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Transcription
00:00 12h50 sur France Culture, l'heure de la rencontre des Midis de Culture.
00:04 Avec vous Géraldine Mosnassavoy et Nicolas Herbeau.
00:07 Merci Thomas.
00:09 A demain, c'est l'heure de la seconde partie des Midis de Culture.
00:12 Et comme chaque jour, vous l'avez dit, c'est l'heure de la rencontre avec une personnalité
00:17 du monde de la culture.
00:19 Place à la rencontre.
00:31 Aujourd'hui, notre invitée est dessinatrice BD.
00:33 Elle préfère toutefois se définir comme conteuse.
00:35 Elle a fait de l'Aviron à haut niveau.
00:38 Autrice d'une dizaine d'albums, elle vient nous parler pour cette rencontre du grand
00:42 incident paru il y a une semaine chez Futuropolis et l'Ouvre-édition.
00:46 Bonjour Selba.
00:47 Bonjour Nicolas, bonjour Géraldine.
00:50 Et bienvenue dans les Midis de Culture.
00:52 Alors on va bien évidemment Selba parler de BD, de vos BD, de dessin.
00:58 Mais avant, on aimerait savoir l'Aviron.
01:01 Pourquoi l'Aviron ?
01:03 Alors tout simplement parce que j'ai grandi au bord d'un lac, ou pas très loin d'un
01:11 lac.
01:12 Et comme mes parents ont eu la superbe idée de mettre ma soeur et moi dans un collège
01:21 lycée réservé aux filles, l'Aviron nous semblait la bonne idée pour rencontrer des
01:26 garçons.
01:27 Donc vous vous êtes dit l'Aviron pour rencontrer des garçons, pas par passion par exemple ?
01:31 Non, c'est beaucoup trop fatigant.
01:34 Mais vous le racontez dans votre BD, dans le même bateau.
01:38 Effectivement, c'est des entraînements tous les jours.
01:41 C'est horrible.
01:42 Mais c'est vrai.
01:43 Mais comment vous avez réussi alors à être championne du monde junior en trouvant ça
01:47 horrible ?
01:48 Alors oui, mais ça c'est quand on fait quelque chose.
01:51 Beaucoup, beaucoup, beaucoup.
01:53 Donc au bout d'un moment, il faut s'entraîner 7-8 fois par semaine.
01:57 C'est quand même… Voilà.
02:00 Et faire tout ça pour après ne pas être sur les tapis rouges, ce serait hyper frustrant.
02:05 Alors il vaut mieux gagner.
02:07 Ça veut dire que ça dit quelque chose de votre caractère ? Vous êtes déterminée ?
02:11 Oui, je pense quand même oui.
02:13 Vous en avez refait depuis l'Aviron ?
02:16 Non, non, non.
02:17 Vous avez été championne du monde et après ça s'est arrêté ?
02:20 Après, j'avais d'autres rêves.
02:22 Donc championne du monde à quel âge ?
02:23 18 ans.
02:24 Est-ce que c'est à peu près au même moment quand vous avez commencé l'Aviron, vous
02:30 étiez adolescente au collège, que vous avez commencé le dessin ?
02:33 Ah non, j'ai commencé très très tôt.
02:35 Je pense que je dessine depuis que j'avais la force de tenir un crayon.
02:41 Donc deux ans ?
02:43 Oui, je pense que très très tôt.
02:45 Puis j'ai eu la grande chance d'avoir une maman qui n'aimait pas beaucoup la télévision.
02:50 Et quand on s'ennuyait, elle nous donnait, à ma soeur et moi, des feuilles, des feutres
02:59 et on dessinait.
03:00 Donc à quel moment est apparue peut-être cette envie que le dessin soit plus qu'un
03:06 divertissement, qu'une sorte de substitut à la télé ?
03:10 C'est très naturel en fait.
03:12 Comme je dessinais depuis toujours et ça a toujours été mon moyen d'expression préféré,
03:19 parce que j'ai très très tôt commencé à me raconter des histoires en faisant des
03:24 dessins.
03:25 Donc ça racontait déjà beaucoup de choses.
03:26 Après le processus a été très naturel.
03:30 Je n'ai jamais arrêté en fait.
03:33 L'aviron était une parenthèse.
03:36 Mais j'ai toujours quand même dessiné à côté, à l'école, pour amuser les copines,
03:42 leur raconter un petit peu.
03:43 Pour rencontrer des garçons aussi ?
03:45 Non.
03:46 Pour approcher des garçons ?
03:47 On voyait des petits messages sous forme de dessins ?
03:50 Non mais ils étaient dans les dessins !
03:51 Justement, on a tous commencé à dessiner très tôt.
03:55 Moi je dessinais des bonhommes avec des bras en forme de râteau.
03:59 Je ne racontais pas d'histoire.
04:00 Mais est-ce que vous vous souvenez à quel moment vous avez commencé à raconter des
04:07 histoires ?
04:08 Est-ce que vous vous souvenez de quelle histoire c'était ?
04:09 Qu'est-ce que ça racontait ?
04:10 Oui, je me souviens assez bien de ces grands dessins que je faisais sur des papiers d'ordinateur
04:18 qui sortaient des imprimantes à l'époque, qui étaient reliés entre eux.
04:22 Comme des rouleaux.
04:23 J'avais des grandes feuilles qui ne s'arrêtaient plus.
04:26 Je dessinais beaucoup d'hôpitaux parce que comme ma maman était très malade des
04:30 poumons et elle était très souvent à l'hôpital, l'hôpital c'était un endroit que je connaissais
04:36 bien.
04:37 Il y avait beaucoup de chambres et j'imaginais ce qui se passait derrière toutes ces portes.
04:42 Nous, on ne connaissait qu'une seule chambre.
04:43 Donc je dessinais des grands hôpitaux avec toutes les chambres.
04:49 Et je dessinais dans chaque chambre, je me racontais des histoires, ce qui se passait
04:53 dans les chambres.
04:54 Ça ressemble déjà un petit peu à de la BD presque.
04:57 Mais c'était du dessin à l'époque, ce n'était pas pour vous de la BD forcément.
05:01 Ah non, je ne connaissais pas de la BD.
05:03 Vous n'en aviez pas lu ?
05:04 Jamais non.
05:05 J'ai lu ma première BD à 30 ans passés.
05:11 Ah ouais ?
05:13 Ah oui, en Allemagne, ce n'est pas du tout populaire comme dans le monde franco-belge
05:18 ou aux États-Unis ou au Japon.
05:21 Pas du tout.
05:22 L'Allemagne a un petit retard.
05:24 Encore maintenant ?
05:25 Encore maintenant, oui.
05:27 Parce qu'on ne rattrape pas autant de… En France, en Belgique, c'est tellement riche.
05:34 C'est un milieu tellement riche et c'est tellement populaire.
05:37 En Allemagne, il y a aujourd'hui quelques BD, quelques librairies BD spécialisées,
05:46 mais très peu.
05:47 Il y a aussi quelques maisons d'édition de BD, mais c'est incomparable.
05:51 Vous avez essayé de publier vos BD en Allemagne ou pas ?
05:53 Non, j'ai eu un livre dans le même bateau qui a été…
06:02 Celui où vous racontez justement vos années d'aviron, notamment avec votre sœur aînée.
06:06 Voilà.
06:07 Et donc ce livre-là, comme ça joue en Allemagne, ça joue à l'époque de la chute du mur
06:12 et de la réunification.
06:13 Donc c'est un sujet très allemand aussi.
06:15 Et là, c'est une maison d'édition allemande qui est venue acheter les droits à Futuropolis
06:24 pour la sortir en Allemagne.
06:25 Oui, je pense qu'il faut quand même le préciser parce qu'en fait, on ne l'a pas dit, vous
06:28 êtes née en Allemagne, mais vous vivez aujourd'hui…
06:30 Ça s'entend quand même ?
06:31 Oui, ça s'entend.
06:32 Mais bon, il vaut mieux le dire.
06:34 Vous êtes née en 1973, donc vous racontez la chute du mur de Berlin à la fin des années
06:40 80, enfin en 89, dans le même bateau.
06:45 À quel moment vous êtes venue en France ? Est-ce que vous êtes venue en France justement
06:48 parce qu'il y avait une sorte de vide artistique autour des possibilités qu'offrait le dessin ?
06:53 Alors non, je suis venue au début par curiosité parce que je connaissais la France juste par
07:03 les vacances d'été.
07:05 On a passé toutes nos vacances d'été au bord de la Méditerranée vers Grissant.
07:12 Et pour moi, la France, tout était beau, c'était toujours joyeux, c'était les
07:21 vacances.
07:22 Donc j'avais une image très idéalisée de la France.
07:25 Et quand tout au début de mes études, j'ai vu à Arn, en Allemagne, j'ai commencé à
07:32 faire mes études de graphisme et d'illustration.
07:35 Et on avait une petite cafétéria où je faisais du service aussi pour gagner un peu
07:40 des sous.
07:41 Et sur la porte était affichée une affiche qui prônait les échanges Erasmus.
07:49 Et donc j'ai dit, la France, on peut partir en France.
07:52 Saint-Etienne, je ne savais pas où c'était, je me suis inscrite sans savoir où j'allais.
07:56 Et alors, quelle a été la surprise ? Comment vous avez été ?
07:59 C'était génial.
08:00 Je suis d'abord partie pour 3-4 mois et ça m'a tellement plu que…
08:08 On n'est jamais partie ?
08:09 Si, je suis partie.
08:10 Je suis repartie en Allemagne.
08:12 Je me suis réinscrite pour un Erasmus d'un an.
08:14 Je suis retournée à l'école des beaux-arts de Saint-Etienne.
08:18 Et là, j'ai rencontré mon mal idéal avec lequel je vis toujours.
08:24 Mal idéal ? Vous n'avez pas mari ? Homme idéal ? Mal ?
08:28 C'est mon mal.
08:29 Oui, mon amoureux.
08:32 On a fait deux enfants Erasmus et hop, je suis restée.
08:35 Et hop, Saint-Etienne.
08:37 On va tout de suite parler de la BD qui sort et qui s'appelle "Le Grand Incident".
08:43 Et pour vous inviter à nous parler du sujet, à nous dire de quoi parle cette BD, parce
08:47 qu'elle est beaucoup moins personnelle, autobiographique que vos autres albums, je
08:51 vous propose d'écouter cette archive de 1957.
08:54 Allo, allo, Max Petit, m'entendez-vous ? Je vous entends, Saint-Michy-Mont, je vous entends.
09:02 Alors, je pense que peut-être...
09:03 Je vous entends.
09:04 Pendant que je parlais...
09:05 Pour le moment, nous attendons aussi l'arrivée de Sa Majesté et de son Altesse Royale, le
09:10 Prince Philippe.
09:11 Il s'arrêtera un instant, je le redis, pour regarder cet extraordinaire statue, la victoire
09:16 de Samothrace.
09:17 Pour...
09:18 Oui ? Vous m'entendez, je pense ?
09:20 Oui.
09:21 Nous en étions au chapitre de la statuaire.
09:23 Peut-être pourrais-je dire un mot d'une regrettable omission que j'ai faite, pardon,
09:28 à propos de quelques-unes des pièces rares qui se trouvent dans la salle des Cariatides.
09:32 Et en particulier, je voudrais dire qu'au centre de cette salle se trouve la fameuse
09:38 Diane Chasseresse, qui est une copie antique du bronze du IVe siècle avant Jésus-Christ
09:45 et qui fut acquise par François Ier.
09:49 Il y a là quelques formelles statues comme cet adorable enfant à l'oie ou les trois
09:55 grâces si fameuses.
09:57 Et encore, j'ai là sous les yeux une Aphrodite accroupie, la Vénus de Vienne, une Ariane
10:04 endormie et qui sont tous des chefs-d'œuvre grecques de la période hélénistique qui
10:08 va du IIIe au Ier siècle avant Jésus-Christ.
10:12 10 avril 1957, la Reine d'Angleterre est en voyage en France et elle visite le Louvre.
10:18 Vous aussi, Zelba, vous nous faites visiter le Louvre dans votre dernier album, Le Grand
10:22 Incident, qui est paru aux éditions Futuropolis et aussi chez Louvre.
10:26 Editions, est-ce que vous voulez aussi nous montrer les plus belles statues, comme on
10:29 l'a entendu dans cet archive du Louvre, et notamment les statues de femmes ?
10:33 Oui, bien sûr, c'est formidable de se balader dans le Louvre.
10:39 C'est un lieu très impressionnant, rempli de chefs-d'œuvre.
10:43 C'est d'ailleurs une invitation pour une carte blanche.
10:50 Donc chaque auteur, chaque autrice qui vient, c'est une coédition entre le Louvre et
10:58 les éditions Futuropolis.
10:59 Et moi, j'avais envie de rencontrer le Louvre aussi avec toutes les idées que j'avais
11:09 en tête.
11:10 Vous avez dit tout à l'heure que c'est peut-être un livre moins personnel qu'avant.
11:16 Mais même quand j'écris une fiction, il y a quand même beaucoup de moi dedans.
11:24 Et forcément, je viens avec les choses qui me tracassent, avec les choses qui m'amusent,
11:31 me travaillent en tout cas.
11:32 Je montre dans le grand incident des belles statues et des belles toiles qu'on trouve
11:42 au Louvre, mais j'avais envie de surtout les cacher un petit peu.
11:47 De les invisibiliser finalement.
11:50 Parce que dans le monde culturel, les femmes ont pendant longtemps été invisibilisées
11:57 aussi.
11:58 Et donc, ce livre-là, je l'ai écrit en sortant.
12:04 C'était juste après la Covid, quand on a été privés de culture, etc.
12:09 Donc, c'était assez dur.
12:10 Et tout ça a aussi nourri cette histoire où le Louvre doit fermer ses portes parce
12:17 que les sculptures et les femmes nues peintes deviennent transparentes dans les œuvres.
12:25 Est-ce que vous pouvez nous raconter l'histoire du grand incident ?
12:30 Je dis juste le début et peut-être vous irez jusqu'où vous voulez aller pour pas
12:34 trop nous en dévoiler.
12:36 On ouvre donc votre album, Zelba, et on est dans le Louvre.
12:43 Les visiteurs passent les portes de sécurité et on se rend compte que les hommes sont invités
12:49 à se déshabiller.
12:50 On vérifie quand même plusieurs fois, on se dit est-ce que c'est que les hommes ?
12:54 Est-ce que c'est aussi les femmes ? Non, effectivement, ce ne sont que les hommes
12:57 qui du coup sont tous nus.
12:59 Et on ne comprend pas ce qui s'est passé, pourquoi les hommes sont nus.
13:02 Et là, flashback dans l'histoire.
13:04 Est-ce que vous voulez en dire plus, Zelba, sur ce grand incident qui a mené à cette
13:09 situation où les hommes visitent à poil le Louvre ?
13:12 Au poil !
13:13 Oui, la première scène du flashback, c'est une visite du Louvre d'une classe
13:23 de jeunes lycéens, de très jeunes hommes qui sont attroupés autour de la belle Atalante
13:35 qui se noue ses sandales.
13:37 Elle est toute nue, elle est sur un petit socle, donc bien accessible aux visiteurs.
13:42 Et il lui manque un quelque peu de respect parce qu'ils vont la toucher, ils se prennent
13:49 en photo en lui touchant les seins, ils la prennent en photo, ils font des gros plans
13:55 sur ses fesses.
13:56 Ils miment l'acte sexuel avec elle.
13:59 C'est quelque chose qui n'est pas hyper grave en soi.
14:03 On peut dire que ce sont des bêtises de jeunes hommes.
14:07 Mais quelque part, ça montre déjà l'image de la femme, qui est encore bien ancrée,
14:16 la femme offerte, la femme objet, cette femme un peu soumise aussi dans sa nudité.
14:26 Et donc, on apprend ensuite que les sculptures prennent très mal ces réflexions-là parce
14:34 qu'elles vivent.
14:35 Tout le monde ne peut pas les entendre, mais il y a Teresa, ma petite femme de ménage
14:41 portugaise qui travaille au Louvre depuis 30 ans et qui est mon chouchou, ma petite
14:48 chouchou du livre.
14:49 - Qu'on n'écoute pas au début.
14:50 - Voilà.
14:51 - Mais qui est la seule à écouter ces femmes dans le musée.
14:54 - Voilà.
14:55 Elle les écoute, elle échange avec elles, elle les entend et elle prend soin d'elles.
15:02 Et quand elle apprend que maintenant ça suffit, les femmes dans les œuvres veulent se révolter,
15:09 elle va parler au président directeur, fictif bien sûr, dans le livre.
15:15 Et bien sûr, il la prend pour une folle, il la vire.
15:18 Et voilà le grand incident a lieu.
15:23 Les femmes disparaissent dans les œuvres et personne ne comprend ce qui se passe et
15:27 pourquoi.
15:28 - Alors c'est étonnant.
15:29 J'imagine que vous parliez tout à l'heure que c'était une coédition avec le Louvre.
15:33 Donc vous aviez carte blanche.
15:34 Comment le Louvre réagit quand vous leur dites que vous allez faire disparaître les
15:40 œuvres qui sont dans ces salles, dans votre bande dessinée ?
15:44 Ça paraît un peu fou ?
15:46 - Non, je pense que c'était…
15:51 Je raconte une histoire.
15:52 Donc c'est pas le vrai Louvre bien sûr.
15:54 Le Louvre est mon terrain de jeu.
15:56 C'est le décor pour cette histoire-là.
15:59 Mais c'est une fable en fait que je raconte.
16:01 C'est une fable burlesque et fantastico-mique.
16:04 Donc avec des traits fantastiques.
16:06 Et j'espère toujours un peu drôle aussi.
16:10 - Oui c'est drôle.
16:11 Je confirme, c'est drôle.
16:12 C'est très drôle.
16:13 - Tant mieux.
16:14 C'était le but.
16:15 - Mais est-ce que le Louvre, c'est pas froissé ?
16:17 - Non.
16:18 Après c'est de l'art.
16:21 Nous on fait un art.
16:25 La BD est aussi un art.
16:27 Et il faut pouvoir transgresser aussi un petit peu.
16:31 Il faut que ça soit transgressif.
16:32 Et le Louvre est déjà un lieu tellement impressionnant que moi j'avais envie en plus de venir avec
16:42 des hommages un peu irrévérencieux.
16:44 - Il y a tout de même un discours derrière cette fable, ce conte que vous nous racontez.
16:50 Qui est effectivement relire l'histoire de l'art.
16:54 Relire tout ce qui a été produit durant des siècles.
16:56 Et redonner, éclairer en tout cas le rôle des femmes et la position des femmes dans
17:02 ces œuvres.
17:03 - Oui.
17:04 Mais c'est…
17:05 Alors comme toute fable, je pointe un problème sociétal d'aujourd'hui.
17:11 Donc je parle…
17:12 Ça se passe au Louvre mais je ne parle pas du Louvre vraiment.
17:14 Je parle à travers les œuvres d'art de notre société d'aujourd'hui et cette sexualisation
17:21 du corps féminin qu'on subit encore aujourd'hui.
17:24 Et je le raconte d'ailleurs dans la postface de mon livre que tout ça est aussi né…
17:32 Parce que moi j'ai des enfants.
17:33 Mes enfants aujourd'hui subissent les mêmes choses que moi quand j'étais jeune, que
17:39 nos mamans peut-être avant nous.
17:40 Et je trouve qu'à part mettre un mot sur la chose, le harcèlement de rue, les choses
17:48 ne changent pas assez vite.
17:50 Donc je me suis dit, voilà, ça me travaille tout ça.
17:54 Aujourd'hui, les jeunes filles, les jeunes femmes doivent encore subir ce genre de choses.
18:02 - Alors effectivement, quand je vous ai posé la question, est-ce que le Louvre s'est
18:06 froissé, c'est plutôt est-ce que vous l'avez senti, comment dire, ouvert à ce genre de
18:11 réflexion ? Ouvert à l'idée quand même de se questionner sur la manière dont on
18:17 met en scène des œuvres, dont on fait de la pédagogie ou au contraire se disant, voilà,
18:23 ce sont des travaux qui relèvent de l'histoire, de l'art, de livres à part, de recherches
18:28 à part.
18:29 Nous on est un musée et on doit présenter les œuvres telles qu'elles sont.
18:32 On ne peut pas revenir en fait sur l'histoire, on ne peut pas changer les œuvres qui sont
18:37 exposées.
18:38 - Non, mais en plus il ne faut pas les changer.
18:39 C'est comme ça.
18:40 On a quand même aujourd'hui le droit de regarder ces œuvres avec notre sensibilité
18:46 d'aujourd'hui, avec nos prises de conscience, avec un œil critique aussi.
18:50 Mais moi j'ai surtout travaillé avec une personne au Louvre, avec le directeur de collection
18:57 de cette collection Louvre avec Futuropolis qui s'appelle Fabrice Douard et mon puits
19:03 de science qui a répondu à toutes mes questions et qui m'a fait rencontrer des personnes
19:08 aussi.
19:09 Et j'ai rencontré une jeune conservatrice du département des peintures qui a vraiment
19:16 salué mon idée de parler de tout ça parce qu'elle a dit c'est vrai qu'on a, même
19:22 nous dans notre métier de conservatrice, par moments, on est des femmes aussi, donc
19:28 bien sûr quand on a une lecture de ces œuvres qui est parfois un peu difficile parce que
19:35 la nudité féminine telle qu'elle est montrée dans beaucoup d'œuvres d'art, pas dans
19:40 tous, je le dis que dans le grand incident ou pour le grand incident, bien sûr je me
19:46 suis concentrée sur les œuvres qui allaient dans la direction de ce que je veux raconter
19:53 dans mon histoire.
19:54 Mais elle m'a dit qu'il y a des salles par exemple qu'elle vit mal parce qu'il
20:03 y a beaucoup de femmes humiliées dans la nudité, soumises, que des scènes d'enlèvement
20:10 voire de viol, des attouchements non consentis, toujours ces femmes reluquées alors qu'elles
20:18 sont endormies.
20:19 Voilà, donc ça c'est des choses, bien sûr qu'on ne va pas revenir en arrière.
20:24 - Mais c'est d'ailleurs tout le travail de la médiation culturelle et des médiateurs
20:28 et médiatrices qui sont dans les salles et qui aussi expliquent aux visiteurs effectivement
20:34 ce qu'on voit sur les œuvres, comment elles sont représentées, à quelle époque
20:37 elles ont été réalisées, c'est peut-être ce qui manque à cette jeune bande d'adolescents
20:41 qui arrivent et qui s'attaquent en quelque sorte à cette statue.
20:46 - Oui, peut-être.
20:47 - C'est le travail aussi de cette BD.
20:49 Il y a quelque chose aussi qui est intéressant dans cette BD, Zelba, c'est qu'il y a d'un
20:54 côté la surreprésentation des corps nus féminins et l'autre paradoxe c'est qu'à
21:00 côté de ça on a une invisibilisation des femmes qui gèrent ce musée en fait.
21:05 Je pense notamment au personnage du frère et de la sœur jumeaux, jumelles, Charles
21:10 Darlin qui est le directeur et Charline Darlin qui est sa sœur jumelle et qui est la secrétaire.
21:15 Mais en fait ils se déguisent l'un en l'autre et c'est vraiment Charline qui dirige ce musée.
21:22 Donc il y a vraiment ce paradoxe que vous travaillez en fait relativement à l'art
21:25 et qui en fait ne se retrouve pas que au Louvre mais aussi dans tous les arts, dans la BD.
21:30 Surreprésentation du corps féminin nu, invisibilisation de ceux qui font, de celles qui font cet art.
21:36 Alors ça c'est heureusement en train de changer pas mal.
21:40 Vous croyez dans la BD par exemple que ça change ?
21:42 Alors dans la BD je crois qu'on est entre 20 et 30% d'autrices aujourd'hui.
21:50 Oui ça change.
21:54 Après c'est sûr que quand on est dans des salons de BD, il y a toujours beaucoup plus
22:00 d'hommes que de femmes.
22:01 Mais ça je pense que j'ai écrit cette histoire aussi parce que dans cette collection Louvre,
22:10 il y avait beaucoup d'hommes qui ont fait des livres avant moi et quand j'ai cherché
22:15 les nombres d'autrices là-dedans, je me suis dit tiens, tiens, il n'y a pas beaucoup
22:21 de femmes.
22:22 Donc d'autant plus important c'était pour moi de raconter une histoire qui parle
22:29 de ça aussi, de la condition de la femme dans notre société.
22:34 Et puis il y a une femme qui a beaucoup compté pour vous dans la BD, c'est Marjane Satrapi.
22:40 Mais putain c'est pas possible, où qu'on se place on voit toujours la même chose.
22:55 Tu parles d'un cours d'anatomie, le seul truc qui dépasse c'est son grenier.
22:58 Vous devez vous présenter immédiatement à l'université centrale.
23:02 Tous ceux qui s'abstentront seront renvoyés pendant deux semaines.
23:05 Nous ne pouvons pas nous permettre de nous comporter n'importe comment.
23:10 C'est du sang de nos martyrs qu'ont poussé les fleurs de notre révolution.
23:13 Avoir une conduite indécente c'est piétiner le sang de ceux qui ont donné leur vie pour
23:16 notre liberté.
23:17 Aussi je demande aux demoiselles ici présentes de porter des pantalons moins larges et des
23:22 cagoules plus longues, qu'elles couvrent bien leurs cheveux et qu'elles ne se maquillent
23:25 pas.
23:26 Quelqu'un a-t-il une question ? Oui ? Vous dites que nos cagoules sont courtes, que
23:31 nos pantalons sont indécents, que nous nous maquillons, etc.
23:34 En tant qu'étudiante en art, une bonne partie de mon temps se passe à l'atelier.
23:37 J'ai besoin de liberté de geste afin de pouvoir dessiner.
23:40 Une cagoule plus longue rend la tâche encore plus difficile.
23:43 Vous n'hésitez pas à nous faire des remarques ? Or, les frères ici présents ont toutes
23:47 formes de coiffure et d'habillement.
23:48 Parfois, ils mettent des vêtements tellement serrés qu'on arrive même à voir leur
23:52 dessous.
23:53 Comment se fait-il que moi, en tant que femme, je ne puisse rien éprouver en regardant ces
23:56 messieurs moulés de partout, mais qu'eux, en tant qu'hommes, puissent s'exciter
23:59 sur nos quelques centimètres de cagoule en moins ?
24:01 "Persée, police" de Marjane Satrapi et Vincent Paronaut, c'est le film qui date
24:17 de 2007, mais la BD date de l'an 2000.
24:21 Est-ce que c'est cet album, Zelba, qui a été la première BD que vous avez lue et
24:26 donc peut-être le premier choc que vous avez eu avec la bande dessinée ?
24:28 "Ah oui, tout à fait.
24:30 C'était une révélation pour moi.
24:32 Lire "Persée, police", ce n'était pas du tout ce que je pensais être de la BD.
24:38 J'avais une idée assez arriérée de ça.
24:43 Je me suis dit que c'est forcément quelque chose pour ados ou pour enfants, forcément
24:48 en couleur, des petits tomes de 48 pages.
24:52 Et de pouvoir raconter une histoire sérieuse pour adultes, comme ça, en BD, c'était
25:03 un choc.
25:04 Je me suis dit "Waouh, c'est ça que je veux faire !"
25:08 Parce qu'il y avait à la fois le mélange entre l'image, le texte, mais aussi peut-être
25:14 un propos politique.
25:15 C'est-à-dire qu'il y avait vraiment ces trois dimensions-là que vous pouviez tenir
25:18 dans une BD ?
25:19 C'est vrai que j'aime beaucoup lire l'autobiographie.
25:23 J'aime bien lire des récits où je sens une personne derrière le récit, où j'apprends
25:30 quelque chose en plus.
25:32 Donc là, oui, bien sûr, sur la vie de Marjane Satrapi, c'était hyper intéressant en plus.
25:40 Pour moi, un bon livre m'apprend toujours quelque chose aussi.
25:44 J'essaye aussi dans les livres que j'écris de toujours faire passer des petits messages.
25:50 Ça veut dire que vous attendez aussi des retours de ceux qui vous lisent ?
25:55 Pour la BD, ça passe par des séances de dédicaces, mais vous le faites aussi plus
26:01 au quotidien, avec les réseaux sociaux, où vous êtes aussi présente.
26:03 C'est important pour vous cet échange avec ceux qui vous lisent, qui vous regardent ?
26:08 Voir s'ils ont bien reçu vos messages ?
26:09 Après, chacun a le droit d'interpréter comme il veut.
26:14 Et puis, on ne peut pas plaire à tout le monde.
26:16 Mais c'est vrai que je suis assez active sur les réseaux sociaux.
26:21 Ça a commencé à l'époque, je crois que c'est en 2007, que j'ai ouvert mon premier
26:28 blog.
26:29 A l'époque, c'était les blogs.
26:31 J'ai commencé à publier mes toutes premières petites histoires, parce qu'au début, je
26:37 n'osais pas trop directement me lancer dans un grand récit.
26:42 J'ai fait des toutes petites choses sur quelques cases pour apprendre un peu les codes.
26:46 Ce qui était chouette, déjà avec les blogs, c'était qu'on avait un retour immédiat.
26:52 Il y avait des gens qui lisaient et qui commentaient.
26:55 Parfois, on discutait.
26:57 Moi, j'ai trouvé intéressant de pouvoir dire tout de suite que ça fonctionne, ça
27:02 fonctionne moins.
27:03 On apprend vachement mieux quand on a des retours, quand on n'est pas tout seul dans
27:07 son atelier.
27:08 Vous n'étiez pas vexé ? Ce n'est pas vexant d'avoir…
27:10 C'est une question que je me pose souvent.
27:12 Il y a beaucoup d'écrivains, d'auteurs, de dessinateurs qui partagent sur les blogs,
27:15 sur les réseaux, qui sont très contents d'avoir des retours, des fins qui sont réécrites
27:19 aussi.
27:20 Mais est-ce que parfois, on n'a pas l'impression, on ne prend pas le risque non seulement d'être
27:23 vexé, c'est purement personnel aussi, mais que vraiment l'envie qu'on avait, l'expression,
27:29 l'interprétation qu'on avait n'a jamais été perçue.
27:31 C'est quelque chose de frustrant presque.
27:33 Pour moi, la critique est assez importante.
27:36 Plus trop aujourd'hui, au moins, tout dépend comment c'est ramené.
27:41 Comment c'est amené si quelqu'un vous insulte, bien sûr que c'est vexant.
27:47 Aucun intérêt.
27:48 Aucun intérêt.
27:49 Mais si quelqu'un n'a pas compris la blague ou n'a pas compris quelque chose,
27:54 n'a pas été touché par quelque chose que j'ai envie de raconter de manière touchante,
28:03 c'est ma faute.
28:04 Ça veut dire que je n'ai pas réussi à exprimer ça, ni avec les mots, ni avec le
28:11 dessin.
28:12 Donc, ça me montre aussi où je dois encore améliorer mon trait et mon écriture.
28:19 Vous nous emmeniez presque sur les réseaux sociaux, dans les coulisses de comment vous
28:28 travaillez aussi.
28:29 C'est important pour vous de montrer que la BD ou le dessin, ce n'est pas juste
28:35 l'œuvre finale, mais c'est aussi tout un travail de comment vous le faites, comment
28:38 vous vous exprimez par ce biais-là.
28:40 C'est vrai qu'avant le grand incident, j'ai toujours beaucoup plus mis l'accent
28:47 sur l'écriture que sur le dessin.
28:49 Je me suis toujours dit que le dessin, c'est juste mon outil pour raconter une histoire.
28:57 Peut-être que ça m'a un petit peu sécurisé aussi d'avoir le dessin.
29:03 Parce que comme le français n'est pas ma langue maternelle, il fallait d'abord
29:06 que je la prévoise.
29:07 De là à pouvoir dire un jour « je suis autrice », parce que c'est assez gonflé,
29:16 j'ai trouvé ça assez gonflé de dire ça parce que ce n'est même pas ma langue
29:19 et j'étais assez réticente pendant très longtemps.
29:21 En plus, je suis une femme, donc j'ai un gros complexe de l'imposteur tout le temps.
29:27 - Et maintenant ? Vous pouvez vous dire autrice maintenant ?
29:30 - Oui, je le dis maintenant.
29:32 Ça fait quelques années que je dis que je suis autrice et quelque chose dans ma tête
29:37 fait toujours « zzzz ».
29:38 - Ah, ça y est, je le dis !
29:41 - Mais voilà, il faut assumer au bout d'un moment.
29:45 C'est vrai que le dessin, quand j'ai eu cette belle invitation dans la collection
29:50 Louvre, au début ça m'a un petit peu impressionnée.
29:54 Parce que je me suis dit « oh, pour le Louvre, il va falloir que je soigne le dessin, peut-être
29:59 un peu plus, il faut mettre un peu plus d'importance sur le dessin ».
30:04 En plus, mon éditeur au Louvre, Fabrice Douard, il m'a dit « ah, tu vas nous faire un livre
30:12 en tradis, comme ça, sur papier, pas sur tablette graphique.
30:16 - En tradis, ça veut dire en traditionnel ?
30:18 - En traditionnel, sur du papier, sur du beau papier.
30:21 - Avec des pinceaux.
30:22 - Voilà.
30:23 - Ce n'est pas votre habitude, vous êtes plutôt numérique ?
30:26 - Alors, ça dépend.
30:27 Je suis devenue numérique avec les trois livres d'avant.
30:34 Parce que je me suis dit « bon, peut-être que ça me fait gagner du temps ».
30:38 Ce qui est absolument faux.
30:40 Parce que quand on a la possibilité de revenir en arrière, eh bien, on revient en arrière.
30:46 Même si les traits n'étaient pas si mal que ça.
30:49 Mais là, voilà, pour le grand incident, j'ai acheté du beau papier aquarelle, très
30:55 épais et je suis restée plantée devant un grand moment avant d'attaquer la première
31:02 planche.
31:03 Je me suis dit « oulala, je ne vais jamais pouvoir dessiner là-dessus ».
31:05 Eh bien, je suis arrivée.
31:07 Je suis assez fière d'avoir un gros paquet d'originaux aujourd'hui pour ce livre.
31:14 - Qu'est-ce qui vous a plus plu d'ailleurs ?
31:16 Est-ce que c'est le travail comme ça en tradis ou est-ce que c'est la tablette numérique ?
31:20 Qu'est-ce que vous allez faire pour votre prochain album ?
31:21 Est-ce que vous avez revu votre manière de fabriquer ?
31:25 - Alors là, pour moi, c'était très important pour ce livre.
31:28 Après, j'adapte toujours mon dessin au récit.
31:32 Il faut qu'il serve le récit.
31:33 Ici, j'avais besoin d'originaux pour ce récit qui joue au Louvre.
31:39 Mais je ne m'interdis pas de revenir à la tablette pour un prochain livre.
31:46 - Qui sont vos références en bande dessinée ?
31:51 Qui vous lisez aujourd'hui comme auteur et autrice de bande dessinée ?
31:55 - Alors, c'est vrai que comme je suis entrée dans ce monde de la bande dessinée avec Persépolis
32:04 de Marjane Satrapi, je suis restée assez gourmande de ce genre de récits.
32:11 Je lis beaucoup de choses autobiographiques comme Florence du Prélatour ou Aude Mermillau.
32:21 Après, j'ai beaucoup d'amis aujourd'hui dans la bande dessinée comme mon ami De
32:30 Loupi qui m'a d'ailleurs posé ce livre de Persépolis entre les mains.
32:37 C'est un petit peu grâce à lui que j'ai découvert la bande dessinée.
32:40 Bien sûr, je lis tous les livres.
32:44 J'ai beaucoup aimé aussi le hashtag #J'accuse de Jean Dittard.
32:51 Des choses où on apprend vraiment beaucoup de choses.
32:54 Mais qui sont peut-être des récits assez intimistes aussi.
32:59 Peut-être pas du grand public.
33:02 - J'ai pensé qu'à ma manière, j'étais profondément féministe, que je le serais
33:09 toujours, que ça a été un grand moteur dans ma vie.
33:12 Et si on regarde de ma génération, j'ai peut-être réalisé les plus grandes, les
33:17 réalisations les plus monumentales.
33:19 Toutes mes choses monumentales dans un certain sens sont aussi pour prouver qu'une femme
33:26 peut travailler à cette dimension.
33:28 Et aussi, il faut voir que l'époque a permis à une femme pour la première fois, rappelez-vous
33:35 qu'au 18e siècle, les femmes avaient la défense de sculpter parce que ça leur donnerait
33:40 des mauvaises idées.
33:41 Rappelez-vous que Camille Claudel a passé 30 ans enfermée parce qu'elle avait plus
33:48 de talent que Rodin et c'était insupportable.
33:50 Il y a eu beaucoup de choses.
33:52 Rappelez-vous qu'avant, j'aurais été brûlée comme une sorcière.
33:55 J'ai toujours été très conscient de ça.
33:58 Très conscient de ce vouloir m'exprimer d'une manière monumentale.
34:04 L'artiste Niki de Saint-Fall en 1991, qui évoque ici son féminisme comme moteur dans
34:12 sa vie, aussi dans sa création.
34:13 Très intéressant cette idée de vouloir faire des œuvres monumentales pour montrer
34:17 aussi qu'une femme peut le faire.
34:20 Est-ce que vous, vous avez toujours ça en tête, Zelba, quand vous faites une BD, que
34:24 ce soit en tradi, sur tablette numérique, en abordant la question de la mort racistée
34:29 de votre mère ou l'aviron, la chute du mur avec votre sœur ou là le grand incident
34:33 au Louvre, de vouloir faire quelque chose de monumental aussi, de l'aborder comme
34:38 comment je le fais en tant que femme pour marquer quelque chose ?
34:41 Peut-être pas.
34:42 Moi, j'ai envie de raconter des histoires.
34:46 Moi, je n'achèterais pas un livre selon le sexe de l'auteur ou de l'autrice.
34:53 Je m'intéresse autant aux livres écrits par des hommes que des livres écrits par
34:58 des femmes.
34:59 Je raconte des histoires et je pense que je les raconte avec ma tête et mes mains
35:04 et non avec mon sexe.
35:06 Après, bien sûr, je suis une femme et je suis féministe avec une prise de conscience
35:13 assez récente qui date de MeToo, je dirais, parce que j'ai 50 ans.
35:21 J'ai forcément été aussi élevée dans une famille plutôt patriarcale.
35:27 Il y avait beaucoup de choses où le féminisme était peut-être vu comme quelque chose de
35:33 négatif.
35:34 C'était des hystériques auxquelles on n'avait pas très envie de s'identifier.
35:38 J'ai pris conscience de beaucoup de choses à l'époque de MeToo, quand j'ai commencé
35:47 à m'échanger avec des amis aussi et où je me suis rendu compte qu'en fait, nous
35:53 étions très très nombreuses, qu'on avait toutes vécu des choses et accepté des choses
36:00 inacceptables.
36:01 - Merci beaucoup Zelba d'être venue nous parler de votre BD "Le grand incident"
36:07 paru chez Futuropolis et l'ouvre-édition.
36:09 J'en profite aussi pour citer mes mauvaises fiches chez Futuropolis et dans le même bateau
36:14 chez Futuropolis aussi, j'ai lu les trois BD, elles sont super.
36:18 Donc allez-y.
36:19 - Merci beaucoup.
36:20 - Merci à vous et pour finir Zelba, je vous propose le choix entre deux chansons.
36:23 Alors "Element of Crime", je crois que vous connaissez bien.
36:27 Je vais le dire en allemand, vous allez me dire si je le prononce mal.
36:29 "Immer Unter Strom" ou alors on vous propose...
36:33 - C'était bien, c'était bien.
36:34 - C'était super.
36:35 - L'accent tonique, je ne sais pas.
36:37 Ou alors une chanson surprise sur la nudité.
36:39 - Ah je prends la surprise.
36:41 - Allez c'est parti alors.
36:43 Un soir je faisais une plaine d'eau pour tout maillot, j'avais la peau, nul ne pouvait me
36:55 voir, pas le ciel noir.
37:00 La lune soudain vint s'exhiber, j'allais lui dire ta bouche bébé, quand j'entends
37:07 ton cri près de moi, un cri des moines, il y avait un homme sur un rocher pas assez
37:17 haut, l'homme a fait "Oh" et moi dans l'eau, moi j'ai fait "Oh".
37:28 Il m'a vue nue, toute nue, sans cache truc ni soutien machin, j'en ai rougi jusqu'au
37:40 vaccin, il m'a vue nue, toute nue, je me suis par respect humain, voilé la face de
37:53 mes deux mains, mais je vois bien, parce que j'ai réfléchi, j'ai négligé d'voiler
38:03 quelques petits chichis.
38:07 - Et la chanson surprise c'était "Mr Get".
38:10 Il m'a vue nue, vous l'aurez toute l'après-midi dans la tête, moi c'est déjà le cas depuis
38:15 ce matin.
38:16 - Vous la chantez bien.
38:17 - Oui je la chante moins bien que Mr Get.
38:19 - Les midis de culture sont préparés par Aïssa Touendeuil, Anaïs Hizbert, Cyril Marchand,
38:24 Zora Vignier, Laura Dutèche-Pérez et Manon Delassalle.
38:27 Merci beaucoup à eux, merci aussi à Nicolas Berger à la réalisation, à Nicolas Bonnet
38:33 à la prise de son ce midi.
38:35 Et merci à vous Nicolas Herbeau, on se retrouve demain.
38:38 - A demain.

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