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Olivier Rouquan, politologue, enseignant-chercheur en sciences politiques et chercheur associé au CERSA, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéressent à l'étude de la réforme des retraites par le Conseil Constitutionnel.
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Olivier Rouquan, politologue, enseignant-chercheur en sciences politiques et chercheur associé au CERSA, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéressent à l'étude de la réforme des retraites par le Conseil Constitutionnel.
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00:00 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavenko, vous recevez ce matin le politologue Olivier Roucan.
00:04 Bonjour Olivier Roucan, bienvenue sur Europe 1, vous êtes politologue, enseignant-chercheur en sciences politiques,
00:09 chercheur associé au CERSA, le Centre d'études et de recherche de sciences administratives et politiques.
00:14 La bataille des retraites est entrée hier dans une phase aiguë.
00:17 Alors on a vu que le gouvernement avait survécu aux deux motions de censure
00:21 déposées par les oppositions après le 49-3 jeudi dernier.
00:25 Le projet de loi de retraite a donc été adopté.
00:28 Normalement c'est le soulagement qui devrait l'emporter au sein de l'exécutif.
00:32 Or c'est exactement le contraire, le climat est plus tendu que jamais depuis le début de l'examen.
00:37 On a l'impression que plus le texte avance et plus la contestation se radicalise, Olivier Roucan.
00:43 Disons que le cheminement du texte a à chaque fois renforcé finalement les oppositions
00:51 puisqu'on a quand même utilisé une batterie d'instruments qu'on appelle le rationalisme du Parlement
00:59 et du vote de la loi, c'est-à-dire des outils qui permettent de contraindre les parlementaires dans leur délibération.
01:06 Vous pensez notamment à l'article 47-1 par exemple ?
01:09 47-1, 44-2, 44-3, 38 du règlement du Sénat et puis évidemment tout ceci se terminant d'apothéose avec le 49-3.
01:19 Donc ça remonte les parties d'opposition et puis on se rend compte aujourd'hui
01:25 que ce que l'opinion acceptait facilement dans les années 90-2000, l'usage du 49-3
01:32 est aujourd'hui perçu très majoritairement comme un outil antidémocratique.
01:37 Alors comment vous l'expliquez ça Olivier Roucan ?
01:39 Je pense qu'il y a eu une évolution des valeurs, il y a des exigences aujourd'hui démocratiques
01:44 qui sont plus fortes et on voit que tout ceci va évidemment avec un décrochage par rapport aux institutions
01:52 et par rapport au personnel politique.
01:55 Donc il y a à la fois plus d'exigences démocratiques d'une partie de l'opinion,
01:58 mais il y a aussi, il faut bien le dire, un rejet.
02:02 Et dès qu'on parle d'un certain nombre d'instruments institutionnels ou politiques,
02:06 une partie de l'opinion se braque, refuse et rentre dans la colère.
02:10 Avant, on doit un peu voir la situation politique des uns et des autres,
02:13 à commencer par celle du président de la République.
02:15 La question qui se pose c'est qu'est-ce qu'il va bien pouvoir faire ?
02:18 Est-ce qu'il n'est pas au seuil de l'empêchement politique ?
02:20 Voyons un peu ce que va devenir le texte.
02:22 On voit que les oppositions et Elisabeth Borne, la première ministre,
02:25 se tournent au même moment vers le Conseil constitutionnel.
02:29 Alors qu'est-ce que les oppositions attendent du Conseil constitutionnel
02:32 et qu'en attend la première ministre ?
02:34 - Le Conseil constitutionnel, dès lors que l'on passe par une procédure
02:38 de loi de finances rectificative, et c'était le cas le 47-1...
02:42 - Oui, c'est une enveloppe budgétaire qui a été choisie pour les retraites.
02:45 - Il se prononce obligatoirement.
02:47 Donc il doit nous dire s'il y a la totalité ou une partie de cette loi
02:52 est conforme ou pas à la Constitution.
02:54 - C'est le contrôle de conformité on appelle ça.
02:56 - C'est le contrôle de conformité qui encore une fois est automatique
02:58 dès lors que l'on est sur une loi rectificative de finances ou une loi de finances.
03:02 Donc ceci, si vous voulez, est tout à fait normal.
03:06 - Est-ce qu'il y a un risque d'ailleurs que le texte soit refusé ?
03:08 - Il semblerait que sur certains articles il y ait des interrogations.
03:11 Mais on ne va pas faire le travail du Conseil constitutionnel avant lui.
03:14 Mais il semblerait que certaines dispositions ont un lien indirect.
03:17 - Il y a un risque de censure partielle.
03:19 - Avec le cœur du sujet, donc c'est ce qu'on appelle des cavaliers sociaux,
03:23 et le Conseil constitutionnel pourrait décider de dire qu'ils ne sont pas conformes à la Constitution.
03:28 Et puis il y a la question de la procédure qui a été suivie.
03:30 Est-ce que le Conseil constitutionnel va estimer que cette procédure
03:35 pour ce type de texte est là aussi conforme ou pas ?
03:38 - Alors maintenant les oppositions elles aussi saisissent le Conseil constitutionnel
03:42 en ayant déposé une proposition de loi visant un référendum d'initiative partagée, un fameux RIP.
03:50 Alors qu'est-ce qu'il y a d'abord dans cette proposition de loi
03:52 et pourquoi ça doit aller au Conseil constitutionnel ?
03:54 - Le RIP, c'est l'idée qu'il faut abroger finalement.
03:59 Cette réforme, et donc ça c'est en gros le contenu de la loi, il faut l'abroger.
04:06 Et le Conseil constitutionnel dans la procédure qui a été mise en place entre 2008 et 2013
04:13 doit regarder le contenu de ce texte et là encore estimer s'il est conforme à la Constitution.
04:22 Et ensuite il faut qu'il vérifie que les signatures des 1/5e des parlementaires qui présentent ce texte,
04:28 tout ceci est bien valide.
04:30 - Quel est l'objectif des oppositions à travers ce référendum d'initiative partagée ?
04:34 Est-ce que c'est d'imposer une sorte de légitimité populaire
04:37 si on parvient à rassembler pas loin de 5 millions de signatures ?
04:39 Évidemment c'est un poids politique très fort.
04:41 Ou est-ce que ce n'est pas aussi de retarder les choses ?
04:44 Parce qu'on sait qu'un RIP ça prend des mois.
04:47 - Ça prend 9 mois pour que les signatures de 1/10e de l'électorat puissent être recueillies.
04:53 Il faut du temps pour faire campagne.
04:55 Donc ça prend 9 mois.
04:57 L'objectif est à la fois de retarder et sur le fond d'aboutir,
05:05 en mobilisant évidemment le peuple,
05:09 d'aboutir à faire barrage à cette réforme.
05:13 Et évidemment à infliger un camouflet au gouvernement et au président.
05:18 Rappelons que si les signatures sont obtenues,
05:22 c'est l'Assemblée et le Sénat qui se saisissent du texte.
05:25 Et si dans les 6 mois elles n'arrivent pas à voter un texte,
05:27 il y a un référendum.
05:29 Ça peut prendre tout ceci beaucoup de temps.
05:31 - Effectivement.
05:32 On ne va pas avoir le temps de passer tous les sujets en vue,
05:36 mais on voit qu'à travers cette réforme se pose maintenant un sujet d'ordre et de paix civile,
05:40 avec tous les soirs des incidents répertoriés dans de nombreuses villes,
05:43 des insoumis qui poussent à l'insurrection.
05:45 Le terme est employé par le député insoumis Antoine Léaumont, je le dis à dessein.
05:50 Jean-Luc Mélenchon lui évoque la nécessité d'une censure populaire.
05:54 Et face à cela, Emmanuel Macron, pour l'heure silencieux, doit prendre la parole.
05:58 On l'a appris il y a quelques minutes.
06:00 Demain à 13h dans les JT de la mi-journée de TF1 et de France 2,
06:05 pour dire quoi, Olivier Roucan ?
06:07 - Pour dire quoi, je pense qu'il doit indiquer la suite,
06:13 le chemin qu'il souhaite suivre.
06:15 Et il doit notamment s'exprimer sur le gouvernement.
06:21 Est-ce qu'il veut le remanier ?
06:23 Est-ce qu'il veut redonner une cohérence à cette équipe ?
06:25 Ou est-ce qu'il veut en changer ?
06:26 Et notamment au sujet de sa première ministre.
06:30 Quel cap veut-il que le gouvernement suive dans les semaines ou les mois qui viennent ?
06:35 Parce que là, il y a une usure prématurée de ce gouvernement.
06:39 Avoir nommé Elisabeth Borne et l'user en six mois, c'est quand même assez inédit.
06:45 Donc il faut redonner du souffle.
06:47 Est-il en mesure de le faire dans le contexte que nous connaissons ?
06:50 Peu de personnes le croient, mais nous écouterons son intervention demain.
06:56 - Il y a toujours plus de questions que de réponses alors, on se parle.
06:58 Merci d'être venu ce matin nous voir sur Europe 1.
07:01 Merci de vos lumières.
07:02 Olivier Roucan, politologue, enseignant-chercheur au CERSA,
07:04 invité d'Europe 1 en matin.
07:05 Bonne journée à vous.