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"Le 13/14" reçoit aujourd'hui Pénélope Komitès, adjointe à la Mairie de Paris et Présidente de la Société Publique du Funéraire (SPF) et Manuel Sauveplane président de l’Union du Pôle Funéraire Public et Directeur Général de la Société d'Economie Mixte Le Pech Bleu, ce lundi 5 février 2024.

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Transcription
00:00 France Inter, le 13-14, Jérôme Cadet.
00:06 Le service public, oui, la recherche de profit, non.
00:09 Voilà le slogan qu'on peut lire depuis quelques jours dans les rues de Paris, avec comme photo
00:13 d'illustration celle d'un cercueil.
00:15 La ville de Paris annonce ainsi la mise en service à partir du 1er mars d'une société
00:20 publique funéraire pour venir concurrencer le privé et faire baisser les prix, des prix
00:24 qui ont beaucoup augmenté ces dernières années, plus que l'inflation d'ailleurs.
00:27 Alors en quoi consiste ce service public du funéraire ? Quelle forme peut-il prendre
00:32 ? Et pourquoi certaines communes en disposent-elles et pas d'autres ? Je pose ces questions à
00:37 nos invités.
00:38 Pénélope Comitesse, bonjour.
00:39 Bonjour.
00:40 Vous êtes adjointe à la mairie de Paris, présidente de cette société publique du
00:45 funéraire, donc précisément, qui vient d'être créée.
00:47 Avec nous également en direct de Béziers dans les Roses, Manuel Sauveplaine, bonjour.
00:52 Bonjour à tous.
00:54 Vous êtes le président de l'UPFP, l'Union du Pôle Funéraire Public, qui regroupe
00:58 80 membres en France, soit 500 communes, des métropoles et des petites communes également.
01:03 Et vous-même, vous travaillez pour une société d'économie mixte qui regroupe une soixantaine
01:08 de communes autour de Béziers et qui assure des services funéraires.
01:11 C'est bien ça ?
01:12 On va vous retrouver dans quelques minutes, Manuel Sauveplaine.
01:19 J'attends aussi les questions des auditeurs de France Inter.
01:22 On a un premier appel, c'est celui de Nicole.
01:29 Bonjour Nicole.
01:30 Bonjour.
01:31 Vous nous appelez d'Elbeuf en Seine-Maritime, c'est ça ?
01:33 Elbeuf-sur-Seine en Seine-Maritime, qui est une commune de la métropole de Rouen.
01:37 Vous avez un témoignage à nous livrer peut-être Nicole ?
01:40 Oui, absolument.
01:41 J'ai eu la douleur de perdre mon mari il n'y a pas tellement longtemps et j'ai utilisé
01:46 les services de la régie municipale d'Elbeuf-sur-Seine.
01:50 Et je dois dire qu'en termes de coûts, c'était beaucoup moins cher et surtout
01:57 la prise en charge était exceptionnelle.
01:58 Il y a eu un accueil, un respect, une empathie, ce qui me paraît être les qualités premières
02:05 d'un service public mais qui ne l'est pas tout le temps.
02:07 Vous avez comparé les prix à ce moment-là Nicole ?
02:10 Absolument, absolument.
02:11 Même si j'étais déjà persuadée que j'utiliserais ce service-là.
02:16 Je ne peux pas vous donner parce que je ne me souviens plus bien quand on perd quelqu'un.
02:23 Il y avait une nette différence entre les deux.
02:30 Merci Nicole pour ce témoignage que je soumets à Pénélope Comites.
02:36 Le premier argument pour vous ce sont les prix ? C'est ce que nous dit Nicole dans
02:42 la création de cette société publique funéraire ?
02:44 Vous avez effectivement dans le cadre de la création de la société publique locale
02:50 funéraire de Paris, vous avez effectivement les prix qui sont les mêmes sur tout le territoire
02:56 parisien et qui sont des prix inférieurs à ceux du privé.
03:01 Vous l'avez dit, on a eu une augmentation extrêmement importante, presque deux fois
03:06 plus que l'inflation depuis une dizaine d'années.
03:09 Vous avez effectivement aussi des prestations de qualité, d'accueil dans les différentes
03:15 agences sur le territoire parisien.
03:18 C'est une société qui rend aussi d'autres services, notamment sur des obsèques pour
03:25 les personnes à la rue par exemple ou des personnes parisiennes qui ont des ressources
03:31 inférieures à 992 euros annuels et qui sont pris en charge effectivement aussi.
03:36 Je pense qu'il y a des services publics qui nécessitent de ne pas être privatisés.
03:43 Mais qu'est-ce que vous allez pouvoir faire avec la création de cette société que vous
03:47 ne pouviez pas faire par le passé ?
03:49 Cette société publique locale permet grâce à une loi qui est passée en 2010 de pouvoir
03:57 effectivement déroger à ce qu'on appelle les appels d'offres, c'est-à-dire que vous
04:03 n'êtes pas obligé de mettre en concurrence via un appel d'offres.
04:07 Et notamment par exemple, là nous allons remettre, nous avons confié à la SPL la
04:13 gestion du funérarium des Batignolles à Paris.
04:17 Nous allons confier également à cette SPL la gestion de ce que nous appelons les services
04:24 extérieurs des pompes funèbres, c'est-à-dire toute l'organisation des obsèques à Paris.
04:28 Si nous avions dû remettre cela en termes de concurrence, il n'était pas sûr au regard
04:36 du Code des marchés publics que ce soit forcément le service public qui ait gagné.
04:41 Mais aujourd'hui en cas de décès d'un de ses proches, on peut déjà faire appel
04:45 au service de la ville de Paris pour un enterrement, c'est déjà possible ?
04:49 Oui, parce qu'en 1998 la ville de Paris a créé une société d'économie mixte
04:55 qui effectivement pratique déjà des tarifs inférieurs à ceux du privé.
05:00 La seule différence c'est qu'effectivement quand vous êtes une société d'économie
05:05 mixte, vous êtes soumis au Code des marchés publics et vous devez répondre à des appels
05:11 d'offres.
05:12 Cela a été notamment le cas sous la mandature précédente, c'était cette société d'économie
05:18 mixte qui gérait le crématorium du Père Lachaise.
05:21 Nous avons donc, comme toute collectivité, lancé un nouvel appel d'offres et il s'avère
05:27 que cette société d'économie mixte n'a pas remporté.
05:30 C'est le privé qui a récupéré le marché ?
05:32 Tout à fait.
05:33 Les prix ont augmenté ou pas ? Ou ils sont restés stables ?
05:35 Les prix pour l'instant n'ont pas vraiment augmenté mais ça a été effectivement
05:44 douloureux je dois dire.
05:46 Je pense qu'aujourd'hui on a quand même un marché qui est financiarisé à peu près
05:50 à 30% sur le territoire national avec des prix d'obsèques qui varient de manière
05:55 assez impressionnante.
05:56 Précisément l'ouverture à la concurrence date d'il y a un peu plus de 30 ans, 1993.
06:01 Manuel Saufplan, qu'est-ce que ça a changé aujourd'hui ? Quel est l'état du marché
06:05 entre privé et public ? Et dans le privé, qu'est-ce qui domine ? Je crois qu'il y
06:08 a quand même deux superbes entreprises qui dominent largement ce marché.
06:11 Oui tout à fait, le fait d'ouvrir le marché à la concurrence a libéré le marché complètement
06:17 qui était sous forme de monopole et du coup effectivement tout le monde a pu s'engouffrer
06:22 dans ce marché-là.
06:23 Et aujourd'hui il y a effectivement le groupe Funecap et le groupe OGF qui détiennent
06:30 à eux deux quasiment la moitié du marché en France.
06:34 Le premier connu notamment sous la marque Roquecler et le deuxième Pompe Funèbre Générale.
06:39 C'est ça, Pompe Funèbre Générale ou Roblo.
06:42 Donc évidemment ce sont des réseaux qui sont franchisés, que l'on retrouve partout sur
06:49 le territoire et on n'a pas cette proximité, on ne retrouve pas cette proximité que nos
06:55 sociétés publiques locales, nos sociétés d'économie ou même nos régies municipales
06:59 peuvent avoir chacun sur leur commune respective.
07:01 Alors vous c'est un modèle dive ? Ce qui encourage une vraie qualité de service
07:05 qu'on ne peut pas prétendre avoir sur l'ensemble d'un territoire, même si on fait tous les
07:10 efforts qui soient.
07:11 Vous avez une vue nationale Manuel Saufplan, est-ce que le public reprend des parts de
07:17 marché ou pas depuis quelques années ?
07:19 Je ne sais pas si c'est très difficile à évaluer, en tout cas il ne peut en reprendre
07:25 que si l'on se révolutionne un petit peu et que si on propose à toutes les collectivités
07:31 les différents moyens et surtout les plus efficaces et les plus agiles, les plus dynamiques
07:35 pour être les plus compétitifs dans un marché qui est très concurrentiel.
07:38 Et les SPL et les sociétés économistes font partie de ces outils.
07:43 On a du mal à vous entendre Manuel Saufplan, on va vous retrouver dans quelques minutes.
07:52 Pénélope Comitesse, j'ai lu que seuls 10% des villes françaises avaient conservé
07:57 leurs services funéraires.
07:58 Pour quelle raison est-ce qu'il y a eu finalement cet abandon depuis 30 ans ? Parce que c'est
08:04 une charge aussi financière pour les communes ?
08:06 Je pense qu'il y a effectivement le fait d'être potentiellement une charge financière
08:11 pour les communes puisque gérer en régie par exemple un service de pompe finale nécessite
08:16 que vous payiez les agents etc.
08:18 Je pense que c'est aussi une facilité, on est sur les mêmes sujets que la gestion
08:23 de l'eau.
08:24 Paris a notamment par exemple remunicipalisé son service de l'eau sous la première mandature
08:31 avec Bertrand Delanoë.
08:32 Je pense qu'effectivement il faut du temps aussi pour sortir de ce système.
08:40 La SPL, on a mis presque 4 ans avant de la créer donc ça prend du temps.
08:47 Mais je pense que c'est aujourd'hui essentiel.
08:50 Ce qu'on voit aussi c'est qu'il y a non seulement le prix des obsèques qui varie
08:55 mais vous avez aujourd'hui aussi le montant des contrats d'obsèques.
08:59 C'est-à-dire qu'il y a une augmentation très très forte en France des contrats d'obsèques
09:04 parce que je pense que les personnes n'ont pas envie de laisser cette charge à leurs
09:07 héritiers.
09:08 Et vous avez aujourd'hui 30% de gens qui ont déjà pris des contrats obsèques, notamment
09:15 vers des groupes privés.
09:17 Et nous proposons aussi avec cette SPL un contrat obsèque via la Mutac qui est une
09:23 mutuelle avec une revalorisation du contrat de 2% chaque année.
09:27 Ce qui n'est pas forcément le cas des banques, des assurances ou des groupes privés.
09:30 Comment sont fixés chez vous à Paris le prix des obsèques ? C'est un conseil municipal
09:34 comment ça se passe ? Il y a un vote ?
09:35 Il y a effectivement dans le cadre par exemple du service extérieur des ponts funèbres,
09:42 il y a une négociation avec la SPL et la ville fixe effectivement le montant des obsèques.
09:49 Par exemple pour la société publique que nous avons créée, les montants des crémations
09:54 seront de 2660 euros et de l'inhumation de 2908.
09:59 Vous savez que les crémations peuvent monter jusqu'à plus de 6300 euros dans le privé
10:05 ou 7300 pour des inhumations, ce qui est énorme.
10:09 Bonjour Laurent.
10:10 Bonjour.
10:11 Vous nous appelez de Grenoble, nous vous écoutons.
10:13 Oui bonjour, je viens de créer début 2024 une activité sur un nouveau métier, un métier
10:20 émergeant en France qui existe en Suisse depuis un certain temps déjà, le métier
10:24 de célébrant de cérémonies civiles.
10:26 Par ce biais-là, j'entends répondre à un besoin qui ne trouve pas de réponse aujourd'hui,
10:31 un besoin des familles qui est de pouvoir célébrer des cérémonies civiles puisque
10:36 traditionnellement la cérémonie était du domaine du religieux dans ce pays et les
10:40 services des ponts funèbres géraient l'aspect réglementaire.
10:42 Ça se passe où Laurent ?
10:44 Comment ?
10:45 Ça se passe où ? C'est au funérarium ?
10:46 Ça se passe où les familles souhaitent que ça se passe, ça peut être à la fois des
10:51 cérémonies d'obstacles, des cérémonies du souvenir, des cérémonies de dispersion
10:54 des cendres, ça peut se passer au funérarium, ça peut se passer à domicile, ça peut se
10:59 passer en plein air, dans le respect de la réglementation bien évidemment.
11:02 Et vous travaillez avec des acteurs publics et privés je suppose ?
11:05 Je travaille avec des acteurs publics et privés et c'est pour ça que votre émission est
11:08 très très intéressante mais je souhaiterais que la question du service public du funéraire
11:13 ne se réduise pas à la question de l'opérateur de ponts de funèbres privés ou publics.
11:18 C'est une question sur laquelle je tente beaucoup plus largement.
11:21 Quand j'ai par exemple une famille qui souhaite une salle où célébrer une cérémonie civile,
11:27 j'ai beaucoup de mal à trouver parfois des élus qui se saisissent de cette question.
11:31 On est très directement dans le sujet et bien au-delà des opérateurs publics ou privés.
11:36 C'est pas une question d'opérateurs, c'est une question pour les élus locaux de réinvestir
11:40 ce sujet, de se réapproprier ce sujet.
11:42 Ils ne sont pas assez sensibles à cette question, c'est ce que vous nous dites, c'est ce que
11:44 vous constatez en tout cas vous.
11:45 Je ne pense pas que ce soit un problème de sensibilité, c'est un problème pour les
11:48 élus comme pour les familles d'information.
11:50 En fait le champ des possibles est large et pour rendre possible il faut d'abord informer,
11:55 se saisir des possibilités et puis peut-être avancer d'un point de vue réglementaire
11:59 et législatif mais ça c'est une autre question.
12:01 Mais déjà simplement informer sur ce qui est possible et de ne pas réduire cette
12:05 question opérateur public ou privé, c'est plus large.
12:08 Merci Laurent pour ce témoignage.
12:10 Daniel Sauveplaine peut-être une réaction sur ce que nous dit Laurent ?
12:14 Je partage, je partage tout à fait.
12:17 On fait tous une mission de service public, alors il y a des bons opérateurs et des bons
12:20 professionnels dans les deux camps.
12:22 Moi je n'ai pas envie de rentrer dans un discours partisan par rapport à ça.
12:25 Mais voilà ce qui est juste c'est qu'il faut savoir faire ce métier avec beaucoup
12:29 de valeur, beaucoup d'éducation, beaucoup de respect et les familles c'est ça qu'elles
12:34 viennent chercher.
12:35 La question du tarif, je préfère préciser ça aussi, c'est que les services publics
12:43 sont maîtres de leurs tarifs.
12:45 Les collectivités et les élus sont maîtres de nos tarifs.
12:48 Ce sont nos organes de gouvernance, ce sont nos présidents de conseil d'administration,
12:51 ce sont des conseils municipaux qui votent chaque ligne de nos tarifs, du maître de
12:55 cérémonie en passant par le porteur.
12:57 Donc il ne peut pas y avoir de dérive comme on peut rencontrer dans une société qui
13:01 n'est contrôlée que par des actionnaires privés.
13:03 C'est hyper important de garder ça bien à l'esprit.
13:07 Vous Abézier, ce n'est pas tout à fait le même modèle qu'à Paris, c'est une
13:10 société d'économie mixte.
13:11 Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ça fonctionne ?
13:12 Alors la différence avec une société publique locale comme Paris c'est que dans la société
13:17 d'économie mixte vous pouvez avoir jusqu'à 45% d'actionnaires privés.
13:20 C'est-à-dire que c'est pas le cas, jusqu'à minimum 15%.
13:24 C'est notre cas Abézier, c'est-à-dire qu'il y a 85% du capital qui est détenu
13:28 par 60 collectivités et 15% qui sont détenus par des opérateurs privés, des entreprises
13:34 privées qui peuvent être des sociétés d'assurance, des associations crématistes
13:38 par exemple, qui peuvent être des sociétés banques.
13:40 Et quel avantage vous y voyez M.
13:42 Sauveplane ?
13:43 A la société anonyme ?
13:45 A la société d'économie mixte oui.
13:47 C'est une société anonyme comme je viens de le dire.
13:49 C'est-à-dire qu'elle a toutes les valeurs d'une société publique, c'est-à-dire
13:53 qu'elle est dirigée au niveau de sa stratégie, de ses coûts, de ses dividendes par des élus
13:58 donc ils ne peuvent pas faire n'importe quoi par rapport aux familles.
14:01 Mais en même temps elle a l'agilité d'une société anonyme, d'une société privée.
14:04 Les salariés sont de droit privé, on peut recruter, on peut faire des achats tels qu'on
14:12 le souhaite sans passer toujours par le carcan administratif, parfois lourd, dans ce marché-là.
14:17 Et il y a des sociétés d'économie mixte qui fonctionnent très bien dans d'autres
14:20 secteurs d'activité comme l'événementiel, le tourisme, l'immobilier et je ne vois pas
14:24 pourquoi les élus se priveraient aussi de cet outil dans ce métier qui doit rester
14:30 dans le carcan public.
14:32 - Merci à tous les deux, Manuel Sauveplaine et Pénélope Comitesse d'avoir participé
14:36 à cet échange autour du marché du funéraire qui a suscité, vous l'avez entendu, beaucoup
14:39 de réactions et beaucoup d'appels.
14:41 13h45 sur Inter.
14:42 [Musique]

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