• il y a 10 mois
La sexagénaire Geneviève Rapjeu, qui s'est découvert tardivement une passion pour le rap, partage ses analyses et ses meilleures playlists à une communauté grandissante sur TikTok, Instagram et Youtube.

Retrouvez "La question qui" de Maïa Mazaurette sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/burne-out

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😹
Amusant
Transcription
00:00 C'est l'heure de la question de Maya Masorette introduite par la sanson, la sanson, Cheng de PNL.
00:06 *Musique*
00:33 Le rap est-il réservé aux jeunes ? Si c'est le cas, je dois être un dinosaure,
00:38 parce que c'est seulement aujourd'hui que je découvre l'existence du groupe PNL qui a quand même,
00:42 si si, vendu 3 millions d'albums.
00:45 - J'en sons, JBS ! - Il est zbodi !
00:47 - Non mais honnête, moi je suis vraiment nulle et j'assume complètement.
00:50 Donc, je disais, je vais être honnête, à la première écoute de Cheng, la chanson qu'on vient d'entendre,
00:55 j'ai rien compris. A la deuxième j'ai rien compris, à la quinzième j'ai rien compris,
00:58 j'ai été lire les paroles sur internet, j'ai toujours rien compris.
01:01 Et à mon avis, allez, vous non plus, tendez l'oreille, on réécoute.
01:04 *Musique*
01:09 Balayette sur le beat, j'ai la barre, je suis ravi, haine, douleur qui m'habite, fin de citation.
01:14 Est-ce qu'on peut être habité par la haine et la douleur tout en étant ravi ?
01:17 Est-ce une licence poétique ou l'aveu d'un trouble bipolaire ?
01:21 Si PNL vend des millions d'albums en jetant des mots au hasard sur la musique,
01:24 devrais-je faire pareil dans mes éditos et obtenir des disques d'or ? Allez, je tente ma chance.
01:28 Balayette sur le tweet, j'ai la blette, je suis ravi, concombre, couleur qui m'habite.
01:31 *Non, non, ça ne marche pas, je te signe, je produis, ça part en prod*
01:36 En tout cas, j'assume d'être complètement larguée.
01:39 Mes tympans font de l'arthrose, ma playlist a des rhumatismes.
01:42 Quand vous allez en festival, moi manifestement je vais en Ehpad, c'est vrai que je fais un refus d'obstacle.
01:47 Pour moi dont le langage est plus châtier qu'Elisabeth Borne après 20 mois à Matignon,
01:51 le rap c'est trop de gros mots.
01:52 Pour moi dont la gestuelle est plus délicate que l'avenir de Rachida Dati à la culture,
01:56 les rappeurs font trop de doigts d'honneur.
01:58 J'aimerais me trouver des excuses mais vraiment j'en ai aucune.
02:00 Le rap est la deuxième musique la plus écoutée en France après la variété.
02:04 Et c'est un rappeur, Jul, qui est l'artiste le plus streamé en France.
02:07 Et c'est peut-être justement ces succès qui vont me consoler.
02:10 Ma radicalité aujourd'hui, ma minorité, le fait que je fasse partie de la contre-culture,
02:14 c'est justement parce que j'écoute pas de rap.
02:16 Camarade, désolée, dans le studio c'est moi la plus ghetto.
02:19 *Et aujourd'hui, Maïa, tu reçois Geneviève Rabjeu*
02:22 Bonjour Geneviève Rabjeu.
02:24 Bonjour.
02:25 *Vous êtes une sexagénaire tiktokeuse, instagrammeuse et même youtubeuse depuis peu*
02:29 *Vous êtes spécialisée dans le rap dont vous analysez les sons et les paroles*
02:33 *Est-ce que vous comprenez ce que PNL dit quand il chante "Badayette sur le beach"*
02:36 *et la barre "Je suis ravie, un douleur qui m'habite"*
02:39 Je ne suis pas une traductrice assermentée de PNL.
02:43 Mais intuitivement, j'ai envie de dire que oui.
02:47 J'imagine qu'il est question précisément de la maîtrise de la vie grâce à la musique
02:53 et notamment du plaisir qu'on en tire sans oublier d'où on vient.
02:57 Et notamment des haines et des rancœurs qu'on a aussi gardés au fond du cœur d'une certaine enfance.
03:03 *Et voilà*
03:04 *Voilà, la vache*
03:05 *Alors est-ce que c'est parce que moi je suis de mauvaise foi et je ne fais aucun effort*
03:08 *ou alors est-ce que c'est vous qui avez des pouvoirs spéciaux pour réussir à comprendre ce que moi je...*
03:12 Je ne comprends pas.
03:13 Je crois que j'ai beaucoup écouté de rap.
03:14 *Vous avez donc...*
03:17 *Vous pouvez transcrire*
03:18 Oui, oui, oui.
03:19 Je veux dire qu'effectivement la particularité du rap c'est un certain langage, une certaine sémantique
03:25 et au départ, pris à froid, on est peut-être un peu perdu.
03:29 A la longue, on devient familier du paysage.
03:33 Et on devient familier intuitivement des allusions, des choses qui sont évoquées
03:38 parce qu'on maîtrise un peu plus les codes.
03:41 Alors moi je ne me pose pas en hyper spécialiste.
03:43 Je suis très flattée par votre proposition mais je suis beaucoup plus modeste que ça.
03:47 Je suis simplement une auditrice qui aime beaucoup, qui se passionne
03:51 et qui passe beaucoup de temps à écouter du rap.
03:54 *Comment vous avez commencé ?*
03:56 Alors très simplement, d'abord j'ai commencé très tard, ce qui peut être très surprenant
03:59 parce que moi je suis comme vous pendant quasiment les trois quarts de ma vie,
04:04 on va dire jusqu'à 57 ans à peu près, je n'ai jamais écouté de rap.
04:08 Je n'étais absolument pas concernée.
04:10 Ça ne m'intéressait pas.
04:12 Et puis un proche m'a suggéré l'audition de l'album de Népal,
04:16 "Adios Bahamas", que j'ai écouté et que j'ai trouvé très très beau.
04:20 Et là je me suis dit "ça c'est du rap !"
04:23 Alors là je me suis dit, je suis passée à côté de quelque chose.
04:25 Et simultanément on m'a fait écouter deux frères de PNL
04:29 et je suis tombée le coup de fou totale.
04:31 Et je me suis dit "mais là je suis vraiment passée à côté"
04:34 et on va réparer ça immédiatement.
04:36 Et donc je me suis mise à écouter beaucoup, beaucoup, beaucoup
04:40 de tout, du francophone, du francophone actuel,
04:44 du francophone plus ancien, c'était très boulimique.
04:47 Et puis très rapidement je me suis dit "mais voyons,
04:50 il y a une base à tout ça, c'est l'Amérique".
04:53 Donc quand on s'intéresse au rap, on va d'abord voir le rap américain.
04:57 Je suis partie vers le West Coast, je suis partie vers la scène new-yorkaise,
05:01 j'ai écouté tout Atlanta.
05:03 Et c'est très très boulimique.
05:05 Et j'ai adoré. Alors évidemment, après, on accumule, on accumule
05:09 et puis on construit.
05:11 - Aujourd'hui vous dites qu'on ne peut pas ne pas aimer le rap.
05:14 - Alors non, je ne dis pas qu'on ne peut pas aimer le rap.
05:16 Je dis par contre que... - Vous dites que c'est une grande sphère.
05:19 - Oui, je dis qu'il faut en écouter. - Il y a forcément un truc qu'on aimera.
05:22 Pourquoi est-ce qu'il faut en écouter ?
05:24 - Parce que la moitié de la planète écoute ça.
05:26 Et que quand on vit dans ce monde, il faut connaître le monde dans lequel on vit.
05:31 Donc, non mais, on vit dans un monde, je veux dire,
05:34 on vit dans son monde, on s'intéresse à ce qui se passe dans le monde dans lequel on vit.
05:38 Alors, on peut ne pas aimer le rap. Moi j'accepte tout à fait qu'on me dise
05:41 "Moi, je n'aime pas le rap". Ça, je peux tout à fait comprendre.
05:44 Ce que j'aime moins, c'est qu'on me dise, ce que j'entends assez volontiers
05:47 dans les gens qui peuvent m'entourer, c'est "Ah mais quelle horreur ce truc,
05:50 moi il est exclu que j'écoute ça".
05:52 Et ça, je dis non, on ne peut pas dire ça.
05:55 Quand la moitié du pays écoute du rap, il faut au moins un minimum
06:00 s'y intéresser, n'écouter que quelques sons, mais se faire une idée objectivement.
06:05 On aime ou on n'aime pas. Si on n'aime pas, on arrête là.
06:07 Mais on ne peut pas l'exclure par principe, à compter du moment
06:11 où c'est la sphère musicale dominante du moment.
06:13 - Et est-ce que ça permet de rester jeune, d'écouter du rap ?
06:16 - Alors, rester jeune, moi je trouve que c'est un peu idiot comme concept
06:20 parce qu'on l'est ou on ne l'est pas, mais si on ne l'est plus, on ne l'est plus.
06:23 Mais par contre, ça permet de garder le partage avec toutes les tranches de la vie.
06:29 C'est-à-dire les jeunes qui n'écoutent que ça, et des moins jeunes qui en écoutent moins
06:33 ou certains même qui n'en écoutent pas et qui feraient bien d'en écouter un peu plus.
06:38 Mais ça permet en tout cas de garder des codes communs, de comprendre où va l'autre.
06:43 - Il n'y a pas un moment où c'est trop tard ?
06:45 Où on est périmé, où on se dit "ça y est, il faut raccrocher, il faut laisser aux jeunes leur musique" ?
06:49 - Non, non, de mon point de vue, il n'est jamais trop tard pour rien du tout.
06:52 Il y a des gens qui font un son en parachute à 95 ans, donc il n'est jamais trop tard pour rien du tout.
06:57 Ce qui est certain, c'est que le rap étant quand même une sphère très codifiée,
07:01 si on n'en a jamais écouté et qu'on a un certain âge, au premier abord,
07:05 c'est un peu radical et sans doute décourageant.
07:08 Donc je pense que si on s'y met un peu tard, il faut être un peu guidé en quelque sorte sur la découverte des codes.
07:15 Jamais trop tard pour s'intéresser à ce qui se passe dans le monde, autour de soi, ça c'est clair.
07:20 - Écouter du rap, c'est écouter le monde d'aujourd'hui. Merci infiniment Geneviève Rabjeux.
07:24 On retrouve tout votre contenu sur TikTok, Youtube et Instagram
07:28 et on va vous dévoiler en bonus votre playlist Geneviève Rabjeux recommande.
07:32 *Générique*

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