• il y a 11 mois
Partout en France, les mobilisations des agriculteurs s'intensifient. Ce matin, Maya Lauqué reçoit Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT. 

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00:00 Merci d'être avec nous ce matin. En ce moment même, en Ile-de-France, en Haute-Garonne, Nouvelle-Aquitaine, des agriculteurs intensifient leur mobilisation, débutée il y a une semaine.
00:09 Y a-t-il parmi eux des militants CGT ?
00:11 Écoutez, je ne sais pas. Cette mobilisation, elle met en lumière un scandale, le fait que de plus en plus de paysans ne vivent plus de leur travail,
00:18 alors que de l'autre côté, les prix de l'alimentation explosent et que de plus en plus de salariés ne peuvent plus nourrir correctement.
00:25 Pourquoi ? Parce que les multinationales spéculent sur le prix de l'alimentation et que les marges dans l'agroalimentaire et dans la grande distribution explosent.
00:33 On a entendu certains agriculteurs, parce que vous avez donc appelé hier vos militants à rejoindre ce mouvement des agriculteurs.
00:40 Certains refusent votre participation au mouvement. Ils vous accusent de vouloir le récupérer, d'agir par opportunisme, en clair de souffler sur les braises. Qu'est-ce que vous leur répondez ?
00:50 La CGT n'organise pas les agriculteurs, elle organise les salariés des exploitations agricoles, qui sont encore plus concernés par des conditions de travail très dégradées et par des salaires très faibles.
01:00 Ce que nous disons, c'est que ce sont les mêmes qui tirent les revenus des paysans vers le bas et qui exploitent les salariés dans l'agroalimentaire et dans la grande distribution,
01:09 et que nous pensons que les salariés et les paysans peuvent s'unir pour dénoncer ces multinationales et ces marges qui sont réalisées sur le dos des salariés et des paysans.
01:18 Ce que vous dites, c'est qu'on va créer des convergences entre les luttes des salariés et celles des paysans. Si vous voulez les créer, c'est qu'a priori, il n'y en a pas, pour l'instant.
01:24 C'est une lutte des paysans et des agriculteurs, oui, tout à fait. Et nous appelons, nous, les salariés, à faire grève pour gagner des augmentations de salaires.
01:35 C'est ce qui va se passer dans l'éducation nationale le 1er février prochain, où les enseignants et les enseignantes seront en grève pour exiger des augmentations de salaires,
01:41 parce que de plus en plus de salariés n'arrivent plus à se nourrir. On a d'un côté des paysans qui ne peuvent plus vivre de leur travail,
01:47 et de l'autre côté des salariés qui, malgré le fait qu'ils travaillent, ne peuvent plus se nourrir parce que les prix de l'alimentation explosent.
01:53 Il y a un problème. Et au milieu, c'est le capital qui explose ses marges, avec une spéculation, une mondialisation qui tire les prix vers le bas pour les agriculteurs,
02:03 et qui tire les normes sociales et environnementales vers le bas.
02:06 Vous avez pris des contacts avec les organisations agricoles ces dernières heures ?
02:10 Oui, la CGT est en contact avec la Confédération Paysanne, ce n'est pas nouveau, ça fait des années qu'on travaille avec eux.
02:16 Et ce qui est intéressant, c'est qu'il y a quelques mois, quand on était dans la mobilisation contre la réforme des retraites,
02:22 on a eu beaucoup de mouvements de solidarité avec des paysans qui nous apportaient sur des piquets de grève à manger,
02:28 parce qu'il y avait un certain nombre de grévistes qui étaient en grève reconductible, et qui nous apportaient leurs produits pour permettre aux grévistes de tenir.
02:34 Donc ces solidarités entre le mouvement paysan et le mouvement ouvrier, elles sont anciennes.
02:38 Et vous, vous vous sentez plutôt bien accueilli aujourd'hui dans cette mobilisation ?
02:41 Il y a beaucoup de barrages et d'endroits où ça se passe très bien, oui, par exemple dans l'Aveyron, dans la Manche,
02:46 hier j'ai eu des remontées où ça se passait très bien.
02:49 Cet après-midi, Gabriel Attal annonce une mesure forte sur la rémunération des agriculteurs s'ils décident de terminer ce mouvement.
02:55 Alors ce n'est pas forcément ce qui ressort de leur témoignage aujourd'hui.
02:58 Vous faites quoi ? Vous remballez les pancartes et vous rentrez vous aussi ?
03:01 Écoutez, c'est les agriculteurs qui décident pour ce qui concerne leur mobilisation,
03:06 et nous pour ce qui concerne les salariés, ce que nous exigeons c'est des augmentations de salaires pour les salariés.
03:11 Et ce que nous disons en tout cas, c'est que nous sommes très méfiants par rapport à la capacité du gouvernement
03:16 et du patronat en général de répondre à ce type de mobilisation par la remise en cause des normes environnementales,
03:21 ce qui ne conduirait que par une fuite en avant.
03:24 Les agriculteurs sont les premières victimes du dérèglement climatique,
03:28 les agriculteurs sont les premières victimes de la pollution,
03:31 puisque je rappelle que la première cause de mortalité chez les paysans et chez les ouvriers agricoles, ce sont les cancers.
03:38 Et donc ce n'est pas de moins de normes sociales et environnementales dont nous avons besoin,
03:43 mais plus d'accompagnement pour permettre une transformation du modèle agricole
03:47 et permettre de bien travailler, bien vivre de son travail, et bien manger, et produire localement.
03:51 En fait il faut mettre fin au gigantisme, aux fermes-usines qui se développent partout.
03:55 Ça a quel sens d'inonder le tiers-monde de poulets produits en batterie ou de lait en poudre ?
04:00 Ce dont nous avons besoin, c'est de nourriture de qualité,
04:03 produite à côté de chez nous pour limiter les émissions de gaz à effet de serre.
04:06 Un mot de personnalité de gauche, notamment Eléphie,
04:10 qui ont dénoncé un deux poids deux mesures sur la technique de maintien de l'ordre
04:14 autour de ces mobilisations des agriculteurs.
04:17 Hier Gérald Darmanin a dit "on ne répond pas à la souffrance" en envoyant le CRS.
04:22 Il estime que les agriculteurs respectent les règles de la République,
04:25 ne s'en prennent pas aux forces de l'ordre ni aux bâtiments publics.
04:28 Moi j'ai bien entendu ce qu'a dit Gérald Darmanin
04:31 et je l'appelle à être cohérent et à cesser ce deux poids deux mesures.
04:35 Et donc je l'appelle à mettre immédiatement fin aux poursuites
04:38 qui visent mille militants et militantes de la CGT
04:41 qui sont poursuivies pour s'être mobilisés contre la réforme des retraites.
04:44 Donc la même chose que les agriculteurs avec des actions absolument pas violentes
04:48 puisque nos militants sont poursuivis pour faire un feu de palette sur la voie publique
04:53 ou dérouler du papier toilette par exemple sur un bâtiment.
04:56 Ils pensent à nouveau d'être poursuivis avec des procès.
04:59 Donc il faut immédiatement être cohérent, mettre fin à ces poursuites.
05:02 Et puis quelque part avec des déclarations comme ça,
05:05 moi la conclusion que j'en tire c'est que la prochaine fois
05:07 on va faire nos manifestations avec des tracteurs
05:09 puis peut-être que ça sera plus simple.
05:11 Un autre sujet d'actualité, hier le Conseil constitutionnel
05:14 a rendu sa décision sur la loi immigration.
05:16 Elle est assez largement censurée.
05:18 Il n'y a plus de quotas, plus de durcissement du regroupement familial,
05:21 plus de caution étudiante.
05:23 Est-ce que vous êtes soulagé ?
05:25 C'est une victoire et un camouflet pour le gouvernement
05:27 puisque ce que nous disons depuis des semaines est confirmé,
05:30 à savoir que la préférence nationale, la remise en cause du droit du sol
05:34 sont contraires aux principes qui fondent notre République.
05:38 Cependant il reste beaucoup de dispositions problématiques dans ce texte.
05:42 Par exemple, les jeunes majeurs n'auront plus les mêmes droits.
05:45 Un jeune majeur qui est protégé par l'aide sociale à l'enfance,
05:48 si la loi s'applique pour les jeunes majeurs étrangers,
05:52 il n'aura plus droit à cette protection.
05:54 C'est grave parce que ça veut dire qu'il y aura une inégalité
05:57 entre les jeunes français et les jeunes étrangers
05:59 et que les jeunes étrangers ne pourront plus être protégés.
06:01 Donc j'appelle solennellement le président de la République
06:04 à tirer les leçons de cette censure et à ne pas promulguer cette loi de la honte.
06:09 Il nous reste quelques secondes.
06:11 Il y a un autre texte qui va être examiné la semaine prochaine
06:14 et qui concerne l'IVG.
06:17 Gérard Larcher, cette semaine, a indiqué qu'il ne souhaitait pas
06:22 l'inscription de l'IVG dans la Constitution
06:24 parce qu'il ne pense pas que l'IVG soit menacée en France.
06:26 Qu'en pensez-vous pour conclure ?
06:28 L'IVG est déjà menacée au quotidien
06:30 puisqu'il n'est pas effectif pour des milliers de femmes
06:33 qui n'arrivent pas à avoir des rendez-vous dans les délais
06:36 pour faire respecter leurs droits.
06:37 Elles sont obligées de partir avorter à l'étranger.
06:39 Donc oui, l'IVG est menacée.
06:41 Nous savons qu'un certain nombre de forces politiques réactionnaires
06:44 dénoncent l'IVG.
06:48 Dans le monde entier, il est remis en cause,
06:50 que ce soit en Pologne ou en Argentine par exemple.
06:53 Il faut qu'il soit inscrit de façon claire dans la Constitution
06:56 et surtout que les moyens soient mis en place
06:58 pour que toutes les femmes aient le droit
07:00 et puissent maîtriser leur corps et leur sexualité.
07:03 Merci beaucoup Sophie Binet.

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