A l’occasion de la journée internationale des droits de l’enfants, France 2 retrace mardi en prime time le combat de Laurence Brunet-Jambu contre les autorités pour sauver Karine. Un téléfilm révoltant.
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00:00A l'occasion de la journée internationale des droits de l'enfant, France 2 propose
00:07demain soir une soirée spéciale, donc avec un débat précédé du téléfilm Signalement.
00:12Vos invités médias, Céline Bay d'Harcourt, sont le réalisateur de cette fiction et celle
00:16qui en a inspiré le scénario.
00:18Bonjour Eric Métaillé.
00:19Bonjour.
00:20La maltraitance des enfants c'est un sujet qui vous touche particulièrement.
00:23Vous aviez réalisé le film Les Chatouilles en 2018 avec Andréa Bescon, cette fois vous
00:26adaptez l'histoire vécue par Laurence Brunet-Jambut qui est à vos côtés.
00:30Bonjour Laurence.
00:31Bonjour.
00:32Vous, vous aviez écrit un livre co-écrit avec votre nièce Karine qui a été victime
00:36de privations, de coups, d'insultes pendant des années de la part de ses parents, victime
00:40aussi de viols de la part d'un ami de la famille.
00:42C'est grâce à vous qu'elle est sortie de cet enfer.
00:45Qu'attendez-vous de cette fiction ? Laurence, vous espérez peut-être que le téléspectateur
00:49soit plus vigilant sur ce qui se passe à côté de chez lui, du moins que ça l'interpelle,
00:53que ça l'interroge ?
00:54Alors ce que j'espère c'est que les jeunes vont s'emparer du sujet en fait.
00:58C'est eux qui détiennent un peu les clés, c'est-à-dire qu'il faut que tout le monde
01:01se lève, se tienne debout et se dise « on y va » en fait, il faut que ça s'arrête.
01:05Le pire, alors il y a évidemment ce qu'a vécu Karine qui est absolument terrible,
01:09mais double peine, pour vous il y a eu l'indifférence voire l'hostilité de certaines personnes
01:15de l'aide sociale à l'enfance, de la police, de la justice, racontez-nous un petit peu
01:19ce combat.
01:20En fait, plus je faisais le signalement, plus j'étais la sorcière, puisque tout
01:25le monde m'appelait comme ça, la sorcière, et c'est ce que Karine se rappelle d'ailleurs,
01:29c'est que j'ai été nommée comme ça par ses géniteurs, par la justice, j'étais
01:34l'empêcheuse de tourner en rond, et en fait j'ai été confrontée à quelque chose
01:40d'horrible, c'est-à-dire que c'est moi qui suis allée en garde à vue en fait,
01:43et j'ai subi un rappel à la loi avec, je dois le dire, un délégué du parquet vraiment
01:50pour une femme très machiavélique en fait, et donc on m'a obligée à signer une lettre
01:57d'excuses, tant pour le violeur que pour les parents de Karine, et je devais demander
02:02pardon à la justice pour tous les problèmes que j'avais suscités.
02:06C'est une scène d'ailleurs qui a été reprise dans le film, Éric Métaillé, je
02:11le disais c'est un sujet qui vous est cher, faire du livre de Laurence et Karine un téléfilm
02:14pour vous ça a été une évidence ?
02:16Oui mais c'était surtout, c'est vrai un peu par la suite parce que L'échatouille
02:21était très basé avec Andréa sur la victime, mais tout le processus quand j'ai lu le
02:26livre, il est révélateur de choses où on demande l'ouverture à la parole, comme
02:35je le dis à la fin du film, oui l'ouverture à la parole ça y est elle est faite, c'est
02:38maintenant écoutez-la, parce que si vous n'écoutez pas et s'il n'y a pas d'agissement
02:42on n'y ressortait pas.
02:43Quand j'entends ce que je viens d'entendre sur l'actualité là, je me dis on est très
02:47mal parti parce que le fonctionnement des avocats, c'est partout, c'est gangréné
02:53de partout, c'est un truc à prendre à bras le corps, comme le dit Laurence, c'est
02:57à la base même, c'est les jeunes qui peuvent défendre ça, c'est pour ça que le film
03:02il est important qu'il soit regardé aussi par les jeunes.
03:04Est-ce que vous avez dû édulcorer certaines séquences, il y a des choses dans l'histoire
03:09de Karine, de Laurence, qui n'étaient pas montrables à la télé en prime time ?
03:12Oui je pense, d'ailleurs le film, on a essayé de faire quelque chose où on montre une forme
03:19de violence, ou des mots, ou des actes, mais il était important pour moi en tout cas,
03:26c'est que les gens aillent jusqu'au bout du film, c'est un propos, c'est quelque
03:29chose qu'on avait envie de, un message qu'on voulait faire porter, j'avais pas l'intention
03:32moi de me retrouver avec des gens qui regardent la première image et font oh là, on coupe.
03:36Parce que relater la vérité ça aurait été insupportable en fait.
03:39Ah bah si on part rien qu'au niveau de l'âge réel de l'enfant au moment des faits, on
03:45est obligé de changer l'âge, parce que c'est plutôt là, à la 9 ans, dans le film.
03:51Et ça a commencé vers 6 ans, ça a commencé quand elle est née en fait ?
03:55Oui exactement, c'est ce que j'allais dire.
03:56Vous aviez fait un signalement d'ailleurs assez vite, après sa naissance.
03:59Oui, avec la naissance, Kariné qui avait fait son premier signalement.
04:01Vous avez fait appel à Laurence pour vous aider pour le scénario, de quelle manière
04:05vous avez collaboré tous les deux ?
04:07Non, là on est trois à avoir écrit, mais là où vraiment, Laurence pour moi, c'était
04:13une référence plus de ressenti.
04:17Je cherchais pas, obligatoirement je cherchais pas à aller, c'est une construction, j'étais
04:23pas en train de demander à Cécile de devenir Laurence ou au deal de devenir la maire, c'était
04:30une construction.
04:31Par contre, j'avais besoin de ressentir de sa part les attaques, le mouvement.
04:37Et Odile et Cécile, toutes les deux ont des attaques qui sont très très proches de ce
04:40que je pense que c'était.
04:41Cécile Bois, elle a reçu pour ce rôle le prix de la meilleure comédienne au dernier
04:45festival de la fiction de La Rochelle, et c'est vraiment mérité.
04:48Est-ce qu'elle a réussi, Laurence, à retranscrire vraiment ce que vous avez vécu, ce que vous
04:51avez ressenti ?
04:52Ah ben, moi je trouve que tous les acteurs ont magnifiquement joué en fait, et alors
04:56c'était ma peur, parce que c'était notre vie, c'était notre souffrance.
05:01Et j'avais peur qu'elle soit un peu diffuse, et non pas du tout, moi quand j'ai vu l'avant-première
05:08à Vierzon, ça a été une émotion, j'étais incapable de me rappeler des scènes, tellement
05:14les scènes c'était moi en fait, c'était Karine, c'était son regard, c'est la petite
05:19fille qui joue Karine, elle le joue magnifiquement en fait, ses yeux, tout son aspect, c'était
05:25un peu magique, parce qu'on a, Eric et tous les gens qui ont fait le scénario, ont retranscrit
05:31ce qui était le plus important pour moi, c'est-à-dire l'apparence de Karine, ça
05:36se voyait qu'elle était en souffrance, et malheureusement les institutions n'ont rien
05:40vu.
05:41C'est ça pour moi mon plus grand dilemme, et je cherche encore aujourd'hui, et je pense
05:45qu'on ne fait pas assez attention à comment les enfants se comportent, comment on les
05:49regarde en fait.
05:50Il n'y a pas que la parole, il y a aussi ce qu'ils sont.
05:54Comment on fait jouer Eric Méteiller à une petite fille, un rôle aussi douloureux ? Est-ce
05:58que vous avez dû lui expliquer vraiment les choses ?
06:00Oui, mais on avait déjà vécu ça avec Les Châteaux, avec une petite fille qui avait
06:049 ans, mais elle était très intelligente, elle comprenait complètement, pour elle,
06:10ça faisait partie d'une démarche.
06:12D'abord, elle avait très bien la différence entre ce qu'est le tournage et la vie réelle,
06:19la vie à elle, parce que la vie réelle c'est le tournage, mais sa vie à elle était différente,
06:25donc elle savait très bien.
06:26Mais en plus de ça, de plus en plus, je trouve que chez des jeunes, et là je parle de très
06:32jeunes puisque c'est 9-10 ans, il y a une conscience pour beaucoup de dire qu'il y
06:37a un combat, on est en train de nous emmener, on veut être là, on ne veut pas laisser
06:41faire.
06:42Mais c'est la prévention.
06:43Moi c'est toujours pareil, on trouve tous les moyens pour soigner un cancer, c'est magnifique,
06:49mais éviter le cancer, c'est… et là, malheureusement, on nous donne des éléments
06:54de plus en plus… on va faire plein de choses après, mais c'est l'avant, c'est avant
06:59pour que ça n'arrive plus.
07:00Comment va Karine aujourd'hui, Laurence ?
07:03Alors je dirais que c'est une belle jeune femme, une super belle maman.
07:06Que vous avez adoptée ?
07:07Oui, elle est devenue notre sixième enfant en 2016.
07:10Et donc elle a elle-même un enfant ?
07:13Oui, elle a une petite puce, et comme elle dit, c'est la plus belle chose qui me soit
07:17arrivée dans la vie, en fait, et on avait des inquiétudes, c'est vrai, pendant la
07:21grossesse, parce qu'on nous dit attention, c'est une période critique, et en fait,
07:26Karine a vécu ça avec extrêmement de sérénité, avec extrêmement de bonté, comme elle le
07:32dit aujourd'hui, j'ai réussi à mettre ça derrière moi, j'oublierai jamais, jamais,
07:37mais c'est derrière moi et j'avance, il faut avancer.
07:39Grand courage, parce qu'elle a vraiment vécu l'enfer, ce n'est pas du tout un
07:42mot galvaudé.
07:43Il faut que les victimes se tiennent debout.
07:46Très très rapidement, Karine.
07:48Simplement, je le dis parce que c'est important pour le film, c'est un film d'air, on n'a
07:52pas cherché, je veux dire, ce n'est pas un film qui va vous sortir de…
07:56Ce n'est pas angoissant ?
07:57Non, vous n'allez pas sortir de ça, vous allez sortir avec des questionnements énormes,
08:02peut-être un combat, peut-être une rage, mais c'est de l'air.
08:06Merci infiniment à tous les deux d'être venus ce matin.
08:08La fiction Signalement, c'est donc demain soir à 21h05 sur France 2.