Jeudi 20 mars 2025, retrouvez Christophe Aulnette (Senior advisor, Seven 2), Henri d'Agrain (Délégué général, Cigref), Yann Lechelle (entrepreneur de la tech et cofondateur, probabl.AI) et Christine Guliver (éducatrice spécialisée et porte-parole, collectif Meer) dans SMART TECH, une émission présentée par Delphine Sabattier.
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00:00Bonjour à tous, c'est parti pour un grand débrief de l'ActuTech. On est ensemble pour une demi-heure.
00:13Je vous présente les sujets et commentateurs juste après.
00:20Dans Smartech aujourd'hui pour le grand débrief avec nous Yann Lechel.
00:23Bonjour Yann, entrepreneur de la Tech, co-fondateur de ProBel-EA, un spécialiste de ces nouveaux modèles.
00:30Avec nous également Henri Dagrin. Bonjour Henri. Bonjour Elphine.
00:33Délégué général du SIGREF, l'expert des DSI dans le CAC 40, en tout cas un des porte-parole.
00:41Et puis Christophe Holnet, petite surprise pour mon ami Christophe. Merci Elphine.
00:46J'ai lu votre livre. Alors je voulais l'avoir terminé pour ce matin.
00:51Je ne suis pas tout à fait à la fin, mais enfin j'ai vraiment parcouru une grande partie.
00:55Il est passionnant. Je rappelle que vous êtes Senior Advisor chez SevenTwo.
00:59Et vous avez donc écrit ce livre pour raconter l'aventure post-Microsoft, puisque vous étiez un des grands dirigeants de Microsoft.
01:06Et comment ça se passe quand on quitte et qu'on doit se reconvertir quand on quitte la grande entreprise.
01:11C'est absolument passionnant. Alors ce n'est pas du tout de ça dont on va parler Christophe aujourd'hui.
01:16On va parler d'Apple Intelligence. Ça change pour les GAFA, on a du choix.
01:21Apple Intelligence, qu'est-ce qui se passe ? On a une crise qui sort au grand jour avec des révélations sur le retard pris par Apple dans l'IA et des fausses promesses sur les démos.
01:31On va aussi parler de Google, un autre GAFA qui est incontournable.
01:35Et ce rachat historique de Wizz Startup dans la cybersécurité pour 32 milliards de dollars.
01:42Mais on commence en France. On commence avec une commission d'enquête sur les effets de l'application TikTok sur les mineurs.
01:48Et pour lancer cette discussion, nous sommes connectés avec Christine Gulliver. Bonjour.
01:52Bonjour.
01:54Vous êtes porte-parole du collectif Maire pour Mineurs, Éthique et Réseau.
01:59Vous êtes éducatrice spécialisée par ailleurs dans la vie.
02:02Peut-être déjà un mot quand même sur le collectif. Qui vous êtes ? Ce que vous faites ?
02:07C'est un rassemblement, un collectif de citoyennes majoritairement.
02:13On s'est connus sur les réseaux.
02:16Et c'est à partir des constats que nous faisions chacune de nos côtés et de ce qu'on pouvait échanger en messages privés qu'on s'est dit qu'il y a peut-être quelque chose à faire.
02:24Se responsabiliser peut-être et commencer à consigner.
02:29Donc depuis 2023, on a un drive rempli de centaines et de centaines de screens, de vidéos qui nous semblent problématiques.
02:38Et plus particulièrement pour les jeunes sur les réseaux et les mineurs.
02:42On a surtout entendu parler de vous autour de l'affaire Ophénia, puisque vous en avez dénoncé les dérives sectaires de cette influenceuse.
02:53Vous surveillez comme ça chaque jour l'activité qui se passe sur les réseaux sociaux.
02:58Avec un regard particulier sur TikTok, qu'est-ce que vous constatez ?
03:02Ce qu'on constate, c'est qu'effectivement, on trouve qu'il y a une banalisation de tout ce qui est les sujets autour de la santé mentale.
03:13Autour des violences aussi, que ce soit des violences verbales, voire des violences sexuelles.
03:21Le harcèlement, parce qu'à la fois il va être dénoncé, mais en même temps pour le dénoncer, on va utiliser la méthode des vidéos réponses.
03:30Et donc au final, ça génère du harcèlement.
03:32On constate vraiment pareil au niveau des troubles alimentaires.
03:37Il y a beaucoup de contenus qui vont parler des influenceurs, influenceuses.
03:42Le lifestyle healthy, on fait du sport, il faut manger.
03:46Ça commence comme ça, c'est innocent.
03:48Et en fait, au final, on constate que l'algorithme va nous mettre des vidéos qui ne sont pas forcément bien faites, voire très dangereuses.
03:57Puisqu'on peut se retrouver avec des créateurs, même petits, qui n'ont pas forcément de très grosses communautés.
04:03Leur contenu n'est pas comme ça.
04:07On se dit « bon ben ça va », mais par contre les lives, ça ne va pas du tout.
04:10On peut se retrouver à voir une jeune fille qui va manger, faire une crise de boulimie en live, ne rien dire.
04:15Et puis ensuite, on l'entend se faire vomir, puis revenir.
04:18Et les commentaires sont catastrophiques.
04:20Les jeunes filles disent « oh là là, là j'ai une crise, tu me triggers, tu me choques ».
04:29Face quand même à tout ça, l'Assemblée nationale a approuvé à l'unanimité, il faut le préciser, la création d'une commission d'enquête sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs.
04:39Selon la sénatrice Laure Miller, le réseau social, elle dit pour reprendre ses termes,
04:44incarne un paradoxe particulièrement morbide, puisqu'il confronte le public le plus vulnérable au biais de fonctionnements les plus délétères.
04:51Les mots sont vraiment très graves, très durs.
04:54Déjà un commentaire en plateau peut-être sur TikTok, les mineurs, les effets des réseaux sociaux aujourd'hui dans la société.
05:03D'abord, je crois que TikTok n'est que la pointe émergée de l'iceberg.
05:08Il y a de nombreuses plateformes dont les fonctionnements peuvent être interrogés.
05:13Et c'est aujourd'hui, notamment pour les mineurs, un enjeu de santé publique, véritablement.
05:19Mais c'est également, il faut analyser les effets destructeurs en matière d'attention et donc d'apprentissage aujourd'hui.
05:27C'est donc l'avenir de l'éducation des jeunes générations qui est aujourd'hui perturbé.
05:33Hier, j'étais dans une grande école du numérique.
05:36Et les dirigeants me disaient qu'aujourd'hui, la capacité d'attention des jeunes,
05:43les mettre dans un amphi pendant une heure et demie, c'est juste impossible.
05:47Ça ne marche pas.
05:48Quand même, pour notre génération où ça a été notre mode d'éducation, on se dit qu'il y a quand même quelque chose qui est profondément...
05:55— On doit peut-être aussi réinventer la manière dont l'éducation...
05:58— Oui, non, mais d'accord. Mais on peut réinventer, mais quand même constater que l'attention des jeunes,
06:03elle est totalement aujourd'hui mise en cause. Et puis derrière, il y a également des enjeux,
06:11notamment sur la capacité d'influence de la Chine sur les modes de vie occidentaux à travers TikTok.
06:17Et d'ailleurs, ils ont eux-mêmes changé le fonctionnement de TikTok en Chine. Voilà.
06:21Et puis moi, ce que j'aimerais bien, c'est qu'on fasse le lien entre TikTok et les plateformes de cette nature,
06:27et puis le désastre économique et écologique que représente la fast fashion, parce que derrière,
06:33c'est un apprentissage à ces modes de consommation qui est insufflé auprès de la jeunesse.
06:40Et donc les deux me paraissent intimement liés. Et je crois qu'il y a aujourd'hui une commission d'enquête également
06:45et des textes qui sont aujourd'hui travaillés au niveau notamment de l'Union européenne sur justement le caractère catastrophique
06:52d'un point de vue économique, bien sûr, pour l'industrie en Europe, mais également d'un point de vue écologique.
06:58Donc je crois que si on réunit les deux, on a un effet massif sur le fonctionnement des sociétés occidentales
07:05et notamment de la société européenne et de son économie. Donc tout ça, ça doit aller beaucoup plus loin.
07:12– Il faut revoir le DSA, le Digital Services Act.
07:16– Oui, ça je voulais faire réagir justement le collectif, mais Christophe ?
07:20– Moi ce que je pense, Henri le disait, je crois que ces sujets-là doivent être probablement gérés à l'échelle européenne.
07:27Et je trouve ça très très bien qu'il y ait une commission d'enquête qui saisisse du problème.
07:33C'est un problème qu'on constate tous, un problème de santé mentale, un problème majeur.
07:37On se retrouve finalement de façon un peu, on pourrait dresser un parallèle avec l'industrie du tabac dans les années 50
07:43où des médecins venaient vous expliquer que tous les bons médecins fument des camels
07:48ou Philippe Maurice qui expliquait que la fumée était très bonne pour la gorge.
07:51Bon, là on se dira peut-être dans 20 ans, on a sacrifié une génération.
07:57La question c'est qu'il y a une telle addiction, une telle généralisation,
08:02une telle globalisation de l'utilisation de ces plateformes que le plan d'action qui va suivre la décision du Parlement
08:10il ne peut vraiment avoir à mon avis un impact, à moins qu'on décide en France unilatéralement d'interdire les réseaux sociaux
08:17au moins de 16 ans et encore faudra-t-il avoir un mécanisme par exemple de vérification de l'âge.
08:22On parlera peut-être un petit peu après des solutions.
08:26Mais à mon avis c'est à l'échelle européenne qu'il faut se saisir de la chose.
08:30Et je pense qu'on n'arrivera pas à s'en sortir si on n'adresse pas le sujet de la vérification de l'âge.
08:36Une certaine forme de contrôle des algorithmes en fonction du code par exemple
08:42en un atténuant le degré addictif à partir d'une certaine heure le soir comme le font par exemple les Chinois vous le signalez.
08:50Mais pour ça il faut qu'on ait une vérification d'âge et il faut qu'on soit prêt.
08:54Et il y a aujourd'hui des mécanismes qui existent à travers de tierces parties etc.
08:58C'est la liberté d'imposer ces mécanismes ne serait-ce que pour les sites pornographiques.
09:02C'est de la lâcheté.
09:04Et je dirais que depuis l'arrivée de Trump au pouvoir la situation est encore pire
09:08parce que c'est plus seulement devenu un enjeu de guerre économique mais de guerre idéologique
09:12autour de la liberté d'expression.
09:14Et donc je ne suis pas très optimiste sur quel va être le levier à l'action derrière.
09:19Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas le faire.
09:21Il faut se sensibiliser mais ça doit se régler à mon avis au niveau européen.
09:25Yann ?
09:26Alors je vais parler un peu technique.
09:28L'algorithme il est neutre. Il est d'une violence inouïe.
09:31Il est là tout le temps. Il ne dort jamais.
09:34Et il est globalement le même sur TikTok, sur LinkedIn que sur Facebook.
09:38Tous ces fils qui font défiler du contenu.
09:41Et le terme qui a été utilisé je pense dans la citation c'est morbide.
09:46En fait sur des esprits qui sont peu formés ou pas assez.
09:51Et l'impact est fort aussi sur les adultes mais les jeunes en particulier ne sont pas formés.
09:55Ils n'ont pas appris le sens critique.
09:58Ils n'ont pas encore développé ce muscle qui est difficile à développer.
10:02L'effort. L'effort d'apprendre avant d'aller vers la facilité que propose ce contenu.
10:07Et donc il faut absolument bien comprendre au niveau sociétal qu'il y a là un enjeu que nous ne maîtrisons pas.
10:13Puisque ces sociétés là ne proposent pas le contenu en disant
10:18voilà vous la France vous allez être exposé à tel tel contenu.
10:20On le découvre a posteriori.
10:22Bravo madame de l'association mère.
10:24Justement de faire ce travail de reconstruction des contenus qui sont exposés sur des écrans qui ne sont pas les nôtres.
10:30Donc ceux des enfants.
10:32Pour pouvoir témoigner de la dangerosité de ce contenu.
10:36Mais on est sur une pente glissante.
10:37Et donc il me semble qu'il faut prendre le sujet courageusement.
10:41Que cette notion d'âge est critique.
10:44Si on considère que la formation c'est jusqu'à 18 ans par exemple.
10:48Et ça va au-delà évidemment.
10:49Donc d'une part.
10:50Et d'autre part il y a un sujet qu'on évoque assez peu.
10:52C'est cette notion de free speech.
10:56C'est-à-dire à quelle personne est-ce qu'on attribue tel ou tel contenu.
11:00Il y a beaucoup trop de comptes anonymes et de comptes qui sont des robots de campagne.
11:05Et tout ça n'est pas connecté au droit de parole.
11:09Le droit de parole est attribué à l'individu, à une personne, à un citoyen.
11:13Pas à une machine.
11:14Et donc c'est tout ça qu'on doit commencer à traiter.
11:16Il va falloir qu'on le traite de manière très sérieuse.
11:18Justement, vous l'avez tous évoqué, l'échelle européenne.
11:23On a déjà une réglementation.
11:25Ça s'appelle le DSA, le Digital Service 6.
11:27Qu'est-ce que vous attendez de plus, Christine, de cette commission qui va se mettre en place au niveau français ?
11:35D'ailleurs j'ai cité Laure Miller en disant « sénatrice », elle est députée.
11:41Comme l'a dit madame la députée Laure Miller, il faut qu'elle aille voir sous le capot pour voir comment cela fonctionne réellement.
11:51Parce que comme ça a été déjà relevé, le système de signalement par exemple que nous on a plus qu'usité.
11:58On a fait des centaines de signalements en suivant le protocole de TikTok.
12:06On a été retoqués à 98% du temps.
12:09On a même été avertis qu'on faisait des signalements abusifs, alors que non, clairement non.
12:15C'était bien des mineurs qui étaient en live.
12:17Ensuite, on s'est retrouvés à faire des signalements faroces.
12:20Et en échangeant avec les gens, on s'est rendu compte qu'ils ne connaissent pas.
12:24Donc ce qu'on attend, c'est qu'il y ait un éclaircissement sur leur fonctionnement.
12:28Et que derrière, il y ait des décisions de prise qui puissent répondre à toutes les questions qui viennent d'être abordées.
12:33Et qui puissent être le plus préventif possible.
12:37Est-ce qu'il y a assez de moyens humains chez TikTok ?
12:41Parce qu'on sait que les vérifications des signalements sont avant tout aussi un algorithme qui va réagir.
12:49C'est d'ailleurs pour ça que c'est facile de faire sauter des comptes pour certains.
12:52Alors c'est ça, c'est très nébuleux.
12:54On arrive à faire sauter des comptes pour des raisons où il y a plein de créateurs qui vont vous dire je ne comprends pas.
13:00J'ai eu un raid.
13:01Alors nous on l'a vécu quand on a commencé.
13:05On a chacune eu droit à notre raid.
13:07Moi j'ai eu une vidéo qui a sauté parce que la communauté a fait du signalement en masse.
13:15Mais ma vidéo n'en freignait aucune règle.
13:17Mais parce que c'est un signalement en masse, l'algorithme part du principe qu'il y a un problème.
13:22Donc on fait sauter la vidéo.
13:24Donc ce fonctionnement-là, comprendre vraiment ce qu'il en est.
13:28Est-ce qu'il y a des moyens humains réels engagés par TikTok ?
13:32Est-ce qu'il ne faudrait pas des signalers de confiance interne en lien avec les signalers des institutions telles qu'il y a en France ?
13:41Est-ce que ça existe déjà ?
13:42Est-ce que c'est déjà suffisant ?
13:43Nous on attend qu'ils comprennent et que derrière il puisse y avoir des décisions, des actions menées vraiment concrètes.
13:54Par exemple, on taxe bien des grandes industries parce qu'elles polluent.
13:59Pourquoi pas taxer aussi les TikTok et les plateformes parce qu'elles génèrent des problèmes de santé mentale importants socialement.
14:13Nous on a des pistes de réflexion, mais on est surtout dans le constat et on est surtout là pour amener ce qu'on constate.
14:22Et chacun son rôle aussi.
14:26Yann a raison de féliciter le collectif, de vous féliciter pour le travail que vous menez vraiment.
14:32Et toutes les questions que vous posez, ce sont des bonnes questions.
14:35Donc on espère effectivement que cette commission servira au moins à nous permettre d'y voir plus clair et à y répondre.
14:41Merci beaucoup Christine Gulliver d'avoir été avec nous en ouverture de ce débrief.
14:45Je rappelle donc que vous êtes la porte-parole du collectif maire.
14:48On enchaîne nous avec un autre sujet, celui d'Apple Intelligence.
14:52Apple et l'intelligence artificielle, aïe aïe aïe.
14:55Donc révélation sur un retard, sur des mensonges, sur les démonstrations qui ont été faites notamment lors de la WWDC,
15:03la conférence des développeurs d'Apple qui s'est tenue en juin 2024.
15:09Là où on a vu toutes les promesses de Cupertino.
15:13Voilà, comme elle sait nous parler de cette révolution de l'intelligence artificielle qui est arrivée dans Syrie.
15:20Et puis là on découvre finalement que non, finalement la version de Syrie qui était attendue, elle n'est pas prête.
15:26C'est le blogueur John Gruber, qui est vraiment un fin connaisseur d'Apple, qui a publié un édito assassin.
15:33En fait il s'en veut, il dit j'ai jamais été aussi en colère contre moi-même finalement d'avoir cru à tout ça aveuglément.
15:39Il dit il y a quelque chose de pourri aujourd'hui à Cupertino.
15:43On a le journaliste de Bloomberg qui rapporte une réunion qui est véritablement une réunion de crise au sein d'Apple.
15:51Avec le responsable de Syrie qui dit qu'il n'est pas certain de savoir quand les améliorations attendues seraient réellement lancées.
15:59Et il parle de honte, de situation très embarrassante.
16:03Comment est-ce que vous expliquez, vous, ce retard, cette situation dans laquelle se retrouve Apple par rapport à l'IA ?
16:10Yann ?
16:11Tout va bien chez Apple. C'est la société la plus valorisée au monde.
16:15Au-delà de 3000 milliards malgré les annonces de Trump.
16:19Apple a toujours été en retard sur l'innovation, toujours.
16:23Et réussit à capitaliser malgré tout, puisqu'ils ont une approche que j'apprécie plutôt, de ne pas compromettre sur l'expérience utilisateur finale.
16:32Donc évidemment, ils ont d'ailleurs commencé avec Syrie, mais ce n'était pas tout à fait au niveau.
16:37Et ils sont finalement toujours un petit peu en retard sur le sujet de la cité en bocaux parce que ce n'est pas prêt.
16:42La technologie n'est pas prête pour monsieur, madame, tout le monde.
16:46Donc en fait, ils ne veulent pas prendre le risque de mettre l'utilisateur face à des mauvaises réponses ?
16:52De la même manière que Google, qui avait pourtant les compétences pour faire de la Gen AI plus vite que tout le monde,
16:59puisque ce sont eux qui ont publié le papier, ne l'ont pas fait pour ne pas mettre en danger leur business model dominant de moteur de recherche.
17:06Donc en fait, ces entreprises font très attention.
17:08Alors évidemment, ils ont la pression en interne.
17:11Il faut aboutir. Ils ont fait des annonces.
17:13Donc c'est par rapport aux annonces qu'il y a des sujets.
17:15Mais globalement, ces entreprises, et j'en note trois, Apple, Microsoft et Google, ont accès à 5000 milliards d'humains et valent plus que 5000 milliards de dollars.
17:27Donc ces trois entreprises-là, tôt ou tard, vont nous envahir avec cette IA lorsqu'elle sera prête.
17:32Donc rien n'aura voulu.
17:34Christophe, ancien Microsoft, regard sur Apple.
17:39Le regard sur les GAFAM plutôt, disons.
17:41Le regard sur Apple, je pense que c'est quand même une évolution un peu préoccupante d'Apple, pour moi.
17:48Parce qu'Apple a toujours été dans un mode qui consistait à avoir une culture du secret, à attendre et tout d'un coup sortir un produit et ne jamais compromettre effectivement sur l'expérience client.
17:59Peut-être le seul écart avec ça, c'était un produit qui n'a pas bien marché au début qui était Apple Maps.
18:04Mais disons qu'ils étaient quand même toujours dans cette culture-là.
18:07Je trouve que c'est une évolution un peu préoccupante qui montre probablement, à mon avis, deux choses.
18:11La première, c'est qu'il y a une pression énorme sur le fait de sortir quelque chose sur l'IA.
18:16Et qu'il y a peut-être des dirigeants à un endroit, sans en référer forcément à Tim Cook, qui ont un peu survendu ce qu'ils étaient capables de faire, peut-être eux-mêmes sous pression.
18:25Donc je pense qu'il faudra que des têtes tombent.
18:28Parce que ça peut créer beaucoup de malaise et de manque de confiance en interne et en externe.
18:32Et la deuxième réflexion, c'est qu'en fait, on voit bien qu'avec l'IA conversationnel, les chatbots d'ancienne génération ont beaucoup de mal à se réinventer.
18:41Je ne sais pas si vous avez essayé d'utiliser le chatbot d'Orange.
18:44Je n'ai jamais rien vu de plus stupide.
18:46On demande à chatjibitit dans les choses et on voit bien que, en fait, c'est parfois pas facile.
18:50C'est un peu comme si vous avez un vieux vélo et que vous mettez un moteur électrique dessus.
18:54Les freins ne fonctionnent pas, ça ne fonctionne pas.
18:56À un moment donné, il faut peut-être se dire, j'arrête et je recommence.
18:59Pas facile pour une énorme compagnie.
19:03Toujours difficile, mais c'est l'enjeu de tous les géants de savoir se réinventer.
19:07En fait, ça renvoie à un vrai sujet, mais qui concerne d'ailleurs tous les DSI.
19:14C'est celui de la dette technique.
19:16Du legacy, parce qu'en fait, Siri, ça date de 2011, donc ça a 14 ans.
19:22Et ça a été profondément intégré dans tout l'environnement Apple, de manière technique.
19:29Et donc, c'est profondément enraciné.
19:31Alors, quand vous avez un chatbot conversationnel qui, lui, est indépendant de tout un environnement technique,
19:37vous l'apportez, il fonctionne merveilleusement bien.
19:40C'est JGPT ou Gemini ou le chat.
19:45De Mistral, tout à fait.
19:47De Mistral.
19:48Mais là, Siri est intégrée dans toutes les stacks techniques de tous les produits de Microsoft.
19:56Et c'est là où réside la difficulté.
19:59D'ailleurs, Apple est confrontée à deux options.
20:04Soit d'évoluer progressivement.
20:06Et donc, ça prend du temps, nécessairement du temps, de faire évoluer Siri vers le LLM Siri,
20:13qui est annoncé, Apple Intelligence, pour transformer progressivement tout cet environnement technique.
20:18Soit la stratégie de la table rase.
20:21Mais ça, quand on est Apple, en termes d'expérience client, en termes de protection des données,
20:30parce que c'est une des promesses à travers Apple Intelligence, la protection des données des utilisateurs,
20:35et en termes de possibilité de retrouver le même produit à travers toutes les gammes de produits d'Apple,
20:42c'est extrêmement compliqué.
20:44Et donc, il n'y a pas de recette magique.
20:46Quand on a un legacy, il faut le traiter.
20:49Et je crois que c'est ce à quoi se retrouve confrontée aujourd'hui Apple.
20:54Il y a une troisième option, c'est ce qu'a fait Microsoft.
20:57C'est de décider d'aller chercher à l'extérieur, finalement, la technologie.
21:01Oui, mais attention, Nelphine, ça veut dire que quand on va chercher à l'extérieur,
21:05l'intégration dans tout l'environnement de développement,
21:08avec toutes les règles extrêmement rigoureuses qu'Apple s'applique sur tous ses stacks techniques,
21:15ce n'est pas simple.
21:17Parce qu'Apple a aussi choisi d'être dans un environnement fermé.
21:20Absolument.
21:21Ils ont tout de même annoncé qu'ils allaient faire un partenariat avec OpenAI si ce n'était pas déjà fait.
21:26Le problème au niveau des consommateurs, c'est cette surpromesse.
21:30Et si Apple nous vend des appareils qui sont encore plus chers, plus performants,
21:34pour une promesse qui n'est pas au rendez-vous,
21:36ça, ça pose problème vis-à-vis du consommateur,
21:38qui aura prépayé quelque part une fonctionnalité qui n'est pas à la hauteur.
21:42Mais globalement, les appareils vont être mis à jour.
21:46Donc tout ça va arriver finalement très vite.
21:49Moi, j'ai été directeur d'opérations chez Snips,
21:52une entreprise qui faisait des assistants vocaux, vendue à Sonos.
21:55Personnellement, j'utilise Siri tous les jours, vocalement.
21:58Je ne suis pas sûr que je sois représentatif de la population.
22:02Tout ça va mettre du temps, je vous assure.
22:04C'est une interface du futur, l'interface vocale,
22:07mais elle est d'une complexité inouïe.
22:10C'est vrai que Chad GPT a bousculé le monde entier de la technologie
22:15et tout le monde a essayé de positionner quelque chose.
22:19Mais dans les cinq prochaines années, les choses vont se placer calmement.
22:22On n'a plus beaucoup de temps pour parler de Google,
22:25qui a racheté la start-up de cybersécurité Wiz pour 32 milliards de dollars.
22:29Plus grosse acquisition jamais réalisée dans son histoire.
22:34Google fait le lien avec l'utilisation croissante du cloud
22:40qui augmente les risques cyber.
22:43Est-ce que ce rachat veut dire que l'heure est grave ?
22:47Comment vous l'interprétez ?
22:4932 milliards de dollars, c'est quand même spectaculaire.
22:52Effectivement, ils ont explosé tous les compteurs.
22:54On est à 45 fois le revenu annuel récurrent.
22:5732 milliards, c'est une somme gigantesque
23:01et donc une très bonne capacité de négociation de l'équipe Wiz,
23:05puisqu'on voit que ça traîne depuis 18 mois.
23:08C'est remarquable.
23:10Mais au-delà de ça, je pense que c'est surtout une formidable opération stratégique
23:15parce qu'aujourd'hui, la plupart des grandes entreprises sont multicloud,
23:19avec un oligopole dont le Challenger et Google Cloud.
23:24Le produit Wiz, par sa nature multicloud,
23:27est un peu intégré au-dessus par les grands clients
23:30pour suivre les risques cyber liés au cloud
23:34et faire des rémédiations automatiques.
23:36C'est un outil qui a un peu englobant tout cela.
23:39Pour Google avoir l'outil,
23:42on promet bien sûr qu'il continuera à travailler avec tout le monde.
23:45On connaît l'histoire.
23:47Ça va leur donner de la crédibilité vis-à-vis des clients
23:50parce que le produit Google va être plus sécurisé par lui-même.
23:53Petit à petit, il sera assez naturel, comme tous ces acteurs le font,
23:57d'orienter progressivement les clients.
23:59Pourquoi vous n'utilisez pas un peu plus des ressources Google Cloud
24:02plutôt qu'Amazon Web Services ou Azure ?
24:04Oui, évidemment.
24:06Vous connaissiez Wiz, j'imagine.
24:08On nous dit que c'est l'acteur incontournable aujourd'hui dans la cyber.
24:12On l'avait découvert lors d'une learning expédition en Israël
24:16que nous avions fait en avril 2023, je crois,
24:21avec quelques députés et sénateurs.
24:24On avait été découvrir Wiz, entre autres,
24:28et puis l'unité 8200 dont sont issus les fondateurs.
24:33Il faut bien voir que ce n'est pas une société américaine
24:38qui rachète une société israélienne.
24:40Parce que le marché domestique de ces startups israéliennes,
24:44c'est le marché américain.
24:46Et là, il y a une fusion qui est assez importante.
24:50Donc le développement naturel de Wiz,
24:54c'était bien le marché des États-Unis.
24:56Nous, tout ce qu'on espère, et bien entendu,
24:58c'est qu'il y a une situation de dépendance,
25:01déjà des clients de Wiz,
25:03notamment lorsqu'ils sont inscrits dans des stratégies multicloud
25:06et des stratégies cloud hybrides,
25:09qu'on ne retrouve pas des comportements
25:14tels que ceux que l'on a pu connaître de la part de Broadcom
25:17avec leur achat de VMware.
25:19Donc la situation est très différente.
25:21Mais en tous les cas, on est sur un tel niveau de rachat
25:24que derrière, il va y avoir une tendance naturelle
25:26à vouloir valoriser cette acquisition financièrement.
25:31Et donc les clients devront être attentifs
25:34aux comportements commerciaux à venir,
25:37aux stratégies commerciales à venir.
25:39On n'est pas sortis de nos dépendances sur le cloud ?
25:42On est dans des situations de dépendance.
25:45Pourquoi est-ce que des Wiz, ça se crée en Israël
25:48et pas en Europe ?
25:50Est-ce que l'Europe est capable de faire émerger
25:53de tels acteurs ?
25:55D'abord de faire émerger de tels acteurs.
25:57Je pense qu'il y en a.
25:58Il y a de belles pépites dans le domaine
26:00de la cybersécurité en Europe,
26:02en France et en Europe.
26:04Et puis ensuite...
26:05Google a fait racheter Mandiant.
26:06Mandiant était à l'origine fondé par des Français,
26:09si je me souviens bien.
26:10Et les a conservés.
26:11Et les a conservés en Europe.
26:13Yann ?
26:14Petite réaction en tout cas sur les sommes évoquées.
26:18Mais surtout la surface d'attaque.
26:20C'est-à-dire que ces acteurs que sont notamment
26:22AWS, Azure et Google, Google Cloud,
26:26sont les acteurs dominants
26:28de la première division du cloud dans le monde.
26:31Et ces acteurs ont une telle surface d'attaque
26:33qu'ils doivent se protéger.
26:34Ah oui.
26:35Et donc, 32 milliards sur un malentendu.
26:37Ça fait 1,5% de la valorisation de Google,
26:39qui vaut 2 000 milliards.
26:42Finalement, c'est la moindre des choses.
26:44C'est-à-dire que ces entreprises-là
26:46ne peuvent pas se permettre d'être attaquées.
26:48Elles le sont au quotidien.
26:50Donc il leur faut les meilleurs.
26:51Si cette solution est la meilleure,
26:53c'est peut-être pas cher payé.
26:55Souvenons-nous de Yahoo,
26:57qui a été hacké intégralement dans les années 2000,
27:01parce qu'ils avaient baissé leurs gardes.
27:03Et un moment donné, ces acteurs, s'ils périclident,
27:05c'est fini.
27:06Mais est-ce qu'on est obligé de racheter pour ça ?
27:08Oui, absolument.
27:09Est-ce qu'on est obligé de passer par de l'acquisition ?
27:10Absolument.
27:11Quand on est un hyperscaler,
27:12globalement, il faut intégrer...
27:14Je pense que la sécurité est un des éléments.
27:17Mais il y a aussi une opportunité stratégique,
27:20d'un point de vue commercial,
27:21de gain de part de marché.
27:23Parce qu'ils vont avoir une position stratégique
27:25vis-à-vis d'un grand nombre de clients.
27:26Imaginez un client où Google Cloud
27:28représente 5% des workloads cloud,
27:31qui est un client Wiz.
27:33Tout de suite, ils prennent une position stratégique
27:35au sein du client.
27:36Ils vont pouvoir orienter leurs choix derrière,
27:38en s'appuyant sur le fait
27:39qu'effectivement, ils ont une sécurité parfaite
27:43grâce à Wiz.
27:44Et éviter que les deux autres hyperscalers
27:46ne rachètent Wiz...
27:48Aussi, oui.
27:49Et augmentent les tarifs,
27:50ou leur empêchent d'être aussi bien défendus.
27:52Donc, quelque part, cette consolidation s'opère
27:54sur la stack totale.
27:55Et là, on ne peut plus être dans la compétition.
27:57Wiz était le partenaire de l'année
27:59pour Microsoft en 2024.
28:04Je termine en présentant votre ouvrage, Christophe,
28:08que j'ai bientôt terminé,
28:09que je lis avec grand plaisir.
28:11Le jour où j'ai quitté Bill Gates,
28:12j'ai plongé dans les tumultes de la reconversion.
28:15Christophe Holnet, merci beaucoup.
28:17Yann Lechel, merci aussi.
28:19Je rappelle que vous, vous êtes à l'œuvre
28:21sur Probable AI.
28:22Et Henri Dagram, merci beaucoup pour être là
28:25et nous parler aussi au nom du Sigref.
28:27A très bientôt sur la chaîne Bsmart4Change.