Guilhem "Pone" Gallard, membre de la mythique "Fonky Family", est atteint de la maladie de Charcot depuis 2015. Il publie "Un peu plus loin" (JC Lattès) dans lequel il raconte sa vie, avec les mots du cœur et ceux des yeux. Sa femme Wahiba est l'invitée de 9H10.
Retrouvez "L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10
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00:00 Sonia De Vilaire, votre invitée ce matin est l'épouse d'un célèbre beatmaker dont le nom de scène est Paune.
00:06 Vous saurez tout sur l'art du sample, ces boucles fatales qui font d'un son de rap un hit inoubliable.
00:13 Bonjour Wai Bagalar.
00:14 Bonjour.
00:14 Soyez la bienvenue.
00:16 Vous êtes donc la femme de Paune.
00:18 En quelques mots, je voudrais que vous nous décriviez à quoi ressemble Paune aujourd'hui et comment il vit.
00:28 Alors Paune aujourd'hui il ressemble à Paune.
00:32 À lui, allongé sur un lit.
00:35 Voilà, allongé sur un lit, 24h sur 24 tout le temps.
00:39 Donc, tétraplégique avec une trachéotomie.
00:43 Donc c'est un dispositif qui lui sert à respirer et une gastrostomie aussi.
00:49 Donc c'est un dispositif aussi qui lui sert à se nourrir.
00:53 Il est à faune.
00:54 Exactement et communique grâce à un dispositif informatique avec une navigation oculaire.
01:00 Voilà, alors une navigation oculaire, ce sont ses pupilles qui se déplacent.
01:04 Il n'y a plus que ses pupilles d'ailleurs qui se déplacent, dont il a la commande.
01:10 Il arrive avec ça à écrire un livre qui paraît aux éditions La Grenade, j'y sais la thèse, qui s'appelle "Un peu plus loin".
01:18 Parce que vous n'allez pas y croire mais Paune voit toujours plus loin.
01:22 Y compris atteint à ce stade-là par la maladie de Charcot.
01:27 Cher Paune, on vous écoute.
01:29 Vous avez enregistré un petit message pour les auditeurs de France Inter.
01:34 Bonjour à tous et à toutes.
01:37 Le fait de parler à un si grand nombre de personnes me procure un sentiment étrange.
01:42 Moi qui n'ai plus de voix.
01:44 Refaire de la promo après tant d'années ne fait que décupeler ce sentiment.
01:49 C'est un retour à quelque chose que j'apprécie énormément.
01:53 Je me suis mis à nu dans ce bouquin et ça aussi, c'est étrange.
01:59 Voilà, on l'a habillé un peu, on a mis des sons autour.
02:02 On n'était pas très à l'aise avec cette voix numérique, cette voix artificielle.
02:07 Mais vous, c'est votre quotidien ouahiba.
02:09 C'est la seule manière que vous avez de communiquer avec votre mari ?
02:12 Exactement.
02:13 Donc c'est une voix qui est familière et en même temps qu'on l'entend partout.
02:22 Et qui ne lui est pas propre aussi.
02:24 Donc c'est très bizarre.
02:26 Quand on utilise une voix artificielle sur le web, c'est cette voix-là qui sort.
02:30 C'est cette voix-là qui ressort.
02:31 Donc c'est vrai que c'est quelque chose aussi qu'on a essayé, sur lequel on travaille encore.
02:37 Pour y remédier.
02:38 Et on a déjà fait beaucoup d'étapes avec Marc-Antoine Lebray justement.
02:42 Qui est un imitateur.
02:43 Exactement.
02:44 Et qui est venu chez vous, qui a travaillé avec Paune.
02:46 Et qui s'est entraîné sur d'anciennes vidéos, des enregistrements de sa voix bien réelle.
02:51 A l'époque où il pouvait encore parler.
02:53 Et qui essaye de la restituer.
02:55 Ça fait encore plus froid dans le dos.
02:56 Au contraire, ça fait plaisir.
02:58 Ça fait plaisir.
02:59 Ça fait plaisir.
03:00 Parce que quand j'ai entendu la première fois l'imitation de Marc-Antoine, j'ai dû fermer les yeux.
03:05 Parce que c'est vrai que c'est très étrange d'avoir la voix de Paune avec un autre physique.
03:11 Et en fait, ça fait du bien de le réentendre.
03:16 Ça fait du bien.
03:18 Pour tous nos auditeurs qui ne seraient pas très familiers de l'histoire du rap français.
03:23 Paune, c'est l'âme de la funky family.
03:25 C'est ce hit hallucinant signé avec IAM en 1995.
03:30 * Extrait de Bad Boy *
03:53 Et là, vous voyez par exemple, Jean-Baptiste Audibert,
03:55 programmeur musical de cette ranche, est en PLS quand il entend les Bad Boys de Marseille.
04:00 Un peu plus loin, c'est aussi l'histoire d'une jeunesse à Toulouse.
04:04 C'est l'histoire d'un coup de foudre hallucinant pour Marseille.
04:07 C'est l'histoire d'un gamin qui grandit et qui se construit à travers le graphe
04:11 et à travers un collectif de grapheurs.
04:14 C'est l'histoire de la rencontre avec IAM.
04:16 C'est l'histoire de ce tube qui va les propulser avec la funky family,
04:20 des premiers concerts à Marseille soutenus par tout le panier.
04:23 C'est cette histoire-là que les fans vont retrouver dans le livre.
04:26 Et c'est l'histoire de la maladie de Charcot.
04:29 Comme Paul n'a beaucoup d'humour, il a un site sur lequel je vous conseille de vous rendre.
04:33 Ça s'appelle la SLA pour les nuls.
04:35 La SLA, ça veut dire quoi ?
04:37 * Extrait de Bad Boy *
04:39 Et puis il en a tiré un petit livre qui s'appelle Charcot pour tous.
04:43 Le Charcot pour tous.
04:46 C'est quand même plein d'humour.
04:50 Le diagnostic tombe en 2015.
04:53 Et en 2015, c'est une déflagration.
04:55 Au point que vous ne reconnaissez plus votre mari qui est si combatif,
04:59 si vivant, si mordant, si toujours plein de projets.
05:02 Au fond, c'est la défaite absolue. C'est le chaos.
05:06 On ne s'attendait tellement pas à ce diagnostic-là.
05:11 Enfin, on le redoutait.
05:13 Avec les symptômes qu'il avait avant, on le redoutait.
05:16 On espère qu'une chose, c'est que ce ne soit pas ça.
05:20 Dès que ça arrive, le coup est tellement dur que pour lui, il est chaos.
05:28 Il est sonné debout.
05:30 Le voir vide, vide dans le regard, vide dans l'attitude, c'est vrai que ce n'était pas lui.
05:39 Mais en même temps, il fallait quand même rester debout.
05:45 Parce qu'on a deux filles.
05:47 Donc du coup, il fallait trouver le moyen de le réveiller.
05:55 Un jour, il a dit, et c'était bien avant que son cœur ne s'arrête de battre,
05:59 parce que Pau ne revient de très loin.
06:01 Un jour, il a dit "je n'abandonnerai jamais".
06:04 Qu'est-ce qui s'est passé dans sa tête pour qu'il décide
06:06 qu'il n'abandonnera jamais, atteint à ce stade-là par la maladie de Charcot ?
06:11 Déjà, dans son caractère, c'est quelqu'un de très combatif.
06:15 C'est quelqu'un qui ne lâche pas.
06:17 C'est quelqu'un qui va au bout des choses.
06:20 Il y avait déjà cette force de caractère qu'il avait déjà en lui.
06:24 Nos filles.
06:26 C'est clair que voilà, quand on y repense, ça a été un booster pour lui.
06:32 Et aussi, sa spiritualité aussi.
06:39 Sa foi.
06:42 En 2017, lorsque son cœur s'est arrêté de battre, il l'écrit,
06:46 "je faisais 39 kilos pour 1m77.
06:49 J'étais à un stade de dénutrition si avancé qu'il suffisait à engager mon pronostic vital.
06:54 On m'a alors plongé dans le coma pendant une vingtaine de jours.
06:57 C'est là, entre la vie et la mort, que j'ai commencé à me reconstruire."
07:01 Et il raconte votre combat, pas son combat, votre combat à tous les deux,
07:06 face au corps médical, qui vous dit à vous, "Madame, c'est de l'acharnement thérapeutique."
07:12 Exactement. Parce que, avec le recul, je me dis, il y a un patient qui arrive,
07:21 qui est complètement, voilà, qui est arrivé dans un sale état.
07:26 Et parce que la dégrogolade s'est faite très très rapidement, en 10 jours,
07:31 il a perdu, je crois, 10 ou 15 kilos.
07:34 Et en même temps, on ne peut pas s'imaginer une vie avec ça.
07:41 Donc se dire, mais à quoi bon le réanimer ?
07:47 Pour faire quoi ? Quelle sera votre vie ?
07:51 "Vous ne vous rendez pas compte", vous dit le médecin.
07:55 "Vous ne vous rendez pas compte de tout ça, quoi."
07:58 De ce qui va en durée.
07:59 Exactement. Et nous, à ce moment-là, on arrive à l'hôpital, en service de réanimation,
08:03 il est 3h du matin. Ne me dites pas ça, en fait.
08:07 Ne me dites pas de "non, on est arrivé avec un projet de vie,
08:12 il a ses directives anticipées, on veut juste que ce soit respecté."
08:16 Ses directives anticipées. Il avait écrit, "Je ne veux pas qu'on me débranche, je veux vivre."
08:22 Sauf que je découvre, en lisant le livre de Paune, et c'est un grand débat national en ce moment,
08:27 que les directives anticipées, elles sont opposables.
08:30 C'est ça.
08:32 Donc le corps médical peut dire non.
08:34 Et chose que nous, encore aujourd'hui, on a du mal à comprendre en discutant avec d'autres patients,
08:40 parce que du moment que le patient fait un choix éclairé,
08:45 on doit respecter son choix.
08:47 Je ne verrai pas pourquoi, on ne voit pas pourquoi, un médecin, enfin une personne qui est au final étrangère,
08:53 prend cette décision si importante à la place du patient.
08:57 Donc après, quand le patient n'a pas pris sa décision, ça c'est un autre débat.
09:03 Mais quand il y a des directives anticipées, il faut que ça soit respecté.
09:06 Et au départ, c'est vrai que l'équipe médicale a eu du mal à comprendre la démarche,
09:12 à comprendre notre projet de vie.
09:14 Donc il y a eu beaucoup de discussions, ils ont dû faire intervenir des personnes extérieures,
09:20 et accepter aussi ma présence dans un service aussi fermé que ça,
09:25 parce que PON avait demandé à ne pas être seule.
09:28 Mais petit à petit, et avec l'aide du chef de service, le Dr Gragnet, qui est devenu un ami aujourd'hui...
09:38 De toute façon, vous les avez tous retournés.
09:41 Vous les avez tous retournés. C'est-à-dire que quand il est sorti du coma, il a récupéré tellement vite.
09:46 Il avait des cicatrices partout, de la tête au pied, il avait du métal dans le corps,
09:52 et ils n'en sont pas revenus de cette force de vie.
09:55 De ce projet de vie, on va parler ensemble au Wahïba, il est 9h19.
09:59 Vous écoutez France Inter, c'est Kate Bush qu'on va entendre.
10:02 C'est Kate Bush à la sauce PON, évidemment.
10:06 Kate Bush, immensissime chanteuse britannique qui préface le livre de PON,
10:11 et qui dit "il faut découvrir à quel point cet homme est incroyable, il y a tant de choses à apprendre de lui".
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11:58 Voilà, "Far", chanté par Kate Bush, et c'est un projet très particulier,
12:04 ouais, il bague à l'art, de PON, parce que c'est un projet à la fois artistique et caritatif.
12:09 Tout à fait.
12:10 Donc, je vous laisse expliquer.
12:12 Donc en fait, c'est un projet, ça s'appelle "Listen and Donate".
12:15 Ouais.
12:17 Donc c'est un projet caritatif où chaque écoute est un don pour l'association TRACADOME.
12:21 Donc cette association, en fait, elle vient en aide aux soignants et aux aidants,
12:26 pour les former, justement, aux personnes qui sont lourdement appareillées à domicile.
12:31 Voilà, et on va en parler.
12:33 [Musique]
12:35 France Inter, le 7 9 30, l'interview de Sonia De Villers.
12:39 Marseille, comme vous le savez, ce soir, PON n'est pas parmi nous.
12:45 Mais, grâce à des moyens techniques, il voit tout, il entend tout.
12:50 Marseille, un maximum de bruit pour lui !
12:53 [Applaudissements]
12:55 Un maximum de bruit pour la musique de PON, Marseille !
12:59 [Applaudissements]
13:00 Concert de soutien à PON, je crois que la Funky Family s'était séparée depuis 10 ans, c'est ça ?
13:05 C'est ça.
13:06 Vous les avez réunis !
13:07 [Rires]
13:08 De toute façon, vous avez tous les deux tellement d'énergie.
13:11 Vous les avez réunis, vous les avez recollés sur scène.
13:13 Les billets se sont arrachés en 8 minutes, et vous avez récolté des fonds à ce moment-là.
13:18 On va peut-être dire un mot, Waïba, c'est-à-dire que PON a composé des super tubes.
13:23 Il a travaillé avec le 113, il a travaillé avec IAM, la Funky Family, ça a été un grand succès.
13:28 Vous n'en êtes pas moins des Français, comme tout le monde, et vous n'êtes pas très riches.
13:33 Je le dis, il ne faut pas imaginer que dans cette vie dédante qui est la vôtre aujourd'hui,
13:39 vous vivez dans un luxe inimaginable avec une noria de personnel.
13:44 Au contraire, vous vous débrouillez toute seule.
13:46 Exactement.
13:47 On se dépatouille avec les aides qui sont mises en place aussi.
13:53 Mais non, ce n'est pas parce qu'on a rencontré le succès,
13:57 et pour eux, fin des années 90, début des années 2000,
14:01 qu'aujourd'hui les gens sont riches.
14:05 Non, pas du tout.
14:06 Pas du tout.
14:07 Et PON, dans son livre qui paraît aux éditions La Grenade, J.C.Lathès,
14:10 et qui s'appelle "Un peu plus loin", c'est vous dire le caractère du gars,
14:14 il parle de votre abnégation, Waïba.
14:16 Il parle de votre abnégation, de votre vie aujourd'hui,
14:19 de cette femme qui sourit du matin au soir, qui est là auprès de son mari, jour et nuit.
14:26 Vous n'avez plus aucune espèce de liberté en réalité.
14:30 Tout est organisé autour de cette maladie et de cette hospitalisation à domicile.
14:34 Exactement.
14:35 C'est une autre vie.
14:37 Une autre vie où tout est organisé.
14:40 Comme j'ai dit souvent, on n'a plus le droit au freestyle, à essayer de se...
14:49 Enfin voilà, les moments...
14:52 Le freestyle c'est un genre en rap.
14:54 Mais pour vous c'est juste avoir 5 minutes de liberté,
14:56 pouvoir improviser votre vie dans les 2 heures qui viennent.
14:58 L'improvisation, ça c'est fini.
15:00 Tout est cadré, tout est calculé.
15:03 On essaie d'anticiper un maximum de choses à l'avance.
15:08 Pour justement faire en sorte qu'on soit dans une vie paisible, sereine,
15:15 et qui ait une continuité et que chacun reste à sa place.
15:18 Paune a un rapport très particulier avec les machines.
15:23 C'est-à-dire que quand on lit cette autobiographie,
15:25 on comprend que très jeune, il ne quittait pas les salles d'arcane de jeux vidéo
15:30 et il détestait perdre.
15:31 Et que très jeune aussi, il va tomber sur les premières consoles de composition rythmique,
15:37 les Roland W, voilà, j'y connais rien.
15:40 Mais on comprend qu'en fait, il fait très rapidement corps avec la machine.
15:44 Et il devient ce beatmaker, ce fabricant, ce concepteur de son et de boucle.
15:51 Et c'est pas rien pour quelqu'un qui aujourd'hui dépend d'une machine.
15:54 Et même de plusieurs machines.
15:56 C'est vrai, dit comme ça, j'avais jamais pensé.
16:00 J'avais jamais pensé et tout.
16:03 Mais c'est vrai que même pour la première fois qu'il a eu la navigation oculaire,
16:07 quand on connaît un peu le système, ça a l'air très simple.
16:11 Mais c'est vrai que quand on le voit débarquer, on se dit, ça va être compliqué.
16:15 Et lui, il s'est emparé de ça.
16:17 Il s'est emparé de ça et même le commercial qui est venu nous le présenter au tout départ,
16:21 il n'en revenait pas parce qu'en dix minutes, il avait saisi comment ça marchait.
16:27 Et en fait, il a tout de suite maîtrisé le système.
16:29 Il a tout de suite maîtrisé le clavier, c'est-à-dire pour composer des mots.
16:33 Ensuite, qui seront reliés à cette voix artificielle qu'on a entendue tout à l'heure.
16:37 Donc, ça lui permet d'écrire, ça lui permet de lire, ça lui permet de communiquer.
16:40 Mais quand même, au départ, il s'est dit, je ne pourrai plus composer de musique.
16:44 Parce que les logiciels que j'utilise sont tellement complexes
16:46 que simplement avec mes pupilles, je n'y arriverai pas.
16:49 - Exactement. - Et puis finalement ?
16:51 - Et puis finalement, il y est arrivé.
16:53 C'est vrai que quand on voit son logiciel de musique,
16:55 c'est des logiciels qui sont vraiment très très complexes.
16:58 Et où chaque touche, en plus, c'est des petites touches qu'il faut aller chercher.
17:05 Et donc, quand il se servait de ses mains, il avait plein de raccourcis avec le clavier.
17:10 Donc, ça allait très vite. - Et là, il n'a que ses iris ?
17:12 - Là, il n'a que ses... Je ne sais pas.
17:14 Encore aujourd'hui, pourtant je le vois travailler, je ne sais pas comment il fait.
17:18 Il prend beaucoup beaucoup d'attention, beaucoup de concentration.
17:23 Mais il y arrive.
17:25 Et le jour, le premier jour où il a réussi à faire une boucle,
17:29 pour un musicien confirmé, la première boucle qu'il a faite, c'est une boucle standard.
17:35 Mais pour lui, c'était tellement grand ce qu'il avait fait à ce moment-là
17:40 qu'il s'est rendu compte, il s'est dit, si je suis arrivée à faire ça, ça va prendre du temps.
17:45 Mais je sais que je vais arriver à faire un truc.
17:47 - Il compose des albums, il produit des albums, il écrit des livres.
17:51 Il raconte quelque chose de très touchant.
17:54 Il a le souvenir de la nourriture,
17:56 qui maintenant ne pourra plus jamais manger normalement,
17:59 puisqu'il est nourri à travers toute une tuyauterie.
18:03 Donc, il a décidé d'écrire un livre de cuisine.
18:06 - Tout à fait. - Non mais sans blague !
18:09 Un livre de cuisine, avec des recettes.
18:12 - Exactement. Mais je pense que ça a été vraiment pour lui une forme de thérapie,
18:16 le deuil de ça. C'est quelqu'un qui se nourrit beaucoup,
18:19 enfin qui aimait la cuisine, qui aimait cuisiner.
18:22 Très bordélique dans sa cuisine, très créatif aussi, donc c'est pour ça.
18:26 Mais il aime trop ça.
18:29 Et en fait, je pense que le fait de se dire, je vais écrire un livre de cuisine,
18:34 juste en se souvenant des saveurs et des combinaisons qui fonctionnaient bien.
18:39 Donc autant il a écrit des recettes familiales,
18:42 et des recettes qu'il n'a jamais goûtées.
18:45 - C'est vrai ? - Et qui fonctionnent super bien.
18:48 - Voilà, il s'est découvert aussi une passion pour le miel.
18:51 En fait, cette saleté de maladie, Charcot, qui est extrêmement grave,
18:55 il ne la souhaite à personne, Paune, mais maintenant qu'elle est là,
18:59 au fond, il la fait sienne, et il le dit et il le redit, page après page,
19:04 "Je suis heureux". - Exactement.
19:07 Je comprends les gens qui ne comprendront pas ce que je vais dire,
19:13 mais cette maladie, en fait, elle nous a ramené tellement à l'essentiel,
19:20 et elle nous a fait vivre des moments très très durs,
19:27 mais elle nous a fait vivre aussi des moments tellement intenses de bonheur,
19:32 que du coup, on est heureux.
19:38 On est heureux tant qu'il a envie, tant qu'il est là, tant qu'il continue à faire des projets.
19:44 - Cette vie nous a ramené à l'essentiel.
19:46 Lui, il dit, c'est pas difficile avec Charcot, tout le corps s'arrête,
19:49 il reste l'essentiel, la tête et le cœur. - C'est exactement ça.
19:52 - Merci Waii Bagar. - Avec plaisir.
19:54 - Merci beaucoup. Un peu plus loin, c'est le livre de Paune,
19:56 composé avec les yeux, qui paraît à la grenade, J.C. Lattès.
19:59 Merci beaucoup. - Merci.