• l’année dernière
Il est le chef pâtissier dont l'histoire inspire le film "À la belle étoile" qui sort le 22 février prochain. Yazid Ichemrahen publie "Créer pour survivre" (Hors Collection) dans lequel il revient sur ses succès et ses déboires.

Retrouvez " L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10

Category

🗞
News
Transcription
00:00 Sonia De Villere, votre invitée a posté le nec plus ultra des yachts de luxe sur Instagram.
00:05 Et oui, parce que la pâtisserie a un temps rimé pour vous avec tous les clichés du
00:09 fric et de la réussite.
00:11 Bonjour Yazid Hichem Rahen.
00:13 Bonjour Sonia.
00:14 Vous avez adoré en prendre plein les yeux.
00:17 Alors mettez-nous en plein les yeux comme vous l'avez fait sur Instagram à une époque.
00:21 Vous le meilleur jeune pâtissier du monde, sacré meilleur jeune pâtissier du monde
00:27 en 2014 Harry Mini.
00:30 Vous vous êtes bien amusé.
00:32 Je me suis amusé après beaucoup de difficultés.
00:37 Vous vous êtes bien amusé.
00:39 Mais ça veut dire ouvrir des points de vente à Mykonos, ouvrir des points de vente à
00:44 Akshat, ouvrir des points de vente au Qatar, c'est-à-dire partout là où est la Jet Set.
00:49 Dans ce métier, ce qui est intéressant, c'est de pouvoir avec des gâteaux entrer
00:54 chez n'importe qui.
00:55 Et il est vrai que de le faire au Qatar, à Mykonos, à Akshat ou même à Paris, c'est
01:02 assez intéressant parce qu'on y rencontre beaucoup d'opportunités pour un développement
01:08 potentiel sur l'avenir.
01:10 C'est ça, ça veut dire qu'on tutoie les top models, qu'on rencontre Robert De Niro.
01:14 Exactement, c'est fou, j'ai ouvert à Mykonos et à l'inauguration de ma boutique,
01:17 il y avait Gigi Hadid, Bella Hadid, Kate Moss.
01:19 C'était complètement dingue.
01:21 Et c'est vrai que si j'avais pas ouvert là-bas, je pense pas que j'aurais pu les rencontrer.
01:26 Vous, l'enfant parti de rien, arrivé très très haut, ça donne un film de cinéma
01:31 qui sort la semaine prochaine et qui s'intitule "À la belle étoile".
01:35 Ça veut dire quoi, moff ?
01:37 Le meilleur ouvrier de France.
01:39 Il faut travailler dur, énormément.
01:42 Je regarde la table 8, là.
01:47 Jeune homme, qui t'a signé ici ?
01:49 Dès demain, il sera remplacé chef.
01:50 Avant de me jeter chef, laissez-moi faire un essai au moins.
01:52 On va le garder le petit.
01:54 Soin à l'heure et présentable.
01:56 Oui chef.
01:57 Quand on est en foyer, y'a pas mille façons de s'en sortir.
02:02 C'est plus possible de le garder, ça devient trop grave.
02:07 Yazeed, il a un talent, il est en train de le développer, faut pas tout casser.
02:09 C'est quoi tout ça ?
02:10 Ils vont me détruire si je reste ici.
02:12 Je vous en supplie, laissez-moi y croire s'il vous plaît.
02:13 Ça va changer ma vie.
02:15 Est-ce que l'un d'entre vous veut faire partie de l'équipe de France de pâtisserie ?
02:20 Bravo.
02:21 M.B.F.
02:22 Meilleur bouillable de France.
02:24 Je prépare les championnats du monde et j'ai besoin d'un sponsor.
02:26 En plus de l'air Nat, t'es en train de relâcher, t'es mou là !
02:28 Chef, comment on devient le meilleur ?
02:29 C'est pas un Paris-Presse, c'est un Paris-Chiasse.
02:31 Tu veux être le meilleur ou un génie de la pâtisserie ?
02:35 Oui.
02:36 Et comment on sait si on est l'un ou l'autre ?
02:38 Tu sauras.
02:39 Le film est signé Sébastien Tullard.
02:42 Vous voilà donc, personnage de cinéma Yazeed Hichem Reine.
02:47 Mais dans la vraie vie, il y a une success story.
02:50 Elle est pleine de failles, elle est pleine de doutes, elle est pleine de problèmes.
02:54 Et ces problèmes, vous les racontez de manière assez cash dans un livre qui sort en même
02:59 temps que le film, qui s'appelle "Créer pour survivre".
03:01 Survivre, c'est pas rien, comme ça sort hors collection.
03:06 "Créer pour survivre".
03:08 Parce que dans cette course au succès, dans cette course à la jet set, il y a un éternel
03:11 syndrome d'imposteur.
03:12 Alors, c'est quoi le problème ?
03:14 Un éternel syndrome d'imposteur.
03:16 Un éternel syndrome d'imposteur et puis "survivre", ça a été le mot pendant longtemps.
03:20 Parce que quand on grandit comme ça, il est vrai qu'aujourd'hui j'ai 31 ans, je suis
03:25 en face de vous, je pensais même pas vivre jusqu'à mes 30 ans.
03:28 Et toute cette notoriété apportée par le film me fait réaliser à la fois à quel
03:35 point le chemin était long et puis surtout tous les détails qu'il a fallu combattre
03:40 pour faire ce que je fais aujourd'hui.
03:42 - Oui, c'est du combat.
03:44 C'est du combat tout petit d'abord pour tenir debout.
03:48 Vous avez été abandonné par votre père, votre soeur et vous, vous grandissez avec
03:55 votre mère.
03:56 Votre mère qui se défonce, qui boit beaucoup, qui se prostitue.
04:01 Donc c'est une toute petite enfance qui est plongée dans la terreur, dans la peur, dans
04:07 une insécurité permanente.
04:08 - Oui, dans une insécurité permanente et puis surtout sur un manque de reconnaissance.
04:15 Parce que quand on grandit, l'acheminement classique d'un être humain c'est d'avoir
04:20 la reconnaissance dans les yeux de son papa et sa maman.
04:23 Et moi, au-delà de la terreur, parce que quand on est petit on se rend pas forcément
04:27 compte de tout, c'est le manque de reconnaissance qui a certainement guidé tous mes choix à
04:32 venir pour les prochaines années.
04:34 - C'est pour ça qu'on poste plein de photos sur Instagram.
04:37 C'est pour que quelqu'un vous regarde et vous like et vous dise "c'est bien".
04:42 - Certainement.
04:43 - Ça remplace le...
04:44 - C'est une forme de narcissisme comme des centaines de milliers de personnes avec les
04:46 réseaux sociaux maintenant.
04:47 Mais non, pour vivre avec l'air du temps en fait, chaque travail amène dans un pays
04:57 plus ou moins joli, avec plus ou moins une jet set, comme vous l'avez dit au début
05:03 d'émission.
05:04 Et en fait, le fait de partager ça avec un public, c'est un peu comme la vérité que
05:15 je voulais mettre dans mon livre, c'était les backstage.
05:18 Au quotidien, je ne partage pas que de la pâtisserie mais je partage les backstage
05:21 de toute ma vie.
05:23 - Il y a quand même un truc, regardez-moi.
05:25 - Oui, certainement.
05:26 - Ce qui vous a sauvé la vie probablement c'est cette famille d'accueil dans laquelle
05:31 vous avez été placé quand vous étiez tout petit.
05:33 D'abord, dans cette famille d'accueil, il y avait de l'amour, il y avait une famille
05:37 où on prenait plaisir à manger ensemble.
05:40 Et puis, il y avait deux fils de la famille qui faisaient leur apprentissage en pâtisserie
05:46 notamment.
05:47 - Oui, en pâtisserie et puis j'ai grandi avec le goût populaire de la pâtisserie
05:51 parce qu'un travaillait à Leclerc et l'autre à Cora.
05:55 Et donc, on était tout de même bercé avec les gâteaux de grande distribution toute
06:01 mon enfance, le poirier de chez Leclerc ou le fraisier.
06:05 Et même aujourd'hui, pas plus tard que mercredi dernier, je prends beaucoup de plaisir à
06:09 acheter la boîte de quatre éclairs, parce qu'il y en a une gratuite, à Leclerc et
06:17 je mange deux ou trois d'un coup parce que c'est ma Madeleine de Proust.
06:20 - Et à la maison, chez Tati, puisque c'était comme ça que vous appeliez votre maman dans
06:25 la famille d'accueil, on faisait des gâteaux.
06:29 On faisait des gâteaux et vous racontez cette satisfaction, cette fierté quand on sort
06:32 le gâteau du four.
06:33 - Exactement.
06:34 - Et alors c'est quoi les gâteaux de votre enfance ?
06:36 - On faisait des gâteaux yourth et puis je l'aidais à faire le baba le dimanche, le
06:42 baba au rhum, que je ne mangeais pas parce que je n'avais pas le droit.
06:46 Et puis je ne l'aimais pas et quand on est enfant, on ne mange pas forcément de gâteaux
06:49 alcoolisés.
06:50 - Est-ce qu'il y avait une crème fouettée d'enfer au milieu ?
06:52 - Exactement, il y avait une crème fouettée et d'ailleurs c'est de là que tient ma passion
06:56 également comme la vôtre pour la crème et surtout le choix du produit parce que ma
07:00 tatie allait toujours chez un monsieur qui avait des vaches pour récupérer sa crème
07:08 et elle n'avait absolument pas le même goût que la crème qu'on peut acheter en grande
07:13 distribution.
07:14 - D'ailleurs, vous qui avez ouvert des points de vente à New York, au Qatar, c'est un problème
07:18 que vous rencontrez, c'est-à-dire que ce beurre français, ce lait français, cette
07:22 crème française qui est si importante quand on fait de la pâtisserie, vous dites "pâtissez-vous"
07:28 parce que dans les émissions de télé on dit "quand on pâtisse".
07:30 - Pas trop.
07:31 - Pas trop, voilà, quand on fait des gâteaux.
07:33 Et bien en fait, ce goût-là de la crème française, vous le retrouvez nulle part ?
07:38 - Exactement, c'est les plus grosses critiques qu'on prend également sur Instagram, l'empreinte
07:42 carbone de par l'acheminement des produits mais j'ai eu la chance entre guillemets de
07:49 grandir dans un pays qui est la France, qui a un patrimoine gastronomique et culturel
07:53 très fort et c'est vrai que quand on grandit avec la crème, du beurre et même le pain
07:59 français qu'on essaye d'ouvrir des commerces à l'étranger, c'est pas si évident de sélectionner
08:08 sa matière première donc parfois il est préférable de la faire venir de France, notamment le
08:14 beurre et la crème.
08:15 - Meilleur bougnoule de France ? Ça s'est vraiment passé pour de vrai ?
08:19 - Alors dans le film ils disent le meilleur bougnoule de France mais la réalité c'était
08:23 meilleur bouquac de France.
08:24 - Ouais c'est ce que vous dites dans le livre.
08:25 - C'était le MBF.
08:26 - C'est quoi un bouquac ?
08:27 - Je pense que c'est en arabe.
08:30 - Ouais.
08:31 - A l'époque c'était un peu comme ça.
08:33 - C'est un mélange dégueulasse entre bougnoule et macaque.
08:35 - Exactement mais sur le coup je le prenais même pas forcément mal parce que j'étais
08:39 sur un ton de la rigolade et de la bêtise entre guillemets humaine, je pense pas que
08:43 ce soit interprété pour moi.
08:45 - C'est dur de s'intégrer dans une brigade en cuisine.
08:47 Vous, vous avez fait votre apprentissage, vous êtes passé par toutes les cases de
08:51 l'apprentissage du CAP.
08:53 Vraiment, vous avez fait votre apprentissage en boulangerie, vous avez fait votre apprentissage
08:58 en pâtisserie, vous avez fait la plonge dans les grands hôtels pour être intégré à
09:03 des brigades.
09:04 - Et j'ai même commencé dans la cantine de mon collège à mélanger la poudre et
09:07 l'eau pour faire des tartes.
09:08 Alors oui c'est très dur parce que déjà avant tout c'est un métier de rigueur, d'engagement
09:13 et de régularité avec beaucoup de pression exercée sur les chefs dû forcément aux
09:18 prix qui vendent leurs plats et leurs prestations.
09:20 Mais je pense que les choses se sont arrangées parce qu'avant il n'y avait pas ce système
09:26 de prud'homme qu'il y a aujourd'hui il y a 15 ou 17 ans et c'est vrai qu'il a fallu
09:32 passer par des étapes qui n'étaient pas forcément toujours faciles durant l'apprentissage.
09:37 - Et alors comment, quand on se retrouve à fabriquer un gâteau, ça m'a impressionné
09:42 ce gâteau, force, que vous avez fait en cinq exemplaires qui est vendu 1800 euros pièce
09:48 avec une bague d'un grand joaillet en diamant.
09:52 - C'était à ma boutique de Mykonos en fait, je voulais vraiment créer l'exception au
09:57 travers de l'expérience client visuel donc c'était apporté forcément par la bague
10:01 et puis surtout...
10:02 - Il était de quelle couleur ce gâteau ?
10:04 - Il était rouge un peu, un peu, un peu velvette.
10:07 - Comme une sorte d'écrin ?
10:09 - Exactement, c'était un écrin sur lequel était posée cette fameuse bague et à l'intérieur
10:13 on avait un praliné fumé donc avec des noisettes, de la menthe que je torrifie à 180 degrés
10:19 pendant quelques minutes et que je mélange avec un caramel qu'on pousse exprès en cuisson
10:26 de manière à ce que ça aille bien avec le chocolat du Venezuela.
10:29 J'utilise le chocolat du Venezuela parce que c'est le chocolat qui pour moi est le moins
10:33 standardisé, il pousse en édition limitée et c'est pas comme celui de Madagascar par
10:37 exemple où on peut trouver beaucoup plus...
10:40 - On vous croit sur parole.
10:42 Ce qui m'intéresse moi c'est ce grand écart absolument vertigineux, abyssal entre le gamin
10:49 qui aime encore la boîte de quatre éclairs dont un gratuit de chez Leclerc et qui fabrique
10:56 un gâteau à 1800 euros/pièce.
10:57 - Pour être complètement honnête, je ne le dis pas souvent mais c'est tout le paradoxe
11:01 de ma vie en fait et c'est pour ça que j'ai voulu être honnête à ce point-là dans ce
11:06 livre qui t'a choqué parfois.
11:08 On peut faire les plus grandes choses et aller dans les plus beaux endroits mais le passé
11:17 sera toujours ancré et bien présent au quotidien et c'est ce qui me rend à la fois brillant
11:23 pour certaines choses et triste et torturé pour d'autres.
11:27 - Yacine Dichemre sur France Inter à 9h20.
11:31 Évidemment j'ai choisi Rihanna rien que pour vous.
11:34 Vous allez nous raconter comment parfois le passé vous remonte méchamment à la gueule
11:39 et ça fait très très mal.
11:40 - Rihanna.
11:41 - Rihanna.
11:42 - Rihanna.
11:43 - Rihanna.
11:45 - Rihanna.
11:46 ♪ ♪ ♪
11:53 ♪ ♪ ♪
11:58 ♪ ♪ ♪
12:03 ♪ ♪ ♪
12:08 ♪ ♪ ♪
12:12 ♪ ♪ ♪
12:17 ♪ ♪ ♪
12:22 ♪ ♪ ♪
12:27 ♪ ♪ ♪
12:32 ♪ ♪ ♪
12:37 ♪ ♪ ♪
12:42 ♪ ♪ ♪
12:47 ♪ ♪ ♪
12:52 ♪ ♪ ♪
12:57 ♪ ♪ ♪
13:02 ♪ ♪ ♪
13:07 ♪ ♪ ♪
13:12 ♪ ♪ ♪
13:17 ♪ ♪ ♪
13:22 ♪ ♪ ♪
13:27 ♪ ♪ ♪
13:32 ♪ ♪ ♪
13:37 ♪ ♪ ♪
13:42 ♪ ♪ ♪
13:47 ♪ ♪ ♪
13:52 ♪ ♪ ♪
13:57 ♪ ♪ ♪
14:02 ♪ ♪ ♪
14:07 ♪ ♪ ♪
14:12 ♪ ♪ ♪
14:15 - Diamond, Rihanna, du sur mesure pour Yacine Hichemren,
14:20 pâtissier qui a été sacré meilleur pâtissier du monde en 2014.
14:23 Et là, vous m'entendez me lécher les bamines parce que Yazid a apporté à toute l'équipe
14:28 des cookies. Vous voulez bien les décrire, les cookies. Moi, je les ai goûtés pendant le disque.
14:32 - Alors, c'est un cookie pur beurre avec tout simplement des...
14:35 - Pur beurre. - Exactement, pur beurre.
14:37 C'est la base du cookie. Et ce fameux praliné fumé dont on parlait juste avant
14:42 et qui est poussé en cuisson exprès avec un peu d'amertume de manière à dessucrer l'ensemble.
14:46 Donc même sur un cookie, on cherche à avoir quelque chose d'assez équilibré quand même.
14:50 - Pfff, c'est extraordinaire.
14:52 ♪ ♪ ♪
14:54 France Inter, le 7 9 30, l'interview de Sonia De Villers.
14:58 - Yazid Hichemren est mon invité parce que d'abord, il y a un film qui raconte
15:03 cette success story ultra spectaculaire qui sort la semaine prochaine,
15:07 qui est signé Sébastien Tullard, qui s'appelle "À la belle étoile",
15:09 qui sera donc sur tous les écrans en France mercredi prochain.
15:13 C'est Josriat qui interprète votre rôle.
15:18 Et puis vous, vous avez tenu à raconter le backstage, comme vous dites dans votre vocabulaire.
15:23 Et vous sortez ce petit livre qui s'appelle "Créer pour survivre, vivre pour ne pas sombrer"
15:28 chez Or Collection. Il y a quelque chose d'extraordinairement.
15:33 Vous l'avez raconté, on faisait des gâteaux chez votre tati dans cette famille d'accueil
15:39 qui a sauvé votre petite enfance et où vous avez été placé par les services sociaux.
15:44 Mais il y a quelque chose de très rassurant dans le sucre, non ?
15:47 Il y a quelque chose qui répare l'enfance, il y a quelque chose qui répare la peur dans le sucre.
15:51 - Oui, bien sûr, déjà qui répare l'enfance et la peur, mais surtout,
15:55 on dit souvent que les meilleurs gâteaux sont ceux de nos mamans.
15:58 C'est ceux qui sont fabriqués avec le plus d'âme.
16:00 Et toutes mes créations entre tradition et modernité, elles relatent ça justement.
16:04 D'où part la vie que j'ai. J'ai du mal à transmettre certaines émotions au quotidien, forcément.
16:14 J'apprends toujours encore et je les transmets avec mes gâteaux, pour de vrai.
16:18 Et ça se ressent dans ma pâtisserie et dans mes créations.
16:22 - Je pense que là, c'est quelque chose d'extrêmement émouvant que vous venez de dire.
16:25 C'est-à-dire que quand on n'a pas été aimé, quand on était petit, c'est très difficile d'aimer.
16:30 Et en fait, ce que vous racontez dans ce livre, c'est l'histoire d'un jeune mec qui se révèle très brillant pour le business.
16:38 C'est-à-dire qu'en fait, vous êtes devenu très vite une machine à séduire les investisseurs.
16:41 Une machine à séduire les investisseurs, à leur faire tous les youyou de la rentabilité et à être exactement ce qu'ils...
16:49 - C'est vrai. Parce que pour rentrer dans un certain monde, il faut se transcender professionnellement.
16:56 Et les gâteaux ne suffisent plus. Mais pour tout entrepreneur, avoir un business, c'est très intéressant.
17:02 Le partager avec le plus grand nombre de personnes, c'est très intéressant.
17:06 Mais mon premier mentor, qui est Bernard Blacher, avec qui j'ai évolué, me disait
17:11 "Plus tu vas créer un modèle économique rentable et plus tu pourras durer dans le temps."
17:15 Et ce sera la meilleure manière de faire plaisir au plus grand nombre de personnes, de durer.
17:22 - Alors qu'aimer quelqu'un, vous n'avez pas appris.
17:24 - C'est beaucoup plus compliqué. C'est ce que je raconte dans mon livre.
17:26 C'est qu'aujourd'hui, du haut de mes 31 ans, le mot "success story" du film, ça m'agace un peu quand on me parle de "success story".
17:34 Parce que je trouve déjà que c'est un terme qui manque énormément d'humilité.
17:39 Et je voulais rétablir la vérité avec ce livre.
17:42 Ce n'est pas une "success story" pour moi, c'est seulement un récit.
17:45 Quand on me dit "félicitations pour ta vie", ben non en fait, j'étais dehors.
17:49 - En plus, la vie, elle s'est bien cassée la figure.
17:51 - Exactement. - C'est-à-dire, vous aviez un rêve, c'était réussir à Paris.
17:55 Briller à Paris. Pas à Mykonos, pas à Gstaad, pas à New York.
17:59 - Je suis brillé partout sauf à Paris. - Et à Paris, vous allez investir beaucoup d'argent.
18:04 Vous allez prendre des risques financiers très lourds.
18:06 Vous allez faire de grosses erreurs de débutants.
18:08 Et vous allez vous prendre en pleine figure les Gilets jaunes.
18:12 - Les Gilets jaunes et le Covid, d'un coup.
18:14 En fait, des grosses erreurs des débutants, je ne fais aucun crédit en banque.
18:18 J'ai un peu d'argent, justement, de Mykonos, Gstaad et tout le reste.
18:22 Je fais tapis, comme au casino.
18:24 Et puis je me dis que je vais faire des petits cookies, des brownies, des choses comme ça,
18:28 en souvenir de mon enfance, rue des Archives à Paris.
18:31 - Avec le quatrième éclair gratuit. - Exactement.
18:34 Et puis c'était exactement ça. C'était un pont entre mon enfance, ce que ma tatie m'a inculqué,
18:39 et ce que je voulais faire découvrir dans la capitale.
18:41 Parce que la pâtisserie, ce n'est pas juste un gâteau.
18:43 Ça se doit d'être poétique avant tout.
18:45 Ça se doit de raconter une histoire.
18:47 Et moi, mon histoire, ça a été que j'ai vite coulé.
18:50 Au bout de neuf mois, on voit M. Macron qui dit "il va falloir fermer vos commerces,
18:55 et puis on vous dira quand vous réouvrirez".
18:57 Et au-delà de ça, c'est là que le calvaire a commencé.
19:00 Parce qu'au-delà d'avoir une entreprise qui coule et des employés qu'on ne peut pas honorer,
19:04 avec toutes les charges sociales qui vont avec, etc., à payer, parce que j'avais plus d'argent,
19:09 on se voit fermer le commerce.
19:11 Et pour moi, mon commerce, c'est ma vie.
19:13 Pas d'amis, pas de famille. Je passais ma vie dans les aéroports et à travers le monde.
19:19 Donc forcément, votre égo se remplit, et ça vous empêche de penser, de réfléchir.
19:24 Mais du jour au lendemain, quand vous êtes enfermé, confiné chez vous,
19:29 vous vous posez la question, vous regardez dans les yeux, et vous vous dites "est-ce que vraiment je..."
19:33 - Et là, tout est remonté à la surface. - Exactement.
19:35 - Tout ? - Un calvaire. Un vrai calvaire.
19:37 Et c'est ce que je voulais raconter.
19:39 On me dit bien souvent "bravo" pour tout ça, mais ça a été un vrai calvaire.
19:44 J'ai eu pensé même en finir beaucoup de fois pendant cette période de Covid,
19:47 parce que ma tati et mon tonton, je ne pouvais pas les appeler.
19:50 C'est des gens assez âgés qui ne comprennent pas forcément ce mode de vie.
19:53 Ils viennent de Chouy, encore une fois.
19:55 Ce n'est pas tout à fait les mêmes ambitions, ni la même vie.
20:00 - Ah bah oui, c'est très compliqué. - C'est très loin.
20:03 - Quand on boit des coups avec Robert de Niro à Mykonos, le jour où on va très mal, Robert de Niro n'est pas là, j'imagine.
20:08 - Exactement. Vous avez tout dit, c'était l'essence de ma vie.
20:11 Après toute cette Coupe du Monde et tout ce Tour du Monde,
20:15 j'étais parti dans cette espèce de course à l'acquisition,
20:23 où en se disant, quand on n'a rien en plus,
20:25 je vais faire ci, je vais faire là, ça va être extraordinaire.
20:28 Et au final, les milliers de gens qui vous félicitent
20:31 et qui sont là au quotidien pour goûter vos gâteaux et vous aider à entreprendre,
20:36 quand vous êtes chez vous avec le Covid et plus rien du tout,
20:40 - Et en faillite. - Et en faillite, vous regardez dans votre répertoire et vous vous dites...
20:43 - Il n'y a plus personne. - Exactement.
20:46 - Yazid Hichem Rahen, il est parti de très bas, il est monté très haut,
20:50 il s'est bien cassé la figure et vous savez quoi ?
20:53 Il est déjà en train de remonter, parce que ça refera un film et ça refera un livre.
20:57 Merci pour ce bouquin, Créer pour survivre, qui paraît chez Hors Collection.
21:02 Merci surtout pour les cookies.
21:04 - C'est moi qui vous remercie. - Nicolas, il va goûter.
21:07 - Oui, je vais goûter. - Il y en a un pour lui. - Merci Sonia.

Recommandations