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00:00 L'invité éco, Camille Revelle.
00:04 Bonsoir à toutes et à tous, nous parlons d'un anniversaire ce soir, cela fait 30 ans
00:09 que le traité de Maastricht est entré en vigueur et maintenant où en est-on ?
00:13 Bonsoir Gisabelle Coupé-Souberan, économiste, maîtresse de conférence à l'université Paris 1, Panthéon-Sorbonne.
00:19 Ce traité a fait avancer l'intégration européenne et notamment l'intégration monétaire en amorçant la création de l'euro.
00:25 Avec le recul, est-ce qu'il a fait entrer l'Union Européenne dans une nouvelle ère ?
00:29 Alors oui bien sûr, c'est une étape majeure le traité de Maastricht qui comme vous venez de le dire a posé les jalons de l'union économique et monétaire
00:39 qui institue l'euro, qui institue la banque centrale européenne, qui institue le système européen de banque centrale.
00:45 Donc étape importante mais avec finalement si vous voulez quand même pas mal de trous dans la raquette si l'on peut dire
00:53 parce que c'est un traité qui s'est beaucoup concentré sur les conditions d'adhésion à la monnaie unique en fixant les fameux critères de convergence.
01:03 Alors on ne va pas tous les énoncer mais parmi ces critères de convergence il y a les critères budgétaires que l'on connaît encore aujourd'hui
01:11 qui sont demeurés ce qu'ils étaient dans le traité de Maastricht.
01:14 Donc un critère en termes de déficit public qui ne doit pas dépasser 3% du produit intérieur brut.
01:20 Sachant que pour la France en cette année ce sera 4,9%.
01:23 Oui parce qu'il y a eu des gestions de crise entre temps et puis un fameux critère également de dette publique ne devant pas dépasser 60% du produit intérieur brut.
01:31 Et vous pourrez me dire celui-ci aussi en l'a considérablement dépassé.
01:36 Donc il y avait ces critères si vous voulez de convergence que les pays candidats à l'euro devaient respecter pour pouvoir adopter l'euro.
01:46 Le problème c'est que dans le traité ensuite rien n'a été prévu finalement en cas de divergence après l'adoption de la monnaie unique.
01:56 Or divergence il y a eu.
01:58 Et comment elle se porte aujourd'hui cette union ? Parce que l'euro a quand même traversé quelques zones de turbulence.
02:02 Vous diriez qu'elle est achevée en construction ou est-ce que vous diriez ça dépend tout simplement ?
02:07 Alors je dirais ça dépend comme n'importe quel économiste dit souvent ça dépend mais j'irais même au-delà du ça dépend.
02:14 Je dirais que c'est une union très incomplète.
02:17 Très incomplète précisément parce qu'il n'a pas été prévu dans le traité de quoi ensuite si vous voulez poursuivre l'union.
02:25 Il y a eu une sorte de pari finalement dans ce traité de Maastricht.
02:29 Le pari d'une union spontanée qui se ferait d'elle-même une fois la monnaie unique adoptée.
02:37 Et donc on n'a pas jugé bon d'accompagner cette union monétaire d'abord par une union bancaire.
02:45 C'est-à-dire en surveillant à l'échelle européenne les banques de la zone euro qui mettent en circulation l'euro.
02:52 Il a fallu la crise des dettes souveraines qui a failli faire exploser la zone euro pour qu'on en vienne à mettre en place cette union bancaire.
03:00 A partir de la fin 2012, cette union bancaire elle fonctionne à peu près mais en fait elle aussi est incomplète.
03:08 Donc on surveille les banques à l'échelle de la zone euro.
03:11 On a prévu un dispositif pour résoudre leurs difficultés en cas de crise.
03:16 Mais il y a encore si vous voulez là une incomplétude au niveau de la garantie des dépôts.
03:21 Et puis surtout ce qui manque c'est l'union budgétaire, l'union budgétaire, l'union fiscale.
03:26 Rien n'est prévu pour mener vraiment une politique budgétaire digne de ce nom à l'échelle européenne.
03:31 L'union fiscale c'est un vœu pieux ?
03:34 Malheureusement oui, ça semble l'être jusqu'à présent.
03:38 C'est-à-dire que l'union européenne a laissé en son sein prospérer des paradis fiscaux.
03:44 Et a laissé également si vous voulez se maintenir une course aux moins dix ans fiscales.
03:51 Donc ça c'est assez dramatique.
03:54 Donc pas d'union budgétaire, pas d'union fiscale, pas d'union politique.
03:58 Vous voyez que ça fait quand même une union très très incomplète, assez bancale à vrai dire.
04:04 Qui n'a pas véritablement les moyens de réaliser les transformations majeures.
04:10 Qu'on a besoin de réaliser à minima à l'échelle européenne face notamment à la crise écologique.
04:16 Pourtant il y a un pacte vert normalement de l'union.
04:19 Alors c'est vrai il y a un pacte vert et ça aussi c'était quand même une initiative très importante.
04:24 Un pacte vert qui vivote en ce moment, qui connaît des difficultés sur lesquelles on est en train un peu de revenir.
04:32 Alors il y a eu certes si vous voulez une initiative de financement dans le cadre du plan de relance européen.
04:41 Dans le cadre de Next EU Generation.
04:44 Au moment de la gestion de la crise sanitaire.
04:47 Avec donc une assez belle initiative en termes de mutualisation du financement.
04:53 Puisque la commission européenne a lancé un emprunt commun au nom de l'union européenne.
05:01 Mais ça, ça n'a été accepté qu'à la condition de ne pas renouveler l'opération.
05:06 Donc pas de ressources, vraiment pas de ressources communes.
05:11 Pas d'impôts communs pour constituer également des ressources communes.
05:16 Donc pas d'emprunt commun, pas de ressources communes.
05:21 Vraiment pas de quoi mener une politique d'investissement majeur permettant de réaliser, de mener à bien ce fameux pacte vert.
05:31 Je voudrais qu'on revienne sur les règles budgétaires européennes et dans les tuyaux.
05:39 Est-ce que vous les voyez évoluer ? Est-ce qu'il faut qu'elles évoluent ?
05:43 Alors il faudrait qu'elles évoluent.
05:45 Il faudrait que ces règles soient sans doute beaucoup moins quantitatives, plus qualitatives.
05:50 Qu'elles adoptent sans doute un régime un peu privilégié notamment pour les investissements dans la transition écologique.
05:57 Mais je crains vraiment que ces règles ne soient amendées qu'à la marge et restent ce qu'elles sont.
06:05 Donc on va rester dans une sorte de triangle infernal des finances publiques européennes
06:13 avec en effet des ressources très limitées, une capacité de financement très limitée
06:21 et puis toujours cette course au moins disant fiscale qui malgré tout se poursuit.
06:27 Donc voilà, si on veut vraiment d'une union européenne, il faut plus d'Europe, il faut s'unir véritablement.
06:34 Sinon malheureusement les bases ne sont pas suffisamment solides et tout ça risque fort un jour de voler en éclats.
06:42 Donc aller plus loin, 30 ans après l'entrée en vigueur du traité de Maastricht.
06:45 Merci beaucoup Gisabelle Coupé-Souberan, vous êtes l'invité éco de France Info.
06:49 Ce soir vous êtes économiste et maîtresse de conférences à l'université Paris 1, Panthéon-sur-Aubonne.
06:54 Merci à vous.

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