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Aujourd'hui, dans « Les 4V », Julien Arnaud revient sur les questions qui font l’actualité avec Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT.

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Transcription
00:00– Sophie Binet qui a écouté avec beaucoup d'intérêt la chronique d'Axel Detarlay il y a quelques instants.
00:06On voit bien que la désindustrialisation, ça concerne absolument tout le monde.
00:09D'abord sur, bonjour à vous, ces 90 jours finalement Donald Trump qui laissent du temps,
00:17ce sera seulement 10% si on peut dire, et ensuite on verra, vous réagissez comment vous
00:21à cette annonce surprise d'hier soir, est-ce qu'il y a aussi pour vous du soulagement ou pas ?
00:24– Oui évidemment c'est une bonne nouvelle, après la grande interrogation c'est les négociations
00:27qui vont s'ouvrir, et j'appelle à une chose, c'est la transparence, parce que nous savons
00:32que Donald Trump fait ça pour être en situation de force sur les négociations, on sait que
00:36l'impact des négociations est très important pour les salariés, les citoyennes et les
00:41citoyens d'un point de vue social et environnemental, donc il faut que tout le monde soit autour
00:44de la table, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
00:46– Et vous trouvez qu'elles sont malmenées ces négociations pour l'instant ?
00:49– Elles n'ont pas commencé, mais surtout le problème c'est que c'est sans nous.
00:53– Vous parlez de la réunion d'hier à Bercy en fait ?
00:55– Je parle globalement de la situation où le gouvernement encore une fois écoute
01:00toujours les mêmes, puisqu'il passe son temps à recevoir les patrons à Bercy, à Matignon
01:03ou à l'Elysée, et que pour l'instant il n'a pas pris le temps de consulter les
01:08organisations syndicales et de les associer, alors que nous sommes non seulement potentiellement
01:12les premières victimes de cette situation, mais nous sommes surtout les premiers à défendre
01:17l'emploi, c'est ce qui se passe face à tous les plans de licenciement que nous avons
01:20aujourd'hui.
01:20– On sait qu'on a des grandes entreprises très financiarisées, très internationalisées
01:25qui ont du mal à défendre l'emploi en France, le patriotisme économique c'est nous qui le
01:31portons, c'est nous qui portons l'emploi et donc c'est avec nous qu'il faut parler.
01:34– Et quel est l'appel que vous lancez au gouvernement alors ce matin ?
01:36– Eh bien à associer les premiers et premières concernées, à savoir les salariés, il y a
01:40besoin de mettre en place une cellule de crise avec les organisations syndicales,
01:44les organisations patronales et avec tous les instruments dont l'État dispose pour agir
01:49sur l'économie. – Alors expliquez-nous, est-ce que ces incertitudes, ces nuages noirs
01:53sur l'économie, ils ont commencé déjà à avoir des conséquences sur le plan de l'emploi ?
01:56Est-ce que vous avez des remontées de terrain qui le disent ?
01:57– Ça fait un an que la CGT tire la sonnette d'alarme en disant que les licenciements
02:02explosent. Il y a un an, nous recensions 130 plans de licenciement, aujourd'hui on en est
02:07à plus de 350. Le problème c'est qu'il y a aussi des effets d'opportunisme et des effets
02:13d'aubaine. Je peux vous prendre par exemple l'exemple d'Owen Silinois, un verrier américain
02:18qui a des implantations en Europe et en France, qui vient de nous annoncer 350 suppressions
02:23d'emplois en France, notamment l'usine qui fabrique les bouteilles de Perrier. Il n'y a
02:28aucun lien avec les décisions de Trump, sauf qu'il l'annonce maintenant pour faire
02:32comme si c'était lié à cette guerre commerciale. Donc il y a beaucoup d'effets d'Owen, je pourrais
02:38aussi vous parler d'ArcelorMittal par exemple, dont nous savons qu'il a décidé de quitter
02:43la France et l'Europe d'ici 5 ans et il profite de la guerre commerciale pour faire
02:47comme si c'était lié aux mesures commerciales de Trump.
02:50Et sur les mesures commerciales de Trump, quels sont les secteurs dans lesquels vous
02:53redoutez la plus grande casse aujourd'hui ?
02:55L'industrie d'une façon générale. Après il y a des secteurs qui sont plus particulièrement
02:59exposés, je pourrais parler du cognac en particulier. Mais la difficulté de cette
03:04situation c'est qu'il y a celle qui est liée aux Etats-Unis, on sait que l'impact est
03:10relativement limité quand même malgré tout, mais le problème c'est l'effet d'ensemble.
03:14C'est les surplus asiatiques qui peuvent inonder l'Europe et la France, c'est la désorganisation
03:19des chaînes mondiales de production et c'est surtout le fait qu'on a une économie très
03:23fragile parce que très financiarisée et donc exposée à des effets de panique comme
03:29on le voit en bourse depuis plusieurs jours. C'est beaucoup trop dangereux.
03:33Comment on lutte contre ça ? Est-ce que la France et l'Europe doivent elles aussi mettre
03:37en place des barrières douanières ? Oui, ce qu'il faut c'est reprendre en main
03:41notre économie. La CGT porte de nombreuses propositions. La première c'est de mettre
03:46en place un moratoire sur les licenciements pour protéger notre industrie. Il y a urgence
03:50parce que nous sommes en train de perdre des pépites indispensables à notre souveraineté
03:55industrielle. La deuxième c'est de justement sécuriser notre industrie, par exemple en jouant
04:01sur les achats publics, en imposant que les achats publics priorisent le Made in France
04:06et le Made in Europe. Et on peut faire la même chose sur les politiques d'achat des
04:09entreprises. Il faut responsabiliser les grandes entreprises pour qu'elles priorisent ce qui
04:14est produit à proximité, les circuits courts, pour qu'on défende notre industrie, notre
04:20économie. Et c'est dans les tuyaux, ça fait partie des outils de la boîte à outils
04:23brandi par Bruxelles. Et c'est évidemment l'un des enjeux de la négociation en cours entre
04:28Bruxelles et Washington. Vu ce contexte compliqué, Sophie Binet, le ministre de l'économie
04:32hier a confirmé que la prévision de croissance était revue à la baisse. On était à 0,9,
04:36on passe à 0,7. La Médie du Travail ne l'avait déjà dit ici à votre place. Est-ce
04:40que vous pensez que ça peut aller encore plus bas et qu'on peut tomber en récession ?
04:44Je ne suis pas économiste. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que la situation, elle
04:48est incertaine et inquiétante. De toutes les manières, on est un peu suspendu à des décisions
04:53de Donald Trump qu'on ne maîtrise pas. Et donc, il faut prendre la mesure de la
04:58gravité de la situation et donc avoir des mesures fortes annoncées de façon coordonnée
05:02au niveau français et européen. Et donc, c'est pour ça qu'il faut associer les organisations
05:07syndicales et travailler enfin sérieusement pour lutter contre ces licenciements. Ça
05:12fait un an qu'on tire la sonnette d'alarme et qu'on n'a pas de son, pas d'image de la
05:15part du gouvernement.
05:16Alors, il y a une mesure forte sur le plan budgétaire qui a été annoncée hier, de
05:18nouvelles économies pour 5 milliards d'euros. Est-ce que vous pensez qu'on est en train
05:23d'entrer petit à petit dans ce qu'on appelle l'austérité, le mot qui fait un peu peur
05:26à tout le monde ?
05:27Oui, nous sommes très inquiets parce que le fait que le gouvernement, encore une fois,
05:31passe son temps avec le patronat nous laisse à penser qu'il pourrait y avoir une forme
05:35de stratégie du choc, c'est-à-dire de profiter de la situation pour ressortir des cartons
05:40les viennes lunes de l'Elysée et du patronat, à savoir déréguler l'économie, imposer
05:47des reculs sur les droits sociaux, imposer des reculs sur les services publics. Je le dis
05:52très solennellement, nous appelons, le gouvernement et le patronat, nous n'accepterons jamais
05:59des reculs pour les droits des salariés et pour les services publics. Dans le moment
06:03que nous vivons, nous avons justement besoin de plus de protection et de plus de cohésion
06:07dans notre société.
06:08Vous demandez à être associé. La semaine prochaine, il y a une conférence des finances
06:11publiques. Est-ce que vous avez été invitée ? Est-ce que vous irez ?
06:13Par ma connaissance.
06:15D'accord. C'est l'appel qui est lancé ce matin. Vous voulez participer le 15 avril
06:18à cette grande conférence des finances publiques qui est organisée du côté de Bercy.
06:22Bercy, où on travaille sur le budget 2026. La porte-parole a dit que ce serait un cauchemar.
06:27Comment est-ce qu'on fait pour réduire le déficit sans augmenter les impôts, Sophie Binet ?
06:31La CGT a des propositions depuis des mois que le gouvernement refuse d'entendre. Je vais
06:36en citer deux. La première, c'est travailler sur les aides publiques aux entreprises.
06:39C'est un montant de 200 milliards chaque année que le gouvernement n'est même pas
06:43en capacité d'évaluer et donc encore moins de conditionner.
06:47Ils n'ont pas besoin d'être soutenus en ce moment les entreprises justement ?
06:49Ça dépend desquelles. Et puis il y a peut-être quelques conditions à mettre.
06:51Par exemple, Stellantis, le patron de Stellantis vient d'annoncer son parachute doré
06:57à 34 millions d'euros. Stellantis touche des aides publiques. Est-ce que c'est normal
07:01que nos aides publiques aillent s'évaporer dans des rémunérations astronomiques pour
07:05des patrons ou des actionnaires dont les dividendes sont records ?
07:09La deuxième proposition de la CGT, c'est justement d'aller s'intéresser aux dividendes
07:13et aux rachats d'actions. La France n'a jamais distribué autant de dividendes
07:17et de rachats d'actions qu'en 2024. C'est un record au plan européen.
07:22Plus de 100 milliards d'euros sont distribués par les entreprises du CAC 40 aux actionnaires.
07:27Alors on voit que vous êtes évidemment très très éloigné du BDF qui propose, lui,
07:30d'augmenter la TVA pour baisser les charges des entreprises. C'est le contraire de ce que
07:33vous nous dites maintenant. Le gouverneur de la Boucle de France, lui, il appelle à la mobilisation générale.
07:37Il a envoyé une lettre hier à François Villeroy de Gallo. Il dit qu'il faut travailler plus.
07:42Alors il dit plus et mieux, mais surtout plus. Vous répondez quoi ? Vous dites oui, pourquoi pas ?
07:45Parce qu'il faut bien trouver des marges ou bien jamais de la vie ?
07:48En fait, il y a 10 millions de personnes en France qui aimeraient beaucoup travailler plus.
07:51Il y a 6 millions de personnes qui sont au chômage. On ne choisit jamais d'être au chômage,
07:55surtout en ce moment où on se fait licencier par milliers. Et puis, il y a 30% des femmes
08:00qui sont enfermées sur des emplois à temps partiel, dans la grande distribution,
08:03dans l'aide à domicile, dans le nettoyage, par exemple, qui souhaiteraient travailler à temps plein
08:07et qui sont enfermées avec des salaires de misère. C'est là-dessus qu'il faut travailler,
08:11plutôt que de nous parler sans cesse de repousser l'âge de départ en retraite.
08:15L'appel de Sophie Binet, lancé ce matin dans Télématin, l'appel à être entendu et surtout écouté,
08:19pour commencer par le gouvernement, si on a bien compris. Merci beaucoup d'être venu dans les cas de vie ce matin.
08:23Merci.

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