• avant-hier
LEX INSIDE du 13 mars 2025

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Tout de suite, c'est l'édito de Sabine Lockman. On va parler de l'origine du devoir
00:15de vigilance. Sabine, pourquoi un devoir de vigilance ?
00:18Alors malheureusement, comme trop souvent, c'est un drame. L'effondrement d'un bâtiment,
00:29le Rana Plaza, en 2013, qui va tuer pas loin de 1200 personnes et mettre à la rue 2500
00:35salariés et qui va révéler au monde entier à la fois l'un des drames de la mondialisation
00:42et la fast fashion. Parce que chacun des consommateurs que nous sommes va découvrir que ces salariés
00:50travaillaient dans des conditions absolument innommables et que des conditions de sécurité
00:54qui avaient y compris été rappelées la veille de l'effondrement, n'ont pas été suivies de mesures
01:00de sécurité et de précaution. Alors en 2017, au terme d'un travail législatif qui a fait aussi
01:07grand bruit, notamment en France, va être promulguée la loi Pottier, la loi dite vigilance,
01:15qui va imposer aux acteurs en France, et quels acteurs ? Les entreprises qui ont leur siège
01:24social et qui ont plus de 5000 salariés ou qui ont un siège à l'étranger mais qui ont plus de
01:2910 000 salariés, ce qui représente à peu près 300 sociétés, cette obligation de rapporter au
01:37travers d'un plan de vigilance la façon dont elles gèrent à la fois les enjeux liés aux droits
01:43humains, à la sécurité, à la santé, mais aussi à des logiques environnementales. Ce qui me paraît
01:50très important pour tous ceux qui nous écoutent, on est très souvent focalisés sur le plan de
01:55vigilance et quelque part sur le livrable, alors qu'en fait ce travail porte sur une démarche,
02:01un comportement auquel l'ensemble des dirigeants qui ont une responsabilité, évidemment pas
02:08simplement de prendre des décisions mais aussi de veiller à ce qu'au sein de leur organisation
02:13et leur chaîne de valeurs soient appréhendés de la meilleure façon possible les risques,
02:17et bien ce devoir de vigilance correspond à une démarche où de la gouvernance jusqu'à l'exécutif,
02:24des équipes et des fonctions support, notamment des directions juridiques, des directions financières,
02:29des directions des risques et des assurances jusqu'aux directions opérationnelles en
02:33intégrant les directions industrielles, soient appréhendés effectivement des risques que plus
02:39personne ne peut ignorer. À côté de ces démarches et effectivement pour les encadrer,
02:46le législateur va poser ce fameux plan de vigilance autour de cinq axes. Le premier qui
02:53correspond à la cartographie des risques, je crois que nous irons plus tard dans le détail. Le second
02:59qui est un sujet très important parce qu'il correspond à l'évaluation des filières et des
03:05sous-traitants et les fournisseurs qui sont concernés, bref du périmètre concerné par
03:10ce devoir de vigilance. Également comment les entreprises posent un travail en matière de
03:17prévention, comment est-ce qu'à l'intérieur de la chaîne de sous-traitance et avec leurs
03:22fournisseurs, elles travaillent à atténuer et à prévenir ces risques. Et enfin et surtout comment
03:27est-ce que sont captés les signaux faibles ou les signaux moins faibles au travers de processus et
03:33de mécanismes d'alerte qui doivent être évidemment suivis des faits avec un dispositif qui là aussi
03:41en termes d'escalade en cas de crise doit être appréhendé au meilleur niveau de l'organisation.
03:47Je terminerai en disant que le devoir de vigilance appelle et a appelé de façon très significative
03:55les dirigeants en France mais aussi ceux des pays qui ont aussi adopté des réglementations
04:01similaires. Je vise les Pays-Bas, je vise l'Allemagne, l'Europe aussi, on sait qu'il y a un
04:05travail en cours. Et puis certains des états aussi dans le monde qui au travers de législations
04:12souvent sectorielles ou certains thèmes, les Etats-Unis finalement aussi depuis 1935, ont une
04:18règle qui s'impose pour obliger ceux qui utiliseraient du travail forcé ou de l'esclavage
04:23moderne à ne pas introduire leurs produits sur le territoire américain. Bref, les dirigeants
04:28sont aujourd'hui confrontés à ce devoir de responsabilité ou porté par la loi Potier et des
04:36règles qui s'appliquent tout au long de leur chaîne d'activité ou tout simplement dans ce qu'on
04:41appelle l'éthique des affaires. Parce que finalement de quoi parle-t-on si ce n'est de la culture, si
04:46ce n'est de la connaissance et du fait que nous ne pouvons plus ignorer là encore que tout au bout
04:53d'une chaîne de production d'un produit mais aussi d'un service, on pense aussi à ces centres qui
04:58aident à fabriquer de la donnée ? Eh bien il y a des êtres humains, il y a une planète qui peut
05:04être endommagée de façon significative et particulièrement préjudiciable pour des personnes
05:09qui elles n'ont rien demandé. Donc c'est de cela dont il s'agit, un principe de responsabilité qui
05:15est rappelé là encore au travers de la loi Potier en France, d'autres réglementations en Europe ou
05:21dans le monde. Alors Sabine est revenue sur l'origine donc du devoir de vigilance avec
05:25cet événement le Rana Plaza qui a fait que le législateur s'est emparé de cette question. Est-ce
05:31que ça s'inscrit dans un mouvement de responsabilisation de l'entreprise un peu comme a
05:38décrit Sabine avec le changement des comportements ? Aujourd'hui l'entreprise est obligée d'intégrer
05:45ces événements sociaux environnementaux qui sont extérieurs à l'entreprise mais
05:50aujourd'hui elle doit faire avec. Philippe ? Alors merci d'abord de convoquer ce débat très
05:56intéressant aujourd'hui même, puisqu'aujourd'hui nous sommes dans une période un peu charnière où
06:00les règles changent, c'est-à-dire qu'elles sont à peine nées, qu'on leur dit il va falloir changer
06:05de couleur, changer de votre ADN, changer d'axe, changer de charge aussi. Donc dire aussi que pour
06:13les entreprises et leurs conseils c'est un domaine assez rock'n'roll au sens où il faut
06:19arriver à essayer de comprendre quelle est la charge des contraintes tout en étant productif
06:24et rentable, ce n'est pas évident. Donc je crois qu'il va falloir aussi qu'on passe un petit moment
06:28sur la difficulté d'avoir des cibles mouvantes à suivre, ce qui fait partie du charme de la
06:37profession de juriste aussi, mais pas que. C'est bien aussi d'avoir pour un opérateur économique
06:41une certaine compréhension des règles et une stabilité des règles, donc c'est un point
06:46important sur ce domaine. Dire aussi que ce qui a été très bien expliqué par Sabine Lockman c'est
06:54d'où vient cette régulation, cette construction de cadres juridiques, mais ça vient aussi des
07:04pratiques des entreprises, ce ne sont pas les régulateurs qui en chambre disent tiens il faudrait
07:09qu'on fasse un système très très contraignant. Non, c'était le constat de ce qui fonctionnait
07:15dans les entreprises qui depuis très longtemps, surtout pour les groupes importants, avaient déjà
07:20ces cartographies des risques, avaient déjà cette conscience éthique, on a parlé des sociétés à
07:24raison d'être, des missions, donc en fait c'est plutôt une synthèse. Évidemment le problème c'est
07:30que parfois on veut aller trop loin dans l'exercice et quand la synthèse devient une usine à gaz ça
07:36commence à être compliqué, donc c'est à nous aussi en tant qu'opérateur, en tant que conseil, en tant
07:40que juriste, d'arriver à faire en sorte que ça soit un moment positif pour l'entreprise, pour affirmer son
07:47soi profond, c'est pas juste une contrainte qu'on doit faire pour cocher une case. Mathieu, c'est un
07:54sentiment que vous partagez également ? Tout à fait, il y a une phase d'évolution évidente quand
08:01on prend du recul, à la base ce sont des obligations qui sont sur les épaules et même sur la tête des
08:07états, et petit à petit on voit que la charge de la responsabilité est transférée des états aux
08:13entreprises, avec tout un débat éthique, philosophique, civique sur quelle est la place
08:19dans la société civile de société commerciale, à quel point la société commerciale doit dépasser
08:26son simple objet social, est-ce que c'est la somme des intérêts de ses actionnaires et de ses salariés,
08:31est-ce qu'elle doit faire le bien, et si oui dans quelle mesure ? Et tout ça c'est exactement le
08:38nœud de toutes les questions qu'on se pose, avec dans les entreprises que nous, cabinet d'avocats,
08:44on accompagne, aux côtés des juristes internes des entreprises, cette volonté pas simplement de
08:51bien faire, mais de bien faire ensemble, et de bien faire pour l'entreprise, pour les actionnaires,
08:57pour les salariés, mais aussi toutes les parties prenantes, et ça c'est fondamental,
09:01et il faut trouver une manière pertinente, sans se mettre trop d'obligations sur le dos,
09:07pour les entreprises, de bien le faire, et de bien le faire savoir exactement.
09:11Bon voilà de quoi bien lancer notre seconde partie, on va conclure cette
09:16première partie là-dessus, tout de suite l'émission continue avec notre débat.

Recommandations