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Art et designTranscription
00:00 Jusqu'à 13h30, les midis d'occulture.
00:04 Nicolas Herbeau, Géraldine Mosnassavoy.
00:08 Notre rencontre quotidienne, c'est une conversation à trois voix avec notre invitée.
00:13 Ce midi, elle est actrice et comédienne et tout lui réussit.
00:17 Depuis une vingtaine d'années qu'elle est tombée du nid, elle fait battre ses ailes
00:20 et déploie son talent au théâtre, à la télévision et au cinéma, poursuivie en
00:25 quelque sorte par la figure rassurante des oiseaux, qui lui permettent donc aujourd'hui
00:31 assurément de voler de ses propres ailes avec le syndrome de l'oiseau.
00:34 Premier spectacle qu'elle a mis en scène, co-mis en scène avec Renaud Meyer et dans
00:39 lequel elle joue également un rôle qui lui a valu l'an dernier un Molière.
00:42 Bonjour Sarah Giraudot.
00:44 Bonjour.
00:45 Bienvenue dans les midis d'occulture.
00:46 Merci.
00:47 Vous remontez donc avec ce spectacle sur les planches Sarah Giraudot, aux côtés de Patrick
00:52 Dassoum-Sao, un projet que vous portez d'ailleurs depuis plusieurs années, parce que je pense
00:56 que ça a commencé, si je ne dis pas de bêtises, un tout petit peu avant le confinement.
01:00 Oui, je suis tombée amoureuse du texte il y a pas mal de temps déjà.
01:03 Et vous le reportez aujourd'hui sur les planches donc, ça veut dire que cet investissement
01:08 il était si important que vous n'arrivez plus à vous détacher de ce spectacle ?
01:11 Non, je m'en suis détachée pendant pas mal d'années parce que finalement je l'ai
01:15 lu il y a longtemps.
01:17 Et puis il avait été abandonné et il revenait dans un coin de ma tête régulièrement.
01:22 Et voilà, je me suis rendue compte à quel point j'y étais attachée de manière bien
01:29 plus forte que ce que j'avais pu penser.
01:31 Et c'est pour ça que j'ai décidé aussi de le mettre en scène.
01:35 C'est quoi comme attachement ? Justement, comment on est attaché à un texte ? Est-ce
01:39 que c'est physique ? Est-ce que c'est le besoin de le rejouer tous les soirs ?
01:44 Mais justement, je pense que c'est très étrange.
01:47 Il y a certains textes où l'inconscient de l'auteur vient parler à l'inconscient
01:51 du lecteur.
01:52 Et au début, on ne sait pas exactement pourquoi ça résonne.
01:56 Et c'est vrai que là, une histoire de séquestration depuis 18 ans, c'est tellement horrible.
02:04 En fait, je n'ai jamais été attirée par l'horreur en tant que telle.
02:07 Ce n'est pas du tout des choses qui me poussent à la création, qui me poussent à la rêverie.
02:13 Et donc pour le transcender, c'était un petit peu étrange.
02:17 Mais déjà, le sujet ne me plaisait pas.
02:19 Et en fait, quand j'ai lu ce texte de Pierre Tréhardy, la forme qu'il y a mis, c'est-à-dire
02:25 le thriller, il y a une dramaturgie qui est extrêmement bien construite.
02:29 Et ensuite, la poésie qu'il y a mis et l'humanité qu'il a mis dans ses personnages,
02:35 ont fait que c'est… on sortait de l'histoire horrible pour en créer une histoire tout
02:41 à fait particulière.
02:43 Après, je pense que pourquoi ça m'a parlé, c'est que cet oiseau à qui on coupe les
02:46 ailes en fait, toute jeune, c'est comment le cerveau va développer des armes pour survivre.
02:52 Et ça, je pense que c'est un sujet qui me touche profondément au cœur depuis très
02:58 longtemps.
02:59 Ça, je pense que ça vient de ma mère, ça vient de notre histoire familiale.
03:02 Et c'est pour ça aussi que je suis toujours en admiration des résilients, des gens qui
03:08 ont eu des passifs extrêmement lourds et comment ils réussissent à survivre.
03:12 Ça, c'est un sujet qui me passionnait et il est au centre de cette pièce.
03:18 *musique*
03:22 Je m'appelle Eve.
03:24 Je suis sa prisonnière dans la maison.
03:28 *musique*
03:33 Il a coupé toutes les horloges et le fichage du micro-ondes aussi.
03:37 Je n'ai même pas de montre.
03:39 Je ne connais même pas mon âge.
03:41 Il m'a enfermée.
03:43 Ça fait tellement longtemps.
03:47 Je rentrais du collège, ça je le sais.
03:50 J'avais 10 ans je crois.
03:52 Et il m'a enfermée pour toujours.
03:55 *musique*
03:58 Une fois, j'ai aperçu un grand arbre devant la maison, comme un sapin de Noël mais plus clair.
04:04 Alors, il va me chercher.
04:06 Il va me chercher parce qu'il veut nous emmener dans le grand nord.
04:09 Peut-être qu'il veut simplement nous tuer.
04:11 Il va me tuer, je vous dis.
04:15 Moi, je ne veux pas mourir.
04:17 Vous êtes là ou pas ?
04:19 Je ne sais pas si vous êtes vrais mais j'ai besoin de vous là.
04:24 Je m'appelle Eve.
04:26 Je suis sa prisonnière dans la maison.
04:29 *musique*
04:31 Extrait Sarah Giraudeau de la bande-annonce de ce spectacle "Syndrome de l'oiseau"
04:36 où vous interprétez Eve, cette jeune femme enfermée avec son enfant dans un appartement en sous-sol.
04:42 Patrick D'Assoumsao, lui, joue votre conjoint, Franck,
04:46 qui lui rend visite pour déjeuner avec elle, pour lui parler.
04:50 C'est ça qui est intéressant.
04:52 Là, on entend tout de suite dans cette bande-annonce la tension, l'angoisse,
04:56 cette montée dramatique dont vous parliez juste avant.
04:58 Mais ça débute quand même par quelque chose d'assez quotidien, d'assez banal.
05:03 Il vient déjeuner avec elle.
05:04 On ne sait pas très bien où on est au début.
05:05 C'est le problème de faire des bandes-annonces dans des projets où il y a une dramaturgie très forte.
05:11 Parce qu'on ne peut pas livrer des informations qui vont gâcher la vision du spectacle.
05:18 Et là, sur cette pièce, c'était extrêmement difficile de faire une bande-annonce.
05:23 Et donc, on en est resté à cette partie mystérieuse où on ne sait pas si elle parle à quelqu'un,
05:29 est-ce que c'est dans sa tête, est-ce que c'est vraiment quelqu'un ?
05:31 Bref, parce qu'en fait, tout le reste, on ne peut pas le livrer.
05:34 Mais c'est vrai que du coup, on ne peut pas rendre compte de la quasi-normalité qu'il y a dans ce rapport
05:41 entre Ève et Franck, qui est ce rapport de manipulation depuis des années,
05:47 dans lequel il y a de l'attachement, il y a de l'amour, il y a de la haine, il y a de la peur,
05:52 mais il y a aussi de la douceur.
05:54 Voilà, le rapport de manipulation, il est extrêmement intéressant, je veux dire, à développer en répétition.
06:02 C'était vraiment le travail le plus difficile, c'était de réussir à ce que pour eux, c'est une normalité,
06:09 alors que pour le public, tout est anormal.
06:11 Oui, parce que quand on est dans le public, effectivement, on sait, on connaît l'histoire,
06:15 ce fait divers, inspiré notamment de cette histoire de Natacha Kampusch,
06:19 cette fillette autrichienne qui a été séquestrée, enlevée à l'âge de 10 ans,
06:22 et séquestrée durant une dizaine d'années, effectivement.
06:26 Et vous nous plongez dans cette ambiance, parce qu'il y a cette musique qu'on a entendue,
06:30 vous avez participé à cette mise en scène, il y a quelque chose aussi,
06:35 et c'est là la complexité de ces personnages, où on passe par toutes les émotions.
06:40 On est inquiet pour elle, on est face à une scène du quotidien d'abord, on rit aussi,
06:46 et j'ai été surpris de voir effectivement la salle hier soir notamment rire à de nombreuses reprises.
06:52 Mais parce que je pense qu'il y a un pathétique dans l'horreur, et dans la normalité dans l'horreur,
06:57 ça devient le pathétique rentre en jeu.
07:00 Et c'est là où l'écriture de Pierre Tréhardy est géniale, je trouve,
07:04 parce qu'il y a mis dans son écriture ce pathétique-là,
07:08 et une espèce de rythmique, avec parfois des répliques qui fonctionnent comme des flèches.
07:13 Il y a une enfance aussi à elle dans la manière de parler, qui à des moments est drôle,
07:20 parce qu'il y a une vraie innocence dans une situation qui est totalement terrible.
07:25 - Qui provoque un décalage d'ailleurs.
07:27 - Qui provoque un décalage total, et puis lui a assumé à ce point-là, à des moments, cette méchanceté,
07:34 alors qu'à d'autres moments il va assumer son côté beaucoup plus humain.
07:39 Ce sont des mélanges qui font qu'à un moment donné, on est pris par ces vagues d'émotions,
07:46 qui sont les vagues un peu humaines, mais je pense que le rire vient aussi du soulagement.
07:50 Et après la première partie, le public a besoin de se soulager,
07:55 parce que c'est elle qui prend aussi un petit peu le dessus.
08:00 - Sarah Giordo, vous venez de parler du texte,
08:05 mais vous avez parlé aussi de ce qui est intéressant dans tout le travail, dans les répétitions,
08:09 c'est-à-dire de jouer quelque chose de normal, enfin normalement quelque chose d'anormal.
08:13 Comment vous avez procédé pour faire ça, pour par exemple préparer un repas de manière tout à fait normale,
08:20 tout en laissant apparaître qu'il y avait une anormalité peut-être dans un geste,
08:23 dans la disposition, dans la mise en scène elle-même ?
08:27 - En fait, l'anormalité elle est déjà dans le sujet, elle est dans le sujet, elle est dans le texte.
08:32 Donc c'est ce que je disais beaucoup avec Renaud Meyer, avec Patrick Dassume-Sao,
08:39 c'est qu'en fait il ne faut pas jouer, on ne va pas jouer la méchanceté,
08:43 il faut trouver l'humanité qu'il y a entre les répliques,
08:50 et cette manière de dire les choses comme on le dirait dans la vie.
08:55 Et c'est vrai que ça se base énormément sur l'écoute.
08:59 Moi l'écoute c'est un peu la règle d'or de ce métier, franchement.
09:06 - Plus que de parler en fait ?
09:07 - Bien plus que de parler, parce qu'en fait l'écoute c'est ce qui va engendrer comment vous allez parler.
09:14 Donc avant de penser, c'est exactement ça le travail, c'était avant de dire comme tu as envie de le dire,
09:21 essayons de nous écouter le plus possible, comment on va entendre ce que tu me dis,
09:27 et comment du coup je vais pouvoir te répondre.
09:29 Et c'est là où cette normalité aussi va arriver, parce que dans la vie si je vous parle et que vous me répondez,
09:35 avec des réactions différentes, mais c'est vrai que cette normalité vient à un moment donné de la qualité de l'écoute
09:43 pour que les acteurs soient profondément branchés et connectés l'un à l'autre.
09:48 Et c'est là où je pense qu'il y a une espèce de naturel où les gens sont assez perturbés,
09:55 de se dire "mais c'est fou parce qu'on voit une situation terrible,
09:59 mais on se rend compte de la chose petit à petit, et en même temps à des moments on a l'impression que..."
10:04 Mais parce qu'il y a cette espèce de vérité qu'on a essayé de mettre en place dans le rapport
10:09 pour sortir complètement de ce rapport qui aurait pu être très manichéen,
10:16 un méchant très méchant d'un côté et une soumise très soumise de l'autre.
10:20 Mais le rapport de manipulation il apporte ce rapport humain obligatoire.
10:25 Là même dans la pièce c'est plus lui qui rentre dans l'univers de Ève,
10:30 c'est pour ça que dans la mise en scène c'était très important,
10:34 j'ai eu envie de la faire avec mon amie Renaud Meillère,
10:37 mais parce que Ève prenait une place, elle était dominante,
10:42 pas dominante forcément dans le rapport, mais dans l'espace, dans l'univers.
10:47 Donc c'est presque un franc qui est invité dans l'univers de Ève,
10:51 et ce qui fait aussi que ça adoucit énormément, même si c'est lui qui a engendré tout ça,
10:55 cette situation, c'est ce qui adoucit aussi énormément l'univers.
11:00 Il ne fallait absolument pas rendre cette pièce, en faire un spectacle terrible
11:05 où les gens allaient en ressortir à vouloir vomir ou sortir de la salle, pas du tout.
11:10 Et d'ailleurs c'est lui aussi qui lui renvoie la réplique presque,
11:14 puisque vous l'avez dit, il y a une forme d'enfance, d'innocence dans ce personnage de Ève
11:18 qui n'a connu comme repère que ce franc, puisqu'elle est enfermée depuis 18 ans,
11:23 et qu'elle a développé une forme d'imaginaire, une forme de folie,
11:28 dont on disait tout à l'heure un décalage, et c'est lui qui parfois va continuer à l'entretenir
11:35 dans ce jeu-là, en lui disant "oui, oui, j'ai eu le docteur, ne t'inquiète pas, tout va bien, tu vas mieux".
11:40 Il y a une forme aussi, il la maintient avec ces répliques-là,
11:44 "je n'aime pas que tu rêves", "quand tu commences à réfléchir, pense à autre chose".
11:48 Il y a toute une forme de psychologie très importante.
11:51 - Oui, la dimension psychologique est extrêmement importante,
11:54 comme dans toute manipulation, et comme dans toute manipulation extrêmement longue.
11:59 C'est vrai que lui, il la maintient en la rassurant sur certaines choses,
12:03 et en même temps en continuant à la garder en vie,
12:08 il l'empêche de réfléchir, il n'a pas envie qu'elle réfléchisse,
12:10 mais en même temps il a envie qu'elle fasse du piano,
12:13 parce que sinon c'est la mort, lui il le sait très bien.
12:17 À un moment donné, lui il est dans un moment où son système ne fonctionne plus,
12:22 et c'est lui qui commence à se faire bouffer par cette petite vie
12:28 qui prend bien trop de place dans sa vie à lui.
12:31 - Comment vous faites pour maintenir cet équilibre,
12:34 entre effectivement si on est trop proche du fait divers, quelque chose de trop réaliste,
12:38 qui nous plonge dans quelque chose de glauque qu'on n'a peut-être pas envie de voir,
12:41 et en même temps si on est trop poétique, quelque chose peut-être qui retire de la puissance
12:45 aussi à ce qu'a vécu ce personnage de Eve V ?
12:49 - Ça c'était le plus compliqué dans la mise en scène,
12:54 et en même temps c'était ce sur quoi on était complètement raccord avec Renaud Meyère dès le départ.
13:00 C'était vraiment cette ligne très ténue entre le réalisme et l'imaginaire.
13:08 Et donc on a constamment travaillé pour essayer de garder du réalisme qui vient de cette normalité,
13:16 qui vient je pense du rapport humain, de la vérité dans le rapport humain.
13:21 Donc ce réalisme-là il est là, il est aussi dans le décor où il fallait mélanger imaginaire et réalisme.
13:28 Jacques Gabel a fait un travail merveilleux parce qu'il fallait qu'on sente
13:33 que l'artisanat de Franck est là-dedans, et en même temps ça lui apporte beaucoup de poésie,
13:39 et en même temps de la noirceur parce qu'il y a quelque chose d'assez étouffant.
13:44 Et en même temps son univers à elle de l'art avec ce piano qui est gravé,
13:48 parce que c'est par l'art aussi que le cerveau se défend dans les longues enfeintes.
13:54 - Et plus que le fait divers, est-ce que vous n'avez pas eu peur de faire une pièce
14:01 qui est trop reprise ou mal interprétée par rapport aux problématiques qu'on peut soulever en ce moment
14:08 sur le rapport entre les hommes et les femmes ?
14:11 C'est-à-dire de se dire "là c'est une pièce qui va édulcorer quand même l'emprise,
14:15 ou qui va la rendre poétique, imaginaire".
14:19 Est-ce que vous n'aviez pas peur d'être récupérée d'une manière ou d'une autre, ou incomprise ?
14:22 - Non, justement je ne fais plus attention à ça parce qu'on est dans un monde
14:28 où on nous dit ce qu'on doit faire avant même qu'on essaie de le faire.
14:32 Ou "attention à ce que vous allez faire avant même que vous essayiez de penser".
14:36 - Vous ne voulez pas vous auto-censurer ?
14:37 - Non, il ne faut pas s'auto-censurer.
14:39 Après je pense que dans beaucoup de textes, chacun y voit des tas de sujets.
14:43 On parle en fait de tas de sujets même si on ne s'y attache pas concrètement
14:47 ou forcément pendant qu'on y travaille.
14:50 Mais dans les bons textes, je trouve que ça soulève énormément de sujets.
14:54 Et donc bien sûr que dans cette pièce, il y a le rapport de la manipulation de l'homme sur la femme.
14:59 Bien sûr qu'il y a des tas de sujets qui ressortent.
15:02 Après moi, celui qui m'a touchée profondément, c'était plus cet instinct de survie.
15:07 Alors bien sûr c'est dans le rapport de manipulation qu'on développe ça entre l'homme et la femme.
15:12 Mais quelque part, il n'y avait même pas forcément de sexe au départ.
15:16 C'était comment fonctionne la manipulation d'un humain sur un autre humain.
15:21 Et comment un petit oiseau blessé réussit à survivre dans des conditions terribles.
15:26 Mais après je ne me suis pas censurée aussi parce que ça ne retrace pas un fait divers.
15:32 Ça n'est pas du tout l'histoire de Natacha Kampusch.
15:34 L'histoire de Natacha Kampusch, c'est juste ça.
15:36 Inspirer l'auteur de se dire comment c'est possible que des situations comme ça existent.
15:41 Comment c'est possible que ce monde soit aussi fou.
15:43 Et donc du coup, c'est parti de là.
15:45 Mais sinon, si c'est pour juste retranscrire un fait divers,
15:49 je préfère regarder un documentaire ou faire un documentaire.
15:51 J'en apprendrai bien plus.
15:53 Par contre, s'il y a de la fiction, comme lui dans son texte,
15:56 il y a de la fiction puisqu'il met de la dramaturgie.
15:58 Et le thriller, c'est lui qui fait un travail.
16:01 Au final, c'est lui qui fait le travail le plus gros.
16:04 Quand il y a une dramaturgie qui avance comme celle du syndrome de l'oiseau,
16:09 en fait on est dans une fiction et on dépasse le cadre d'une forme de réalité.
16:14 Dans ce cas-là, quelque part, tout est possible pour moi quand il y a une dramaturgie qui fonctionne.
16:18 C'est là où on passe dans le domaine de la fiction.
16:21 Et c'est là où on peut, je pense, faire pas ce qu'on veut,
16:25 parce qu'il faut faire attention entre cette fragile frontière entre réalisme et fiction.
16:29 Mais je pense en tout cas qu'on peut dire énormément de choses
16:33 et l'évoquer de manière très différente parce qu'on est beaucoup plus libre.
16:38 Parce qu'il y a une vraie fiction dans la manière de raconter l'histoire.
16:42 Quand je raconte l'histoire des semelles de plomb de René,
16:46 c'est aussi un hommage à l'effort, au courage des acteurs.
16:50 Moi je voudrais quand même rappeler que c'est énormément de travail.
16:55 C'est énormément de travail.
16:57 Ça n'est pas répéter un texte en blue jeans avec une cigarette à la main.
17:02 C'est pas ça.
17:03 C'est mettre son corps à la disposition d'un autre corps imaginaire.
17:08 C'est faire entrer en soi un personnage.
17:10 Ce sont des invocateurs, ce sont des évocateurs.
17:13 Ils invoquent un personnage.
17:16 Donc c'est beaucoup d'efforts.
17:18 C'est un vrai travail.
17:20 Ils doivent être le plus athlétiques possible.
17:23 Ils doivent avoir le corps le plus disponible possible.
17:27 Ils doivent faire attention à leur voix.
17:31 Ça ne veut pas dire se chouchouter ni se chochoter.
17:34 Ça veut dire au contraire être très exigeant vis-à-vis de chacun d'eux.
17:39 Les semelles de plomb pendant trois mois pour pouvoir voler à un moment,
17:44 c'est presque la métaphore de ce que c'est.
17:47 C'est-à-dire savoir admettre que Puck vole
17:51 et que l'acteur doit donner l'impression de voler.
17:55 Et que pour ça, ses jambes, ses meulées, sa respiration doivent être très entraînées
18:02 pour que le rythme qu'il s'impose dans sa course, dans ses arrêts,
18:07 sa souplesse soit presque inhumaine.
18:13 J'adore !
18:15 La voix de la metteuse en scène Ariane Mouchkine, c'était dans L'Heure bleue sur France Inter en 2014.
18:21 En vous voyant hier sur scène, puis en écoutant et en recherchant cette archive d'Ariane Mouchkine,
18:28 j'ai presque l'impression que vous pourriez dire ça.
18:31 C'est incroyable !
18:33 J'ai tellement rêvé de travailler avec cette femme.
18:38 Mais là, ce qu'elle dit, c'est exactement ça dans les sensations.
18:42 Notamment sur l'idée de la place du corps, de l'athlétisme, de l'endurance,
18:51 des semelles de plomb pour pouvoir s'envoler.
18:54 C'est-à-dire que ce sont des contradictions qu'il faut gérer
18:58 parce que c'est extrêmement lourd tout en atteignant dans le travail des moments d'envol incroyable.
19:06 Mais c'est vrai que tout ça, elle a raison, c'est énormément de travail.
19:11 Et elle parle si bien du travail des acteurs, c'est très beau.
19:17 Et du métier de metteur en scène puisque c'est aujourd'hui aussi votre nouveau métier, Sarah Giraudot.
19:22 Est-ce que vous avez l'impression de demander des choses inhumaines parfois à votre corps ?
19:27 Et par exemple au corps de Patrick Dassin-Massao avec qui vous avez préparé ce spectacle ?
19:34 Non, à mon corps, je n'ai pas l'impression de lui demander des choses inhumaines.
19:38 Je pense qu'il y parvient à des moments parce qu'il est poussé à.
19:44 Mais je n'ai pas la conscience de me dire qu'il faut que je passe toujours par le rêve
19:49 et par le personnage que je dois jouer et comment son corps petit à petit va rentrer dans le mien
19:55 et comment du coup mon corps va se désarticuler, va se transformer un peu pour devenir lui.
20:02 Après en tant que metteur en scène, quand on est comédien, on culpabilise beaucoup.
20:10 Je culpabilisais beaucoup pour mon partenaire parce que de jouer avec une comédienne qui met en scène,
20:17 ce n'est pas facile parce qu'en plus moi je ne lâche rien, je suis extrêmement exigeante.
20:22 Je pense avoir du côté de mon père là-dessus, j'ai un gros problème avec l'exigence.
20:27 Il y a des tas de choses que je ne lâche pas, je suis tout le temps, tout le temps, tout le temps.
20:31 - En détail vous voulez dire ? - Le moindre détail.
20:34 Les choses arrivent par step, on n'est pas du tout, tous les détails n'arrivent pas dès le départ.
20:38 C'est pour ça que la mise en scène c'est magnifique parce qu'il y a vraiment des étapes.
20:41 Et on voit chez les comédiens quelles étapes peuvent arriver.
20:47 Ça y est, on peut passer maintenant à cette étape parce qu'il est arrivé à cette étape-là.
20:51 Et que là, après seulement, mais moi les étapes que je voyais à des moments qui allaient beaucoup plus loin,
20:56 je savais qu'il fallait que je patiente et qu'il fallait attendre d'être arrivé à telle...
21:01 Donc la mise en scène c'est aussi une énorme patience parce que c'est une anticipation d'énormément de choses.
21:08 Parce que vous avez énormément de choses dans la tête qui sont déjà très claires.
21:13 Qui sont des rêves aussi que vous ne pourrez pas atteindre et que vous allez devoir aussi avec le temps transformer.
21:18 Et en même temps vous allez avoir énormément de temps pour parvenir à certaines choses.
21:23 Et qu'il faut connaître ces étapes-là pour ne pas brusquer les acteurs.
21:28 Et c'est vrai que du coup Patrick d'Assume Sao il a fait un énorme travail sur le temps.
21:33 Parce que c'est des rôles qui sont... Les rôles de gros gros méchants, c'est vraiment des rôles extrêmement compliqués.
21:38 Et par rapport au soi effectivement, au soi humain dans la vie et comment réussir à mettre du soi
21:44 dans un personnage qui est à tous les niveaux terrible.
21:49 C'est aussi très compliqué au niveau psychologique.
21:52 Donc il y a tout un travail, il y a toute une montée qui se fait doucement et des étapes qui se passent.
21:57 Et voilà, de jouer entre comédiens en sachant qu'il y a une comédienne qui va aussi analyser énormément de choses de ce que vous faites.
22:05 Tout en jouant, tout en travaillant pour essayer de gravir tous ces échelons-là.
22:11 C'est pas facile mais ça s'est très bien passé.
22:15 - Justement vous avez l'impression que c'est une... Puisque c'est nouveau aussi pour vous, une relation déséquilibrée ?
22:21 Entre celui qui joue, le metteur en scène, la metteuse en scène qui joue aussi un rôle dans ce spectacle-là ?
22:27 Ou est-ce que vous vous êtes dit "de toute façon c'est moi qui prends le risque de mettre en scène donc il faut que j'aille au bout" ?
22:33 - Je pense que tout vient du rapport et du choix des partenaires que vous choisissez.
22:39 Je pense que ça dépend des acteurs, ça dépend des metteurs en scène.
22:45 Puisque Renaud Meyère était metteur en scène aussi à la base, je l'ai rencontré sur "Zelda" et "Escote-Fut Gérald" c'est lui qui avait mis en scène.
22:52 Donc je pense qu'il faut choisir aussi les natures où vous pensez qu'artistiquement vous allez bien vous entendre.
22:59 Mais choisir des natures aussi qui vont comprendre pourquoi vous avez choisi d'être là, de faire ce travail-là.
23:07 Et en quoi ils vont pouvoir vous accompagner et quel vont être leurs rôles à eux.
23:13 Et Patrick, il a très bien compris aussi tout de suite et c'est pour ça qu'il a été très fort dans cette manière de gérer ce rapport avec une comédienne et en même temps une metteuse en scène.
23:22 Et il y a un rapport de confiance qui s'est petit à petit mis en place et de plus en plus mis en place et qui s'est vraiment scellé.
23:28 Et tandis que dans le rapport aussi de metteuse en scène, on ne peut pas être deux metteuses en scène avec des natures de feu.
23:35 C'est impossible à prendre les mêmes décisions.
23:39 - C'est vous le feu ?
23:41 - Oui, surtout il y en a forcément un qui a rêvé le projet en premier, qui l'a porté, qui veut le porter.
23:48 Et que du coup l'autre metteur en scène qui va venir l'accompagner, il sait à quelle place il va être.
23:56 C'est pas qu'il va être moins metteur en scène, pas du tout.
23:59 Il va être metteur en scène mais il va accompagner d'une autre manière.
24:02 Il ne va pas être la locomotive dans le sens sur la manière dont le projet a été imaginé.
24:10 Et Renaud Meillard ne connaissait pas ce texte, il ne l'a pas rêvé.
24:13 Le sujet profond ne le touchait pas autant que moi.
24:17 Donc il a su tout de suite être le partenaire idéal.
24:22 C'est-à-dire voilà, il m'a porté un accompagnement qui était extrêmement précieux.
24:29 Tout en me laissant une place énorme à ce que je voulais en faire moi dès le départ.
24:35 Et ça je pense que ça dépend beaucoup des natures que vous choisissez.
24:39 Il y a certains metteurs en scène ou des acteurs qui n'accepteront pas.
24:42 Ils auront besoin de prendre la place ou ils auront besoin de...
24:47 Voilà, c'est pas... ça dépend.
24:49 - Sarah Giraudot, vous avez dit que vous étiez très exigeante.
24:52 Mais ça passe par quoi ce genre d'exigence ? Il y a quelque chose qui vous insupporte ?
24:57 - Un truc qui me... - Mais même vis-à-vis de vous en tant que comédienne ?
25:01 - Oui, c'est-à-dire que j'ai... je dois avoir une attraction pour la vérité.
25:09 J'ai besoin d'atteindre à des moments une forme de vérité.
25:14 Je ne sais pas exactement où elle se situe parce que dans ce métier,
25:17 elle se situe quand même à des endroits très différents pour chacun.
25:20 Il y en a, ils vont voir des spectacles, ils vont se dire "Oh là là, c'était génial, ça m'a pris aux tripes".
25:25 Et puis il y en a d'autres qui vont se dire "Mais j'ai pas du tout accroché".
25:28 Donc notre vérité, elle est placée à notre niveau.
25:32 Mais il y a quand même quelque chose dans mes ressentis,
25:38 souvent avec lequel je déroge pas.
25:41 Là, je sais qu'on est dans la vérité.
25:43 Là, je sais qu'il y a des soirs où on ne l'est pas, où on est à côté, où on est...
25:47 - Donc ça dépend des soirs ? - Parce que c'est des pièces aussi...
25:50 Là, maintenant, ça bouge de moins en moins, mais c'est des pièces qui sont très mouvantes
25:53 parce que c'est vraiment des pièces d'acteurs aussi.
25:55 Ça se base énormément sur le jeu, sur la connexion qu'il y a entre les acteurs.
25:59 Et donc parfois, vu de l'extérieur, peut-être que la différence se verra pas énormément,
26:04 mais moi, de l'intérieur, je suis capable de trouver des différences immenses
26:09 dans la vérité qu'on a livrée à des moments sur scène.
26:13 Et ça, c'est pareil dans les répétitions.
26:15 Ça va être sur une réplique, ou même sur un bout de réplique,
26:19 ou même sur comment on va se répondre à ce moment-là,
26:24 ou même sur un temps.
26:26 Tout veut dire quelque chose, tout apporte une vérité,
26:29 ou peut la casser de manière très superficielle.
26:35 Même parfois, quelque chose de très superficiel, et pas grave du tout,
26:38 est capable de vous casser une vérité.
26:40 Et donc ça, moi, c'est quelque chose auquel je suis très alerte,
26:44 et en même temps, il faut que je relâche.
26:47 Et c'est ça qui est beau aussi d'être comédienne sur un projet,
26:50 c'est qu'à un moment donné, on est obligé de lâcher.
26:53 - Et juste de jouer ! - Et juste de jouer.
26:55 Et juste d'être en connexion avec le public, avec votre partenaire.
26:59 Et puis s'il y a des choses où ça commence à faire des nœuds à l'intérieur,
27:02 parce qu'il y a des moments où vous ne sentez pas cette vérité,
27:04 et que ça vous agace, il faut tout de suite le lâcher,
27:07 et se dire "mais en fait, ce moment-là sera comme ça,
27:12 c'est l'histoire de ce moment-là, et c'est pas pour ça qu'il n'y a rien,
27:16 c'est autre chose, et si pour toi c'est peut-être moins bon,
27:20 ou c'est moins dans la vérité que tu chéries,
27:24 il y a quand même quelque chose.
27:27 Et il faut préserver ce quelque chose-là,
27:30 parce que c'est là où sinon vous détruisez vous,
27:33 vous détruisez votre partenaire, vous détruisez le spectacle que vous mettez en scène.
27:37 Et ça, c'est pas bon. Et comme moi, c'est ma première mise en scène,
27:40 j'apprends tout ça, j'apprends à essayer de me foutre un peu la paix,
27:44 mais cette exigence, je vais jamais la lâcher.
27:49 C'est quelque chose où, quand je vois chez les gens de la non-exigence,
27:54 c'est souvent quelque chose qui me désole un petit peu.
27:58 - On va commencer ? - Pourquoi je suis là ?
28:04 Je t'aime bien, alors on va faire ça vite.
28:07 On sait que tu traînes avec les amortisseurs.
28:09 - Oui, je bosse avec lui. - Je sais.
28:12 - Depuis combien de temps tu bosses pour lui ? - Quelques semaines.
28:15 Il m'a recrutée comme doctorante, on fait de la sismologie.
28:18 De la sismologie ?
28:20 Tu me sors ta salade avec ta gueule de petit chaton, mais c'est bon, on sait.
28:26 Ça fait un an et demi qu'on bosse sur lui.
28:28 - Vous savez quoi ? Je comprends rien. - Reza Mortazavi, c'est pas de la sismologie.
28:33 Il bosse pour les Iraniens, comme toi.
28:38 Reza, c'est pas un Iranien.
28:40 C'est un Iranien, mais il travaille pas pour les Iraniens.
28:44 En France. En France, il travaille pour l'Institut Physique du Globe.
28:48 En Iran, je sais pas du tout pour qui il travaille.
28:51 C'est à la fac à Téhéran. Je comprends pas, du coup, pourquoi je suis là.
28:56 - Tu comprends pas ? - Non.
28:58 - Quand je te parle, tu comprends pas ? - Non, je comprends rien.
29:02 Je t'aime.
29:04 Extrait de la série "Le Bureau des Légendes".
29:13 C'était la première saison épisode 5.
29:15 Une série d'Éric Rochand.
29:17 Pour ceux qui ne l'ont pas vue, c'est sur les services secrets français.
29:20 - Où vous incarnez Sarah Giraudeau, Marina l'oiseau, avec sa, je cite, "gueule de petit chaton".
29:26 Et vous, vous l'avez souvent dit, on vous a souvent donné des rôles de petite oiseau.
29:31 Celui-là, c'est celui qui vous a fait connaître au grand public, avec ce personnage, cette saison, et ce temps long,
29:38 puisque c'est 5 saisons de 2015 à 2020.
29:42 Qu'est-ce que ce personnage vous a fait ? Vous faites encore rire d'ailleurs.
29:45 - Vous avez choisi un super extrait. C'était une de mes scènes préférées sur les 5 saisons.
29:50 Donc c'est drôle d'avoir choisi celle-là.
29:52 Là où l'écriture d'Éric Rochand, Camille de Castelnau, c'est quand même génial.
29:57 - Ce personnage, il représente quoi pour vous aujourd'hui ?
30:02 Et comment est-ce que vous l'avez vu aussi évoluer ?
30:04 Parce que nous on l'a vu en tant que spectateur évoluer,
30:06 mais est-ce que pour vous en tant qu'actrice, aussi il a changé et il vous a apporté quelque chose en tant que professionnel de la comédie ?
30:14 - Il a évolué, à travers la dramaturgie qu'il y avait au fur et à mesure des 5 saisons,
30:19 il a évolué par rapport au rapport que j'ai eu avec ce métier que je ne connaissais absolument pas.
30:24 Voilà, les agents secrets.
30:27 C'est un monde que je ne connaissais pas du tout et que forcément au fur et à mesure des 5 ans,
30:31 on s'y est intéressé, on a rencontré aussi des gens.
30:35 Et donc j'ai été vraiment assez fascinée par ce monde-là.
30:39 Donc du coup, je travaillais sur les saisons en y connaissant toujours un petit peu plus.
30:45 Et c'était extrêmement agréable.
30:47 Après sur le rôle, je pense que c'est des rencontres avec des rôles et avec des cinéastes,
30:54 qui sont extrêmement importantes pour des acteurs,
30:57 parce que j'avais beaucoup de mal, moi, à l'image d'exister en tant que qui j'étais.
31:04 C'est-à-dire que quand on a beaucoup de contradictions en nous, entre ce qu'on dégage, ce qu'on est à l'intérieur,
31:10 au départ le cinéma, il n'aime pas trop les contradictions.
31:13 Mais ça, ça l'extrême beaucoup, parce qu'il y a une différence entre la rude, la dureté de la scène
31:19 et en même temps, comme elle le dit, semelle de plomb en vol.
31:22 C'est pour ça que Ariane Mouchkine parle exactement du théâtre.
31:26 Qu'est-ce qui représente le théâtre ?
31:29 C'est cette lourdeur et en même temps cet envol, cette légèreté qu'il faut.
31:34 Et c'est vrai que ça, ça représente le théâtre.
31:37 Donc ça représente aussi toutes les contradictions qu'il peut y avoir dans votre personnalité.
31:42 À l'image, c'est très étrange parce qu'il faut assez vite dégager ce que vous êtes.
31:47 S'il y a des contradictions, on n'a pas le temps de les voir, ou ce n'est pas ça qu'on veut voir.
31:52 Et du coup, il y a quelque chose qui passe, qui passe très vite.
31:56 Quand vous avez une petite voix d'oiseau, une gueule de petit chaton et que vous êtes toutes minces,
32:01 il y a quelque chose qui se fait tout de suite et on n'a pas le temps de dire ouf, que c'est oui ou non, ou c'est ça.
32:10 Et là, dans un rôle comme ça, c'est magnifique parce qu'on a besoin de cette contradiction.
32:15 On a besoin de cette force intérieure et en même temps de cette fragilité extérieure.
32:20 Et c'est rare, sont les rôles qui demandaient ça en fait.
32:23 C'est pour ça que pour vous, Éric Rochon, vous le présentez comme votre bienfaiteur
32:28 parce qu'il a justement permis à l'actrice que vous étiez d'être plus complexe
32:34 que ce qu'on peut faire normalement au cinéma ou à la télévision, en tout cas quand on est filmé.
32:38 Complètement, parce que du coup, c'était un rôle qui, à travers sa dramaturgie,
32:42 permettait de montrer énormément de choses.
32:45 Après, je n'étais pas là à devoir jouer la forte et en même temps être la fragile.
32:50 Tout ça était dans la... C'est là où la dramaturgie et où l'écriture est extrêmement importante dans les personnages.
32:59 Les personnages, ils existent énormément, enfin ils existent à part entière dans l'écriture.
33:04 Après, nous, on vient apporter notre nature et c'est vrai que cette...
33:08 Je remercie Éric d'avoir su lire à l'intérieur d'une actrice sa force de décision.
33:18 Je pense que ce n'est pas une force... Je veux dire, on ne se dit pas "Tiens, elle est..."
33:23 - Une force physique. - Une force physique.
33:25 C'est une force vraiment mentale. La force de décision, la force d'être qui tu es
33:32 tout en ayant une apparence timide, fragile et en même temps soi-disant innocente.
33:39 Mais il y a aussi des raisons.
33:42 Et ça, du coup, il est parti chercher tout ça.
33:44 Et c'est ce qui l'a profondément intéressé pour ce rôle de Marina.
33:48 Parce que les agents secrets...
33:51 - Sont peut-être un peu complexes aussi. - Sont un peu complexes.
33:54 Et justement, les femmes qui ont ces deux ors-là font souvent partie...
34:00 On m'avait dit souvent "des très très bons agents secrets" parce qu'on ne doute de rien.
34:06 - Sarah Giraudeau, qu'est-ce qu'on vient chercher quand on prépare un film ?
34:10 Vous avez fait depuis beaucoup de films, notamment en 2017 "Petit Paysan"
34:14 pour lequel vous avez reçu le César de la meilleure actrice pour un second rôle.
34:19 Qu'est-ce qu'aujourd'hui un réalisateur vient chercher chez vous ? Est-ce que vous savez ?
34:24 - Pas du tout. Je ne sais pas du tout ce qu'il vient chercher chez moi.
34:29 Après, je pense qu'il y a encore du mystère dans ce que pensent les réalisateurs de moi.
34:37 Je pense, en général.
34:39 Après, ce mystère-là, je pense qu'il est important.
34:44 Il est important pour moi parce que je trouve que dans tout personnage,
34:50 dans tout être humain, il y a un mystère.
34:52 Il y a une zone silencieuse et cette zone silencieuse, à chaque fois, elle est à explorer.
34:56 C'est comme des personnages, moi j'aime bien l'explorer.
34:59 Je ne sais pas du tout ce que les réalisateurs...
35:03 Je pense que souvent, ils viennent chercher effectivement une contradiction,
35:06 cette contradiction qu'avait Marina Loiseau.
35:09 C'est pour ça qu'elle a éveillé beaucoup de regards.
35:14 Donc souvent, je dirais que c'est plus une forme de douceur mélangée à une force d'état d'être.
35:24 Avec aussi, vous maintenant, la confiance au cinéma de pouvoir jouer des rôles très différents.
35:30 On vous a vu dans "Les Envoûtés", dans "Le sixième enfant" ou encore récemment l'année dernière dans "Bernadette",
35:35 ce film de Léa Doménac sur Bernadette Chirac.
35:38 Vous n'avez plus de limites dans les genres, dans le type de personnage que vous voulez incarner ?
35:44 Non, en fait, je pense que je n'ai aucune limite du moment que j'y trouve ma vérité.
35:49 Je vais reparler de la vérité.
35:51 Mais c'est vrai que les choix se font là-dessus.
35:55 Soit il y a quelque chose qui vous parle et où vous sentez quelque chose à pouvoir dessiner vraiment.
36:03 Soit il y a quelque chose où vous sentez que vous n'avez pas grand-chose à dire.
36:08 Et dans ce cas-là, il ne faut pas y aller.
36:11 En revanche, il faut aller au théâtre du petit Saint-Martin pour vous voir Marina Loiseau.
36:17 J'étais sûr, c'était certain.
36:19 Sarah Giraudeau, pardon.
36:21 Jusqu'au 20 avril prochain, "Le syndrome de l'oiseau".
36:24 Le texte est signé Pierre Tréhardy et vous jouez aux côtés de Patrick D'Assoumsao.
36:29 Spectacle que vous avez co-mis en scène avec Renaud Meyer, ça s'appelle "Le syndrome de l'oiseau".
36:34 Pour finir, Sarah Giraudeau, nous avons choisi deux chansons, les deux en référence à deux comédiennes avec qui vous avez déjà joué.
36:42 Soit une chanson par Micheline Dax, soit une chanson par Catherine Deneuve. Laquelle souhaitez-vous écouter ?
36:47 Je n'aurais pas quoi dire.
36:49 Il faut le dire quand même.
36:51 Peut-être Micheline Dax parce qu'elle n'est plus là et que j'ai un très beau souvenir d'elle.
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37:41 Syracuse donc sifflée par Micheline Dax. Merci beaucoup Sarah Giraudeau d'être venue dans les Medis des cultures.
37:51 Merci à vous.
37:52 Une émission préparée par Esa Thouen Doei, Anaïs Hiesbert, Cyril Marchand, Zora Vignet, Laura Dutèche-Pérez et Manon Delassalle.
37:58 C'est Louise André qui réalise cette émission ce midi et à la prise de son Anthony Thomasson.
38:02 A demain Géraldine.
38:03 A demain Nicolas.