L'auteure publie un roman graphique, "Minuscule Folle Sauvage" (chez "La Ville Brûle). Elle est l'invitée de Mathilde Serrell. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes/nouvelles-tetes-du-mercredi-07-fevrier-2024-2378608
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00:00 Place aux nouvelles têtes Mathilde Serrel ce matin, une artiste pas si seule sous sa frange.
00:05 Pauline de Tarragon est dans notre studio Portrait sonore.
00:09 De son enfance, elle garde le souvenir de la tourterelle.
00:15 Au petit déjeuner dans le jardin de papi et mami.
00:18 Et puis, cette autoradio.
00:20 C'est là qu'elle entend la guitare de George Harrison qui lui donne des idées.
00:41 A 16 ans, elle chante et joue dans les rues de sa ville, Avignon, pour gagner 3 sous.
00:45 C'est marrant.
00:46 Jusqu'à ce que ses copines l'inscrivent au casting de la nouvelle star.
00:49 10e saison, elle a 17 ans et termine 3e.
01:16 Mais déjà dans cette reprise de Véronique Samson, tout crie l'envie de se barrer.
01:20 Retour à la respiration, le dessin, école estienne à Paris et création d'un duo doudou
01:27 anti-star system.
01:28 Py-ja-ma.
01:29 Dans son clip, elle a la tête dans un carton en forme de poste de radio.
01:48 Ça ne se prend pas au sérieux mais ça bosse dur.
01:50 Avec le premier album "Sous ma frange", elle part en tournée et fait les premières parties
01:55 de Pomme et Juliette Armanet.
01:56 Grosse année.
01:57 Donc en 2024, déjà on va se satisfaire de la situation.
02:04 L'année dernière, tu t'es plein parce que tu travailles trop.
02:07 Cette année, tu travailles moins mais tu as de l'argent que tu as gagné l'année
02:10 dernière.
02:11 Donc t'es pas dans la merde.
02:12 Donc sois content.
02:13 Pour 2024, année de ses 28 ans, elle raconte ses bonnes résolutions dans son Pyja-ma
02:18 chaud sur YouTube et recommence, non sans méfiance, à remplir le vide.
02:22 Ça commence par un manuel de survie minuscule, folle, sauvage.
02:26 Son premier roman graphique qui sort la semaine prochaine.
02:28 Pauline de Tarragon, bonjour !
02:30 Bonjour !
02:31 Vous êtes un peu une anti-nouvelle tête finalement.
02:34 L'idée c'est de rester planquée à créer normalement, non ?
02:37 C'est très contradictoire.
02:40 J'ai toujours un petit peu deux côtés.
02:42 J'ai un côté très ours et en même temps, je n'arrête pas de faire des choses et d'être
02:46 avec des gens en continu.
02:48 Donc je suis un ours contrarié.
02:49 Et dans la tension hypersensible, hyper active.
02:54 Ça n'a pas très bien ensemble mais je ne peux pas les dissocier.
02:56 Non, il n'y a rien qui va.
02:57 Il manque un équilibre que je n'ai pas encore trouvé.
03:00 Vous le trouvez quand même, vous trouvez un chemin dans ce roman graphique.
03:04 C'est le parcours qu'on a entendu en surface dans ce portrait.
03:07 Maintenant, on va aller dans votre tête.
03:08 C'est exactement ce qui se passe au début de ce roman graphique avec un petit personnage
03:11 qui monte à l'intérieur de votre cerveau.
03:13 C'est publié aux éditions de la Villebrûle et en exergue, vous avez choisi Isabelle Sorrents
03:17 et son livre "Le complexe de la sorcière".
03:19 C'est l'idée qu'il y a des gens qui descendent pour les autres dans nos cachots, dans nos
03:25 sous-sols, là où on reprise les robes déchirées des spectres, écrit-elle.
03:29 Et finalement, on aide les autres d'une manière mystérieuse.
03:33 Il faut bien que quelqu'un y aille, c'est ce que vous avez décidé de faire ?
03:34 Oui, je pense que je suis descendue à l'intérieur de moi pour moi d'abord.
03:39 Mais je sais que quand les autres le font, moi ça m'aide.
03:42 Donc j'essaie de trouver un petit peu un sens et une utilité à ce que je fais.
03:46 Parce que très souvent j'ai l'impression que mon métier ou mes métiers ne servent
03:49 à rien.
03:50 Donc j'essaie de trouver un petit peu des excuses.
03:52 Alors vous sautez dans le trou de votre tête, vous explorez ce que vous avez de pire.
03:56 Vous commencez par votre enfance.
03:58 Votre enfance, vous ne dites pas bonjour ?
04:00 Non, à personne.
04:02 Donc vous ne dites pas bonjour à la dame, ça c'est jamais ?
04:05 Non, j'ai été très effrayée de tout le monde.
04:08 Alors vous n'aimez pas les gens, vous vivez avec les livres, la télé, la Nintendo, vous
04:13 baladez avec des peluches et des figurines que vous cachez dans vos poches pour leur
04:16 parler.
04:17 Et puis une muraille antisociale, c'est un conseil qu'on peut donner aux enfants qui
04:21 écoutent, un dictionnaire.
04:22 Comme ça vous dites toujours aux gens "j'ai pas fini mon livre".
04:25 Voilà, je lisais en continu.
04:27 Je pense que je ne lisais pas vraiment d'ailleurs, c'était juste pour me cacher derrière et
04:29 pour ne pas parler aux autres enfants qui étaient là.
04:32 Alors finalement vous vous dites, il y a peut-être une option, devenir la folle du village.
04:36 Celle qui est à l'extérieur, qui ne parle à personne, qui vit en autarcie.
04:41 Et là, vous repensez à Paudane, c'est extrêmement drôle puisqu'on se rappelle des robes ciel
04:47 et des robes soleil.
04:48 Mais vous proposez toute une gamme de robes.
04:50 Il y a la robe couleur dépression nerveuse, il y a la robe SPM.
04:53 Vous expliquez ce que c'est la robe SPM ?
04:55 Le syndrome prémenstruel que moi j'ai découvert assez tard et qui fait qu'il y a pas mal
04:59 de femmes qui ont envie de se foutre en l'air juste avant leur règle et on ne nous prévient
05:05 pas en fait.
05:06 Et donc quand on commence à hurler sur les gens ou à se sentir très très triste pour
05:10 aucune raison, souvent c'est lié.
05:12 Alors moi j'ai une astuce, il faut le noter dans son téléphone éventuellement, une petite
05:16 alerte deux jours avant pour éviter ça.
05:18 En tout cas il y a aussi la robe couleur d'agression sexuelle, la couleur trouble obsessionnel.
05:25 Et en fait au fond, vous vous dites, dans la rue il y a des gens qui sont aussi des
05:28 survivants, des terrifiés, des obsédés.
05:30 Et ils sont peut-être probablement chez eux.
05:33 S'ils ont fait un pas dehors, c'est que vraiment ils ont franchi une muraille.
05:36 C'est pour eux que vous écrivez ?
05:38 Oui, comme je disais tout à l'heure, c'est avant tout pour moi je pense, pour m'aider.
05:41 Mais en effet, à force de discuter avec des gens, parce que j'ai fini par sociabiliser
05:46 avec pas mal de gens qui sont très sympas d'ailleurs, il y a beaucoup de gens qui ont
05:50 des problèmes d'anxiété sociale, beaucoup de gens qui ont des problèmes de performer
05:55 dans la vie de tous les jours et donc qui en fait au quotidien font énormément d'efforts
06:01 pour être juste eux-mêmes et pour correspondre à ce que la société attend d'eux et d'elles.
06:05 Donc voilà, j'essaie de parler de ça pour qu'ils se sentent moins seuls.
06:10 Vous avez des techniques aussi ? Vous conseillez aux gens de vivre comme une vieille dame ?
06:15 Oui, ou un vieux monsieur.
06:16 C'est vrai que je suis partie sur la dame, mais on peut partir sur le monsieur aussi.
06:20 Donc ça consiste en quoi ?
06:21 C'est faire les choses de façon calme.
06:25 C'est vrai que j'aime bien les lumières très tamisées, j'aime bien parler avec mon
06:28 chien, j'aime bien écouter des vinyles, manger de la soupe, me coucher à 21h.
06:32 Mais j'alterne entre ça et rentrer à 6h du matin complètement ivre.
06:36 C'est toujours cette ambivalence-là.
06:39 Et c'est vrai que ça me fait souvent fantasmer les vieilles personnes qui s'habillent en
06:43 Kichwa et qui lisent des livres et qui ont l'air d'aller bien.
06:48 Vous avez aussi mis votre vie en statistique.
06:52 Il y a un diagramme extraordinaire entre amour, vie sociale, divertissement, travail,
06:56 repos et angoisse.
06:57 C'est vrai que les angoisses prennent quand même la moitié du camembert.
07:00 Et le rapport haine de l'humain, amour des chiens qui est assez proportionnel.
07:05 Je pense que ça aidera beaucoup d'auditeurs.
07:09 Mais surtout, Pauline de Tarragon, ce matin, comme vous avez mis dans des beaux quos les
07:13 meilleurs punchlines sur la solitude, vous avez évidemment choisi Céline Dion.
07:16 Elle était aux Grammy Awards et grâce à vous, ce matin, elle est aussi un peu avec
07:20 nous.
07:21 Allez-y Céline, je vous en prie, vous prenez la guitare.
07:28 Je pense que chacun aura deviné de quel titre il s'agit.
07:35 C'est ça.
07:42 C'est ça.
07:50 C'est ça.
07:58 C'est ça.
08:07 C'est ça.
08:17 C'est ça.
08:27 C'est ça.
08:37 C'est ça.
08:49 Bravo ! Plus jamais seule, grâce à Pauline de Tarragon.
08:53 Je vous le conseille vraiment, minuscule, folle, sauvage, aux éditions.
08:56 La ville brûle, bonne route à vous !