Aurore Mahieu et Clara Hesse ont reconstitué les audiences, avec de véritables protagonistes du dossier dont Floriane Harelle, jugée en appel pour avoir tué son compagnon dans un contexte de violences conjugales. Fait rarissime, elle avait été acquittée en première instance.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Vos invités médias aujourd'hui, Céline Baïd-Arcourt, sont à l'origine d'un podcast inédit dans sa forme.
00:04Il s'intitule « Le procès à réel » et il place l'auditeur dans la peau d'un jury de cour d'assises.
00:08Bonjour Clara S.
00:09Bonjour.
00:10Vous êtes journaliste indépendante spécialisée dans les affaires de justice
00:13et c'est vous qui signez ce podcast qui a été réalisé par celle qui est à vos côtés.
00:17Bonjour Ormailleux.
00:18Bonjour.
00:19Merci également d'être avec nous.
00:20Vous êtes la directrice artistique du studio de production Nouvelles Écoutes.
00:23Parlez-nous d'abord de ce procès en quelques mots.
00:26Clara, vous l'aviez couvert en 2021.
00:27Oui, c'est ça. En février 2021, quand j'étais reporter pour Le Républicain Lorrain,
00:32j'ai eu l'opportunité de couvrir ce procès qui est le procès en appel de Florian Harrell.
00:37Un procès qui a été assez émouvant et qui m'a beaucoup touchée.
00:44L'histoire de cette femme m'a beaucoup touchée.
00:46L'histoire, c'est qu'elle a tué son compagnon ?
00:48Oui, elle a tué son compagnon dans un contexte de violence conjugale
00:52et tout l'enjeu du procès était tourné autour de la question de la légitime défense.
00:56Savoir si elle était en situation ou pas de légitime défense.
00:59Elle a été acquittée en première instance, il faut le préciser.
01:02Oui, acquittée en première instance.
01:03Tout de suite, vous avez eu le sentiment que cette affaire était particulière ?
01:07Oui, parce que j'ai fait des études de droit au niveau de la décision de justice qui a été rendue.
01:12J'avais tout de suite ce sentiment que c'était une décision qui était rarissime
01:15parce que des femmes qui ont été acquittées de meurtres sur leurs conjoints au motif de la légitime défense.
01:21En France, il y en a à l'époque, en tout cas, il n'y en avait que trois.
01:24Il y en a quatre aujourd'hui.
01:25Aujourd'hui, il y en a quatre, oui.
01:26Et donc Florian Harrell faisait partie de ces trois femmes.
01:29Et tout de suite, je me suis dit que c'est une histoire qu'il faut raconter.
01:33Enfin, plus loin que la presse régionale.
01:35Et j'avais envie de raconter cette histoire.
01:38Je ne savais pas encore comment.
01:39Alors justement, le comment, parce qu'il y a deux aspects intéressants dans ce projet,
01:42Aurore Mailleux, la forme et le fond.
01:44On va commencer quand même par le fond, le sujet en lui-même.
01:46Une femme rejugée pour avoir tué son mari violent.
01:49L'idée d'en faire un podcast, ça vous est venu rapidement ?
01:52Alors, c'est Clara qui nous a proposé cette histoire.
01:57Donc, nous, comme on ne fait que du podcast, évidemment, on savait qu'on allait le faire en podcast.
02:01Par contre, de quelle manière ?
02:02Nous, c'est des sujets qui nous touchent beaucoup.
02:05On a beaucoup tourné autour de cette réflexion de la forme.
02:09On voulait à la base faire un documentaire sur Floriane, sur la question de la légitime défense,
02:14des violences conjugales et de beaucoup de thèmes qui ressortent de son histoire.
02:17Mais c'est vrai qu'à force de lire les comptes rendus d'audience de Clara,
02:21parce qu'elle avait suivi de manière très assidue les trois jours de ce procès en appel,
02:26je me rendais compte à cette lecture, et on s'est tous rendu compte,
02:29que ce n'était pas aussi simple que ça,
02:31et que tous ces thèmes venaient naturellement dans l'histoire.
02:34et notamment que Floriane a quand même tué son compagnon.
02:40Ce n'est pas rien.
02:42Et d'être acquittée deux fois, ce n'est pas rien non plus, par un jury populaire.
02:47Et c'est vrai qu'à la lecture, j'ai été balottée dans mes convictions,
02:51de savoir si ce verdict était justifié, et pourquoi et comment.
02:56Et je me suis dit que la meilleure façon de faire réfléchir les gens,
02:59évidemment, était de les mettre face à tous ces doutes et à toute cette nuance qu'apporte la justice.
03:03Oui, ça nous permet, nous, auditeurs, de nous plonger dans une salle d'audience,
03:07de comprendre aussi le fonctionnement d'un procès,
03:10avec Clara qui donne des éléments de vulgarisation qui sont assez importants.
03:14Ça explique la justice aux citoyens.
03:15Mais alors la forme, finalement, vous avez choisi de reconstituer le procès.
03:19C'est comme si on y était. Pourquoi ?
03:21Alors, pour justement, je veux dire, les procès en France sont ouverts à tout le monde,
03:26mais on ne peut pas les filmer, on ne peut pas les enregistrer.
03:32Donc on s'est dit que c'était aussi inédit de permettre aux auditeurs
03:35de se retrouver dans une salle de cours, dans une cour d'assises.
03:39Moi, ça ne m'était jamais arrivé.
03:40Clara, c'est son métier.
03:42Et du coup, elle était le garant de la véracité de la reconstitution.
03:47Elle me disait, non, mais là, tu ne peux pas faire parler cet avocat,
03:50parce que c'est dans cet ordre-là.
03:51Donc j'ai appris également beaucoup de choses.
03:53Parce que c'est une reconstitution strictement fidèle, Clara.
03:56Tout ce qui est dans le podcast a été dit lors du procès ?
03:59Oui, alors on a essayé d'être, on va dire, le plus objectif et fidèle possible
04:03en sachant que le procès a duré trois jours,
04:05donc à peu près 30 heures d'audience qu'on a résumées, nous, en six heures.
04:09Mais effectivement, il y avait tous les moments un peu clés de ce procès.
04:14En fait, on a voulu les refaire.
04:17Et c'est une reconstitution qui est vraiment fidèle.
04:22L'idée n'était pas d'inventer des choses.
04:25Tout ce qui est dit, tous les moments importants du procès,
04:32se sont passés dans la vraie vie, dans le podcast.
04:35Et on n'a rien inventé.
04:36Et c'est tellement fidèle que ce sont les vrais protagonistes qui rejouent le rôle.
04:40Alors, pas tous, mais Florian Arel, l'accusée, il y a aussi sa mère,
04:44la sœur de la victime, l'avocat des partis civils,
04:46comme si on était au théâtre, finalement.
04:47Et je dois dire que c'est assez déroutant,
04:49parce qu'on voit leurs émotions, ils pleurent,
04:53voilà, comme dans un film, alors que c'est leur vraie vie.
04:56Ce parti pris, comment il vous est venu, Aurore, Clara ?
05:00C'était assez naturel.
05:02On s'est très vite dit, avec Clara, avec notre producteur,
05:05qu'on ne ferait pas ce podcast si Florian Arel ne participait pas.
05:12Et on voulait aussi des personnes du côté de la victime.
05:16L'idée était de respecter le contradictoire,
05:18comme dans un véritable procès, en fait.
05:19Même pour l'équipe du propos, je pense que c'était hyper important.
05:21Voilà, il nous fallait un équilibre.
05:23Donc là, on l'avait, on avait deux personnes du côté de Florian,
05:27donc elle et sa mère, et du côté de Johnny Adam,
05:29on avait sa sœur et son avocat, enfin l'avocat de sa famille.
05:32Donc pour nous, l'équilibre était respecté.
05:36Et on a sollicité d'autres personnes qui n'ont pas désiré participer.
05:39Eux ont accepté et étaient même très contents de la sollicitation de Clara.
05:44Oui, ça peut être étonnant ça, Clara. Ils ont accepté facilement ?
05:47Alors oui, ils ont accepté.
05:49Par exemple, Florian Arel, moi j'avais créé un lien de confiance et de respect avec elle
05:52trois ans avant, enfin je veux dire, au procès déjà.
05:56Et je lui avais, dès le début, dès la fin de ce procès,
05:58je lui avais dit que j'avais envie de raconter son histoire.
05:59Je ne savais juste pas comment, de quelle manière, etc.
06:02Et puis voilà, la rencontre avec Nouvelles Écoutes a précipité les choses.
06:05Et voilà, le podcast est devenu une évidence de le faire.
06:07C'est un écrin parfait pour raconter son histoire.
06:11Je pense que Florian Arel, comme Isabelle Adam, ont des motivations qui sont différentes.
06:15Florian Arel, quand je lui dis, je l'appelle pour lui dire,
06:18Nouvelles Écoutes, boîte de prod, on va faire un podcast pour raconter votre histoire.
06:22Elle me dit qu'elle a envie de le faire parce qu'elle veut que ça serve.
06:26Ça serve à d'autres femmes, ça serve à la justice.
06:28Isabelle Adam, avec qui je n'avais pas forcément créé de relation lors de ce procès.
06:37Mais je la retrouve sur Facebook, je la contacte.
06:39Et puis tout de suite, elle me dit, ça fait trois ans que j'attends qu'il y ait un journaliste
06:43qui m'appelle pour pouvoir reparler de mon frère.
06:44Et pour elle, c'est lui donner une nouvelle opportunité d'avoir une tribune,
06:49pour pouvoir reparler de Johnny, qui certes a des parts d'ombre,
06:53mais qui a aussi, comme toute personne, des parts de lumière,
06:55qui a été un frère, qui a été aimé, qui a eu une famille.
06:58Et on avait besoin de ça, en fait.
06:59Elles ont été rémunérées, ces personnes ?
07:01Absolument pas.
07:02Non, elles ont fait ça gracieusement.
07:04C'est vraiment formidable.
07:05Alors, c'est un peu long, mais ça vaut le coup.
07:07Non, c'est six heures, mais c'est vraiment intéressant.
07:09Et on a vraiment le sentiment d'être dans ce procès au sein de cette cour d'assises.
07:13Merci à toutes les deux.
07:14Merci au cours.
07:15Merci à tous.