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00:00 Ils ont vérifié les photos.
00:02 Ils ont vérifié qu'elles n'étaient pas éditées en Photoshop.
00:06 - As-tu vu les photos? - Non, je n'ai pas.
00:09 As-tu vu les photos?
00:11 Je ne peux pas croire qu'on puisse faire ça aux autres.
00:20 En 2014, des milliers de clichés de victimes du régime syrien, mortes sous la torture, sont dévoilés.
00:35 Nom de code, dossier César.
00:37 César était un photographe de la police militaire du régime de Bachar al-Assad à Damas.
00:44 À partir de mars 2011, on demande à César et à son équipe, lui et les autres photographes, de prendre en photo des cadavres.
00:53 Ils comprennent que ce sont des détenus morts dans des centres de détention, des services de renseignement du régime syrien.
01:00 Ce sont des cadavres qui pèsent 30-40 kg, qui sont visiblement affamés, qui ont subi des coups.
01:07 Et qui ont surtout des numéros sur le corps qui indiquent d'où ils viennent, de quel centre de détention ils ont été amenés.
01:17 César m'a envoyé un message, il avait un son très fort, il m'a dit qu'il devait me voir.
01:25 Il a décidé de quitter le travail.
01:32 Je suis allé chercher pour qu'il reste en César.
01:39 Pendant 18 mois, Samy, activiste et ami proche de César, l'aide à sortir des archives secrètes du régime 27 000 photos de détenus syriens morts.
01:47 Dans le but d'alerter la communauté internationale, mais aussi d'informer les familles sans nouvelles de leurs proches.
01:53 La première fois que les photos de César sont montrées, c'est en janvier 2014 au ministère des Affaires étrangères français.
01:59 Puisque Laurent Fabius s'empare du sujet, il est assez proche du groupe qu'on appelle à l'époque les amis de la Syrie.
02:06 Quand les photos sont diffusées au ministère, c'est un silence glacial.
02:11 Ces photos sont quand même terribles et nous rappellent forcément les camps de concentration.
02:16 Fin 2013-2014, il y a ces négociations de paix à Genève, le régime syrien ne va pas bien.
02:22 Donc le régime est peut-être proche de tomber.
02:25 Laurent Fabius va à l'ONU, demande que le conseil de sécurité vote une résolution pour saisir la Cour pénale internationale, pour que le régime syrien soit jugé.
02:34 Ceux qui sont contre, la résolution n'a pas été adoptée en raison du vote négatif des membres permanents du conseil.
02:49 Face à l'impasse de la justice internationale, des activistes publient en ligne le dossier César, dans l'espoir que des familles puissent identifier les victimes.
03:00 Je suis en contact avec vous, j'ai vu des photos de la Cour pénale internationale.
03:06 Tout va bien.
03:08 Quelle est la date d'arrestation ?
03:12 L'arrestation a eu lieu le 11 juin 2012.
03:20 On découvre que le dossier César n'est pas mort.
03:24 Des enquêteurs, des familles, essayent de s'emparer du dossier, de l'utiliser comme un instrument pour porter des plaintes,
03:33 et trouver un autre chemin en saisissant des tribunaux en Europe et en trouvant parmi les victimes, des victimes qui ont la binationalité,
03:40 c'est-à-dire qui sont syriens et français, syriens et espagnols, ou autres.
03:45 Obeida Dabag est franco-syrien.
03:49 Il est à la recherche de membres de sa famille arrêtés en 2013 par les services de renseignement syriens.
03:55 Sa double nationalité lui permet de porter plainte en France pour disparition forcée et torture.
04:01 Soit ils sont morts sur la torture, on veut le savoir, soit ils ne sont pas morts sur la torture, on veut savoir à qu'est-ce qui leur aurait reproché,
04:07 et je veux le savoir, je veux le savoir.
04:09 Ça va pas être plus simple que...
04:11 Alors, on va peut-être parler de la plainte.
04:16 C'était important de qualifier à la fois disparition forcée,
04:20 c'est-à-dire que ça suppose un enlèvement par les autorités,
04:24 et ensuite la dissimulation du sort qui leur est réservé.
04:27 Donc on est vraiment dans cette catégorie, la juridique.
04:29 Cette plainte, est-ce qu'elle va être transmise aux autorités syriennes ou pas ?
04:33 C'était important de suivre des histoires au présent,
04:36 parce que ce n'est pas un "call case", c'est une histoire qui existe aujourd'hui.
04:40 Les photos de César, c'est des photos de gens qui sont morts hier,
04:43 qui meurent aujourd'hui, qui vont mourir demain de la même manière,
04:46 qui vont être affamés, torturés, etc.
04:48 Donc on ne parle pas d'histoires au passé.
04:50 Donc les photos de César, elles posent ça.
04:53 Contrairement à ce qu'on pense, la torture n'est pas là pour faire parler,
04:56 mais elle est là pour faire taire.
04:58 Les disparitions forcées brisent les familles,
05:01 sur des générations et des générations,
05:03 tant que vous ne connaissez pas le sort de votre proche,
05:06 vous ne pouvez pas grandir avec David,
05:08 vous ne pouvez pas grandir avec une personne qui manque dans votre famille,
05:11 avec des non-dits, avec des silences.
05:14 Et ça, c'est vraiment un crime perpétré par le régime consciemment.
05:19 Il y a vraiment une terreur qu'il impose avec ça.
05:23 Moussa Alkacem, chauffeur,
05:26 Wakhledo, 1182 jours de détention.
05:30 Moussa Achawak, 37 ans, chauffeur,
05:35 1186 jours de détention.
05:38 Noah Shekou, 50 ans, chauffeur,
05:42 1127 jours de détention.
05:45 [Bruit de voiture]