Santé - Alerte canicule

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Chroniqueur : Gérald Kierzek 




En 2003, la France connaissait la canicule la plus sévère de son histoire. Engorgement des urgences, vieillissement de la population... 20 ans après, quelles leçons en tirer ? Le point avec le Dr. Gérald Kierzek.
Transcript
00:00 On va parler justement avec vous des fortes températures qui touchent la France.
00:03 Il y a 20 ans, évidemment, il y avait la canicule, une canicule qui avait fait près de 20 000 morts.
00:08 Ce sont les chiffres de l'Inserm.
00:09 Est-ce qu'on a tiré les leçons, Dr Kierzak, de cette canicule de 2003 ?
00:14 Le vrai problème en 2003, et pour ceux qui s'en rappellent, c'est que le 1er août, finalement, il fait chaud,
00:20 il y a des températures qui sont un peu élevées, mais qui vont se maintenir,
00:23 et il n'y a pas d'anticipation de météo France.
00:25 Et donc, on se retrouve avec des images.
00:28 Quand on regardait les journaux télévisés, j'ai repris quelques archives d'images de la France, le bonheur, la plage.
00:33 Rapidement, la France aux urgences, finalement, et on se souvient tous de ces brancards accumulés dans les services d'urgence,
00:39 où on voyait des personnes âgées essentiellement qui encombraient les couloirs,
00:44 parce qu'on ne peut parler que de ça, que de ces images assez terribles.
00:47 Moi, je me rappelle, à l'époque, on avait ouvert, réouvert des services.
00:50 Ce manque d'anticipation, on peut dire que là, les choses ont un petit peu changé,
00:55 puisqu'il y a maintenant un plan canicule. C'est après la canicule de 2003 qu'il y a eu ce fameux plan canicule en 2004,
01:01 avec la mise en place d'un système de veille, c'est-à-dire dès le 1er juin jusqu'au 15 septembre,
01:06 de manière systématique, chaque année, on a une vigilance sur les températures.
01:10 Frédéric le sait bien, il nous en parle quotidiennement, avec des niveaux vert, jaune, orange, on est en alerte canicule.
01:17 Et puis, quand vraiment ça dépasse et qu'on est sur un phénomène exceptionnel,
01:21 on a une mobilisation maximale avec des alertes de météo France qui sont beaucoup plus précises.
01:25 Et puis, rappelez-vous aussi, suite à la canicule de 2003, il y a eu ce fameux lundi de Pentecôte.
01:30 Travaillé.
01:31 Oui, on travaillait. Alors maintenant, c'est ce jour de solidarité qui peut être n'importe quand dans l'année.
01:36 Et l'objectif, c'était de dégager de l'argent pour pouvoir le mettre sur les personnes âgées
01:40 et sur, justement, l'amélioration de la prise en charge.
01:42 Alors, il y a toujours cette journée de solidarité.
01:45 C'est vrai que l'affectation des crédits, on n'en a pas forcément vu la couleur,
01:49 ni en amont dans les services médicaux sociaux, dans les structures médico-sociales, ni à l'hôpital.
01:54 Ça veut dire, Gérald, effectivement, que ces moyens qui ont été plutôt annoncés à l'époque,
01:58 où on a mis en place des dispositifs,
01:59 ils ne sont pas arrivés dans les hôpitaux, dans les structures qui accueillent les personnes âgées ?
02:01 C'est là où le bas blesse.
02:03 C'est-à-dire qu'il y a, dans la chaîne, j'allais dire, de prise en charge des personnes âgées,
02:07 parce que le problème de la canicule de 2003, c'était vraiment cette surmortalité chez les personnes âgées.
02:11 Il y a le problème du médico-social, les EHPAD, les structures dans lesquelles on doit accueillir.
02:16 Alors bien sûr, il y a eu plein de choses. Il y a eu un plan bleu qui a été fait.
02:19 Ce n'est pas le plan blanc, pas le plan rouge.
02:20 C'est le plan bleu et ce plan bleu, il prévoit des procédures en cas de crise sanitaire, de canicule,
02:26 de rafraîchir les espaces, repérer les personnalités, veiller à l'hydratation, adapter les menus,
02:31 renforcer les équipes médicales.
02:33 Mais qu'est-ce qu'il faut pour ça ?
02:34 Il faut des moyens. Il faut des moyens humains, il faut des moyens personnels.
02:37 Pareil avec les services médicaux sociaux dans les villes,
02:39 pour pouvoir aller au domicile des personnes les plus fragiles.
02:43 Les moyens, il manque de personnel, on le sait à chaque fois.
02:46 Et puis ça, c'est l'amont avant d'arriver à l'hôpital, pour éviter le séjour à l'hôpital.
02:50 Mais à l'hôpital, c'est la même chose.
02:51 Regardez les unes encore cette année, regardez Libération la semaine dernière,
02:54 les unes de tous vos journaux en région.
02:57 On voit l'hôpital en état d'urgence, urgence fermée, la crise sans fin, urgence en détresse.
03:01 C'est août 2023, c'est-à-dire qu'on est 20 ans après et on voit bien que ce manque de moyens,
03:07 en particulier de personnel, il est toujours criant,
03:09 ce qui veut dire qu'on a une crise structurelle qui s'est aggravée depuis 20 ans.
03:13 Donc on fait quoi concrètement ?
03:15 Alors, il y a des déclarations de bonnes intentions.
03:18 Il y a deux axes en fait.
03:19 Il y a l'axe du grand âge, du bien vieillir.
03:21 Et je crois qu'il faut vraiment dans ce pays qu'on prenne conscience qu'on vieillit.
03:24 Et c'est une bonne nouvelle.
03:25 Les progrès médicaux, plein de progrès ont fait que l'espérance de vie augmente.
03:30 Sauf qu'il faut accompagner parce qu'il y a le problème de la dépendance.
03:33 Et on voit que cet été, par exemple, la loi sur le bien vieillir qui était prévue,
03:36 qui était dans les bonnes intentions, elle a été repoussée là encore.
03:39 Et puis le deuxième volet, le deuxième grand axe, c'est les hôpitaux.
03:41 Parce qu'on voit bien qu'on ne va pas pouvoir se passer des hôpitaux.
03:44 Et à chaque fois, alors là c'est la canicule, mais l'hiver prochain,
03:46 ça sera la grippe ou le Covid.
03:48 On voit bien que tout phénomène sanitaire se répercute sur l'hôpital
03:52 et que la situation, elle est assez catastrophique.
03:54 Juste une pensée pour les collègues de Saint-Tropez
03:56 qui ont été obligés en plein mois d'août de fermer les urgences.
03:59 Ce qui est complètement hallucinant et on est 20 ans après la canicule.
04:02 Donc voilà, les deux axes, c'est vraiment le grand âge.
04:04 Anticiper la dépendance et le bien vieillir.
04:06 Et le deuxième axe, c'est soutenir le système de santé
04:08 et probablement refaire un maillage de territoires,
04:10 des hôpitaux de proximité et soutenir la médecine de ville aussi.
04:13 La crise de l'hôpital, ce n'est vraiment pas terminé effectivement Gérald.
04:16 Pour la canicule en tout cas, courage parce que les derniers jours
04:18 commencent à approcher a priori.
04:19 Donc jeudi, on devrait commencer à voir les températures baisser un petit peu.
04:22 N'est-ce pas Frédéric ? Je me tourne vers vous pour être sûr.