19:47 de Paulo Freire qui est un grand pédagogue brésilien, un des fondateurs de ce qu'on
00:19:51 appelle les pédagogies de l'émancipation, beaucoup travaillé sur les problèmes d'alphabétisation,
00:19:55 et il y a cette phrase qu'on trouve trop belle avec Paul et qui guide beaucoup à la
00:19:59 fois ce qu'on fait dans les sentiers métropolitains et dans ces programmes européens, cette phrase
00:20:03 qui dit que « Nul n'éduque autrui » dans un rapport descendant, que personne en même
00:20:07 temps ne s'éduque non plus tout seul, mais que les gens s'éduquent les uns les autres
00:20:11 par l'intermédiaire du monde. Et c'est juste que philosophiquement ça résume bien
00:20:15 je trouve l'esprit dans lequel on développe ces projets d'éducation des adultes, dans
00:20:19 lesquels on commence donc par s'éduquer nous-mêmes. Alors là j'ai fait une série
00:20:25 de slides qui voulaient exprimer un sentiment diffus que j'avais en tant qu'acteur depuis
00:20:31 une dizaine d'années. Moi donc je viens de l'écologie, on va voir ce que je mets
00:20:35 derrière ces mots, mais je viens de l'écologie et je traîne depuis une dizaine, quinzaine
00:20:38 d'années avec des gens qui viennent plutôt de ce qu'on appelle la fabrique de la ville,
00:20:41 je ne sais pas si l'expression est parfaitement convenable, mais bon, voilà maîtrise d'oeuvre,
00:20:45 maîtrise d'ouvrage, technicien, élu architecte, urbaniste, paysagiste, usager, j'en sais
00:20:49 rien. Et j'ai le sentiment depuis longtemps qu'entre ces deux domaines professionnels
00:20:56 ou ces deux domaines de compétences, l'intersection est quand même minuscule. Alors elle existe,
00:21:01 il y a des gens qui connaissent un peu les deux, mais ceux qui ont vraiment une double
00:21:04 culture, qui connaissent vraiment comment la ville se fabrique et par ailleurs qui connaissent
00:21:08 vraiment bien l'écologie sont rarissimes. Et donc ça c'est un peu la situation initiale.
00:21:14 Alors, j'entends vos questions, vos cris, mais que veut-il dire par écologie, fabriquer
00:21:23 la ville on a compris, mais par l'écologie, j'entends pas mal de choses, mais j'entends
00:21:27 un truc qui mélange l'écologie scientifique, c'est quand même une base, comprendre qu'est-ce
00:21:30 que c'est qu'un écosystème, un habitat, une niche, une chaîne alimentaire, savoir
00:21:33 ce que c'est, où est la tête, où est la queue, voilà comment ça marche. Mais aussi
00:21:38 l'écologie politique, ce qu'on appelle les humanités environnementales, les humanités
00:21:42 écologiques, les pensées de l'écologie, ça c'est le cœur de ce qu'on fait nous
00:21:44 aux éditions Wild Project et dans d'autres maisons d'édition et qui prend tellement
00:21:47 de place aujourd'hui avec quelques grandes figures qu'on voit souvent dans les médias.
00:21:50 Mais derrière ces grandes figures il y a beaucoup beaucoup de penseurs et de penseuses.
00:21:53 Et donc voilà, entre ces deux espaces, il y a un petit problème, vous voyez bien que
00:21:57 si on est dans un monde où les écolos connaissent rien à la ville et les gens qui font la ville
00:22:00 n'ont pas une grosse culture en écologie, vous voyez bien qu'on a un souci, ça va
00:22:04 pas. Et au départ quand on s'est rencontré avec Paul Hervé il y a 10 ans, au moment
00:22:09 du lancement du GR 2013, ici même à peu près, je me suis mis en vert dans le rond
00:22:13 écologie et Paul en noir dans le rond fabrique de la ville parce qu'à l'époque on avait
00:22:17 des points de vue assez unilatéraux. Moi je connaissais bien l'écologie, pas du tout
00:22:20 la ville et lui inversement, vous avez compris. Et donc, les phrases que j'ai mis en haut
00:22:24 à gauche c'est pas les phrases qu'on disait nous mais c'est des phrases un peu emblématiques
00:22:27 de ce qu'on pourrait appeler l'unilatéralisme de ces deux sphères. Dans le monde de l'écologie
00:22:31 j'entends souvent "ouais faut en finir avec les métropoles et tout, faut désurbaniser
00:22:35 le monde et tout ça, machin, ok, d'accord, on fait comment, on sait pas". Et du côté
00:22:39 de la fabrique de la ville il y a souvent aussi des phrases assez véhémentes. Alors
00:22:43 à l'époque je me souviens que Paul Hervé il disait "il faut bien loger les gens quand
00:22:46 même". Et donc il y a un peu cette espèce d'ignorance mutuelle. Et donc ce projet ville
00:22:52 terrestre, il voulait remplir un petit peu ce... il voulait essayer d'élargir un peu
00:22:56 les murs, de faire en sorte que... donc c'est un projet de formation qui s'adresse à la
00:23:00 fois aux gens qui viennent de l'écologie et qui veulent mieux comprendre comment la
00:23:03 ville se fabrique, et les gens qui sont calés dans la fabrique de la ville mais qui ont
00:23:06 pas une méga culture en écologie. Et je précise, c'est pas parce qu'on a lu Bruno
00:23:09 Latour qu'on connaît l'écologie politique. Parce que souvent il y a ce côté là aussi,
00:23:12 on a lu un truc et puis on se dit "bon, l'écologie c'est un vaste domaine". Et donc nous notre
00:23:16 horizon, ce qu'on souhaite, ce pour quoi on travaille, ce vers quoi on travaille, c'est
00:23:22 l'idée que ces deux cercles, à terme, n'en fassent qu'un, parce qu'il n'est pas possible
00:23:26 qu'ils n'en fassent pas un à un moment ou à un autre, et que donc l'écologie urbaine
00:23:30 ou la ville écologique, on reviendra sur ces deux termes, soit un domaine de compétence
00:23:35 en soi et qu'il n'y ait plus d'urbanistes qui ne connaisseraient pas bien l'écologie
00:23:39 et qu'il n'y ait plus d'écologistes qui n'aient pas compris que la ville était un
00:23:43 enjeu majeur. Voilà, donc je vous la fais courte sans raconter notre vie, mais c'est
00:23:48 pour que vous compreniez qui vous parle, donc Paul Hervé qui était en noir, moi qui étais
00:23:51 en vert, notre conversation, dialogue, dix ans de dialogue, on ne se comprend pas, on
00:23:54 se parle. J'avais écrit un livre sur l'écologie urbaine en 2012 chez Actes Sud, le GR 2013,
00:23:58 Paul Hervé fait la révolution de Paris en 2014, on crée les sentiers métropolitains,
00:24:02 on marche et à force de marcher, dix ans de marche, dix ans de conversation, on finit
00:24:05 par se croiser, croiser du savoir. Donc cet urbanisme devient de plus en plus calé en
00:24:11 écologie, et moi qui viens de l'écologie, je commence à mieux comprendre comment se
00:24:14 fabrique la ville. Et c'est en 2020, lors du Covid, qu'on se lance dans l'écriture
00:24:17 de ce projet. Alors ça c'est un truc super important que beaucoup d'entre vous doivent
00:24:21 connaître. En 2016, le ministère de la culture a créé donc cet organisme qui s'appelle
00:24:27 Ensa Eco, qui veut favoriser la transition écologique dans les écoles d'archi, en
00:24:34 Ile-de-France je crois au départ, je ne sais plus si c'était pour toutes les écoles
00:24:36 d'archi de France ou que l'Ile-de-France, et ils ont fait un inventaire récemment qui
00:24:40 est un très beau travail, je vois bien le genre de travail dont il s'agit parce qu'on
00:24:44 a essayé de faire le même, l'ensemble du supérieur c'était infernal, c'est une
00:24:48 recension exhaustive aujourd'hui dans toutes les écoles d'archi d'Ile-de-France des
00:24:52 cours qui touchent à l'écologie et à la ville. Donc là quelque part ça fait mentir
00:24:56 mon schéma parce qu'il y en a plein, il y a donc 150 pages de relevés de cours en
00:25:00 école d'archi qui touchent à l'écologie et l'urbanisme. Mais quand on regarde un
00:25:06 peu dans le détail, et franchement c'est un très beau travail, très bien fait, contre
00:25:11 lequel je n'ai vraiment aucune objection, simplement il fallait typologiser toutes ces
00:25:16 initiatives de formation, il fallait les classer, et on voit que dans le classement, c'est
00:25:20 touchant parce que je trouve que c'est assez juste, le classement qu'ils ont fait est
00:25:23 assez juste pour classer l'offre de cours, donc il y a un grand 1, enjeu de la transition
00:25:30 écologique et notion clé, un grand 2, ressources et matériaux, un grand 3, énergie et climat,
00:25:35 un grand 4, la biodiversité et le vivant. Donc c'est assez bien classé parce que ça
00:25:40 classe des familles, on voit bien qu'il y a des gens qui sont obsédés ressources,
00:25:42 des gens qui sont vraiment à fond sur le climat, la décarbonation, d'autres qui sont
00:25:45 à fond sur le vivant, ça classe assez bien dans ces familles dont tu parlais tout à
00:25:48 l'heure Philippe, donc c'est un bon classement en ce sens, mais intellectuellement, c'est
00:25:53 un classement qui dit bien l'état d'égarement collectif où on est, parce que comment est-ce
00:25:57 qu'on peut aborder la question du climat indépendamment de celle des ressources, indépendamment
00:26:01 de celle du vivant, comment est-ce qu'on peut avoir une partie transition écologique
00:26:05 qui n'aborde pas les trois autres trucs, enfin, donc on voit bien que là, c'est
00:26:08 pour ça qu'on a appelé cette slide effervescence et dispersion, parce qu'on est dans ce moment
00:26:12 exactement qui illustre ce dont parlait Philippe en intro, qui est voilà, il y a plein de
00:26:17 choses, c'est formidable, c'est chouette, mais si on demandait à chacune de ces personnes
00:26:21 où on va, en quoi consiste la ville écologique, je pense que ce serait un sacrément cacophonique
00:26:25 et un gros pugilat intellectuel. Et donc la question du cadrage global, effectivement
00:26:32 pour nous aussi, était centrale. Alors là je vais faire un truc que j'ai longtemps
00:26:36 hésité à faire, mais si on parle de cadrage global, allons-y. Nous autres, les gens qui
00:26:42 viennent de l'écologie politique, qui baignent depuis 15 ans dans la philosophie de l'écologie,
00:26:45 les pensées de l'écologie, des vieux routiers de l'écologie, on est parfois surpris,
00:26:53 mal à l'aise, un peu gênés par le fait qu'aujourd'hui la lecture de la situation
00:26:59 écologique qui est la nôtre sur Terre soit qualifiée en crise climatique, causée donc
00:27:05 par un excès de CO2, qui entraînera donc la montée des eaux, l'aspiration des océans,
00:27:09 notamment, et pas que, d'autres problèmes en boucle, et que donc il faut que nous unissions
00:27:14 nos forces pour mettre en oeuvre une transition industrielle qui passe par d'une part la
00:27:18 décarbonation, d'autre part sans doute de la géoingénierie à un moment, avec donc
00:27:22 un grand renfort de technologie pour résoudre cette crise climatique. On est là dans ce
00:27:26 qu'on pourrait appeler un peu, je sais pas comment dire, est-ce que c'est le récit
00:27:29 médiatique ou le récit mainstream, mais c'est quelque chose qui nous envahit tous
00:27:33 plus ou moins, à plus ou moins de profondeur, mais on est tous pris dans ce récit là,
00:27:36 où on parle, où la crise écologique, même Greta, je veux dire, elle parle du climat
00:27:41 comme si on parlait de la crise écologique en général. Alors nous autres, les vieux
00:27:45 routiers de l'écologie politique, on dit pas que c'est faux, je le laisse quand même
00:27:48 en gris clair, mais en fait c'est la petite partie d'un truc beaucoup plus large, le
00:27:54 problème auquel on fait face n'est pas celui du, n'est que marginalement celui du
00:27:59 climat, c'est celui de quelque chose qui s'appelle l'extinction, et donc l'extinction
00:28:03 c'est un mot savant pour parler d'un phénomène à échelle de la Terre, mais très brutalement,
00:28:07 très concrètement, si on le prend physiquement, matériellement, ça veut dire de la mort
00:28:10 massive, de la mort à grande échelle, de la destruction des vies par millions des espèces,
00:28:16 des populations et tout, des sols qui sont rendus stériles, des humains qui sont bien
00:28:20 pris dans cet écosystème qui est abîmé, et ça la cause de l'extinction c'est pas
00:28:24 le CO2 du tout, et donc la réponse à l'extinction c'est absolument pas la transition industrielle,
00:28:28 en tout cas c'est pas la décarbonation ni la géoingénierie, et donc ce récit là
00:28:32 il est beaucoup moins présent, alors vous allez me dire il y a parfois des articles
00:28:37 de l'IPBES qui sortent dans le monde où on voit qu'il y a moins d'oiseaux et tout,
00:28:39 ça nous parle, Rachel Carson, Printemps Silencieux, on sait oui mais on parle tous
00:28:42 les jours climat, décarbonation, on parle pas tous les jours de l'extinction et comment
00:28:45 on fait, et donc l'extinction en deux mots c'est quoi, puisque je me suis dit tiens
00:28:51 puisqu'on en parle, je vais en profiter, j'en parle une seconde quand même, alors
00:28:54 là c'est une courbe qui met en parallèle l'extinction et la population humaine, c'est
00:28:59 pas là dessus que je veux insister parce que ça pourrait nous conduire à des conclusions
00:29:02 trop hâtives, c'est pas parce qu'il y a beaucoup d'humains qu'il y a forcément
00:29:04 mécaniquement une extinction derrière. Ce qui m'intéresse dans cette courbe, et
00:29:08 là où je trouve qu'elle est passionnante, c'est qu'on voit que jusqu'à la deuxième
00:29:10 guerre mondiale, les choses sont quand même sous contrôle, c'est un bien grand mot,
00:29:15 mais en tout cas les choses restent raisonnables, il y a plus d'humains, il y a un peu plus
00:29:18 d'extinctions, mais ça va encore. A partir de la deuxième guerre mondiale, c'est là
00:29:24 que plus rien ne va et qu'on rentre vraiment dans la phase de l'extinction. Donc l'extinction
00:29:28 dont on parle si peu dans la presse, je voulais juste en dire un mot, donc très brutalement
00:29:32 c'est la destruction de la vie sur la planète Terre, quand on dit extinction, on a en tête
00:29:38 vous savez les espèces menacées, les espèces qui disparaissent, en réalité il n'y a pas
00:29:41 que ça, enfin c'est dramatique une espèce qui disparaît, mais il y a aussi dans toutes
00:29:45 les espèces qui n'ont pas disparu, un effondrement des stocks des populations, ça veut dire
00:29:49 que quand il n'y a plus que 2% d'une espèce ou 3% d'une espèce qui a existé, et ça
00:29:55 pour des tas d'espèces, c'est ça l'extinction. Et la cause générale c'est la dégradation
00:30:00 des habitats et des conditions d'existence sur la Terre, de tous les êtres concernés,
00:30:04 donc évidemment un habitat et une condition d'existence n'est pas la même pour une fourmi
00:30:07 que pour un héron, que pour un mulot, donc c'est la dégradation des territoires en
00:30:14 général. C'est un événement qui est non réversible, contrairement au climat, qui
00:30:17 lui par définition, alors ça peut s'emballer, il peut y avoir des effets d'emballement,
00:30:20 mais c'est un événement qui est réversible, dans le Pléistocène le climat il a beaucoup
00:30:24 changé, c'est un événement qui n'a pas eu lieu il y a 2000 ans, ou il y a 4000 ans,
00:30:28 ou il y a 6000 ans, ou il y a 10 000 ans, c'est un événement qui n'a pas eu lieu
00:30:31 l'extinction massive depuis 66 millions d'années, donc il n'y a pas d'événement
00:30:34 historique plus important que ça. Ensuite en général c'est un événement qui marque
00:30:38 la fin des ères ou des périodes géologiques, les extinctions les plus immenses marquent
00:30:44 la fin des ères géologiques carrément, et les extinctions les plus petites marquent
00:30:48 la fin des périodes. Donc une ère géologique par exemple c'est le Mésozoïque, le Mésozoïque
00:30:54 c'est l'ère où il y a les mammifères, c'est depuis la disparition des dinosaures
00:30:57 il y a 66 millions d'années, pour tous ceux qui ont des enfants vous êtes hyper familier
00:30:59 je pense de ça, donc il y a 66 millions d'années les dinosaures ont disparu, depuis
00:31:03 ce sont les mammifères qui règnent sur la terre, et ça c'est une ère géologique.
00:31:07 A l'intérieur du Mésozoïque, l'ère des mammifères, 66 millions d'années, il y a
00:31:12 depuis 2 millions d'années on est en Pleistocène, c'est une toute petite partie du Mésozoïque,
00:31:16 2 millions d'années c'est aussi l'âge de l'espèce Homo, pas Homo sapiens, Homo
00:31:21 erectus, Homo le primate debout qui ne sait pas faire grand chose encore, et donc ça
00:31:28 veut dire que si on est dans une période d'extinction on est à la fin d'une période
00:31:31 géologique, donc au début d'une nouvelle période ou d'une nouvelle ère selon la
00:31:34 gravité, soit on rentre dans une ère post-mammifère ou d'une ère post-Pleistocène on ne sait
00:31:39 pas encore, et évidemment l'extinction contrairement au climat n'est pas un truc qui affecte l'environnement
00:31:46 dans le sens où ce serait hors de nous, l'extinction c'est un truc qui affecte les humains puisque
00:31:49 nous on est fait partie de cette planète, et donc comment est-ce que les humains sont
00:31:54 affectés par l'extinction ? Ils sont affectés comme les muleaux et comme les fourmis, parce
00:31:59 que les habitats sont dégradés et les conditions d'existence sont dégradées, et donc on
00:32:02 voit une détérioration des signaux vitaux.
00:32:04 Alors pas tous, mais certains, notamment la stérilité, pour 2050 tout indique qu'un
00:32:09 homme sur deux sera stérile, et la fertilité est un des signaux, est considéré comme
00:32:14 un des signaux vitaux.
00:32:15 Mais il n'y a pas que ça, il y a aussi tout ce qui est lié à la nourriture, vous connaissez
00:32:18 diabète, obésité, les cancers c'est un sujet compliqué qui mériterait une conférence
00:32:22 en soi, les virus, Marie-Monique Robin a tranché l'affaire à mon avis, on peut dire maintenant
00:32:25 que c'est clairement l'extinction et les virus, c'est clairement directement lié,
00:32:29 et simplement, là c'est la timeline des auteurs, de quelques auteurs qu'on a publiés
00:32:36 chez Wild Project, classés par ordre de naissance, et la ligne rouge marque le début officiel
00:32:41 de l'écologie politique consciente d'elle-même, il y avait des précurseurs avant comme Thoreau,
00:32:46 Aldo Leopold, etc., mais 62 c'est vraiment l'écologie politique, et donc on voit que
00:32:53 l'aggravation de l'extinction, vous vous rappelez de la courbe, le moment où l'extinction
00:32:56 se met à exploser, c'est strictement contemporain de l'essor de l'écologie politique, donc
00:33:01 c'est important de rappeler la concomitance de ces deux choses. D'un côté c'est normal,
00:33:05 puisque on est en extinction, les écologues sont mobilisés, ils luttent contre ça, d'un
00:33:12 autre côté ça pose des questions, on se dit est-ce que l'écologie accompagne l'extinction,
00:33:15 finalement c'est une sorte de greenwashing qui accompagne tout ça, ou est-ce qu'il y
00:33:19 a une impuissance de l'écologie politique, comment faut comprendre ça ? Mais c'est important
00:33:23 de comprendre que vraiment, il n'y a jamais eu autant d'extinctions que depuis qu'il
00:33:27 y a l'écologie, ou inversement, je ne sais pas, mais il y a un truc bizarre. Et donc
00:33:33 il y a effectivement une incapacité collective à tirer les conséquences de cette extinction,
00:33:38 que Rachel Carson explique par le menu en 1962 dans un livre qui se vend à 2 millions
00:33:43 d'exemplaires, c'est quelque chose qui est lu, le gouvernement américain ouvre une enquête,
00:33:47 tout est confirmé, enfin, donc il y a ce que j'ai appelé une architecture d'un déni,
00:33:51 c'est un déni qui évolue au fil des décennies, qui change, alors au début on commence par
00:33:55 dire qu'il n'y a aucun problème, 1962, vous voyez l'ambiance pour ceux qui ont vu la
00:33:59 série Mad Men, Lucky Strike, Whiskey, 30 Glorieuses, Prosper, oui, Rachel Carson, mais
00:34:05 je veux dire, elle est hyper marginale quand même, donc il n'y a aucun problème circulaire,
00:34:09 il n'y a rien à voir. Finalement en 1979 il y a le rapport sur le climat, il y a ce
00:34:12 livre formidable au seuil "Perdre la terre" qui explique que tout d'un coup pendant 10
00:34:16 ans ça se met à flotter, on se dit ah non mais c'est compliqué, c'est compliqué, il
00:34:19 y a peut-être un problème, mais en fait c'est compliqué, on ne sait plus, les scientifiques,
00:34:22 etc, c'est compliqué, on attend, on va voir. Après il y a l'idée à partir du film d'Al
00:34:26 Gore que bon, il y a quand même un problème, probablement, même s'il y a des climatosceptiques
00:34:30 très très véhéments en France comme Claude Allègre, donc il y a sans doute un problème,
00:34:34 la maison brûle, Chirac le dit, mais bon, l'économie quand même, on ne va pas revenir
00:34:38 à la bougie, ça c'est des phrases importantes parce que ce sont des phrases qui permettent
00:34:41 de contourner le problème. Ensuite il y a cette période de la décennie 2010, alors
00:34:46 ça peut se discuter dans le détail, mais ce qui m'intéressait c'est la gradation,
00:34:50 de voir comment le déni change de forme, il évolue. Il y a vraiment un problème,
00:34:55 mais c'est le climat en fait, et donc on a la solution, si c'est le CO2, ça on connaît,
00:34:59 le CO2 c'est un truc d'ingénieur, on a une culture d'ingénieur, une société industrielle,
00:35:02 ça sait faire, on va décarboner. Et là il y a une nouvelle vague qui est en train
00:35:08 de monter et qui là en plus vient du monde intellectuel et vient des pensées de l'écologie
00:35:11 elle-même, c'est que finalement, ça je pense que ça va prendre de la puissance dans la
00:35:15 décennie qui vient, c'est qu'en fait la nature c'est fini, puisqu'on est dans l'anthropocène
00:35:19 qui veut dire l'ère de l'homme, il n'y a plus de nature, la terre est modifiée, c'est
00:35:22 l'homme qui est la plus grande force géologique, donc bon c'est fini. Donc en fait il n'y
00:35:26 a à nouveau plus de raison tellement de protéger quoi que ce soit. Et comme disait Paul Hervé,
00:35:35 ces différents points peuvent coexister, on peut le voir dans une conversation en famille
00:35:38 le dimanche, il y a le grand-oncle qui va dire "ah ben non mais il n'y a aucun problème",
00:35:41 et puis il y a le petit qui va dire "mais c'est l'anthropocène papy" et tout ça,
00:35:44 ça fonctionne ensemble. Or la principale cause de l'extinction qui n'est donc pas
00:35:49 le CO2 c'est un conflit d'habitat. Ah oui on a oublié cette belle slide où il y avait
00:35:54 effectivement… Le point commun entre les deux cercles, vous vous rappelez le cercle
00:35:57 vert et le cercle noir de l'écologie et de l'urbanisme, c'était quand ils commencent
00:36:03 à entrer en relation, à entrer en discussion finement, c'est la notion d'habitat. L'habitat
00:36:07 c'est une notion clé de l'écologie scientifique, et l'habitat c'est évidemment une notion
00:36:11 clé pour la fabrique de la ville. Et donc la cause de l'extinction c'est le conflit
00:36:15 d'habitat. Et dans la façon dont nous on occupe l'espace, donc d'abord l'agriculture
00:36:19 industrielle qui a détruit la biodiversité, c'est sans doute le premier agent de destruction
00:36:23 de la biodiversité. C'est ensuite l'explosion des espaces urbanisés, là j'ai pris le
00:36:28 chiffre x10 parce que Wang Shu il a dit c'est x10, puis je crois que c'est un peu consensuel,
00:36:33 que c'est x10 entre 1945 on va dire avant le développement et après le développement,
00:36:37 l'extension des villes, donc c'est vraiment une explosion des espaces. Et il y a la ville,
00:36:43 il y a la campagne, mais il y a aussi tout ce qui se passe entre les deux, si tous les
00:36:45 humains voyagent en bagnole dans des routes où les animaux ne peuvent pas vraiment passer,
00:36:50 ça fragmente les habitats. Et donc c'est ces trois éléments là qui causent l'extinction.
00:36:56 Et c'est ce qu'on appelle, nous, quand on le met en œuvre, on ne dit pas « ah si
00:36:59 on faisait un projet d'extinction avec la data et tout », c'est pas ça qu'on dit.
00:37:02 On dit non, on va faire de l'aménagement du territoire. C'est comme ça qu'on appelle
00:37:05 ça. Mais en fait c'est ça la cause de l'extinction. Donc c'est des images qui sont hyper familières,
00:37:10 on les a tous connues, on a tous vu, c'est des clichés, c'est des trucs qui tournent
00:37:15 sur Facebook, c'est des trucs idiots, mais c'est ça qui cause l'extinction. C'est
00:37:20 notre rapport au territoire que j'appelle l'industrialisation de la campagne et de
00:37:23 la ville après 1945. Vous vous rappelez dans nos courbes, on voit bien que c'est à partir
00:37:27 de 1945 qu'on industrialise la campagne, comme on vide les campagnes, on grossit les
00:37:31 villes, on industrialise la ville aussi avec le béton et l'acier. Et là aussi on dit
00:37:36 pas « on va tout détruire », on dit « on va faire du développement ». C'est cool.
00:37:39 Donc le remembrement qui est si mal nommé parce qu'on a l'impression que ça réunit
00:37:43 quelque chose alors que ça détruit tout, et là je reprends l'expression « l'étalement
00:37:47 urbain », c'est pas bien dit, c'est un rat de marée, c'est un tsunami urbain,
00:37:51 c'est Wang Chu qui dit un rat de marée, de facteur 10. Et donc enrayer l'extinction,
00:37:55 vous allez me dire « il est sympa le philosophe, c'est super déprimant, qu'est-ce qu'on
00:37:58 fait avec ça ? ». Et là je reprends une idée que Sébastien Marot, le philosophe
00:38:04 de la ville, disait que la métropole était à la fois inévitable et impossible. Elle
00:38:08 est inévitable si on voit rétrospectivement l'histoire passée, on devait arriver à
00:38:13 la métropole et elle est impossible si on se rejette dans l'avenir. C'était une
00:38:16 jolie idée de Sébastien Marot. Et là je la reprends en disant que c'est un peu pareil,
00:38:21 on pourrait dire ça aussi de l'extinction, qu'enrayer l'extinction paraît complètement
00:38:24 impossible, toutes les courbes montent, tout s'accélère, on voit pas comment est-ce
00:38:27 qu'on peut l'enrayer, mais en même temps, attention, on peut pas se projeter non plus
00:38:32 très loin si on ne l'enraye pas, donc ça paraît inévitable à un moment de l'enrayer
00:38:37 quand même. Pourquoi ? Et la phrase la plus simple je trouve qui explique ça, elle vient
00:38:42 de Déborah Rose, une dame qui a conceptualisé les humanités écologiques dont parlait Philippe
00:38:47 tout à l'heure, il y a marqué 2019 parce qu'on l'a publié en français en 2019,
00:38:50 mais il date de 2004 son livre, et elle dit cette très belle chose, elle dit « l'unité
00:38:54 de la survie, ce qui nous permet de survivre, ce n'est pas l'individu ni même l'espèce,
00:38:58 on ne protège pas son être ou son être humain, mais le couplage organisme-environnement,
00:39:04 donc un organisme qui détériore son environnement commet un suicide ». Je trouve ça résume
00:39:08 bien si on parle de grand cadrage. Et donc dans le genre impossible ou inévitable, il
00:39:15 y a ce joli dessin qui vient d'un blog d'un gars qui fait de la science populaire,
00:39:21 qui joue le math, fait les maths, compte, fait les mathématiques, et qui donc, c'est
00:39:26 rigolo, qui nous rappelle qu'on est dans une situation exceptionnelle, on n'est pas
00:39:29 dans une situation normale, je veux dire il y a 4 générations, il y a 5 générations,
00:39:34 le style de vie qu'on avait était inimaginable, on est au milieu d'un pic pétrolier en fait.
00:39:38 Donc avant on fonctionnait aux muscles et aux feux de bois, mais après on ne sait pas
00:39:43 à quoi on fonctionne, mais c'est pour dire que le changement paraît un peu inévitable.
00:39:47 Et donc on retombe sur notre schéma du début, donc si le problème auquel on a affaire c'est
00:39:55 celui de l'extinction, qu'il est causé par l'aménagement du territoire, à ce moment-là,
00:39:57 le grand sujet qu'on doit avoir c'est celui de la recomposition de nos habitats, villes
00:40:02 et campagnes. Et on n'est pas les seuls à dire ça, puisque l'exposition et le livre
00:40:10 qui sont en train aujourd'hui d'envahir un peu les écoles d'archi depuis 3-4 ans, et
00:40:14 qui sont en train de bouleverser plein de jeunes esprits et moins jeunes esprits, c'est
00:40:19 l'exposition « Taking the countryside » de Sébastien Marot, « Prendre la clé des
00:40:23 champs », qui est actuellement à Marseille à la Friche-la Belle de Mai jusqu'au 14
00:40:26 mai, et qui raconte, qui dit exactement ça, qui dit qu'il faut recomposer le rapport
00:40:30 ville-campagne, et qui reprend toute l'histoire de l'humanité depuis l'origine des villes,
00:40:35 depuis le néolithique, pour nous aider à nous projeter vers l'avenir. Et au moment
00:40:39 où il fait ça, à Marseille, il y a Marion Chnauf qui devait être avec nous, qui lance
00:40:42 la Cité de l'agriculture et qui veut appliquer concrètement un travail beaucoup plus âpre
00:40:46 de terrain dont Sébastien Marot ne peut pas se charger, il ne peut pas être partout,
00:40:50 mais elle, elle fait exactement sur le terrain, depuis 2015-2016, ce que Sébastien Marot
00:40:55 invite à penser dans son expo. Et donc ce sont ces deux choses-là concomitantes qui
00:40:59 nous ont, nous, engagés vers Ville terrestre. Donc finalement, en termes de cadrage, c'était
00:41:04 une première proposition de réponse à Philippe. Nous, ce qu'on propose, c'est donc la notion
00:41:07 d'écologie urbaine, définie comme, si l'écologie est la science des relations des vivants
00:41:11 avec la terre, alors l'écologie urbaine, ça a déjà été utilisé, l'expression
00:41:16 d'écologie urbaine, mais jamais définie de cette façon-là. C'est à ce moment-là
00:41:20 l'art, la théorie et la pratique de réorganiser les habitats humains de façon à ce qu'ils
00:41:26 s'insèrent dans les autres habitats terrestres ou alors, pour le dire encore plus simplement,
00:41:29 de refaire société avec la terre. Bonsoir tout le monde. Je suis Paul-Hervé Lavezcière,
00:41:36 je suis le cofondateur avec Baptiste de l'agence des sentiers ou l'agence des sentiers métropolitains.
00:41:41 On travaille là-dessus depuis maintenant presque 10 ans. On avait d'ailleurs lancé
00:41:48 ici, Marion l'a dit tout à l'heure, mais l'exposition qui retracé l'histoire des
00:41:53 sentiers métropolitains, c'était ici à l'étage et c'était aussi le lancement
00:41:56 du Sentier du Grand Paris. Donc merci encore le pavillon. Par ailleurs, je suis urbaniste
00:42:04 de formation. J'ai eu l'occasion de travailler un peu en Belgique et à Toulon sur des documents
00:42:11 d'urbanisme type Scott ou équivalent Scott en Belgique et je voulais commencer mon intervention
00:42:18 en partageant cette image avec vous. C'est une photo aérienne qui est prise hier, hier
00:42:27 les palmiers, dans la métropole Toulon-Provence-Méditerranée parce que j'avais participé aux travaux
00:42:34 à l'agence d'urbanisme sur le Scott et je voulais partager avec vous cette image parce
00:42:40 qu'elle illustrait un doute, un peu un désarroi dans lequel on se trouvait nous au niveau
00:42:44 de l'agence avec toute la bonne volonté du monde et l'idée d'accompagner nos élus
00:42:50 sur qu'est-ce qui serait des bonnes pratiques en termes d'écologie, sur notamment cette
00:42:54 parcelle qui n'est pas construite là, qui est en fait une friche agricole, donc au milieu
00:42:59 de l'image et donc au sein de l'agence il y avait des débats entre nous, alors chacun
00:43:05 y allait en se basant sur ce qu'il avait de sensibilité ou de conviction ou selon
00:43:11 s'il habitait à côté ou s'il voyait l'endroit que sur la carte, mais on se posait la question
00:43:16 de cette friche qu'est-ce qu'on doit faire, est-ce qu'on doit la bâtir au nom de la densité
00:43:20 parce qu'on est près d'une gare, on voit en bas à gauche il y a une gare TER SNCF,
00:43:25 on dit qu'il faut densifier près des gares, donc après tout pourquoi pas la construire,
00:43:29 oui mais en même temps c'est une friche agricole depuis 30 ans, du coup la nature a repris
00:43:33 ses droits, il y a des tas d'insectes, il y a même un peu des batraciens parce qu'on
00:43:36 a un cours d'eau à côté, et donc au nom de la nature en ville, du coup est-ce qu'on
00:43:40 doit la laisser désurbaniser telle qu'elle ? Est-ce qu'au contraire on ne devrait pas
00:43:44 faire des jardins partagés parce qu'on est dans un endroit où beaucoup de gens vivent
00:43:48 en appartement et donc pour le côté social, vie de quartier, lien social, peut-être qu'on
00:43:53 devrait faire des jardins partagés mais alors comment on va contrôler les usages et puis
00:43:57 du coup on bouleverse peut-être des équilibres qui se sont mis en place, mais en même temps
00:44:01 on est dans le Var, il y a énormément de soleil, c'est l'endroit où il y a le plus
00:44:04 de solérie en France, pourquoi on ne ferait pas un champ de panneaux solaires pour produire
00:44:10 de l'électricité de proximité, après tout ça se justifie aussi, en fait on ne sait
00:44:13 pas, on ne sait pas et donc on aimerait, on a des élus qui nous demandent du conseil
00:44:20 et en fait on est un peu face à... alors on ne manque pas d'idées, il y a des outils,
00:44:25 il y en a plein, il y a peut-être même trop d'idées mais ce qui nous manque c'est un
00:44:28 peu un cadrage ou quelque chose, un horizon qui nous permettrait de répondre à cette
00:44:34 question, à savoir qu'est-ce qu'on fait si on doit faire quelque chose avec cette
00:44:38 parcelle et donc c'est un peu dans cet état d'esprit aussi que l'on entre dans ce projet
00:44:46 Ville-Terrestre et qu'on décide à un moment de le concevoir, c'est pour aussi aider en
00:44:52 fait, se donner des lignes directrices, un cadrage et puis aider tout le monde, que ça
00:44:57 soit simple et que ça soit accessible et qu'on puisse savoir, si on est urbaniste,
00:45:03 association locale, de quartier, qu'on puisse avoir des arguments en tout cas pour savoir,
00:45:09 ou en tout cas avoir des arguments juste au-delà de "mais moi je pense que", "je pense que",
00:45:15 "c'est bien de penser mais sur quoi on se base et pourquoi ?" Donc ça c'est un peu
00:45:19 sur d'où on part aussi et ce que moi j'avais envie de, ce que je venais chercher moi aussi
00:45:26 dans Ville-Terrestre puisqu'effectivement en tant que personne qui ayant écrit le projet
00:45:32 finalement on a énormément appris nous-mêmes.
00:45:35 Ce qui nous apparaît au-delà juste de cette parcelle et des options de cette parcelle
00:45:40 c'est qu'on est dans un moment où on a une pléthore de solutions qui nous promettent
00:45:46 la ville écologique de demain, que ça soit sur le type d'énergie dans les transports,
00:45:51 le type d'aménagement de la chaussée, est-ce qu'il faut faire des trams vert et bleu, est-ce
00:45:56 que la densité c'est bien ? Quand j'étais à l'Institut d'urbanisme on nous apprenait
00:46:01 que la densité c'était bien, on était à fond dans les écoquartiers, les quartiers
00:46:04 de gare il faut densifier etc. et en fait ce qui nous manque quelque part c'est, mon
00:46:11 sentiment c'était pas tellement des options ou d'autres solutions mais c'est plutôt
00:46:15 des clés de lecture, une grille d'analyse qui nous permettrait d'y voir un peu plus
00:46:20 clair au milieu de tout ça.
00:46:22 Et donc c'est vraiment ça finalement l'ADN, ce qui est au coeur de ce projet Ville-Terrestre
00:46:27 c'est trouver une grille de lecture et d'évaluation.
00:46:31 Alors dans un certain scénario qui est pas neutre, qui est pas n'importe lequel, je
00:46:38 vais le présenter après mais c'est celui de la descente énergétique en gros et de
00:46:43 la convivialité, je vous le dirai tout à l'heure, mais c'est ça ce que propose Ville-Terrestre,
00:46:49 c'est comment on peut arriver à ça.
00:46:51 Au moment où on écrit ce projet, ça fait déjà 6 ans à peu près qu'on marche dans
00:46:58 des métropoles, donc dans une première phase de Sentier Métropolitain on était fasciné
00:47:03 par ces grands objets, il y a quelque chose d'un peu grisant, aller marcher sous les autoroutes
00:47:07 etc. mais au bout d'un moment une sorte de nausée quand même qui commence à grimper
00:47:12 après avoir marché autant dans les villes, dans les grandes agglomérations, que ça
00:47:18 soit en France ou à l'étranger.
00:47:21 Et puis par ailleurs on a ce moment du Covid aussi où on se retrouve chez nous, donc là
00:47:26 c'était en 2020, un peu tout le monde choqué, en même temps on était en train de se plonger
00:47:36 dans les lectures autour du biorégionalisme, et donc j'essayais moi toujours de faire
00:47:44 atterrir toutes ces idées, ces concepts dans quelque chose de très concret, en me disant
00:47:49 mais si j'étais encore à l'agence qu'est-ce que je pourrais faire de ce que dit Kirkpatrick
00:47:53 Sahel sur vivre dans les bassins versants, et je vais même à un moment essayer d'imaginer
00:47:58 un scénario biorégional pour l'agglomération de Toulon, en essayant de pousser jusqu'au
00:48:02 bout, mais donc on baigne un peu dans le biorégionalisme, on constate qu'il y a de plus en plus d'initiatives
00:48:10 en agriculture urbaine, et que ces initiatives prennent une nouvelle lumière grâce à l'exposition
00:48:16 de Sébastien Marot, ce qui m'a paraissé moi comme quelque chose de sympathique et
00:48:20 d'agréable pour le lien social, grâce à Sébastien Marot l'agriculture urbaine, je
00:48:27 vois en fait finalement quelque chose de fondamental pour la ville de demain, et donc on est dans
00:48:31 cette conversation au moment où on écrit ce projet Ville Terrestre.
00:48:36 Donc on décide à ce moment là de déposer un dossier à l'Europe, au programme Erasmus+
00:48:42 et de réunir des partenaires, donc on a parmi nous la métropole de Barcelone, une grosse
00:48:47 métropole avec peut-être 500 agents qui travaillent au sein de la métropole, une
00:48:53 association citée de l'agriculture qui est pionnière sur les questions d'agriculture
00:49:00 urbaine, et qui en plus ne fait pas que lancer des projets mais invente des process, des
00:49:04 méthodes qui ont vocation à être réplicables, et donc organise, met en oeuvre la ville agricole
00:49:11 de demain. Parmi les partenaires on a un centre de médiation autour des enjeux urbains en
00:49:17 Belgique, Urbagora à Liège, et puis une association à Bologne qui a relancé des marchés paysans,
00:49:23 et donc on se dit que tous ensemble on va réfléchir, essayer de poser les bases de
00:49:28 ce que serait la ville écologique du futur. Assez vite c'est le mot terrestre qu'on décide
00:49:35 d'appeler le projet Ville Terrestre, on trouve qu'il va plus loin que la question de la
00:49:40 nature en ville par exemple, il est plus fondamental, et il propose d'aller, de renverser un peu
00:49:47 la situation, et de proposer ni plus ni moins qu'un objectif, un horizon dans lequel les
00:49:57 villes seraient non pas seulement durables mais seraient en accord avec la biosphère.
00:50:02 En fait on en avait la nausée de l'expression nature en ville, on se disait c'est pas la
00:50:09 nature en ville l'enjeu, c'est la ville dans la nature ou la ville dans le monde, et donc
00:50:12 la ville dans la biosphère, et c'est pour ça qu'on a appelé ce projet Ville Terrestre.
00:50:17 A ce moment là on fait dans nos recherches, on se donne pour mission avec Ville Terrestre
00:50:23 de produire un jeu, un jeu de cartes, de formation ou d'initiation, et un manuel. Pour ça on
00:50:30 s'initie, on fait un état des lieux de tout ce qui existe, comme beaucoup de gens, il
00:50:33 y en a peut-être beaucoup parmi vous qui l'ont fait, on a fait la fresque du climat, c'était
00:50:38 en ligne parce que c'était confinement etc. Mais donc on a fait la fresque du climat en
00:50:43 se disant que tout le monde le faisait, il fallait qu'on le fasse, on est sorti de là
00:50:47 un peu groggy parce que c'est un exercice aussi de décortiquage de la crise climatique
00:50:55 et de comment cet effet de cause à effet entre des phénomènes naturels qui ont l'air impossibles
00:51:03 à arrêter et qui nous mènent à la situation actuelle. Et donc on est sorti de là un peu
00:51:08 groggy et aussi avec un peu de difficulté à se projeter dans ce qu'on nous proposait,
00:51:15 c'est à dire il faut réduire par 6 les émissions de CO2, donc il faut rentrer dans la décarbonation
00:51:20 et très vite on arrive sur des enjeux très techniques, à savoir, oui mais électrique
00:51:26 par électrique, les batteries etc. Et donc là on est dans des débats d'experts et c'est
00:51:30 sûr de se projeter et de se dire qu'on va habiter ce monde là où on nous demande purement
00:51:35 et simplement juste de réduire nos émissions de CO2 par 6, comment on fait pour habiter
00:51:39 là dedans. Et finalement la personne qui va nous cueillir au vol à ce moment là,
00:51:45 c'est quelqu'un qui est plus là mais dont ces livres sont toujours présents, c'est
00:51:49 Ilych, Ivan Ilych, et notamment avec le livre "Energie et équité" qui est revenu souvent
00:51:56 dans nos échanges avec nos partenaires, on partageait nos références bibliographiques
00:52:00 et Ilych est venu et est revenu et il y a un moment qui nous a vraiment soufflé, c'est
00:52:05 le moment où il nous dit que la dépendance à l'énergie c'est pas un problème environnemental,
00:52:12 c'est en fait un problème social et qu'en fait il y a un problème très important du
00:52:21 fait de faire dépendre une société de l'énergie et que finalement le CO2, alors lui il parlait
00:52:25 pas encore du CO2 ou des enjeux vraiment climatiques ou environnementaux, mais au bout d'un moment
00:52:32 là ça nous semble toucher juste sur cette idée que la dépendance à l'énergie c'est
00:52:38 pas juste une histoire de CO2, c'est aussi une histoire politique de comment on en est
00:52:44 arrivé là à dépendre autant de l'énergie et puis c'est finalement cette énergie abondante,
00:52:52 c'est l'énergie surabondante qui permet la ville moderne, la société industrielle,
00:52:56 pour reprendre les mots de Ilych encore, et en fait c'est ça qui produit l'extinction
00:53:02 d'une part de tout le monde vivant et finalement pour parler juste des mondes humains, la dégradation
00:53:11 des relations sociales avec chacun sa maison, chacun sa voiture, chacun son... si on avait
00:53:16 pas autant d'énergie abondante ça pourrait pas marcher ce mode là. Et donc le scénario
00:53:22 qu'on va élaborer et qu'on va développer dans Ville Terrestre, que je suis sur le point
00:53:28 de vous présenter à présent, c'est celui de la descente énergétique, d'arriver à
00:53:33 des villes terrestres dans le cadre de sociétés écologiques qui pourraient permettre de favoriser
00:53:39 la vie sur terre, l'idée c'est et si nos villes et si nos établissements humains favorisaient
00:53:43 la vie sur terre, et si ça finalement menait à plus de communs, finalement à vivre plus
00:53:51 heureux aussi. Parce que le pire dans tout ça c'est que la ville moderne et l'extinction
00:53:57 ne produit pas non plus du bonheur humain, nous même on finit par souffrir aussi de
00:54:06 ces effets là. En parallèle il y a des livres qui sortent chez Wild Project qui nous confortent
00:54:12 en fait, à chaque fois ça nous conforte dans cette idée là de viser cette descente
00:54:18 énergétique, cette émancipation par rapport à l'énergie abondante. Et notamment on découvre
00:54:24 des auteurs qui devraient être des classiques mais qu'on connaît pas tous et tous bien,
00:54:30 des architectes notamment Hassan Fatih qui parle des constructions en Egypte dans les
00:54:38 années 30 et le couple de Wang Shu et Lu Wenyu sur la question du réemploi etc. Donc
00:54:46 on découvre des figures qui nous éclairent au fur et à mesure du chemin et on arrive
00:54:52 au bout de la quatrième réunion transnationale avec tous nos partenaires européens à résumer
00:54:58 la pensée en cinq piliers. Donc ces cinq piliers c'est l'architecture du projet de la ville
00:55:06 terrestre. Donc c'est premièrement la ville poreuse, donc la ville terrestre devrait être
00:55:11 la ville poreuse, c'est à dire une ville qui... Dans ce chapitre on propose d'aborder
00:55:16 ensemble la circulation des eaux et des vivants, humains compris. Donc ça parle autant de
00:55:22 la goutte d'eau qui peut entrer dans la terre que le hérisson ou les enfants qui peuvent
00:55:28 traverser la rue sans se faire écraser. Donc ça c'est le pilier numéro un qui est celui
00:55:34 de la ville poreuse. Le pilier numéro deux c'est celui de la ville nourricière. On a
00:55:38 failli le mettre en numéro un et puis on l'a mis quand même en numéro deux mais il
00:55:43 nous paraissait à égalité d'importance avec le numéro un. Autour de l'alimentation,
00:55:48 comment on peut renouer en fait avec des pratiques agricoles urbaines. On découvre aussi que
00:55:54 l'agriculture urbaine c'est pas un hobby né dans les années 2010. Pour des gens qui
00:55:59 avaient du temps libre c'est en fait des pratiques beaucoup plus anciennes que ça
00:56:03 et ça c'est aussi nos camarades de la cité de l'agriculture qui nous le rappellent. Le
00:56:08 pilier numéro trois c'est celui de la ville réhabilité qui nous propose de quasiment
00:56:13 ne plus construire en neuf et là on a eu des discussions hyper riches là-dessus. Comment
00:56:17 on pourrait quasiment ne plus construire en neuf et comment arrêter la bétonisation.
00:56:22 Et le cinquième qui est un peu transversal mais qui s'appelle la ville du soin. Qu'on
00:56:27 a nommé la ville du soin. Ah oui pardon j'ai oublié le cadre. La ville productrice qui
00:56:33 est une réponse à cette mise en compétition des territoires entre eux. Donc envisager
00:56:40 la ville comme un territoire de fabrication, de manufacture, d'artisanat etc. avec des
00:56:47 métiers à l'inverse de, mais je vais parler des dark sides après de chaque pilier juste
00:56:54 après. Et celui qui résume un peu tout c'est aussi la ville du soin. Comment faire un établissement
00:57:00 dans lequel les gens sont heureux et en bonne santé. Rien que ça. Donc ça ce sont nos
00:57:09 cinq piliers. C'est ça qui va guider quand vous allez les retrouver dans le manuel. Je
00:57:17 passe un peu rapidement dessus. Donc ça c'est le pilier un. Le pilier deux on l'explore
00:57:21 un peu plus pour vous montrer qu'est ce qu'il y a dans le manuel. Pour chaque chapitre on
00:57:26 a une double page de théorie avec des extraits de textes théoriques qui nous semblaient
00:57:32 fondamentaux dans l'idée vraiment d'avoir un extrait éclairant puisque chacun aille
00:57:37 après chercher lui même, continuer ses recherches bibliographiques. Mais c'est des moments où
00:57:44 on rappelle voilà le maraîchage c'est né en ville et c'est un emploi profondément
00:57:49 urbain. Enfin que des choses où on a parfois besoin d'arguments, on est parfois à court
00:57:54 d'arguments et donc c'est ces textes théoriques qui sont censés nous aider à nous renforcer
00:57:59 là dedans. Donc on a non seulement des textes théoriques, une série d'initiatives inspirantes
00:58:06 à gauche qui sont plutôt des choses actuelles et à droite quelque chose qui nous tenait
00:58:11 vraiment à coeur c'est tout ce qui est autour du patrimoine militant et vernaculaire. On
00:58:15 a parfois oublié que derrière des bonnes pratiques aujourd'hui mises en oeuvre par
00:58:19 des collectivités il y a des luttes. Par exemple les Pays-Bas, Pays du Vélo, en fait
00:58:24 Pays du Vélo parce qu'à un moment le pays a été complètement bloqué par des manifestations
00:58:31 dans tout le pays avec un mouvement social qui en avait marre que les enfants meurent
00:58:38 écrasés sur les routes. Et donc aujourd'hui Pays du Vélo oui mais rendons hommage à
00:58:42 ces gens qui ont à un moment montré la voie. Donc ça c'est pour chaque chapitre on a ça.
00:58:49 On a une série de cartes outils et vous verrez que c'est directement lié au jeu que je vais
00:58:53 vous montrer dans quelques secondes. Et à droite aussi des dissensus parce qu'évidemment
00:58:58 on n'est pas d'accord sur tout, il y a des dissensus on a décidé de les écrire noir
00:59:02 sur blanc parce qu'on trouve que c'est intéressant de montrer qu'il y a des choses qui font débat
00:59:07 et c'est plutôt sain. Donc voilà pour le manuel qui est terminé aujourd'hui. C'est
00:59:16 un travail qui est court, c'est quelques pages mais c'est quand même du temps de travail.
00:59:22 C'est 60 pages. Donc voilà pour la ville productrice, je passe, je continue à avancer
00:59:28 pour arriver vite sur le jeu. Ça je peux le faire très rapidement mais on se rend
00:59:33 compte que chaque pilier correspond à une dark side du monde actuel dans lequel on est.
00:59:41 Donc la ville poreuse répond à la ville fragmentée, la ville nourricière répond à la ville
00:59:49 affamée avec cette idée simple que ce qu'on mange la semaine prochaine n'est pas encore
00:59:53 là à Paris pour les parisiens, le fait qu'on est dans une situation problématique et dangereuse.
01:00:00 La ville réhabilitée répond à cette idée de ville sans limite avec je ne sais plus
01:00:07 combien de stades de foot toutes les 10 minutes, on continue de construire. La question de
01:00:14 la ville productrice elle s'oppose à la ville marchandise avec toutes ces choses auxquelles
01:00:19 on s'est habitués, c'est à dire les opérations de marketing territorial, la compétitivité
01:00:24 des territoires où on voit des pubs dans le métro sur "allez ici, allez là" où
01:00:29 les villes doivent s'offrir comme ça au plus offrant. Donc ça c'est un des traits
01:00:36 de la ville moderne et la ville du soin est un retournement de ce qui est la ville express.
01:00:42 Je n'ai peut-être pas besoin d'en dire plus là dessus. Le grand objectif quand même
01:00:49 de tout ça, de ce qu'on se propose de faire, c'est de faire advenir la ville terrestre
01:00:53 mais depuis la ville moderne puisqu'il ne s'agirait pas de faire comme les modernes,
01:00:57 de dire on va faire table rase et écoutez vous êtes tous trompés jusqu'à maintenant,
01:01:01 maintenant nous on a la solution. Maintenant peut-être 99%, peut-être un peu moins,
01:01:07 presque 99% de la ville écologique du futur elle est là, elle est sous nos yeux et comment
01:01:13 on va faire avec l'existant. C'est vraiment ça la vibration dans laquelle s'inscrit
01:01:20 ce projet. Voilà c'est des extraits du manuel que vous avez déjà. Oui on a eu la chance
01:01:29 d'avoir une illustratrice incroyable qui a donné aussi toute l'âme et tout le grain
01:01:35 aussi à ce projet, que ce soit pour les cartes ou pour le projet, qui s'appelle Gabriel
01:01:38 Reyé qui est ici et qui se reconnaît. Donc merci Gabriel. Un des livrables de ce projet
01:01:48 c'est ce fameux jeu qui est ici en version maquette, qui est un jeu de 70 cartes qui
01:01:54 est en ce moment en version test. J'ai quelques slides là dessus. L'idée est toute simple,
01:02:02 on a une série de cartes avec des outils qui sont que des outils qui existent. Donc
01:02:06 on a la borne qui compte les vélos sur la piste cyclable, on a l'humidificateur d'air
01:02:14 à côté de la gare, on a aussi le réseau de transport en commun, les murs et toits
01:02:21 végétalisés, l'autorisation des habits allégés, on a des tas de solutions qui existent
01:02:27 et l'idée, donc le jeu, ça va être de réfléchir ensemble, comme si on était un
01:02:31 conseil municipal ou en tout cas une assemblée citoyenne qui aurait la possibilité de décider
01:02:39 d'actions et on doit ensemble prendre des décisions sur quelles actions on peut mettre
01:02:45 en oeuvre pour arriver à la ville terrestre. Et donc là dedans, c'est un jeu où on plisse
01:02:50 un peu les yeux et on regarde, est-ce que ça c'est du greenwashing et en fait pas
01:02:53 du tout, ça ne nous amène pas vers la ville terrestre ? Est-ce que c'est juste un habillage
01:02:57 qui nous permet de continuer la ville moderne actuelle ? Est-ce que c'est quelque chose
01:03:03 qui est sympathique, une idée sympa mais en fait c'est symbolique et ça ne va pas
01:03:08 forcément changer la donne ? Ou est-ce qu'au contraire, là on est vraiment sur un signal
01:03:13 faible ou en tout cas quelque chose qui nous montre la voie de la ville de demain, enfin
01:03:18 en tout cas de la ville terrestre ? Donc on est dans cette phase-là où on organise
01:03:22 des sessions de jeu, donc ça c'était des sessions qu'on a organisées ces dernières
01:03:25 semaines à Paris avec des comités de quartier, des associations type recyclerie et autres
01:03:33 et donc ça continue, on est encore en train d'en organiser. Donc on voit au milieu de
01:03:37 la table, vous avez les cinq ronds verts, en fait c'est les cinq piliers et donc on
01:03:41 fait une première manche, on doit faire ses choix, on vote et on regarde est-ce qu'on
01:03:48 a réussi à retourner un pilier ou pas. Là on lance un dé pour savoir s'il y a eu
01:03:54 une catastrophe par exemple, s'il y a un enjeu d'aléa dans lequel on montre aussi
01:04:02 qu'on n'est pas juste dans une bulle mais qu'il y a parfois des choses qui nous échappent,
01:04:05 une pandémie par exemple. Et donc nous en tant que maître du jeu on a ce tableau et
01:04:12 en fonction des choix qui ont été faits on va pouvoir compter les points et voir si
01:04:16 petit à petit on a retourné ou est-ce qu'on s'approche de retourner un pilier. Et donc
01:04:21 si vous voyez chaque colonne c'est un des piliers et il y a la colonne investissement,
01:04:27 ça c'est ce que ça coûte, alors c'est un investissement, c'est une sorte de crédit
01:04:30 temps argent qui est un peu symbolique mais c'est juste pour pondérer les uns aux autres.
01:04:34 Voilà à quoi sert, comment fonctionne le jeu Ville Terresse, en général ça dure
01:04:40 une heure à plutôt deux heures en fait si on veut vraiment faire les deux manches.
01:04:43 On est encore dans cette phase un peu test là mais on a quasiment terminé. On a testé
01:04:51 ce jeu, donc on n'a pas juste joué entre nous, on a fait plein plein de sessions avec
01:04:55 nos partenaires mais on l'a aussi essayé en école d'architecture avec des techniciens
01:05:01 municipaux de la ville de Marseille et notamment des associations locales et puis ça continue
01:05:09 encore là en ce moment sur Paris. Cette idée du jeu elle s'inscrit en fait dans une offre
01:05:15 qu'on veut proposer de formation autour de la ville terrestre avec peut-être trois niveaux
01:05:21 mais qui va de la demi-journée ou de la session de deux heures dans laquelle on joue et donc
01:05:27 jusqu'à un stage ou une formation en deux jours dans laquelle on irait marcher puisqu'on
01:05:33 est quand même sentier métropolitain et la marche pour nous est hyper importante. C'est
01:05:37 important de faire ça puis d'aller après voir sur place et voir comment on peut appliquer
01:05:42 ça après en local. Donc on a déjà fixé quelques dates, les prochaines dates peut-être
01:05:49 je peux vous le laisser comme ça. Tout est sur le site qui s'appelle ville-terrestre.org
01:05:55 et donc ça c'est pour les préinscriptions éventuellement. Si vous voulez n'hésitez
01:05:59 pas à nous contacter là-dessus, on sera ravis. On a fait ce projet pour pouvoir le
01:06:05 partager avec vous donc n'hésitez pas à nous écrire. Voilà, merci beaucoup.
01:06:08 Voilà et c'est à ce stade là que Clara et Philippe Sipé sont venus vers nous avec
01:06:19 ce livre fabuleux qui j'ai remarqué n'a pas été assez lu autour de moi et donc je
01:06:24 voulais refaire la publicité de ce bouquin, c'est pas eux qui l'ont mis en avant, c'est
01:06:27 moi, dont le contenu converge et améliore et développe tout un tas de pistes qu'on
01:06:34 a ouvertes dans les villes terrestres donc c'est vraiment à vous maintenant de… on
01:06:38 vous laisse la parole.
01:06:39 Alors moi je suis donc architecte, j'exerce au sein d'une scope d'architecture qui
01:06:48 est à Paris et qui effectivement a œuvré sur ce projet de la ferme du rail dont je
01:06:53 vais pas vous parler ce soir mais je vais vous parler plutôt d'une inspiration qui
01:07:01 est venue très forte de notre pratique de terrain et de nos échanges avec Philippe
01:07:08 sur le sujet de la nécessaire mobilisation et de la nécessaire mobilisation dans la
01:07:16 formation et dans de nouveaux apprentissages de l'ensemble de la profession du bâtiment.
01:07:22 En partant aussi du constat que la… c'est un texte qu'on a écrit un petit peu comme
01:07:36 un manifeste Philippe et moi on a aussi ça en commun d'avoir eu ce temps de respiration
01:07:42 aussi fertile pour beaucoup de pouvoir se poser un peu, écrire ses questions, être
01:07:49 moins dans l'action, les chantiers arrêtés, toutes ces choses là.
01:07:52 Et l'Arsenal, cette même maison qui nous accueille aujourd'hui, lance un appel de
01:07:58 contribution des architectes que vous aviez peut-être vu, ça avait fait l'objet de
01:08:04 table ronde et d'une exposition ici et qui avait lancé une demande de contribution,
01:08:09 qu'est-ce que pourrait être justement demain sur ces questions.
01:08:13 Et nous si on s'interrogeait sur ces questions là, c'était de constater sur le terrain
01:08:18 que certes des pratiques commençaient à s'amorcer et que pour aller plus loin maintenant
01:08:25 on avait besoin de pouvoir former et former de manière transversale, créer une culture,
01:08:32 Philippe en parlait tout à l'heure, une culture collective autour de ces nouvelles
01:08:35 pratiques et on voulait l'appeler particulièrement de nos voeux sur cette question du rapport
01:08:41 nouveau qu'on avait à la matière, du rapport nouveau à la matière déjà produite, à
01:08:47 ce que nos villes mangent, consomment et rejettent sans jamais produire elles-mêmes et comment
01:08:58 on était, on avait un peu cette injonction de mobiliser cette matière et maintenant
01:09:02 mobiliser cette matière, comment on le fait, avec qui et quelles nouvelles modalités on
01:09:09 se donne.
01:09:10 Et donc c'est un peu dans ce texte qu'on réévoque cette question et cette question
01:09:16 de créer justement, de faire école, de faire école évidemment pas littéralement, là
01:09:21 on appelait un peu de manière manifeste, mais l'idée était aussi de se raccrocher
01:09:28 avec des pratiques qui étaient déjà expérimentées, notamment celle de l'Art & Craft, William
01:09:33 Morris, qui, reconfronté à la matière, cherche à aussi dire que c'est dans l'artisanat
01:09:40 et dans ce rapport à des savoir-faire savants qui sont, lui, à son époque, il est au moment
01:09:49 d'une forte industrialisation qui est pas celle qu'on connaît aujourd'hui, ce pic-là,
01:09:54 il est sur la première qui est malgré tout très violente et qui vient détruire comme
01:09:58 ça des écosystèmes de savoir-faire, et donc il appelle lui-même à la nécessaire redéfinition
01:10:07 d'une esthétique autour de cette question et d'une pratique autour de cette question.
01:10:10 Et il réinterroge la question du beau par la même occasion.
01:10:14 Inspiré aussi du Baos, qui venait dans la formation des architectes, les confronter
01:10:23 à une pratique artisan, puisque vous le savez, le Baos était organisé en atelier autour
01:10:30 du matière, autour d'un matériau, autour d'un métier, d'un savoir-faire, et c'était
01:10:35 l'initial de la formation par lequel chaque étudiant était sommé de passer avant d'engager
01:10:45 une pratique esthétique artistique et de construire un langage.
01:10:48 Et donc c'est nourri de ces choses-là, et nourri de l'idée qu'on était justement dans
01:10:55 cette parenthèse, justement au moment de l'effondrement, c'est-à-dire qu'on va détruire
01:10:59 les milieux violemment, on va détruire le vivant, et en même temps on détruit aussi
01:11:05 ces écosystèmes et ces savoir-faire et ces pratiques-là.
01:11:08 Et tu peux passer, on continue, on se déconfine un peu, quoique pas tant que ça, parce que
01:11:16 je vais vous parler d'un projet là sur lequel on a travaillé pour la ville de Paris, qui
01:11:21 est la réhabilitation de cette maison, qui est la maison des canaux, qui est la maison
01:11:26 de l'économie circulaire et solidaire, donc c'est la vocation de l'association qui occupe
01:11:31 cette maison de diffuser les bonnes pratiques dans tous les champs de l'activité humaine.
01:11:37 Et donc notre coopérative est engagée sur la réhabilitation de cette maison.
01:11:45 Il se trouve que c'est un marché un peu particulier qu'on remporte à ce moment-là, puisque nous
01:11:50 candidatons avec des entreprises.
01:11:52 C'est un format juridique qui s'appelle conception-construction, qui est utilisé normalement pour des gros
01:12:00 machins, mais là, sur ce tout petit ouvrage, on est invité à répondre avec des entreprises.
01:12:05 Et donc nous, tout heureux, on peut répondre avec des artisans, justement, qui sont nos
01:12:10 partenaires qu'on avait dans notre quartier, dans un périmètre de 30 kilomètres, pas
01:12:16 plus, commencer à créer ce lien et ces collaborations très fortes qui sont fondamentales, à mon
01:12:23 avis et à notre avis, dans cette nouvelle constitution et dans cette nécessité de
01:12:29 formation.
01:12:30 Tu parlais de la formation adulte, c'est-à-dire aussi celle qu'on fait sur le terrain, en
01:12:36 marchant.
01:12:37 Et puis, dans le bâtiment, cette pratique de l'apprenti qui, déjà, dans le bâtiment,
01:12:41 dans l'entreprise même, va apprendre son métier.
01:12:43 Et je nous considère tous, sur ces questions-là, comme en apprentissage aujourd'hui.
01:12:49 Donc on répond ensemble, artisans, architectes, concepteurs, et on conçoit ensemble.
01:12:55 On va glaner la matière sur l'ensemble du territoire, là, sur une trentaine de kilomètres,
01:13:01 pour profondément réhabiliter, réisoler.
01:13:03 Je ne vais pas parler de ce projet, il est possible de le visiter de temps en temps.
01:13:09 Et donc, inspiré de ça, on propose à la ville de Paris, et nourrie par cette pensée
01:13:17 autour de l'école du réemploi qui nous habite toujours, on propose à la ville de
01:13:21 Paris de tester le dispositif, là, sur le chantier.
01:13:25 D'abord parce que ça se fait déjà un peu spontanément, puisque dans le montage qu'on
01:13:29 a fait, il y a très ancré dans le chantier, avec des vrais marchés, avec des vraies tâches
01:13:36 dignes et sachantes, des entreprises d'insertion, qui ne sont pas là pour faire les grouillots,
01:13:42 mais qui sont là pour œuvrer et participer à l'ouvrage.
01:13:48 Et donc ces personnes sont, nous les mettons, nous mettons ces entreprises à l'ouvrage,
01:13:57 accompagnées d'artisans, sachants, qui finalement viennent les former sur le chantier.
01:14:02 Et donc c'est un petit peu un chantier-école qui se met en place sur les différents ouvrages,
01:14:07 et notre entrée, vous allez le voir, est sur la question des métiers.
01:14:15 Cette dimension territoriale, elle est fondamentale, cette dimension de gouvernance partagée,
01:14:23 elle est aussi fondamentale au projet.
01:14:25 Et donc vous voyez une série d'acteurs là qui sont mobilisés autour de ce projet aussi,
01:14:29 parce qu'on va chercher la matière un peu partout, et que ça fait autant d'interlocuteurs,
01:14:34 la matière qu'on vient sauver du déchet pour pouvoir lui trouver une nouvelle destination
01:14:39 dans le bâtiment.
01:14:40 Et donc ces acteurs, les formateurs qui vont participer de ce dispositif qui s'appellera
01:14:48 les chemins du bâtiment circulaire, ça n'a pas encore ce nom là, sont ceux qui participent
01:14:56 au projet, et qui sont des artisans qui, dans le bois, qui dans la pierre, qui dans la transformation
01:15:04 du textile et des membranes qui sont issues des déchets textiles et du déchet de la
01:15:10 publicité par exemple, vont savoir refaçonner, transformer cette matière pour lui trouver
01:15:17 une nouvelle destination et lui dessiner une nouvelle esthétique.
01:15:22 Donc l'intuition elle est aussi qu'il faut créer de la transversalité, et que cette
01:15:30 question de la culture commune, elle est fondamentale, et notamment réapprendre architectes, maîtrises
01:15:38 d'ouvrages commanditaires et artisans à se remobiliser autour de ces questions, et également
01:15:45 à créer cette fameuse culture commune, et à réapprendre à se parler, réapprendre
01:15:50 à concevoir ensemble, à penser les établissements ensemble.
01:15:55 Évidemment il y a aussi un dernier acteur qui est celui qui va vivre dans le bâtiment,
01:15:59 qui à notre sens, et dans nos projets on le pratique souvent, doit être aussi impliqué
01:16:05 dans cette question là.
01:16:07 Mais donc ce dispositif que l'on monte avec trois autres partenaires, qui sont la ville
01:16:13 de Paris, Ecopolis, que vous connaissez peut-être, qui fait de la formation à l'éco-construction,
01:16:21 donc qui est une association issue initialement du CAUE, donc qui est sur l'île de France,
01:16:28 et puis les Canots, donc qui sont les occupants justement de la maison dont je parlais tout
01:16:33 à l'heure, et qui ont cette vocation de former les grands publics et les professionnels,
01:16:39 et de les accompagner sur ces questions de la transition écologique, à ce moment là
01:16:45 pas sur le champ du bâtiment.
01:16:46 Et donc tous les quatre on monte ce dispositif de formation, qui est à la fois un outil
01:16:53 pour mobiliser, mais pour créer cette culture commune, et on mobilise également les artisans
01:17:01 sachant du chantier pour accompagner ce dispositif.
01:17:05 L'idée c'est de dispenser à la fois des cours théoriques pour les artisans, les
01:17:11 ouvriers, donc quand on parle là de ce champ là, on couvre un champ assez large, ces nouvelles
01:17:18 pratiques elles vont nécessiter beaucoup de nouveaux métiers, on apprend un peu en
01:17:22 marchant actuellement, il y a des gros déficits, c'est vrai que en même temps la formation
01:17:27 aujourd'hui à la pratique écologique dans le champ du bâtiment est beaucoup mobilisée
01:17:35 sur la préservation de l'énergie.
01:17:39 Et on a promis énormément d'emplois, bon peut-être qu'ils vont arriver, on ne les
01:17:42 voit toujours pas trop venir, moi je suis vraiment convaincue que l'ancrage territorial,
01:17:46 la mobilisation et la collaboration territoriale, cette reconnexion d'une économie locale
01:17:52 ancrée et qui va pouvoir comprendre les interdépendances et les collaborations et trouver sa place
01:18:02 dans une économie locale, ça va être bien plus puissant que cette question là d'une
01:18:06 application technique un peu hors sol.
01:18:10 Donc il y a l'idée de sensibiliser, d'avoir aussi des cours théoriques pour que chacun
01:18:17 puisse comprendre l'enjeu de chaque filière et l'enjeu aussi du déchet et de la matière
01:18:26 auquel il a affaire, puisqu'on a abordé les champs un peu comme en mini-baos, les
01:18:35 champs par métier et par pratique.
01:18:37 Donc vous allez le voir, on a un champ autour de la pierre, de la maçonnerie circulaire,
01:18:44 de la tapisserie circulaire et de la menuiserie circulaire et on peut continuer comme ça
01:18:50 sur un tas de métiers.
01:18:52 Les chantiers inspirants c'est quoi ?
01:18:55 Les chantiers inspirants en fait c'est parce qu'on n'apprend jamais aussi bien que par
01:19:00 la démonstration et donc c'est d'aller visiter ensemble ces trois acteurs, architectes,
01:19:09 maîtrises d'ouvrage et artisans, d'aller sur des chantiers, voir le travail en train
01:19:16 de se faire, la pratique en train de s'opérer.
01:19:19 Et ce qui est très important pour nous aussi dans ce dispositif c'est que la formation
01:19:25 se fasse par le geste, se fasse sur le chantier, se fasse en atelier.
01:19:28 Il y a une aspiration, on le disait tout à l'heure, de plus en plus grande des étudiants
01:19:33 par exemple d'architecture d'aller mettre la main à la pâte.
01:19:36 On le constate de plus en plus nous dans les récits d'expérience de très jeunes architectes
01:19:42 qui sont déjà passés par un tas de chantiers sur le terrain et c'est fort réjouissant.
01:19:48 Et donc la proposition qui est faite ici c'est d'aller dans les ateliers, sur les chantiers
01:19:54 et former les personnes à même ces environnements et proposer à chacun des temps de rencontre
01:20:02 collectif pour échanger sur leur pratique.
01:20:05 Et donc là, ça c'est justement un des volets qui a été développé sur la maçonnerie.
01:20:14 Donc on a fait un travail avec Yvan Delay, qui est maçon, Pierre Seche, qui a formé
01:20:18 les équipes.
01:20:19 Là il y avait des équipes à la fois de bénévoles qui sont venus se former sur le
01:20:23 chantier, donc en chantier participatif.
01:20:25 Il y avait l'entreprise d'insertion Travailler Vie qui était formée sur place.
01:20:28 Et puis il y a des ouvriers de la ville de Paris qui sont venus aussi apprendre ces techniques
01:20:33 spécifiques du réemploi.
01:20:34 Donc là on est sur du réemploi de Pierre Devoiry qui a été mis à disposition par
01:20:39 la ville de Paris.
01:20:40 Donc des rebuts de chantiers qui sont de la belle matière mais en petite quantité.
01:20:48 Et la pierre sèche est une technique qui invite particulièrement ces petites séries
01:20:53 à trouver place dans un ensemble qui aujourd'hui trouve sa place dans l'espace public sans
01:21:00 difficulté.
01:21:01 Et donc il a transmis cette pratique à la fois théorique et de terrain, et je vous
01:21:08 le remontrerai après.
01:21:09 Donc vous voyez que le chantier est tout près du état Bonneuil, donc on n'est pas
01:21:14 loin.
01:21:15 Il y a un acteur aussi de la logistique, donc une entreprise Travailler Vie et cette dimension
01:21:20 de formation elle va aussi s'appliquer pour ses nouveaux métiers de logistique, de trieur,
01:21:25 de caractériseur de la matière, de tous ces métiers qu'il va falloir faire émerger
01:21:31 et qui pour l'instant se pratiquent de manière un peu intuitive.
01:21:34 Tu peux passer ? Oui, il y a quelques images de cette mise en œuvre, là, des calades
01:21:43 et des apprenants.
01:21:45 On a investi aussi ce chant qui nous plaît beaucoup, nous, de la dapicerie circulaire
01:21:52 parce qu'on pense qu'il a un avenir dans le champ de l'architecture puisqu'on va
01:21:56 avoir besoin de se protéger du soleil de plus en plus.
01:21:59 Donc l'approche elle est toujours bien entendu holistique.
01:22:02 On parlait d'une approche en silo tout à l'heure qui n'avait aucun sens.
01:22:06 Évidemment on ne prend pas la question par un seul petit bout.
01:22:08 La matière qu'on va travailler, elle va être là pour répondre à des besoins qui
01:22:13 vont émerger et être nécessairement des façons d'habiter plus frugales.
01:22:20 Tu peux passer ? Donc ça c'était ce qu'on a construit avec les résilientes de l'atelier
01:22:27 Emmaüs, des cloisons mobiles en textile pour pouvoir davantage partager un grand espace
01:22:34 ensemble puisque c'est aussi les enjeux auxquels nous sommes confrontés.
01:22:38 Et donc ce savoir-faire là qui a été développé par les résilientes Emmaüs, c'est aussi,
01:22:44 vous le voyez, la création d'une nouvelle esthétique, c'est-à-dire avec des petits
01:22:47 bouts de rien, comment on va reconstituer un grand textile et qui va trouver sa place
01:22:54 dans des ouvrages assez techniques finalement.
01:22:56 Et donc une revalorisation du geste, même du petit geste, et une intervention aussi
01:23:04 dans celui qui très loin du savoir-faire, trouve sa place dans ces dispositifs là de
01:23:11 manière assez aisée puisqu'il y a un besoin d'intervention avec un tout type de niveau
01:23:17 de savoir-faire qui vont être nécessairement mobilisés.
01:23:21 Ici on est aussi sur la couture, la transformation des toiles de Montgolfière.
01:23:26 Je vous donne ces exemples aussi pour concrétiser un peu ce qui a été mis en œuvre.
01:23:32 Et donc voilà, aussi là un apprentissage de ce geste assez simple de couture, on vient
01:23:38 ramener un savoir-faire qui lui aussi est vernaculaire dans un autre champ que celui
01:23:42 de l'architecture mais qui trouve sa place aussi dans nos problématiques.
01:23:47 Et puis voilà, plus simplement le tissage, le nœud, l'assemblage, toutes choses qui
01:23:54 vont demander du temps et ce temps de main d'œuvre qui va prendre beaucoup plus place
01:24:00 sur nos chantiers puisqu'on va effectivement moins avoir recours aux objets de catalogue,
01:24:07 aux objets fabriqués et donc il va falloir réapprendre tous ces gestes pour pouvoir
01:24:11 remettre en œuvre, les adapter à un contexte.
01:24:14 Là on est sur la corde d'escalade, il y a beaucoup d'écoles d'escalade qui se
01:24:17 montent et qui jettent beaucoup des cordes en parfait état et donc des propositions
01:24:22 comme ça.
01:24:23 Vous voyez bien aussi que ça va faire appel à la créativité du geste de l'artisan
01:24:27 et à une inventivité qu'il va falloir développer sur ces projets.
01:24:32 Voilà, le champ de la menuiserie qui se prête bien, là aujourd'hui il y a un très fort
01:24:40 apprentissage autour de ces questions.
01:24:42 Là c'est l'atelier rare qui, pardon, à travers Phil, et atelier rare, deux ateliers
01:24:48 d'insertion, atelier rare qui transforme des portes et des fenêtres anciennes dans
01:24:53 des ouvrages contemporains et puis à travers Phil qui lui s'est dédié justement à
01:24:59 une menuiserie du quartier qui s'est dédiée à la formation justement à ces nouveaux
01:25:03 métiers, à ces nouvelles pratiques pour transformer de la matière un peu hétérogène,
01:25:07 un peu de guingouin, un peu qui résiste, mais qui malgré tout a encore une nouvelle
01:25:13 vie à gagner.
01:25:14 Les petits circuits, vous voyez qu'on est dans des circuits proches et le fait que la
01:25:19 matière s'échange de main en main, ça aussi ça fait partie du dispositif de formation.
01:25:25 Je vous remercie.
01:25:26 Je vais très rapide parce qu'on a été long.
01:25:36 C'est une réaction, je trouve que c'est intéressant de voir finalement que cette
01:25:40 question de la descente énergétique dans les deux formations qui sont présentées,
01:25:48 il y a beaucoup de convergence, vous plutôt par une entrée biorégion et puis là par
01:25:53 une entrée sur la matière avec dans les deux cas cette volonté de créer de la transversalité
01:26:00 et un espace de discussion en commun.
01:26:05 Maintenant est-ce que ce paradigme biorégion et ce paradigme matière arrivent à se rencontrer
01:26:10 et à faire des ponts entre eux ? Pour moi ça reste quand même une question.
01:26:17 Peut-être pour finir, peut-être juste deux idées, c'est-à-dire que si on ne sait pas
01:26:23 exactement quel est l'horizon qui se dessine devant nous, peut-être il y a des leviers
01:26:28 qu'on pourrait actionner plus que d'autres.
01:26:33 Baptiste a beaucoup parlé de la question du carbone, je pense que dans le champ de
01:26:40 l'architecture elle a occupé une place très importante, une place peut-être trop importante,
01:26:46 on comprend pourquoi, parce qu'en fait on est dans une écologie de la performance,
01:26:53 quand on réfléchit en termes de carbone on est dans une écologie qui est celle du chiffre,
01:26:56 c'est un peu l'écologie de la calculette, qui est quand même super pratique parce qu'on
01:27:00 peut mettre en avant des résultats qui vont être à l'actif de notre bilan.
01:27:10 Donc c'est toujours très pratique de pouvoir dire "regardez à quel type de résultat j'ai
01:27:16 abouti".
01:27:17 Mais ça laisse tellement de questions de côté, des questions qui sont absolument fondamentales,
01:27:26 on a parlé du vivant, on a parlé de la matière, on parle des questions d'insertion, de dignité
01:27:32 du logement, de dignité de rémunération aussi.
01:27:34 Donc la focalisation qu'on a eue sur le carbone, c'est-à-dire dans le champ de l'architecture,
01:27:40 il y a un enjeu, il faut bien sûr décarboner nos sociétés mais il faut décarboner aussi
01:27:48 les pensées de l'écologie.
01:27:49 C'est-à-dire que décarboner les pensées de l'écologie c'est-à-dire qu'on est intoxiqué
01:27:53 à la logique du carbone.
01:27:55 Donc de sortir de cette logique-là pour réouvrir les pensées de l'écologie à leur dimension
01:28:03 politique c'est absolument fondamental.
01:28:06 Et ça, c'est important, il y a une écologie féministe, il y a une écologie décoloniale,
01:28:14 il y a plein d'écologies qui sont absolument passionnantes et qui viennent nourrir la réflexion
01:28:19 des architectes.
01:28:20 Il faut qu'on sorte de notre corner du carbone pour s'ouvrir à cette pluralité de pensées
01:28:28 qui sont absolument fondamentales.
01:28:30 Il faut le faire aussi parce que quand même dans le champ de l'architecture on est des
01:28:35 fétichistes de l'objet et on pense que faire de l'architecture c'est produire des objets.
01:28:40 Je crois que c'est pas du tout la vocation exclusive de l'architecture et plus on se
01:28:48 focalise sur l'objet, moins on pense au système de relations dans lequel ces objets sont pris.
01:28:54 Ce sont souvent des relations délétères, des relations destructrices et puis d'autres
01:28:58 fois des relations ou des liens qui sont des liens qui réparent.
01:29:02 Donc décentrons le regard, regardons moins l'objet, regardons plus l'ensemble des relations.
01:29:08 Et j'en viens à ma deuxième idée, je crois qu'il serait intéressant aujourd'hui de
01:29:16 se dire de quelle définition de l'architecture on a besoin pour opérer cette bifurcation
01:29:21 écologique.
01:29:22 Ok on sait qu'il faut faire du réemploi, il faut construire en biosourcés, en géosourcés,
01:29:31 il faut faire comme ci comme ça, voilà on a plein de...
01:29:33 Non on sait, oui ok, mais il y a quand même une liste de choses qui seraient bien à faire.
01:29:40 Ok mais quelle définition on se donne collectivement de l'architecture ? Et je crois pour ma part
01:29:47 que ce serait intéressant de se dire que la question de la construction en oeuvre ne
01:29:53 peut plus être au centre de la définition de l'architecture et peut-être la construction
01:29:57 tout court.
01:29:58 L'architecte n'est pas nécessairement quelqu'un qui construit, l'architecte c'est quelqu'un
01:30:05 qui cherche à rendre le monde habitable.
01:30:08 Si on se donnait cette définition là, peut-être qu'on s'ouvrirait des nouveaux horizons,
01:30:14 des horizons de pratique, de dialogue, de manière de faire, peut-être qu'on réfléchirait
01:30:18 autrement à la façon dont on peut exercer nos métiers.
01:30:21 Et tu parlais tout à l'heure des habitats, des habitats humains, des habitats non humains,
01:30:28 et comment ces habitats coexistent entre eux, comment on vient à limiter les frictions,
01:30:36 comment on prend cette question en charge, je crois que c'est un agenda qui serait intéressant
01:30:42 pour nous tous.
01:30:43 Ça veut pas dire qu'on construira plus du tout, c'est pas ce que je suis en train de
01:30:46 dire, ça veut pas dire qu'on construira plus en oeuvre, c'est pas ce que je suis en train
01:30:48 de dire.
01:30:49 Mais on peut avoir une autre définition, et cette définition elle va nous ouvrir un
01:30:54 horizon de pensée et d'action.
01:30:56 Voilà, c'est juste une idée que je voulais partager avec vous.
01:30:59 Merci beaucoup.
01:31:00 J'ai une question concernant cette très belle présentation d'ailleurs, merci, concernant
01:31:13 le coût que peut représenter la ville écologique.
01:31:17 On va mobiliser des gens, on va faire des tas de projets qui sont très facilement
01:31:22 financables, notamment par la collectivité, et très rentables, mais quand il s'agit
01:31:28 de refaire la ville sur la ville, avec les acteurs qui souvent désirent avoir les typologies
01:31:36 de projets qu'ils aimeraient concevoir presque d'une manière sans contrainte, est-ce que
01:31:44 votre expérience de cette nouvelle ville est-elle réellement finançable par le secteur
01:31:51 privé ? Et est-ce que vous trouvez que les acteurs privés qui rentrent dans ces projets
01:31:58 sont entièrement satisfaits ? Et qu'est-ce qu'on peut dire finalement des zones par exemple
01:32:05 comme la Défense, ou les zones de géo de Paris de 2024 ? Comment vous raisonnez le
01:32:13 financement de cette nouvelle ville et l'embarquement du secteur privé là-dedans ? Est-ce qu'ils
01:32:19 sont enthousiastes ? Est-ce qu'ils vous demandent rentabilité ? Est-ce que vous arrivez à
01:32:25 créer cette rentabilité ? Je ne sais pas si c'est clair cette question.
01:32:28 Merci pour cette question. Je pense que Clara a mieux placé d'entre nous, parce qu'elle
01:32:36 est plus au contact des opérateurs concrets de la ville pour répondre, mais juste en
01:32:40 prehalable, je voulais juste faire un point sur un truc, c'est que souvent, on voit, y
01:32:45 compris dans Le Monde, des grands papiers genre "Qui va financer la transition écologique,
01:32:48 le coût de la protection de la nature ?" et tout ça. Et là, il y a un truc qui est quand
01:32:52 même assez marquant, c'est que la destruction de la vie sur terre, l'extinction, elle est
01:32:56 extrêmement coûteuse. C'est-à-dire que par exemple, un truc comme l'Union Européenne,
01:32:59 ça a été créé au départ pour financer l'industrialisation de l'agriculture par
01:33:03 la PAC, et tout ça est absolument monstrueux. Et ça a été fait parce qu'on pensait que
01:33:07 ça allait ensuite faire tourner les industries de guerre qui n'avaient plus d'emplois. Enfin,
01:33:13 je veux dire, il y a tout un système. Donc détruire la vie, c'est costaud, c'est coriace.
01:33:17 Donc toute cette extinction, c'est extrêmement coûteux. Il y a des investissements majeurs,
01:33:20 ça s'appelle R&D, c'est des milliards d'euros pour détruire tout ça. Donc il faut arrêter
01:33:24 de dire que protéger la nature est coûteux. C'est-à-dire qu'en fait, ce qui est vraiment
01:33:27 coûteux à tous égards, c'est doublement coûteux de détruire la vie sur terre, c'est
01:33:31 très très coûteux par l'industrie qu'il faut mettre en branle pour le faire, et c'est
01:33:36 très coûteux aussi par les conséquences que ça a. Et donc par exemple, la transition
01:33:39 industrielle actuelle, qui va faire des énergies renouvelables d'un côté et qui va faire
01:33:44 du numérique de l'autre, c'est... Il faut multiplier par 10, 20, 30 les mines pour extraire
01:33:50 les terres rares, plus que ce qu'on n'a jamais fait. Donc tout ça est extrêmement coûteux.
01:33:53 Ça, c'était juste une sorte de préalable global. Après, c'est aux acteurs de la ville.
01:33:57 - Ben oui, les philosophes, Philippe, tu parles souvent de la grande et de la petite addition.
01:34:03 Ça, c'est la petite addition. Effectivement, la grande addition, elle est là, en fait.
01:34:09 Alors, sur le terrain, les acteurs privés, est-ce qu'ils y vont joyeusement ? Eh bien,
01:34:16 en fait, ils y sont assez contraints maintenant aussi par un certain nombre de dispositifs,
01:34:23 de dispositifs de loi et de réglementation qui les contraignent de plus en plus, donc
01:34:28 ils voient l'horizon venir et ils voient aussi que ça va s'accélérer parce qu'ils ont en
01:34:35 interne des tas de consultants qui leur disent qu'il va falloir y aller quand même. En fait,
01:34:39 on n'aura pas le choix. Et du coup, la réponse qu'on voit... Alors là, je parle des majors
01:34:44 avec lesquels je ne travaille pas, mais avec lesquels j'ai pu échanger. Et il y a effectivement
01:34:49 cette inquiétude quand même, parce qu'on est dans un dispositif et dans un mode qui
01:34:55 est fondé sur la production, c'est-à-dire que si on ne produit plus, eh bien il n'y
01:34:59 a plus de modèle. Donc ça remet tellement profondément en cause le modèle que j'imagine
01:35:07 que ça doit être compliqué pour eux. Et donc il y a toujours cette tentative aussi
01:35:12 de retomber sur ses pattes, c'est-à-dire de retrouver des modèles avec, par exemple,
01:35:16 il y a le spectre de la préfabrication qui est un truc qui revient souvent, on se dit
01:35:20 qu'on va récupérer des matériaux, on va pouvoir les préfabriquer dans une usine parce
01:35:26 qu'on va trouver un process. L'usine, c'est bien aussi de toujours revenir à ce processus
01:35:32 d'investissement dans une usine qui va produire et qui va permettre de faciliter le chantier,
01:35:37 avec l'idée que le chantier, ça doit être toujours un moment qui s'annule. C'est-à-dire
01:35:41 comme si ce n'était pas un moment passionnant d'intensité sociale qui doit être remis,
01:35:46 qui doit être redonné à voir à tous, parce que ça nous concerne tous, on disait grand
01:35:51 public et petit public professionnel, mais le grand public est concerné par son environnement
01:35:56 bâti directement, évidemment. On a beaucoup mobilisé autour de la question de l'alimentation
01:36:02 et le grand public s'y est, donc c'est plus resté un sujet d'agroécologue et uniquement
01:36:09 de l'industrie alimentaire, et donc le citoyen s'en saisit. J'attends le moment où le citoyen
01:36:16 va saisir justement aussi de son environnement bâti et revendiquer aussi de la qualité
01:36:23 et de la cohérence et du sens là-dedans. Je réponds pas du tout à votre question.
01:36:27 Quelqu'un d'autre a un réponse ?
01:36:30 Oui, c'est plus coûteux.
01:36:32 Merci déjà.
01:36:33 Oui, il est aujourd'hui plus coûteux, mais vous savez pourquoi ? Parce qu'en fait, il
01:36:36 est aussi beaucoup plus riche, riche socialement. Et je parlais de la formation, c'est replacer
01:36:44 en fait la main d'œuvre au centre de cette histoire, et ce qu'a cherché en fait l'industrie
01:36:52 du bâtiment, a cherché de s'affranchir un peu de cette question, justement, en ayant
01:36:56 des matériaux qui relèvent de l'industrie, en réduisant, je vous le disais, le temps
01:36:59 de chantier. Il se trouve que la main d'œuvre, toutes les techniques que je vous montrais
01:37:05 tout à l'heure, évidemment, en main d'œuvre, elle coûte, mais en intensité sociale, elle
01:37:09 gagne tellement, en fait. Et c'est une expérience qu'on fait sur le chantier très manifeste.
01:37:16 Et donc ce rapport de ce coût-là de la main d'œuvre locale qui va coûter, parce que
01:37:22 la main d'œuvre en France coûte, et pour des bonnes raisons sociales, elle coûte,
01:37:28 elle pourrait peut-être plus peser sur le capital, d'ailleurs, la main d'œuvre, ça
01:37:31 nous aiderait, nous, beaucoup à faire lever ces questions. Il y a aussi sur le coût,
01:37:36 je ne sais pas si vous avez vu, il y a une pétition qui a lancé le mouvement de la
01:37:40 frugalité heureuse pour la détaxation, justement, des matériaux bio et géosourcés, qui pourrait
01:37:48 être un levier fiscal vachement intéressant. Voilà, je pense qu'il y a de la créativité
01:37:53 aussi en termes d'économie, et il faut rentrer dans le dur, et il faut s'en saisir aussi.
01:37:59 On a eu tendance, nous, alors architectes, j'en parle même pas, c'est-à-dire d'être
01:38:03 complètement aveugle sur d'où vient le matériau, complètement aveugle sur la façon
01:38:08 dont il est fabriqué, l'économie qui est derrière, l'arbacte sur des territoires,
01:38:16 sur des milieux très éloignés de ce qu'on prescrit, etc. Et donc il faut se reconcerner
01:38:22 de ces questions-là, en tant que praticien, c'est nécessaire.
01:38:26 Et donc je vais juste faire peut-être une suggestion, parce que j'ai étudié quelques
01:38:32 entreprises en France et dans d'autres pays, qui ont vraiment joué le jeu, et on peut
01:38:38 trouver par la pièce des centres scientifiques et techniques du bâtiment, il y a un certain
01:38:43 nombre d'acteurs, on en a 16ème avec eux, un certain nombre de projets, de démonstrations,
01:38:49 que ce soit en lien avec SNCF ou Engie, ou avec Brugues Immobilier, ou Emery, il y a
01:38:56 énormément de choses qui se font, alors ça se découvre dans les lieux où peut-être
01:39:01 ce public n'y va un peu moins, mais au MIPIM, dans le salon de l'immobilier, c'est assez
01:39:07 impressionnant de voir les projets bas carbone, les quartiers bas carbone, ou les projets
01:39:13 de démonstration, donc je proposais en fait cette question pour voir quelle est la réaction
01:39:19 des uns et des autres, y compris dans la salle, mais j'ai travaillé dans différents secteurs
01:39:23 publics au départ, dans les villes en tant qu'urbanistes, privés, académiques et civiques,
01:39:30 et je trouve que souvent on met le secteur privé de côté, en disant que ce sont les
01:39:37 méchants capitalistes, et en fait il y a un certain nombre de gens qui essaient de
01:39:43 faire l'écologie à l'intérieur de cette économie de marché, et il y a des beaux
01:39:48 exemples, donc en fait c'est plutôt une invitation à dire, rapprochons-nous de tous
01:39:53 les secteurs pour arriver à mener cette transformation de société à laquelle je suis extrêmement
01:40:00 attachée comme vous. Merci encore pour votre présentation, c'était très bien.
01:40:05 Je voulais juste compléter rapidement sur, on n'est pas vraiment économiste, enfin
01:40:09 même pas du tout, mais le modèle économique qui sous-tend la ville terrestre, il serait
01:40:14 basé beaucoup sur les petits métiers, l'artisanat, des petites unités de production, et donc
01:40:21 y compris en appliquant cette logique que tu nous disais Philippe, que rien ne remplace
01:40:27 le fait main sur place, et que tout ce qui consiste à fabriquer des modules en usine
01:40:32 pour les assembler sur place, c'est de l'optimisation de moyens pour réduire des coûts, pour construire
01:40:38 à bas coût, mais ça veut dire que ça marche sur l'idée de concentration de l'argent
01:40:44 dans quelques grandes structures qui ont les moyens de le mettre en œuvre, et donc la
01:40:49 ville terrestre derrière c'est moins de supermarchés pour plus de petits commerces,
01:40:55 moins de grands groupes qui fabriquent des modules préfabriqués pour plutôt du fait
01:40:59 main sur place, artisanal, etc. Donc effectivement c'est pas que le matériau, c'est pas que
01:41:04 le bâtiment, mais c'est derrière un modèle de société. Et donc ça, ça fait de l'emploi
01:41:12 en fait, c'est ça que je veux dire, c'est que c'est énormément d'emploi, dès suroptimisation,
01:41:19 c'est énormément d'emploi de travaux sur place.
01:41:23 Bonsoir, moi je m'appelle Nancy Otaviano, je suis architecte, je travaille dans l'association
01:41:31 14 et une scope qui s'appelle Kidam, et du coup je vais faire très court deux questions.
01:41:36 Une question pour les philosophes et pour cette question là de finalement comment qualifier
01:41:42 l'écologie, quand vous avez parlé de l'étude sur EnsaEco, en gros on voit que c'est holistique
01:41:49 et donc ça résiste à tout effort de taxonomie, en fait est-ce qu'on peut mettre ça en boîte
01:41:53 et en catégorie ? Est-ce qu'il n'y a pas un truc qui résiste dans le pensée classée
01:41:58 face à ce phénomène qu'on essaye de décrire ? Ça c'est pour la partie philosophie, je
01:42:03 sais pas si on peut répondre ce soir, c'est une question que je me pose en général.
01:42:08 Et sur la partie praticien, un peu dans la continuité de ce qui vient d'être dit, nous
01:42:12 quand on fait des projets de réemploi, un des gros sujets c'est les bureaux de contrôle,
01:42:17 c'est la dimension assurancielle, c'est la validation de la prise de risque par la maîtrise
01:42:23 d'ouvrage, et c'est là aussi où peut-être en tant qu'acteur privé que nous sommes
01:42:27 aussi à notre propre échelle, on a tout un travail aussi de transformation des filières
01:42:33 et des mécanismes de la commande, c'est notamment pour ça que la maison des canaux c'est super
01:42:37 intéressant, mais donc finalement comment influencer cette partie de la chaîne ? Point
01:42:43 d'interrogation.
01:42:44 Je vais répondre très vite.
01:42:48 Là je vais, peut-être il y a aussi cette dimension, d'abord il faut leur grisser la
01:42:55 patte aux bureaux de comptes, non, c'est pas ça.
01:42:59 Non, après il faut bien les choisir, moi je pense quand même, c'est-à-dire qu'il
01:43:04 faut qu'ils soient formés, c'est la même question, chez les bureaux de contrôle, pour
01:43:07 l'instant c'est un métier de flic, et pardon si vous êtes bureau de contrôle, et voilà
01:43:12 on se dit, c'est comme comptable, c'est pas très intéressant, maintenant si on devient
01:43:16 cotable dans le champ de l'économie sociale et solidaire et qu'on aide des entreprises
01:43:21 qui ont un modèle économique fragile et qui ont un impact majeur, et bien ça devient
01:43:26 passionnant.
01:43:27 Et le bureau de contrôle c'est la même chose, et j'en connais un avec lequel on travaille
01:43:31 de temps en temps, qui me dit "je n'arrive pas à attirer les jeunes, pourtant c'est
01:43:35 justement l'égarant de la réglementation et de la norme", et il y a une dimension très
01:43:40 créative quand on se penche à l'évaluation du risque commun, puisque c'est ça qu'ils
01:43:45 font, l'évaluation du risque, et si on replace correctement le métier, ça peut devenir
01:43:50 passionnant.
01:43:51 C'est pas une question technique.
01:43:52 Et sur la question du bureau de contrôle aussi, il y a là aussi je pense que la réglementation,
01:44:00 la loi, bon la loi on ne la discute pas, c'est la loi, peut-être, on peut quand même peut-être
01:44:04 se permettre, mais la réglementation et la norme c'est une chose publique et je pense
01:44:09 qu'il faut s'en saisir pour la discuter, pour la travailler, pour faire des essais
01:44:13 en laboratoire pour la faire évoluer, et donc là aussi s'investir sur ces questions-là,
01:44:18 je pense que, enfin je vois plus en plus de collègues qui travaillent justement dans
01:44:23 les réseaux, alors c'est plus sur le biosourcé, mais qui font des essais en laboratoire, voilà,
01:44:28 donc c'est aussi cette reconquête-là qui est à faire pour aller, pour travailler
01:44:35 cette question de l'évaluation du risque et ce frein-là, que je trouve pas majeur,
01:44:39 moi je vous rejoins pas là sur cette question du réemploi, il y en a d'autres plus compliquées.
01:44:42 Oui, il y a une, enfin on devrait avoir une approche holistique de l'écologie, mais
01:44:49 en même temps on procède tous par entrée, et donc voilà, comment on fait quand il y
01:44:59 a cette espèce de découpage qui est un peu arbitraire, pour moi la seule réponse qui
01:45:04 est pertinente c'est de réintroduire la dimension politique, c'est-à-dire que c'est le politique
01:45:09 ou c'est un espace politique qui permet finalement d'articuler entre elles ces différentes entrées,
01:45:16 c'est-à-dire que ce ne sont pas des entrées techniques, la question du vivant, la question
01:45:20 de la matière, voilà, ce ne sont pas des entrées techniques, donc il peut y avoir
01:45:25 une dimension technique dedans, ou une dimension scientifique, mais elles sont traversées
01:45:30 par des enjeux politiques, et donc réouvrir cet espace politique pour moi c'est une façon
01:45:35 de les articuler entre elles, et donc pour aller un cran plus loin, il faut faire de
01:45:41 la construction un champ de bataille. La construction c'est un champ de bataille dans lequel il
01:45:46 y a des guerres de position, pour reprendre le vocabulaire toujours de ce cher Gramsci,
01:45:53 et je crois que dans le monde de l'architecture, cette repolitisation elle est assez lente,
01:46:01 et assez difficile. Par exemple on voit bien sur la question du réemploi, tu parlais des
01:46:07 problèmes assuranciels, bon bah pour moi le réemploi aujourd'hui il est confronté
01:46:10 à des alternatives politiques qu'il ne pose pas, c'est-à-dire soit on va vers de la matière
01:46:16 qui va devenir du produit, avec des niveaux de garantie qui vont permettre de massifier
01:46:20 le réemploi, mais dans le fond on va réintégrer des logiques, on se cale sur des logiques
01:46:25 qui sont des logiques industrielles, soit on pense le réemploi comme une forme de résistance,
01:46:29 le réemploi c'est là pour ralentir, le réemploi c'est là pour singulariser, le réemploi
01:46:34 c'est là pour démassifier, et l'idée qu'on pourrait faire des trucs à grande échelle,
01:46:39 bah non, on va pas faire des trucs à grande échelle, on va justement empêcher les jeux
01:46:44 d'échelle, et en empêchant les jeux d'échelle on va se poser un ensemble de questions qui
01:46:50 sont des questions qu'on ne s'est pas posées. Voilà, mais ça c'est une question politique,
01:46:57 donc pour moi, voilà, faut pas aller juste du côté du réemploi en disant le réemploi
01:47:02 c'est super, on est confronté à des choix, qui sont des vrais choix politiques, ça veut
01:47:09 pas dire que, enfin voilà, moi je suis plutôt du côté de la non-massification, mais je
01:47:19 comprends très bien ceux qui vont dans l'autre sens aussi.
01:47:27 Juste une chose, puisqu'on parle de l'information, je pense qu'il est fondamental aussi, on parlait
01:47:34 du politique et du combat, de se positionner sur cette question là, c'est qu'il faut
01:47:39 que la validation et l'évaluation du risque et tout ce processus là, qui fait que, bon
01:47:46 parce que évidemment le bâtiment est très assuré à ses assurances, c'est garantie,
01:47:54 c'est une donnée avec laquelle on doit composer, et puis le risque c'est une question qui pourrait
01:47:57 être saisie par les philosophes, c'est de bien laisser ça comme c'était, enfin remettre
01:48:04 ça à l'endroit où c'était, le laisser aussi là où c'est, dans le champ des monuments
01:48:13 historiques, c'est du côté du savoir-faire et de l'artisan et du compagnon, c'est lui
01:48:17 qui qualifie, c'est lui qui valide et c'est lui qui donne la pérennité de l'ouvrage
01:48:22 et sa garantie finalement, et bien plus que là où on est aujourd'hui, c'est à dire
01:48:26 du côté du produit, et l'industriel a prescrit, a fait ses essais, a payé, et donc l'industriel
01:48:32 a les moyens, fait cet investissement, et donc vraiment se repositionner, on voit bien
01:48:38 que dans les monuments historiques, ils se foutent totalement d'avoir la fiche produit,
01:48:42 le PV truc, ils veulent le bon artisan, qui, parce qu'il s'affranchit de ces questions
01:48:47 là, qui lui, ils savent qu'il va garantir la pérennité de l'ouvrage et sa viabilité,
01:48:53 et donc il faut qu'on retourne là sur l'humain, sur ces questions là, c'est un truc à...
01:49:00 Voilà.
01:49:01 Julien, on est arrivé au bout de notre temps là, a priori.
01:49:05 Une dernière question.
01:49:06 Oui, mais c'est très léger comme question, ça conclura bien je pense, en toute modestie.
01:49:10 Je me demandais juste ce que vous aviez décidé de faire sur cette friche à Toulon.
01:49:16 Alors je ne sais pas ce qu'elle est devenue, parce que j'ai quitté l'agence d'urbanisme
01:49:23 de Toulon depuis. A priori elle est restée en état, et puis en plus elle est en zone
01:49:32 semi-inondable, donc elle ne devrait pas pouvoir être construite, mais si on nous disait maintenant
01:49:37 qu'on a fait tout ça, tout ce projet ville terrestre, et si finalement on tourne le dos
01:49:45 à l'objectif absolu de croissance urbaine, est-ce que Toulon, Provence, Méditerranée
01:49:51 doit gagner encore, doit se fixer des objectifs démographiques, de plus d'emplois, plus
01:49:56 de population, dans le scénario ville terrestre ce serait plutôt que non, et donc on avait
01:50:01 compté qu'il y avait à peu près, juste sur la ville de hier, il y avait 400 hectares
01:50:05 de friches agricoles, qui étaient de l'horticulture, donc du commerce de la fleur, qui étaient
01:50:10 complètement tombées à cause de la concurrence internationale, des fleurs qui arrivent d'Ethiopie
01:50:14 en avion, et tout ça, donc c'était tombé, mais c'était déjà de la culture super intensive,
01:50:20 mais que dans toute la métropole il y avait 1000 hectares de friches agricoles, et la
01:50:24 plupart, c'est de la friche, et donc si on faisait un programme ville terrestre ou bio-régional
01:50:31 dans la métropole de Toulon, il est fort probable que cet endroit deviendrait un espace
01:50:38 de production type maraîchère, ou en tout cas production agricole locale. Maintenant
01:50:45 je saurais comment conseiller, effectivement, je saurais que dire au conseil municipal,
01:50:51 et en tout cas on aurait des arguments pour les conseiller.
01:50:58 Merci beaucoup.
01:51:02 [Applaudissements]
01:51:09 [SILENCE]

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