Manuel Bompard : "Répondre à ce problème au lieu de faire comme si ça n'existait pas"

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Chaque matin de l'été, à 8h15, Alexandre Le Mer en juillet et Lionel Gougelot en août reçoivent une personnalité au centre de l'actualité. Ce Lundi matin Manuel Bompard revient sur les manifestations de ce week-end en mémoire à Adama Traoré.
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00:00 Manuel Bompard, coordinateur de la France Insoumise, député des Bouches-du-Rhône.
00:03 - Bonjour Manuel Bompard. - Bonjour.
00:04 - Une réaction peut-être d'abord à ce témoignage qu'on entendait dans le journal 8h il y a quelques minutes sur Europe 1,
00:09 ce week-end festival des idées qui s'est tenu dans la Nièvre avec des électeurs de gauche,
00:15 des débats entre des responsables des différents partis gauche,
00:18 et puis on a entendu Stéphanie, cette responsable associative de Roubaix, coup de colère,
00:22 qui ne se reconnaît plus dans la gauche, qui se dit prête à voter blanc ou à ne pas voter du tout,
00:29 qui vous dit hors sol, hors sol face aux grands défis qui se posent à nous aujourd'hui.
00:33 - Elle a le droit de le penser, après tout le monde ne pense pas la même chose qu'elle,
00:38 la preuve c'est qu'à Roubaix Jean-Luc Mélenchon a fait 52% des voix à l'élection présidentielle,
00:42 et que nos candidats aux élections législatives ont fait 70%.
00:45 Donc elle a le droit de penser ce qu'elle pense,
00:47 mais manifestement l'ensemble des habitants de la commune dans laquelle elle habite ne pensent pas la même chose.
00:51 Pour le reste, bien sûr il y a des gens qui ne se reconnaissent pas dans le monde politique tel qu'il est,
00:56 pour partie je les comprends, je crois qu'ils ont raison,
00:58 ils ont eu le sentiment ces dernières années d'être trahis par celles et ceux qui sont au pouvoir,
01:03 ça n'a pas été le cas de la France Insoumise en l'occurrence.
01:05 Et donc notre responsabilité c'est de faire en sorte de convaincre ces gens que si on peut changer les choses,
01:11 et que le programme que porte la France Insoumise peut répondre aux difficultés que les gens rencontrent au quotidien,
01:16 donc moi j'essaye de convaincre tout simplement.
01:18 - Manifestation samedi à Paris, en mémoire d'Adama Traoré, manifestation interdite,
01:23 2000 personnes y ont participé, une dizaine d'élus insoumis et écologistes.
01:27 Pourquoi avoir fait le choix de participer à cette manifestation interdite ?
01:31 - Parce que c'était une manifestation légitime,
01:34 parce que depuis 6 ans maintenant, chaque année se tient cette manifestation
01:39 en mémoire de ce jeune homme qui est mort suite à un contrôle de gendarmerie,
01:45 et que sa famille demande la vérité et la justice,
01:48 et que quand on demande la vérité et la justice, et quand il y a des gens qui ont envie de le faire,
01:53 et d'exprimer cette volonté et cette demande, c'est légitime qu'ils puissent le faire,
01:57 et que la décision d'interdiction de cette manifestation
02:00 était une décision complètement incompréhensible.
02:02 Ces manifestations se sont toujours déroulées dans le calme,
02:05 elles se sont toujours bien passées, d'ailleurs celle-ci s'est bien passée
02:08 jusqu'au moment de la dispersion où la brave M a décidé,
02:12 pour une raison totalement incompréhensible,
02:14 d'attaquer des manifestants, de violenter des journalistes,
02:17 et ce qui devrait, je crois, ce matin, souligner ou soulever une vague d'indignation,
02:23 c'est la manière avec laquelle vos collègues journalistes ont été traités dans cette manifestation,
02:27 ça, ça devrait indigner tout le monde.
02:29 Donc cette manifestation, elle était légitime,
02:31 et je crois qu'il était notre responsabilité d'y participer,
02:34 y compris pour vérifier qu'elle se déroulerait dans des bonnes conditions.
02:37 - Légitime, mais des élus républicains qui se rendent à une manifestation interdite
02:41 pour cause de risque de trouble à l'ordre public,
02:44 ramener l'ordre public, c'est préalable au retour de l'ordre républicain, après les émeutes ?
02:50 Enfin, vous êtes conscient du symbole que vous envoyez ?
02:52 - Bah, je sais pas, peut-être que vous poserez la question à M. Gosselin ou à M. Poisson,
02:56 député de droite qui participait en 2013 devant l'Assemblée nationale à une manifestation interdite.
03:01 Non, à l'époque, je remarque que personne n'est venu leur poser la question de savoir
03:05 pourquoi ils le faisaient, ou est-ce que c'était pas quelque chose d'extrêmement grave.
03:09 Donc, écoutez, notre participation à cette manifestation pacifique, dans le calme,
03:13 était une participation qui visait justement à rappeler que dans notre pays,
03:18 ce qui est en train de devenir la norme, et ça devrait quand même interroger tout le monde,
03:21 entre la dernière fois qu'il y a eu une vague d'interdiction de manifestation, c'était en 1962,
03:26 c'était la manifestation de Charonne, qui était à l'appel du Parti communiste,
03:29 qui avait été interdit, dans lequel il y avait d'ailleurs des élus, et qui s'était terminée par des morts.
03:33 À partir de ce moment-là, de 1962, pendant de longues années en France,
03:38 on a considéré qu'il était légitime de pouvoir manifester.
03:41 On est en train de revenir à une période d'interdiction des manifestations,
03:44 et c'est ça qui devrait nous interpeller.
03:46 - Malheureusement pas. Est-ce que la famille Traoré peut se prévaloir de représenter les quartiers ?
03:49 - Mais personne ne peut se prévaloir de représenter les quartiers.
03:53 Et je pense que d'ailleurs l'intention ou la volonté de cette famille, comme vous l'appelez,
03:58 n'est pas de représenter les quartiers, c'est de défendre une demande de vérité, une demande de justice,
04:05 parce que je pense qu'il n'est pas normal, même quand on a fait une bêtise,
04:09 et quand on est arrêté par la police, que ça se termine par la mort.
04:12 Mais ça, ça devrait interroger quand même tout le monde.
04:14 Je rappelle qu'on est dans un contexte dans lequel, ces dernières années,
04:18 il y a eu une multiplication d'une nombre de personnes qui meurent suite à des refus d'obtempérer
04:21 ou des contrôles de police.
04:22 Il y en a eu 13 l'année dernière, en 2022.
04:25 13, ça fait plus d'un par mois l'année dernière.
04:28 En Allemagne, en 10 ans, il y a eu une personne qui est morte suite à un refus d'obtempérer.
04:31 Ça, ça devrait nous interroger.
04:32 Et je suis stupéfait de voir que le gouvernement est dans l'incapacité d'apporter des réponses politiques à ce sujet.
04:38 Parce que plutôt que de parler des manifestations interdites, de qui y était, etc.,
04:42 la question c'est comment on fait en sorte qu'il n'y ait plus une seule personne qui meurt suite à un refus d'obtempérer.
04:45 C'est ça qui devrait nous interroger.
04:47 - Emmanuel Dombard, les réponses politiques,
04:48 Emmanuel, Elisabeth Borne les a dévoilées, en tout cas en partie, dans Le Parisien hier.
04:54 Mobilisation massive des forces de l'ordre pour le 14 juillet.
04:57 L'idée d'une amende, une amende pour les parents de mineurs impliqués dans les émeutes,
05:01 sur le modèle de la sanction dès la première connerie,
05:03 pour reprendre les mots d'Emmanuel Macron.
05:05 Est-ce que c'est la bonne réponse ?
05:06 - Mais attendez, d'abord, en quoi c'est une réponse politique
05:09 au fait qu'un jeune homme de 17 ans soit mort suite à un refus d'obtempérer ?
05:13 Ça ne répond pas à ça.
05:14 Donc ce n'est pas une réponse politique à ce problème-là.
05:17 - En tout cas aux conséquences, aux émeutes.
05:19 - D'accord, mais normalement quand on essaye d'être un peu rationnel,
05:22 parce que l'objectif c'est quand même d'essayer de faire les choses avec intelligence,
05:26 on essaye d'abord de regarder la cause,
05:28 et puis d'essayer d'apporter une réponse à la cause.
05:31 Et sur la cause, j'observe que c'est le sujet dont le gouvernement ne veut pas parler.
05:34 Donc je dis qu'il faut des réponses politiques d'abord,
05:36 avant de répondre aux fausses réponses politiques du gouvernement, à la cause.
05:40 Et les réponses politiques à la cause, c'est revenir sur la loi de 2017,
05:44 parce que depuis qu'il y a eu une modification de la loi en 2017,
05:46 le nombre de personnes qui sont mortes suite à des refus d'obtempérer a augmenté de 500%.
05:50 C'est le dépaysement systématique des cas d'enquête sur des cas de violences policières.
05:56 C'est une réforme de la police avec la mise en place d'une autorité de contrôle indépendante
06:00 qui remplace l'IGPN.
06:01 Ça c'est des réponses politiques à la cause.
06:03 Pour le reste, la logique qui consiste à dire que quand des parents,
06:08 ou quand un enfant a fait une bêtise, on va attaquer les parents,
06:11 est une logique que je réprouve et que je conteste.
06:14 Je pense que c'est une mauvaise réponse, je pense qu'elle est contre-productive,
06:17 et je pense qu'elle ne fonctionnera pas.
06:19 Voilà, donc je ne suis pas d'accord avec cette réponse.
06:22 Et ceux qui viennent sur les plateaux de télévision
06:25 multiplier les propositions les plus démagogiques les unes que les autres
06:28 devraient savoir par exemple qu'il existe déjà, parfois,
06:31 de la part des juges des enfants, des mesures d'accompagnement pour les parents
06:34 qui ont du mal à élever leurs enfants dans des bonnes conditions,
06:36 et qu'elles ne sont pas suivies des faits parce qu'il n'y a plus de moyens
06:38 pour faire en sorte qu'il y ait ensuite des éducateurs ou des associations
06:41 qui puissent les mettre en œuvre.
06:42 - Emmanuel Bonpart, la parole d'Emmanuel Macron le 14 juillet,
06:44 fin de la période des 100 jours, qui se voulait une période d'apaisement.
06:48 - Réussi, hein ? - Vous pensez qu'Emmanuel Macron va évoquer,
06:51 vous souhaitez en tout cas qu'il évoque le rapport d'hostilité
06:54 entre les forces de l'ordre et une partie de la jeunesse ?
06:55 - Mais oui, mais bien sûr qu'il faut l'évoquer,
06:58 parce qu'on ne peut pas se satisfaire de cette situation.
07:01 On ne peut pas se satisfaire d'une situation dans laquelle
07:04 vous avez une partie de la population qui est dans un rapport de peur
07:07 ou de défiance vis-à-vis de sa police.
07:09 Et dire ça, ce n'est pas être anti-police,
07:11 c'est aussi un problème pour les policiers,
07:13 ça les met dans des situations de danger.
07:15 - Vous lancez un appel pour le 14 juillet, un appel au calme ?
07:17 - Mais moi j'ai toujours demandé à ce que les choses se passent dans le calme,
07:20 et j'appelle surtout à ce qu'il y ait des paroles,
07:22 qu'il y ait des paroles de la part du gouvernement,
07:24 qu'il y ait des paroles d'apaisement,
07:26 et qu'il y ait des paroles qui apportent des réponses
07:28 au mal-être profond qu'il existe aujourd'hui
07:31 dans le rapport entre la police et une partie de la population.
07:34 Et ça, personne ne peut s'en satisfaire.
07:36 Et donc si on veut résoudre ce problème,
07:37 il faut apporter des réponses en profondeur.
07:40 Quand l'ONU dit qu'il y a un problème de racisme dans la police,
07:43 il ne faut pas balayer ça d'un revers de la main,
07:44 il faut s'attaquer à ce problème.
07:45 Quand le défenseur de droit dit que quand vous êtes noir ou arabe,
07:49 puisque c'est les termes qu'il utilise,
07:50 vous avez 20 fois plus de chances d'être contrôlé qu'une personne blanche,
07:54 c'est un problème.
07:55 Et donc il faut répondre à ce problème
07:57 plutôt que de faire comme si ça n'existait pas.
07:58 - Merci, merci Emmanuel Bompard.
08:00 - Merci à vous.
08:00 - Coordinateur de la France Insoumise, député des Bouches-du-Rhône.

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