Bienvenue dans le cinéma de Blandine Lenoir où les héroïnes font histoire face aux tabous imposés par un ordre de domination, dans un élan où la mise en scène accompagne la synergie des actrices.
Cours de cinéma donné par Cédric Lepine, journaliste et critique, le 7 février 2025, dans le cadre de la thématique Elles sont là pour rester, 10 réalisatrices aujourd’hui en France, dans le focus Blandine Lenoir.
Chaque vendredi à 18h30, les cours de cinéma du Forum des images, entrée libre.
Elles sont là pour rester :
https://www.forumdesimages.fr/elles-sont-la-pour-rester
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Institution culturelle de la Ville de Paris, le Forum des images est au cœur de la ville.
Rencontres, cours de cinéma et conférences, thématiques, festivals… Le forum de toutes les images.
Toute la programmation : http://www.forumdesimages.fr
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Court métrageTranscription
00:00:00Merci pour cette invitation, merci à la réalisatrice aussi de m'avoir proposé d'accompagner
00:00:16ce moment d'échange dans la découverte de sa cinématographie.
00:00:20Je tiens aussi à remercier, il y a un gros enjeu, et là je vais entrer aussi dans le
00:00:23vif du sujet autour de la filmographie de Blondie Lenoir, je dis merci aux formes des
00:00:29images de mettre en valeur une réalisatrice, sa filmographie, parce que mine de rien on
00:00:34se rend compte à un moment donné, quand on voit aussi des carrières, il y a besoin
00:00:40d'identifier du cinéma d'auteur, traditionnellement ce rôle a été dévolu du côté de l'industrie,
00:00:50du côté du festival de Cannes, et du coup la question c'est comment on existe, parce
00:00:55que c'est écrit, elles sont là pour rester, mais juste avant de rester, comment on commence
00:00:59à exister, comment on a une existence filmique, cinématographique, sans que les hauts lieux
00:01:09des institutions qui sont censées reconnaître le nouveau cinéma, qu'est-ce que c'est que
00:01:13le cinéma d'auteur, ne vous reconnaît pas, donc plus il y a des espaces différents qui
00:01:17vont reconnaître ces autrices, auteurs, plus on aura certainement aussi une pluralité
00:01:24de regards, donc merci aussi de mettre en valeur toutes ces réalisatrices, je pense
00:01:29que c'est un bon complément, là où il y aurait eu un oubli, pour des raisons diverses
00:01:36et variées, de différentes institutions, donc oui, ce moment d'échange est là aussi
00:01:42pour montrer à quel point il y a énormément de cohérence, il y a une voix qui est très
00:01:47forte à travers ces différents films, et même si l'intitulé est un cours, je ne
00:01:52suis pas professeur, je suis juste signifié, autant que vous j'imagine, et je me place
00:01:58aussi dans la situation de la personne qui a écrit sur les films, qui a vu tous ces
00:02:02films, qui est heureux de pouvoir les partager avec vous, mais je ne suis pas là pour vous
00:02:08donner la vérité sur le film, et surtout qu'il y a effectivement une personne dans
00:02:12la salle qui connaît beaucoup mieux le film, les tournages, les intentions, etc., et si
00:02:17elle le souhaite, elle pourra réagir à tout moment. Et je tiens aussi à préciser
00:02:23que ce que je dirais, c'est mon point de vue, ce n'est pas forcément celui de Blondine
00:02:29Lenoire, c'est un regard extérieur, donc je parle aussi en mon nom, et ensuite ce qui
00:02:35est intéressant, c'est le temps de cet échange aussi avec vous, c'est que s'il y a des doutes,
00:02:41s'il y a des incompréhensions, s'il y a des désaccords, n'hésitez pas, l'idée
00:02:46c'est qu'on puisse aussi échanger avec vous, donc j'ai bien le regard aussi sur
00:02:51vous pour qu'on puisse échanger aussi ensemble. Donc c'est juste pour vous dire, effectivement,
00:02:57on va nourrir ensemble la compréhension du film, et c'est vraiment très intéressant
00:03:02cette idée-là, c'est que j'aime bien la timologie du mot réaliser. Une réalisatrice
00:03:07effectivement c'est la personne qui fait le film, et j'aime bien l'idée que réaliser
00:03:12timologiquement c'est aussi prendre conscience, je réalise que vous êtes là, je prends conscience,
00:03:18et qui sont les dernières personnes à prendre conscience du film, c'est vous aussi le public,
00:03:25et c'est aussi là que c'est intéressant, c'est comment à un moment donné la réalisatrice
00:03:30qui a terminé son film lâche le film, ensuite le film vous appartient, il vous appartient
00:03:35dans vos interprétations, dans vos inspirations, dans vos choix de vie, et donc du coup c'est
00:03:41vous aussi, par ce geste aussi créatif du regard, qui allez devenir réalisateur, réalisatrice.
00:03:47Donc ça c'est aussi important pour que quand je vous dis ça, vous ayez aussi la légitimité
00:03:54aussi de poser votre regard à travers les films, à travers les idées qu'on va développer
00:03:59autour de cette cinématographie. Voilà le cadre. Donc je commence une petite présentation
00:04:05très rapide, j'imagine c'est pareil aussi, vous avez certainement aussi beaucoup d'informations
00:04:10sur Blandine Le Noir, et je vais commencer Blandine Le Noir avec une naissance tout d'abord
00:04:15en tant qu'actrice, une actrice bien particulière, c'est que le désir aussi de faire partie
00:04:21du cinéma il ne l'est pas tout à fait en tant que réalisatrice, tout à fait en tant
00:04:26qu'actrice, elle est devenue actrice dans le premier film de Gaspard Noé, Carné, et
00:04:34le casting était intéressant, c'est que Gaspard était intéressé par Blandine Le
00:04:39Noir parce qu'elle ne souhaitait pas forcément être actrice, mais plutôt être critique
00:04:44du cinéma, réalisatrice, et c'est ce désir là de cinéma qui fait que c'était le bon
00:04:49choix pour interpréter son rôle dans son film. Voilà, commence aussi cette histoire
00:04:57là, c'est intéressant, on est au début des années 90, on est précisément en 1990,
00:05:03et en 1990, Blandine Le Noir va traverser cette décennie en tant qu'actrice, elle va
00:05:08devenir réalisatrice, on est dans des décennies bien particulières, c'est 2000, commence
00:05:15son expérience en tant que réalisatrice avec un premier court-métrage. Il se trouve que
00:05:20les années 90, c'est aussi une décennie super intéressante pour la place des réalisatrices,
00:05:25il y a une nouvelle génération très intéressante, si je parle de Dominique Cabrera, Laurence
00:05:30Cabrera, Barbossa, Sylvie Veyreuil, d'ailleurs dans le court-métrage dans lequel Blandine
00:05:36Le Noir a joué, juste après le film de Gaspard Noé, donc il y a des liens qui se créent
00:05:42au fur et à mesure. J'oserais parler aussi d'Anne-Sophie Solvay-Ganspar, dans lequel
00:05:48Blandine Le Noir a joué dans O'Laker à la fin des années 90, donc il y a une rencontre
00:05:55qui se fait qui n'est pas anodin et peut-être qu'on peut imaginer que cette génération
00:05:59de réalisatrices ont été des femmes aussi inspiratrices pour que Blandine Le Noir devienne
00:06:05aussi réalisatrice. Ensuite, il y a la seconde période, l'autre décennie, les années
00:06:112000, où elle va enchaîner plusieurs courts-métrages, progressivement, où, et là encore une fois
00:06:19je tiens à mettre en valeur une autre institution qui court à l'heure actuelle, c'est le
00:06:25Festival de Clermont-Ferrand, qui a beaucoup accompagné, à une époque où des décisions
00:06:31politiques font qu'on coupe les budgets un petit peu partout, c'est bien de rappeler
00:06:36l'importance aussi d'un festival comme le Festival de Clermont-Ferrand, qui appuie,
00:06:41qui accompagne les films, et donc c'est aussi très important, autour de cette économie
00:06:49du court-métrage qui n'est pas forcément l'économie la plus aisée pour soutenir
00:06:55les films, que ces festivals-là effectivement existent. Donc ça c'était le point très
00:06:59important à dire. Je reviendrai aussi dans cette idée que dans les années 90, Blandine
00:07:06Le Noir est finalement accompagnée d'une nouvelle génération de réalisatrices. Blandine
00:07:11Le Noir a été touchée, elle est devenue, elle l'a souvent dit dans ses entretiens,
00:07:16par un film et une réalisatrice qui l'a beaucoup inspirée, on va le voir aussi dans
00:07:20sa filmographie à quel point elle est présente, c'est Agnès Varda avec le film Sur Antoine
00:07:25Lavoie. Avec une circonstance bien particulière, c'est que Blandine Le Noir n'avait pas forcément
00:07:32l'âge du sujet du film, il y a une découverte inattendue qui s'est faite, et elle s'est
00:07:36dit qu'il y avait quelque chose d'intéressant dans le cinéma, et aussi sur la question
00:07:40qui est très importante du point de vue des réalisatrices, c'est de se dire, il y
00:07:45a une réalisatrice qui le fait, donc il y a peut-être un espace de justimité, moi
00:07:49en tant que femme, pour aussi faire des films. Donc ça on reviendrait sur ces questions-là,
00:07:54et c'est aussi très important la question de légitimité, de montrer des choses pour
00:07:58qu'ensuite des choses se font. Et je pense qu'aussi c'est un sujet qui traverse aussi
00:08:03la filmographie de Blandine Le Noir, le fait de montrer des mouvements, de parler d'éducation
00:08:10sexuelle, des zouzous, de parler de différents sujets. J'allais être un petit peu brut
00:08:17en parlant dans le film, Maculot parlait de sodomie à sa fille, puisque c'est un des
00:08:23sujets, c'est pas évident, on peut en parler avec humour, et les choses ont lieu, et on
00:08:29dédramatise les choses, et ça devient possible. Donc parler, présenter les choses, c'est
00:08:34aussi une démarche très importante dans le cinéma de Blandine Le Noir. Et là où
00:08:39je veux en venir pour expliquer l'intitulé que j'ai choisi, chronologie au féminin pluriel,
00:08:45pour cette séance, mon idée forte aussi pour plonger dans le cinéma de Blandine Le Noir,
00:08:53c'est l'idée qu'il y a une possibilité de relecture de, j'oserais dire, l'histoire
00:08:59de l'humanité, ou du moins l'histoire récente, dans un monde où on nous explique que la
00:09:06culture est associée aux hommes, avec un mot qui me gêne beaucoup, et encore une fois
00:09:12c'est ma problématique à moi, c'est le mot patrimoine. Le mot patrimoine, étymologiquement,
00:09:18veut dire que la culture, les lieux de culture, étymologiquement, appartiennent aux hommes,
00:09:24Dominus pater, c'est la propriété des hommes. Ça veut dire qu'on voit, et j'ose
00:09:29être critique là-dessus, mais c'est juste un fait qu'on peut voir, le centre Pompidou,
00:09:35on voit que c'est Pompidou, homme de pouvoir, qui soutient les lieux de culture. La bibliothèque
00:09:41François Mitterrand, il y a d'autres endroits comme ça. Et si on se balade dans Paris,
00:09:45on va voir qu'il y a plein d'endroits, de statues, de noms de rues, beaucoup de noms
00:09:50de rues militaires, avec des noms d'hommes. Donc on est en train de vous expliquer que
00:09:54l'histoire de l'humanité, l'histoire qui fait qu'on a Paris aujourd'hui, la France
00:10:01d'aujourd'hui, a été construite par les hommes. Et cette autre histoire, que j'oserais
00:10:06appeler matrimoine, c'est pas mon invention, c'est utilisée par d'autres personnes, c'est
00:10:11autre type de lecture, une histoire qui n'a pas été consignée, écrite, parce que pendant
00:10:16très longtemps, qui écrivait du côté des historiens, il y a une majorité d'hommes,
00:10:20du côté du cinéma on revoit aussi une majorité d'hommes. Donc il y a énormément de sujets
00:10:26qui ont échappé. Et donc pour moi, l'idée que je disais chronologie ou féminin pluriel,
00:10:32c'est de réunir des voix de femmes pour raconter une histoire qu'on n'a pas encore entendue.
00:10:36Et là, c'est énormément flagrant, notamment dans le film Annick O'Learn. Dans ce film-là,
00:10:43sur la question de l'avortement, on associe le droit à l'avortement à la place du pouvoir,
00:10:49une femme, les politiques, les choses sont réglées. Et en plus, quand on associe Simone
00:10:55Veil à haute décision au-dessus d'elle, que serait le gouvernement de Chirac à l'époque
00:11:00ou le président Giscard, la femme pourrait être invisibilisée à ce moment-là. Ce que fait
00:11:07Blondine Lenoir avec le film Annick O'Learn, c'est de montrer la réalité sociale,
00:11:12l'organisation sociale d'énormément d'anonymes, même si pareil, émis en valeur Annick O'Learn,
00:11:21il y a un nom, d'ailleurs c'est un leitmotiv dans le cinéma, du moins dans les longs-métrages
00:11:27de Blondine Lenoir, la fonction éponyme, à chaque fois il y a un personnage qui est mis en valeur,
00:11:32que ce soit Zouzou, Aurore, Juliette ou Annie, ce sont des femmes, des anonymes, qui ne sont pas là pour
00:11:38imposer leur histoire, mais qui font, qui sont actifs pour que la société change.
00:11:43Donc ça c'est aussi une figure, un sens de lecture politique super intéressant,
00:11:50pour revenir sur l'histoire qu'on a l'habitude de nous compter, pour casser un petit peu
00:11:55cette image fixée, institutionnalisée à un moment donné, d'idée du patrimoine.
00:12:01Il y a autre chose, et c'est ce qui me tient à cœur, et c'est ce que je vais développer aussi avec vous aujourd'hui.
00:12:07Voilà un petit peu le cadre, est-ce qu'il y a des questions, des remarques, dès maintenant ?
00:12:12Sinon on va commencer. Je vais commencer, chronologiquement je vous ai dit qu'on était
00:12:19au début des années 2000, dès le départ c'est ce qui est intéressant, il y a une autre figure
00:12:24très forte aussi dans le cinéma de Blandine Lenoir, c'est l'idée de cohésion.
00:12:29Blandine Lenoir n'aime plus qu'on parle de sororité, depuis que c'est devenu une marque à vendre,
00:12:34mais il y a un espace effectivement de lien entre les personnes pour être créatif.
00:12:40Et demain il y aura une rencontre entre Blandine Lenoir, sa chef déco, sa chef costumière,
00:12:46et Bertrand Belin, le compositeur de la plupart, de presque tous les films de Blandine Lenoir.
00:12:54Et il se trouve que dès le film avec Marinette, dès ce premier court-métrage, il était là, Bertrand Belin,
00:13:01et d'ailleurs au festival de Clermont-Ferrand, il avait reçu le prix de la meilleure musique.
00:13:07Pour lui aussi, c'était le début dans la musique, et il se trouve que Blandine Lenoir va s'associer
00:13:13à beaucoup de personnes, on retrouve des noms, vous allez voir aussi si vous avez déjà vu plusieurs films de Blandine Lenoir,
00:13:19devant la caméra vous allez voir beaucoup de visages connus, avec différents rôles, il y a toute une troupe,
00:13:24même si on n'est pas chez Robert Guédiguiant avec la troupe qui revient systématiquement,
00:13:30il y a des rôles qui changent, c'est-à-dire que l'actrice la plus explicitement bien vue,
00:13:38ce serait Laura Kalemi qui est présente dans Zouzou, dans le film Aurore, elle est présente,
00:13:44mais un personnage vraiment périphérique, et on la retrouve dans Anne Nicolaire,
00:13:49il y a plein d'autres actrices comme ça, si je parle de Florence Muller, on la retrouve dans une séquence extraordinaire,
00:13:57on va le voir aussi dans un extrait, dans Aurore, alors qu'elle a un rôle plus important dans Zouzou.
00:14:04Donc ça c'est des liens aussi qui font que les films puissent se faire, parce qu'il y a une sorte de famille,
00:14:10de cinéma, qui vont pouvoir faire des films aussi ensemble.
00:14:14Voilà pour le moment, sans plus tarder, je vais commencer par un premier extrait,
00:14:20l'extrait numéro 1, c'est notre classification, nécronologique, c'est le film Bonjour l'abbé,
00:14:28au niveau de la durée, il y a une progression, on passe du court-métrage au moyen-métrage,
00:14:34ce qui permettra au film d'être sélectionné officiel de brive,
00:14:38il y a une reconnaissance déjà des institutions, puisque le film sera nominé au César,
00:14:44et j'ai choisi ce film-là, avec une séquence bien particulière,
00:14:48c'est que ce film, il a adapté des textes, des correspondances,
00:14:55entre des chrétiens, des catholiques de l'époque, à l'abbé Jean Viollet,
00:15:03qui avait une revue qui permettait de parler d'énormément de sujets, notamment la sexualité.
00:15:08Et donc Blandine Lenoir, dans sa démarche, a collecté ces textes-là,
00:15:13elle les a fait jouer par différents acteurs, actrices, et quand on voit tout le film,
00:15:18on voit justement toute la famille d'acteurs, d'actrices de Blandine Lenoir,
00:15:22que ce soit masculin ou féminin, masculin on retrouve Philippe Robaud,
00:15:26il y a Anaïs Demoustier qui était dans son film précédent, Ma culotte,
00:15:31on trouve cette famille-là, et une actrice que vous allez découvrir là,
00:15:36et qui est sur quasiment tous les films de Blandine Lenoir,
00:15:40il y a un attachement très fort, c'est Nanou Garcia,
00:15:43donc je vous invite à découvrir cet extrait-là, Monsieur l'abbé avec Nanou Garcia.
00:16:11Pour éviter que ces enfants ne se conduisent mal, ou ne s'exposent à perdre leur âme,
00:16:15faudra-t-il que chaque année, ils voient leur famille s'accroître d'un bébé,
00:16:18et ce pendant vingt ou trente ans ?
00:16:20Vous répondez à cela, ils n'ont qu'à observer la continence.
00:16:24Bien. Et puisque justement, ils se marient parce qu'ils ne savent pas rester tranquilles,
00:16:29leur tempérament est ainsi, que voulez-vous qu'ils fassent ?
00:16:32Qu'ils aillent ailleurs ? Leur faute serait-elle moins grave ?
00:16:36Donnez-nous un moyen de tout concilier et de grâce,
00:16:39que Dieu n'en soit pas offensé.
00:16:42Combien et combien de familles profondément chrétiennes sont dans la désolation de ne savoir que faire,
00:16:46et voient leur femme, leur fils, s'éloigner de Dieu à cause de cette question ?
00:16:52Que pensez-vous des familles nombreuses, Monsieur l'abbé ?
00:16:55Quand on les regarde de loin, c'est merveilleux, et digne de louanges et d'intérêts,
00:16:58mais vu de près, c'est profondément triste, dans quelque situation qu'on soit.
00:17:03Une exception pourrait être faite en faveur des grandes fortunes,
00:17:07mais celle-ci ne risque rien, elle ne se multiplie pas.
00:17:14Dans ce moyen-métrage, vous avez une succession de témoignages.
00:17:18Ce qui est intéressant, là il y a un parti pris très fort,
00:17:22c'est aussi au niveau de la mise en scène,
00:17:25vous voyez qu'il y a une succession, juste un montage de deux séquences,
00:17:29avec un rapprochement du personnage.
00:17:31Le personnage est contraint par rapport à une table devant elle,
00:17:36on voit sa fonction, on peut imaginer qu'elle est couturière.
00:17:39Il y a seulement le principe de la mise en scène,
00:17:42pour une caméra qui sera fixe, et vraiment concentrée à l'essentiel.
00:17:48On comprend la personne, on est concentré sur sa parole.
00:17:51Et là où je veux en venir sur le côté politique,
00:17:54l'histoire qu'on n'a pas entendue, ces personnes anonymes
00:17:57qui ont laissé trace dans l'histoire, il faut aller chercher ces textes-là,
00:18:01dans ce film, on y a accès.
00:18:04C'est pour ça aussi que je propose la lecture du cinéma de Blandine Lenoir,
00:18:08comme une relecture, comme une réappropriation d'une histoire
00:18:12qui a été volée, qui a été confisquée, qui a été monopolisée à un moment donné
00:18:15par certains hommes.
00:18:17Cette information, c'est d'autant plus intéressant,
00:18:19on pourrait très bien faire un lien direct entre ce film-là et Annick Colère.
00:18:26Annick Colère, Blandine Lenoir, c'est inspiré d'une thèse
00:18:29qui a été faite sur le MLAC.
00:18:31Pareil, une histoire qui n'est pas dans les livres d'histoire.
00:18:34Pour faire connaître concrètement, puisque les films sont médiatisés,
00:18:39sont rendus au public, ils vous rencontrent,
00:18:42il y a une possibilité en permanence, à travers ces films-là,
00:18:45d'avoir accès à une histoire qu'on n'a pas connue,
00:18:48qu'on ne trouvera pas ailleurs.
00:18:50Parce qu'effectivement, qui lit les thèses ?
00:18:53Blandine Lenoir, pour un concours de circonstances,
00:18:56elle s'est retrouvée avec cette thèse qu'elle a pu lire.
00:19:00Il y avait en matière énormément d'histoire.
00:19:03Et à partir de là, est né un film.
00:19:05Ce qui est intéressant, c'est vraiment cette démarche
00:19:08qui est proche d'un anthropologue, d'un historien,
00:19:11d'aller chercher les informations,
00:19:13pour nourrir vraiment une matière filmique, le cinéma.
00:19:17C'est en ce sens-là que le cinéma aussi fait histoire.
00:19:20Et ce n'est pas anodin, parce que je pense que c'est une nouvelle lecture
00:19:23quand on pense au pouvoir cinématographique qu'ont les Etats-Unis.
00:19:28Quand on voit toute l'histoire du cinéma américain,
00:19:31on se rend compte que la vision qu'ont les Américains,
00:19:36et nous-mêmes, à l'extérieur de l'histoire des Amériques,
00:19:39elle est liée aussi, elle est traversée à travers le cinéma.
00:19:42C'est-à-dire juste le principe du genre filmique qu'est le western.
00:19:48Le western, on peut voir ça comme un énorme propagande
00:19:52pour justifier la colonisation et les massacres et le génocide
00:19:55qui a eu lieu aux Etats-Unis.
00:19:57Donc le cinéma n'est pas anodin dans notre vision,
00:19:59notre perception de l'histoire.
00:20:01Et c'est en ce sens-là aussi que ce que fait Blandine Lenoir
00:20:05à travers son cinéma, c'est aussi une relecture,
00:20:08une nouvelle proposition.
00:20:10Donc ça, c'est un geste fort à cet endroit-là,
00:20:13qui est vraiment précis sur ce qui est transmis,
00:20:16et vous pourrez parler aussi avec elle, ce qui est lu.
00:20:20Donc il y a un travail des acteurs, des actrices,
00:20:23pour incarner cette parole,
00:20:26mais ce sont des textes qui sont sourcés,
00:20:30qui sont vrais.
00:20:32De la même manière que ce qui vous est montré à Nicolaire,
00:20:36la méthode Carman, elle est expliquée,
00:20:38il y a un côté aussi pédagogique,
00:20:40il y a un côté effectivement livre d'histoire alternatif.
00:20:43Et c'est ça qui est aussi intéressant dans le cinéma de Blandine Lenoir,
00:20:48même à des endroits qui peuvent vous surprendre,
00:20:51qui s'y prêteraient peut-être le moins,
00:20:53peut-être on en reparlera aussi après,
00:20:55dans son dernier film, Juliette au printemps.
00:20:57Je pense qu'en permanence, on peut retrouver effectivement
00:21:00cette envie de proposer un autre regard sur l'histoire.
00:21:04Et ce regard sur l'histoire n'est pas anodin,
00:21:06c'est parce qu'il y a une histoire
00:21:09qu'on impose aussi des règles.
00:21:11Et là, revenir là-dessus, quand on recherche un petit peu,
00:21:14je vous ai dit que les témoignages qui sont dans ce moyen-métrage,
00:21:18ce sont des témoignages qui datent de 1924 à 1943.
00:21:22On voit celui-ci, il date de 1931.
00:21:24Ça nous rappelle que l'interdiction de l'avortement,
00:21:28toutes ces lois aussi répressives,
00:21:31contre aussi la contraception,
00:21:33datent de la fin aussi en France de la première guerre,
00:21:37dans une logique de repousser la totalité, etc.
00:21:40On se retrouve dans ce contexte-là.
00:21:42Et donc du coup, pareil, ce film-là nous invite à s'interroger
00:21:46qu'est-ce qui s'est passé à cet endroit-là ?
00:21:48Quel est le contexte qui fait qu'il y a des lois répressives, liberticides,
00:21:53où la moitié de la population, les femmes,
00:21:56sont mises de côté dans leur rôle dans la citoyenneté ?
00:22:01C'est une lecture effectivement qui est possible grâce à ce cinéma.
00:22:05C'est quelque chose qu'on a tendance aussi à oublier,
00:22:08et ça permet aussi de montrer que le cinéma,
00:22:11c'est un espace aussi populaire
00:22:13pour comprendre ce qui se passe autour de nous.
00:22:16Là je parle par exemple de la place des femmes dans l'histoire en France,
00:22:22mais c'est aussi au niveau géopolitique,
00:22:24c'est aussi un regard sur le monde entier.
00:22:27Donc le rôle du cinéma n'est pas anodin,
00:22:29c'est pour ça qu'en permanence, les regards qu'on a dessus,
00:22:32les critiques qu'on peut avoir sur les visions que tel film nous donne
00:22:36sur le monde, sur la place des gens, n'est jamais anodin.
00:22:39Donc c'est toujours très intéressant aussi de revenir dessus,
00:22:42quels sont les clichés qui sont véhiculés là-dessus.
00:22:45Voilà pour ça, pour cette séquence.
00:22:49Ce que je tiens aussi à mettre en valeur à ce moment-là,
00:22:53avec ce moyen-métrage, qui va être encore très présent,
00:22:58qui va nourrir beaucoup le cinéma plus tard
00:23:01dans les longs-métrages de Blondie Lenoir,
00:23:03c'est l'importance du dialogue.
00:23:05Elle accorde beaucoup de temps au dialogue,
00:23:08c'est des dialogues qui sont très écrits,
00:23:11et c'est très intéressant, vous allez le voir sur les films suivants,
00:23:14comment aussi chaque interprète va se réapprier à travers son corps
00:23:19ses paroles.
00:23:20C'est pas une parole qui est pésante,
00:23:23qui fait que le corps s'efface presque face au poids de la parole,
00:23:27le corps est très présent.
00:23:29Et là, dans cette tradition-là, j'oserais dire
00:23:31qu'il y a une grande différence, pour moi,
00:23:33entre la parole chez Woody Allen, voire même chez Eric Rohmer,
00:23:37où peut-être que les corps sont presque effacés,
00:23:40là, il y a une incarnation des corps qui est très importante.
00:23:43Et quand on sait que les corps, c'est aussi une matière politique,
00:23:46on va le voir dans le reste d'autres extraits,
00:23:50dans la filmographie de Blondie Lenoir,
00:23:52le corps est effectivement politique,
00:23:54et sur la question de l'avortement notamment, de la sexualité,
00:23:57c'est pas non plus aussi anodin de représenter aussi les corps.
00:24:01Pour la petite histoire, j'essaie aussi de comprendre ça,
00:24:05encore une fois, c'est ma vision.
00:24:07Je me dis, ce film-là, nominé au César,
00:24:11l'industrie se dit, ah tiens, il y a une réalisatrice qui est super intéressante.
00:24:14Pour moi, c'est comme s'il y avait besoin
00:24:16qu'il y ait une sanctification, un espace,
00:24:19si le César s'y intéresse, elle existe.
00:24:21Ça, encore une fois, vous pourrez en parler directement,
00:24:24avec Blondie Lenoir,
00:24:26mais j'ai l'impression qu'il y a un fonctionnement aussi,
00:24:28dans l'industrie du cinéma,
00:24:30à partir du moment où il y a une reconnaissance de l'industrie,
00:24:32certains points clés,
00:24:34il y a des choses qui sont possibles.
00:24:36Et donc, après, va venir, effectivement,
00:24:38son premier film, Zouzou.
00:24:40Et Zouzou, on va commencer,
00:24:42vous allez le découvrir,
00:24:44vous allez voir, c'est une scène sans paroles,
00:24:47mais pour moi, qui dit beaucoup de choses,
00:24:49et je vous invite à aller voir.
00:24:51Mais pour moi, qui dit beaucoup de choses,
00:24:53et je vous invite à découvrir
00:24:55la première scène d'ouverture du film Zouzou.
00:25:21...
00:25:51C'est lourd !
00:25:53On est en 2014,
00:25:55donc déjà une décennie,
00:25:57et là, je voulais commencer là-dessus.
00:25:59Ce qui est intéressant, c'est que
00:26:01c'est un moment sans paroles,
00:26:03et d'ailleurs, la complicité
00:26:05avec Bertrand Belin,
00:26:07le compositeur de ces musiques,
00:26:09est déjà très présente.
00:26:11Il y a une ouverture, effectivement, avec de la musique,
00:26:13et d'ailleurs, c'est la musique qui va déjà donner une tonalité.
00:26:15Même pour les personnes qui n'ont pas vu le film,
00:26:18on sent déjà qu'il y a une possibilité,
00:26:20effectivement, d'humour.
00:26:22La comédie, elle émerge déjà à cet endroit-là.
00:26:24Et ce que je voulais montrer là-dessus,
00:26:26il y a beaucoup de choses qui sont dites,
00:26:29et là, je voulais revenir sur l'importance aussi politique du corps.
00:26:32Le premier corps qu'on voit,
00:26:34c'est une femme, et c'est le corps de la mère,
00:26:37et on va voir que
00:26:39la première image
00:26:41où Blandi Lenoir commence le cinéma,
00:26:44est incarnée par une mère.
00:26:46Il se trouve que la mère, c'est la thématique qui va traverser
00:26:49aussi le cinéma de Blandi Lenoir,
00:26:51avec une interrogation à chaque fois.
00:26:53C'est pareil, c'est une piste de lecture.
00:26:55Si vous prenez chacun des films de Blandi Lenoir,
00:26:57vous pouvez toujours vous intéresser
00:26:59à ce que ça signifie d'être mère.
00:27:02Et à chaque fois, vous aurez des interrogations différentes.
00:27:05Juliette a été présentée hier soir, ici ?
00:27:09Non, pas encore ?
00:27:11Alors, il y a une question, c'est pareil.
00:27:13Ça peut être surprenant,
00:27:15le rôle de la mère,
00:27:17à un moment donné, il y a une image clé,
00:27:19je ne vais pas trop vous dévoiler le film Juliette,
00:27:21mais je cherchais, je me suis dit,
00:27:23comment le personnage principal,
00:27:25incarné par Isaïe Gelin, a un rapport avec la mère.
00:27:27Et là, il y a le secret
00:27:29qui est donné à un moment donné,
00:27:31où elle tient un bébé dans une discothèque.
00:27:34Et donc, on voit à un moment donné,
00:27:36le rapport à la mère traverse les différents personnages
00:27:39du film.
00:27:41Comme on l'a vu au film à Nicolaire,
00:27:43la question de l'avortement, c'est aussi le droit
00:27:45de ne pas être mère.
00:27:47Donc la question de, c'est en ce sens-là aussi,
00:27:49être mère, comme fonction,
00:27:51comme identité aussi sociale,
00:27:53n'est pas non plus anodine.
00:27:55D'ailleurs, l'une des rares fois
00:27:59où Blondie Lenoir se donne un rôle important
00:28:01en tant qu'actrice dans sa propre filmographie,
00:28:04c'est dans le court-métrage Rosa.
00:28:06Je dis que c'est un des rôles les plus importants,
00:28:08mais à chaque fois, effectivement,
00:28:10elle a un rôle aux autres actrices.
00:28:12Donc elle, elle a eu le fil rouge,
00:28:14elle joue un personnage qui est très proche
00:28:16de sa propre histoire,
00:28:18étant une jeune mère,
00:28:20et elle doit trouver quelqu'un
00:28:22qui garde ses enfants.
00:28:24Et elle voit toutes les problématiques,
00:28:26à quel point c'est difficile d'être mère,
00:28:28d'avoir une activité professionnelle dedans.
00:28:30Donc on voit, la question de la mère
00:28:32traverse vraiment toute sa filmographie,
00:28:35que Blondie Lenoir utilise son propre corps
00:28:38dans ses propres films ou non.
00:28:40C'est en ce sens-là que, pour moi,
00:28:42il y a des questions qui sont profondes,
00:28:44et elles sont annoncées dès le départ.
00:28:46Et le corps de la mère,
00:28:48on va voir que dans ce film-là,
00:28:50va questionner beaucoup.
00:28:52Cette mère qui va tomber amoureuse,
00:28:56qui a une autre histoire,
00:28:58qui affirme une sexualité implicitement,
00:29:00comme ce sera aussi questionné dans Aurore,
00:29:04ça créera une problématique
00:29:06du côté des enfants,
00:29:08qui n'ont pas envie de voir
00:29:10l'association mère
00:29:12et femme épanouie sexuellement.
00:29:16Et c'est toute cette ambiguïté-là
00:29:18qui est traversée dans ce rapport à la mère.
00:29:20Et ce que je voulais montrer,
00:29:22dans cet extrait,
00:29:24c'est que toutes les choses sont expliquées
00:29:26sans paroles,
00:29:28les paroles viendront après,
00:29:30mais la première émergence,
00:29:32c'est que le corps explique et exprime
00:29:34beaucoup de choses.
00:29:36Et tous ces personnages dans l'eau,
00:29:38c'est parce que la mère fait un petit écart,
00:29:40qu'on voit toutes ces filles,
00:29:42donc l'association est peut-être aussi facile
00:29:46de se dire, bon, la mère qui se dégage,
00:29:48il y a tous ces personnages-là,
00:29:50toutes ces filles qui seraient
00:29:52comme dans son liquide amniotique,
00:29:54là-dedans, qui vont sortir de l'eau,
00:29:56qui vont naître,
00:29:58et l'histoire va pouvoir commencer.
00:30:00Et l'histoire de notre vie, c'est ça aussi,
00:30:02quitter les eaux de sa mère
00:30:04pour pouvoir découvrir la lumière,
00:30:06la lumière du cinéma,
00:30:08pour exister au monde.
00:30:10Une autre chose aussi que j'aime bien,
00:30:12et qui est pour moi très représentatif
00:30:14de l'envie aussi très démocratique
00:30:16du cinéma de Blandine Lenoir,
00:30:18c'est une envie aussi d'être chorale.
00:30:20Et pareil,
00:30:22il y a une éthique très forte pour moi
00:30:24dans Annick Oller,
00:30:26c'est que même si une héroïne
00:30:28donne son nom au film,
00:30:30elle n'a pas un prétexte
00:30:32pour rencontrer un groupe de personnes.
00:30:34Et là, vous voyez dans ce film,
00:30:36à ce moment-là, leur calamis
00:30:38n'était pas aussi connu qu'elle l'est maintenant.
00:30:40En revanche,
00:30:42elle est là, parmi d'autres,
00:30:44et dans le film,
00:30:46quand on va suivre les différents personnages,
00:30:48on va voir que c'est difficile de dire
00:30:50qu'il y a un personnage principal.
00:30:52C'est en ce sens-là aussi
00:30:54qu'il y a un film chorale.
00:30:56Pour moi, c'est un geste politique aussi très fort,
00:30:58c'est de dire qu'il n'y a pas
00:31:00un personnage
00:31:02qui va vous donner la vérité sur le monde.
00:31:04Et c'est très intéressant,
00:31:06parce que même dans ce film,
00:31:08à un moment donné,
00:31:10il pourrait y avoir un personnage,
00:31:12un méchant,
00:31:14qui est joué par Olivier Rochot,
00:31:16qui joue le rôle de Jean-Claude,
00:31:18qui est homophobe,
00:31:20hyper conservateur,
00:31:22qui a des idées sur tout,
00:31:24qui est l'amoureux de la mère.
00:31:26Et le méchant, à un moment donné,
00:31:28son regard devient...
00:31:30on a de l'empathie pour lui.
00:31:32Et c'est là où aussi
00:31:34ce cinéma-là,
00:31:36de Blandine le Noir,
00:31:38vient casser le côté manichéiste,
00:31:40et avec cette confiance
00:31:42qu'il y a une parole.
00:31:44Il faut écouter chaque personnage
00:31:46pour comprendre un ensemble
00:31:48très complexe de l'histoire.
00:31:50Même le personnage joué par Lord Calamy,
00:31:52qui est la plus ouverte,
00:31:54au niveau de l'apprentissage de la sexualité,
00:31:56alors que ça pourrait
00:31:58poser beaucoup plus de problèmes
00:32:00chez ses deux sœurs,
00:32:02à certains moments, on voit qu'elle se trompe.
00:32:04Et donc, c'est encore une fois
00:32:06quelque chose qui est très important
00:32:08aussi dans cette philosophie,
00:32:10dans la vision de la société qu'on voit
00:32:12dans la filmographie de Blandine le Noir,
00:32:14c'est le fait qu'il faut
00:32:16faire confiance à un groupe de personnes.
00:32:18Et pour moi, c'est encore très fort
00:32:20dans Annick Hollère, c'est que
00:32:22les lois changent, c'est pas seulement
00:32:24parce qu'il y a des personnes au pouvoir,
00:32:26individualisées, c'est parce qu'il y a
00:32:28un groupe de personnes qui sont ensemble, qui font avancer
00:32:30les choses. Vous allez voir aussi
00:32:32dans l'extrait que je présente très près à Annick Hollère,
00:32:34le moment notamment
00:32:36d'un avortement, avec la méthode
00:32:38Karman, c'est un moment
00:32:40qui est collectif.
00:32:42Et si ça peut
00:32:44bien se passer, c'est parce qu'il y a
00:32:46le collectif. Donc la notion de collectif
00:32:48est très présente dans les histoires,
00:32:50mais aussi derrière la caméra.
00:32:52J'insiste là-dessus, dans ce que je disais
00:32:54tout à l'heure, on retrouve beaucoup de collaborations.
00:32:56Bertrand Belin va vraiment accompagner
00:32:58toute la filmographie de
00:33:00Blandine le Noir, mais aussi
00:33:02une monteuse,
00:33:04c'est pas anodin qu'une chef-costumière
00:33:06ait aussi une chef-déco.
00:33:08Et là à présent, il y a des complicités
00:33:10qui se créent, qui fait qu'on
00:33:12peut continuer à travailler aussi ensemble.
00:33:14Je pense que c'est un climat très important,
00:33:16qui fait que d'ailleurs
00:33:18c'est Zouzou
00:33:20et Annie Colère qui sont produits
00:33:22par Nicolas Brévière,
00:33:24le même producteur, et Aurore
00:33:26et Juliette au printemps, c'est aussi
00:33:28une autre société de production. Donc il y a une continuité,
00:33:30et je pense que c'est un espace aussi
00:33:32qui est très important, qui fait que
00:33:34pour Blandine le Noir, le cinéma
00:33:36peut se faire parce qu'il y a
00:33:38une écoute, une confiance
00:33:40des uns et des autres pour que ce type de cinéma
00:33:42puisse exister.
00:33:44Une autre chose que je vais ajouter aussi
00:33:46sur
00:33:48la proposition
00:33:50de ce film,
00:33:52j'en ai pas encore parlé, mais ça me tient aussi à cœur,
00:33:54c'est cette volonté aussi
00:33:56pour les longs métrages, de sortir
00:33:58de la réalité
00:34:00parisienne. On est à Paris,
00:34:02je suis venu jusqu'à vous,
00:34:04j'ai fait des kilomètres jusqu'à vous pour vous présenter
00:34:06ici, ce qu'on pourrait
00:34:08pour vous présenter et
00:34:10communiquer avec vous autour du cinéma
00:34:12de Blandine le Noir, ce qui fait
00:34:14que l'accès à la culture
00:34:16est souvent très associé
00:34:18à la capitale.
00:34:20Donc c'est ici, sauf que Blandine le Noir
00:34:22pour comprendre la société, va la chercher
00:34:24ailleurs. Et tous les
00:34:26films, tous les longs métrages de Blandine le Noir
00:34:28sont faits à l'extérieur.
00:34:30Que ce soit celui-ci, là on est
00:34:32en Charente,
00:34:34pour Zouzou, ensuite pour
00:34:36Aurore on sera à La Rochelle,
00:34:38on va aller
00:34:40en Seine-et-Marne
00:34:42à Nicolaire, et ensuite
00:34:44dans l'Ain pour Juliette.
00:34:46Donc il y a aussi une réalité que m'expliquait
00:34:48Blandine le Noir, c'est que pour
00:34:50représenter une classe sociale,
00:34:52cette classe sociale-là qui est
00:34:54souvent représentée dans ces films, c'est plus
00:34:56compliqué, ce sera une autre histoire
00:34:58représentée dans Paris. Par exemple,
00:35:00le mouvement M'Lac dans Paris,
00:35:02on touchera une autre classe sociale
00:35:04plus aisée. Donc
00:35:06la volonté aussi dans ce cinéma
00:35:08c'est de montrer un autre type
00:35:10d'histoires, et encore une fois
00:35:12pour moi, les histoires
00:35:14des personnes qui n'ont pas
00:35:16accès à la parole, qu'on ne met pas en valeur.
00:35:18Et c'est d'autant plus intéressant
00:35:20qu'à chaque fois
00:35:22il y a une autre géographie.
00:35:24Donc j'aurais pu aussi intituler cette séance
00:35:26Les géographies, aussi
00:35:28au féminin pluriel, parce qu'il y a d'autres
00:35:30voies qui sont mises en valeur.
00:35:32Je vais vous présenter
00:35:34un autre extrait, je voulais vous montrer
00:35:36dans le cinéma de Blandine le Noir,
00:35:38effectivement il y a la réalité,
00:35:40mais il y a des moments aussi qui dépassent la réalité,
00:35:42on est dans l'onirisme.
00:35:44Je vous présente
00:35:46ce second
00:35:48extrait du même film Zouzou.
00:36:08Zouzou
00:36:38Zouzou
00:36:40Zouzou
00:36:42Zouzou
00:36:44Zouzou
00:36:46Zouzou
00:36:48Zouzou
00:36:50Zouzou
00:36:52Zouzou
00:36:54Zouzou
00:36:56Zouzou
00:36:58Zouzou
00:37:00J'aime bien aussi cette séquence-là
00:37:02parce qu'il y a aussi la concentrée
00:37:04de l'humour propre au cinéma de
00:37:06Blandine le Noir, c'est-à-dire qu'on aborde
00:37:08des sujets vraiment très forts, très éminemment
00:37:10politiques, et on
00:37:12peut aussi se permettre d'utiliser l'humour.
00:37:14D'ailleurs, l'humour est la
00:37:16ressource aussi pour
00:37:18questionner le monde.
00:37:20Parce que si
00:37:22on est dans une autre dynamique,
00:37:24je pense qu'on pourrait être dans une autre dynamique
00:37:26dramatique à culpabiliser
00:37:28les personnes. Là, l'humour
00:37:30permet un petit décalage
00:37:32qui est très important, que j'associerais
00:37:34dans une tradition proche
00:37:36aussi de Billy Wilder. Billy Wilder a
00:37:38des textes qui sont très développés,
00:37:40et qui vont aussi en permanence
00:37:42dans la logique aussi du cinéma
00:37:44très
00:37:46très surveillé
00:37:48de l'industrie du cinéma, où
00:37:50les questions de genre, etc., ce n'était pas
00:37:52possible. On ne peut pas
00:37:54exprimer au premier plan, donc il faut
00:37:56utiliser l'humour pour
00:37:58toucher les sujets de fond
00:38:00très profond. Et là, je donne juste
00:38:02l'exemple de certains lame shows
00:38:04où on peut parler d'homosexualité
00:38:06cachée, parce que l'humour
00:38:08c'est aussi une manière de dire
00:38:10mais c'est inoffensif.
00:38:12Alors que si le même sujet, on le
00:38:14traite à travers le drame,
00:38:16on est d'autant plus surveillé. Et je pense,
00:38:18c'est pareil, c'est mon hypothèse,
00:38:20que
00:38:22cette volonté d'affirmer aussi de l'humour
00:38:24a pu fermer aussi
00:38:26des cases. Dans une
00:38:28vision aussi française,
00:38:30encore une fois, c'est mon regard
00:38:32critique que je peux avoir sur le festival de Cannes,
00:38:34où la place aussi
00:38:36du développement de l'humour, ce n'est pas
00:38:38si simple. Je vous mets au défi
00:38:40de trouver beaucoup de comédies
00:38:42dans les palmes d'or. Quand vous
00:38:44êtes réalisatrice, en plus vous faites des comédies,
00:38:46c'est encore plus, et en plus vous avez des sujets politiques
00:38:48qui ne font pas consensus,
00:38:50c'est compliqué d'entrer
00:38:52dans l'industrie du cinéma.
00:38:54Donc la comédie, c'est un gros enjeu encore une fois,
00:38:56de ce côté-là aussi politique.
00:38:58J'aime bien cette idée aussi que la comédie,
00:39:00c'est faire aussi respirer
00:39:02le corps.
00:39:04Vous-même, spectateur,
00:39:06spectatrice, vous êtes dans une salle,
00:39:08le moment où vous commencez à rire,
00:39:10c'est comme si le corps se réveillait,
00:39:12on se disait, ah, on est
00:39:14pris par des soubresauts,
00:39:16et c'est rappeler aussi qu'on a
00:39:18un corps. Et encore une fois, dans cette idée que
00:39:20le corps est éminemment politique.
00:39:22Ce que je vais
00:39:24montrer là-dedans aussi, dans cette séquence,
00:39:26c'est que cette capacité
00:39:28dans un cinéma
00:39:30qui est éminemment
00:39:32riche de dialogue, extrêmement
00:39:34travaillé, il y a une possibilité
00:39:36aussi d'avoir des moments comme ça
00:39:38où juste les corps ont
00:39:40beaucoup de choses à dire. Et là, dans ce
00:39:42film, dans cette séquence aussi-là,
00:39:44j'aime beaucoup cette idée de
00:39:46j'allais dire encore de
00:39:48sororité, de l'espace féminin
00:39:50qui est protégé, comment un homme arrive à cet endroit-là
00:39:52de manière aussi burlesque à cet endroit-là.
00:39:54Ce que là, vous avez bien compris,
00:39:56le personnage qui arrive, c'est
00:39:58le malheureux amant
00:40:00de la mère qui arrive à cet endroit-là.
00:40:02Et d'ailleurs, cette séquence-là,
00:40:04Onirik et tout, reviendra aussi
00:40:06dans le film Aurore,
00:40:08son film suivant. Et c'est intéressant
00:40:10de voir aussi, dans un cinéma
00:40:12qui est très travaillé par la réalité sociale,
00:40:14il y a des moments où
00:40:16on échappe à la réalité immédiate.
00:40:18L'onirisme aussi,
00:40:20c'est aussi important pour nourrir
00:40:22les différents personnages. Pour moi, c'est un petit peu
00:40:24proche aussi, ça peut être proche aussi
00:40:26de l'idée aussi d'utopie.
00:40:28C'est-à-dire que les personnages de ces films ont besoin
00:40:30aussi d'avancer parce qu'ils sont
00:40:32habités par l'utopie.
00:40:34Là, on voit cet endroit-là,
00:40:36c'est extrêmement clair.
00:40:38Si vous n'avez pas vu le film, on voit
00:40:40le conflit qu'il y a entre la mère
00:40:42qui aimerait être autre chose
00:40:44qu'une mère, parce que
00:40:46ces filles qui arrivent, elles sont bien
00:40:48dans ce cocon, dans ce foyer
00:40:50et en même temps, cette approche-là
00:40:52peut être aussi étouffante
00:40:54quand cette femme-là, cette mère
00:40:56veut être autre chose qu'une mère pour ses enfants.
00:40:58Elle veut laisser de la place pour une autre vie,
00:41:00pour une autre sexualité
00:41:02avec cet homme.
00:41:04Je pense que cette séquence résume
00:41:06beaucoup de différents conflits qu'il y a
00:41:08dans l'histoire aussi
00:41:10de ce film. Plus une autre référence
00:41:12aussi, pour
00:41:14cette séquence-là, Blondie Leonard me parlait
00:41:16d'une référence à la peinture flamande
00:41:18aussi, ces mouvements-là,
00:41:20cette sacralité aussi, c'est là aussi intéressant
00:41:22dans ce cinéma,
00:41:24dans ces longs-métrages,
00:41:26où il est question des choses très concrètes,
00:41:28très terrestres, très laïques.
00:41:30Il y a des références
00:41:32aussi, effectivement, qui sont
00:41:34sacrées. La mère,
00:41:36elle devient une icône
00:41:38et c'est peut-être ça aussi la problématique
00:41:40qu'il y a dans un monde aussi patriarcal,
00:41:42sanctifier des
00:41:44personnages, des femmes,
00:41:46pour leur enlever aussi un certain pouvoir.
00:41:48Donc c'est ce côté
00:41:50un petit peu aussi vicieux aussi,
00:41:52de sanctifier pour
00:41:54fixer
00:41:56le rôle d'un personnage,
00:41:58notamment des femmes.
00:42:00Donc là, tout est résumé aussi dans
00:42:02cette séquence.
00:42:04Je vais enchaîner aussi avec une autre
00:42:06séquence. Donc là, vous voyez, dans ce
00:42:08film-là, vous avez le
00:42:10personnage de droite, une des filles, qui a été jouée
00:42:12par Florence Muller.
00:42:14Vous allez retrouver dans un autre contexte,
00:42:16un autre contexte,
00:42:18le film Aurore.
00:42:20Le film Aurore, c'est intéressant aussi
00:42:22parce que c'est le film qui va avoir
00:42:24un énorme succès. Et pareil,
00:42:26aussi, ça c'est un
00:42:28constat et c'est une
00:42:30discussion que j'ai eue aussi avec Blondine Lenoir,
00:42:32cette idée que, quand on
00:42:34me dit, j'ai pu continuer à faire des films
00:42:36parce que j'ai eu la chance à un moment donné
00:42:38que mes films fonctionnent et aient du succès.
00:42:40Aurore aura beaucoup de succès,
00:42:42ça va lui permettre aussi de continuer.
00:42:44Alors que ses films, pour l'instant,
00:42:46ne sont pas encore validés
00:42:48par le label, notamment
00:42:50de Cannes et d'autres prix.
00:42:52Mais elle peut continuer à exister
00:42:54parce qu'il y a une rencontre avec le public.
00:42:56Petite parenthèse, quand le film
00:42:58sort en 2017, il rencontre un public.
00:43:00Il y a une récupération aussi
00:43:02à cet endroit-là. Cannes
00:43:04va implicitement reconnaître
00:43:06ce succès en
00:43:08offrant la place
00:43:10de jury à
00:43:12Annet Jaoui dans son jury
00:43:14à cette époque-là, en 2017.
00:43:16Cannes reconnaît qu'il y a des choses.
00:43:18Il sait que la société est en train de mouvement,
00:43:20et en plus, il faut se rappeler
00:43:22qu'on est en 2017, on est dans le début
00:43:24du mouvement MeToo, etc.
00:43:26Mais il y a toujours un petit peu retard.
00:43:28En permanence,
00:43:30les réalisatrices
00:43:32et les réalisateurs
00:43:34sont obligés d'aller un peu plus avant
00:43:36comme la société vis-à-vis de nos
00:43:38législateurs pour que les choses aussi changent.
00:43:40Je vous invite à découvrir ce passage
00:43:42qui est éminemment politique
00:43:44parce qu'il est question aussi du travail
00:43:46dans ce film-horreur.
00:43:52Bon.
00:43:54Vous m'aviez dit que
00:43:56vous avez démissionné, c'est ça ?
00:43:58Oui, mais en fait, c'est parce que
00:44:00mon ancien patron a pris sa retraite.
00:44:02Le nouveau patron,
00:44:04il a gardé que
00:44:06les ventes de la cuisine. Et puis moi.
00:44:08Mais parce que je pense qu'il ne pouvait
00:44:10pas me virer, en fait.
00:44:12En tout cas, ça ne se passait pas bien.
00:44:14Enfin, il faut que je travaille. J'ai toujours travaillé.
00:44:16Et avant, vous faisiez quoi ?
00:44:18Je travaillais
00:44:20pour mon mari.
00:44:22Je faisais son secrétariat,
00:44:24les comptabilités. Il a une entreprise
00:44:26de rénovation.
00:44:28Je m'occupais des papiers, des factures...
00:44:30Évidemment, mais pourquoi je gênais ?
00:44:32Monsieur arrive les pieds sous la table,
00:44:34on se tape les factures, tout le travail,
00:44:36tout le sale boulot pour ce connard.
00:44:38Les enfants, le ménage, tout. Et hop !
00:44:40Et puis après, à 50 ans,
00:44:42hop, on est jeté !
00:44:48Est-ce que vous avez des documents qui nous prouvent ça ?
00:44:50Ben non.
00:44:52Parce que je travaillais pour mon mari.
00:44:56Bon.
00:44:58Allez, on va faire un petit dossier.
00:45:00Vous allez rebondir, vous allez voir.
00:45:02On va pas se laisser abattre.
00:45:04Puis en plus, vous avez un super nom.
00:45:06Aurore Tabord.
00:45:08Ça sonne bien, ça.
00:45:10Tabord, c'est le nom de mon mari.
00:45:12Je m'appelle Plou, en fait.
00:45:14Aurore Plou.
00:45:18Vous voyez comment on peut rire
00:45:20des choses, et encore une fois,
00:45:22dans une séquence, avoir énormément
00:45:24de choses, du rapport au travail,
00:45:26de la société, et comment aussi,
00:45:28à un moment donné, et ça, je pense que c'est
00:45:30un héritage aussi du burlesque. Le burlesque,
00:45:32c'est dépasser
00:45:34le cadre incisionnel habituel.
00:45:36Le burlesque, c'est tout explose,
00:45:38tout va dans tous les sens. Et cette femme-là,
00:45:40effectivement, excusez-moi,
00:45:42j'ai confondu les deux extraits, c'est pas Florence Muller
00:45:44qui arrivera après, mais Laure Calenmi.
00:45:46Laure Calenmi
00:45:48a déborde le rôle
00:45:50qu'on lui a donné au sein
00:45:52de ce qu'on appelait à l'époque
00:45:54Pôle Emploi, ou LNPE,
00:45:56je sais plus, c'était peut-être Pôle Emploi, à cette époque-là.
00:45:58Pôle Emploi, elle déborde,
00:46:00elle est autre chose, et c'est aussi
00:46:02intéressant parce qu'à cet endroit-là, on voit
00:46:04qu'il y a une possibilité d'avoir une solidarité
00:46:06entre femmes. On déborde l'institution,
00:46:08il y a peut-être quelque chose par rapport
00:46:10aux lois qui existent, qui fait
00:46:12que cette femme qui a travaillé pendant des
00:46:14années, elle n'est pas reconnue, elle n'aura pas
00:46:16droit au chômage, etc.
00:46:18Il y a une solidarité qui peut se mettre en place
00:46:20à cet endroit-là. Et là, effectivement,
00:46:22c'est fait à travers la comédie.
00:46:24Je trouve aussi très intéressant
00:46:26le jeu de Laure Calamier.
00:46:28Vous voyez, le texte, c'est un
00:46:30texte écrit, pensé,
00:46:32par plusieurs personnes, plusieurs scénaristes.
00:46:34C'est pareil, c'est une autre chose que je n'ai pas dit.
00:46:36La dynamique
00:46:38collective est très présente
00:46:40dans le cinéma de Blondine Lenoir,
00:46:42parce qu'à chaque
00:46:44fois, le scénario
00:46:46est pensé à plusieurs personnes.
00:46:48Il y a toujours un collectif. Il y a l'idée que
00:46:50l'histoire ne peut naître
00:46:52que dans un dialogue.
00:46:54De la même manière qu'on voit devant la caméra
00:46:56cette idée chorale que
00:46:58ce n'est pas un héros qui va déterminer tout,
00:47:00c'est plusieurs personnes.
00:47:02Même si le héros éponyme est ici
00:47:04Aurore, joué par Aniel Jaoui,
00:47:06le film est porté par
00:47:08ces différents personnages. Et là, c'est
00:47:10aussi un délice, vraiment,
00:47:12au niveau de ces différentes
00:47:14découvertes de personnages.
00:47:16On voit aussi
00:47:18le plaisir qu'elle a à faire jouer
00:47:20les différents acteurs-actrices,
00:47:22parce qu'à chaque fois qu'on les découvre,
00:47:24c'est vraiment savoureux, comme pour
00:47:26cet extrait. Et donc, ce qui est
00:47:28pensé au niveau du dialogue dans cette
00:47:30séquence, qui n'est pas forcément évidente aussi
00:47:32pour
00:47:34l'horcalémie, parce qu'elle est contrainte,
00:47:36il y a la moitié de son corps,
00:47:38pour être expansive, etc., elle est
00:47:40contrainte. Et elle arrive à
00:47:42dépasser ça, à jouer avec
00:47:44très peu de choses. Elle a un bureau, elle peut
00:47:46taper dessus, mais elle a peu d'éléments
00:47:48aussi pour faire exister son
00:47:50personnage. D'ailleurs, on ne verra pas son
00:47:52personnage du haut en bas,
00:47:54on voit juste une partie. Et le reste
00:47:56de l'histoire, on ne la reverra pas.
00:47:58Donc, tout se joue pour le personnage de l'horcalémie,
00:48:00elle doit faire exister
00:48:02à peine une minute,
00:48:04une minute vingt secondes
00:48:06dans le film. Donc, c'est aussi
00:48:08une vraie performance, une vraie confiance entre
00:48:10la proposition
00:48:12d'écriture, le scénario qui est bien écrit,
00:48:14et la réinterprétation.
00:48:16L'idée
00:48:18aussi d'une construction
00:48:20collective, il ne s'agit pas
00:48:22de tout improviser, parce qu'il y a une histoire,
00:48:24parce qu'il y a des textes,
00:48:26mais que les
00:48:28acteurs et actrices trouvent
00:48:30la meilleure manière à travers leur corps,
00:48:32à travers leur proposition,
00:48:34parfois aussi avec du texte
00:48:36qui vient d'eux et d'elles,
00:48:38quelque chose qui va faire que le
00:48:40personnage existe. Et là aussi,
00:48:42ce moment-là
00:48:44permet vraiment
00:48:46cette grande libération, et je voulais vous le montrer
00:48:48pour représenter ça aussi.
00:48:52Je voulais aussi préciser une chose,
00:48:54quand je parlais aussi de la géographie,
00:48:56c'est quelque chose, la géographie aussi
00:48:58des tournages, on a tendance
00:49:00aussi à oublier, pareil aussi,
00:49:02pendant très longtemps, le cinéma
00:49:04français a été parisien,
00:49:06très centré sur
00:49:08Paris, et quand on voit les
00:49:10premiers films de la Nouvelle Vague,
00:49:12à part Claude Chabrol,
00:49:14qui va tourner Le Beau Serge
00:49:16en extérieur, et d'ailleurs,
00:49:18cette image va être associée
00:49:20comme le résateur régionaliste,
00:49:22tous les films
00:49:24de la Nouvelle Vague vont être très parisiens.
00:49:26Après, ça se comprend
00:49:28parce que c'est aussi
00:49:30une réalité beaucoup plus pratique,
00:49:32parce que les techniciens, la plupart des
00:49:34gens du métier du cinéma, se retrouvent
00:49:36sur place. Quand on décide,
00:49:38même à l'heure actuelle, d'aller tourner
00:49:40ailleurs, il y a aussi un enjeu qui est super
00:49:42intéressant, c'est que les
00:49:44personnes ne rentrent
00:49:46pas chez eux, auprès de leur
00:49:48famille, etc. Et donc, il y a une possibilité
00:49:50aussi d'être dans
00:49:52un espace d'échange,
00:49:54en mangeant, au soir, même si le tournage
00:49:56est terminé, d'avoir un moment aussi détendu
00:49:58qui fait que les personnes entre
00:50:00elles peuvent se parler, peuvent faire des
00:50:02propositions de manière plus détendue,
00:50:04osant aussi remettre en cause
00:50:06certaines choses, puisque la hiérarchie
00:50:08du décideur,
00:50:10elle est un petit peu bouleversée,
00:50:12et c'est en ce sens-là aussi que les tournages
00:50:14en extérieur de Paris ont aussi leurs avantages.
00:50:16C'est quelque chose qu'on ne met pas
00:50:18forcément en évidence, mais
00:50:20cette stratégie qui pète d'un ordre
00:50:22aussi économique, sachez que
00:50:24tourner à Paris peut aussi beaucoup
00:50:26augmenter les coûts, parce que s'il faut
00:50:28bloquer la circulation,
00:50:30etc., il faut demander des
00:50:32autorisations, etc., il y a plus de
00:50:34liberté, par exemple dans Zouzou,
00:50:36à filmer dans
00:50:38un même lieu,
00:50:40avec des personnes qui peuvent même vivre
00:50:42sur le
00:50:44lieu du tournage, ça c'est
00:50:46une dimension économique qui n'est pas non plus anodine
00:50:48pour pouvoir aussi filmer
00:50:50et choisir les lieux de tournage.
00:50:52Voilà. Ce que je vous dis là
00:50:54ne fonctionne pas tout le temps, effectivement,
00:50:56mais c'est des choses qu'on retrouve
00:50:58notamment dans le cinéma américain.
00:51:00Il y a eu une époque, il y a eu des mouvements
00:51:02de personnes qui ont été
00:51:04tournées en dehors de la Californie,
00:51:06dans d'autres États, parce que
00:51:08ça leur permettait aussi plus de liberté
00:51:10que la surveillance
00:51:12au sein des studios.
00:51:14Cette dimension-là aussi, elle n'est pas
00:51:16non plus anodine, en dehors
00:51:18du fait que raconter d'autres
00:51:20histoires en dehors de Paris, en dehors
00:51:22du lieu du
00:51:24pouvoir, de tout ce qui se
00:51:26passe, c'est de montrer aussi d'autres réalités
00:51:28et d'autres légitimités.
00:51:30Dans une société où on
00:51:32voit très peu les personnes, la classe ouvrière,
00:51:34les femmes,
00:51:36c'est aussi notre représentation
00:51:38très diverse aussi de la société
00:51:40qui est importante aussi au cinéma.
00:51:42Pour moi aussi, ça c'est pas
00:51:44anodin.
00:51:46Je pense aussi, même si
00:51:48Blondine Noire n'habite pas
00:51:50dans d'autres régions, ce déplacement-là
00:51:52est très important et pour moi
00:51:54participe à d'autres réalisateurs comme
00:51:56mon cinéaste, là où je vis
00:51:58dans le Tarn, Alain Guiraudy.
00:52:00C'est quelqu'un qui va en permanence
00:52:02proposer d'autres récits parce qu'il s'intéresse
00:52:04à un endroit aussi qu'il connaît, avec
00:52:06d'autres géographies, etc. Il va pouvoir exploiter ça.
00:52:08Même je vous
00:52:10propose aussi d'associer
00:52:12les lieux.
00:52:14Quand on choisit un lieu, c'est important
00:52:16aussi pour les lumières, pour la mise
00:52:18en scène et là notamment, ce
00:52:20côté, pour
00:52:22Aurore, ce côté très solaire
00:52:24associé même
00:52:26au nom d'Aurore,
00:52:28est possible parce qu'on se retrouve
00:52:30aussi à La Rochelle. Le même film
00:52:32à Paris, on aurait effectivement
00:52:34une autre histoire rien que pour la
00:52:36colorimétrie et ça c'est effectivement
00:52:38pas anodin.
00:52:40Est-ce que je vous
00:52:42perds pas ? J'ai pas du tout de notion du temps, j'ai pas
00:52:44de montre. Tout va
00:52:46bien ? Ok. On va
00:52:48continuer dans la
00:52:50chronologie, il y a un autre moment
00:52:52et là pareil aussi, je voulais
00:52:54mettre en valeur une autre actrice
00:52:56qui est Florence Muller, encore une fois
00:52:58on retrouve d'un film à un autre
00:53:00et vous allez voir que dans une
00:53:02hiérarchie, c'est pareil, je serais aussi très critique
00:53:04d'un certain cinéma
00:53:06français qui serait hyper
00:53:08hiérarchisé, c'est-à-dire
00:53:10à partir du moment où on engage
00:53:12un acteur, une actrice célèbre
00:53:14qui permet de débloquer
00:53:16des budgets, normalement
00:53:18on est censé le voir tout le temps, en permanence,
00:53:20etc. Et ensuite, tous les autres personnages
00:53:22seraient secondaires.
00:53:24Encore une fois, comme pour l'arc
00:53:26à l'ami, ce moment aussi, cette proposition
00:53:28de Florence Muller pour interpréter ce personnage,
00:53:30elle a le même rôle
00:53:32que l'arc à l'ami, parce qu'elle
00:53:34interprète un agent de la NPE
00:53:36et était aussi très savoureux. Je vous laisse
00:53:38le découvrir.
00:53:40Voilà, voilà, ouais.
00:53:42Ben ouais.
00:53:44C'est... Ouais, vu que...
00:53:46Non parce que je suis serveuse, moi
00:53:48je suis pas femme de ménage, donc...
00:53:50Vous avez vraiment rien
00:53:52dans la restauration ? Ah ouais, ben non.
00:53:54Enfin, si, mais non.
00:53:56Ça me...
00:53:58Vraiment, on essaye,
00:54:00et puis...
00:54:02Là, c'est...
00:54:04Moi, ça me...
00:54:06Je me rencontre un gros souvenir,
00:54:08parce que...
00:54:10Alors que,
00:54:12en plus, c'est pas...
00:54:14Du coup, ben voilà,
00:54:16on y est, et puis, vous voyez,
00:54:18moi, enfin, on est d'accord,
00:54:20dans tous les cas,
00:54:22avec... C'est ça qu'il faut se dire.
00:54:24On reste...
00:54:26Hein ?
00:54:28Voilà, comme on dit.
00:54:30Et puis...
00:54:32C'est...
00:54:34Vous voyez...
00:54:36Je suis chaude.
00:54:38Vous êtes pas chaudes ? Ben là, non.
00:54:44Voilà, je vais mettre ça.
00:54:46C'est pratique, ça ?
00:54:48C'est super.
00:54:54Ça vient d'un coup, hein ?
00:54:56Oui, moi aussi.
00:54:58Enfin, là, non, mais souvent...
00:55:00Ça se voit pas, là.
00:55:02Ah non, non, pas du tout.
00:55:04Alors, le plus pénalisant,
00:55:06c'est tous ces moments...
00:55:08On est... Ah !
00:55:10Et puis, je te préfère.
00:55:12Mais ça fait...
00:55:14Mais ça fait...
00:55:16Ça fait du bien, en en parlant.
00:55:18C'est vrai.
00:55:20Bon, alors, on revient quand même
00:55:22à ce qu'on disait.
00:55:24Je vous laisse...
00:55:26Oui, oui, d'accord.
00:55:28Voilà, il n'y a pas...
00:55:30Il faut se dire ça.
00:55:32Pareil au niveau de la proposition aussi
00:55:34du jeu d'acteur proposé à Nejabi,
00:55:36qui est l'actrice,
00:55:38qui est le personnage éponyme.
00:55:40C'est aussi intéressant de mettre en valeur un personnage,
00:55:42en tant que récepteur.
00:55:44Et ça aussi, c'est quelque chose qu'on voit aussi,
00:55:46qu'on verra beaucoup dans Nicolaire.
00:55:48Ce personnage d'Nejabi,
00:55:50il peut être aussi votre propre réceptacle.
00:55:52On reçoit
00:55:54ce que nous donne Florence Muller.
00:55:56On est à la place de Nejabi,
00:55:58et la personne qui doit jouer la réception.
00:56:00Elle doit pas s'approprier la scène.
00:56:02C'est aussi intéressant d'avoir cette humilité,
00:56:04de faire exister son personnage juste dans la réception
00:56:06de ce que propose
00:56:08Florence Muller.
00:56:10Florence a été aussi
00:56:12source de propositions
00:56:14à cet endroit-là, même si c'était écrit.
00:56:16Et c'est encore une fois aussi intéressant
00:56:18que la comédie soit au service du politique.
00:56:20Et là, on a un concentré,
00:56:22pour moi aussi, du film.
00:56:24Parce que la question,
00:56:26c'est affronter un tabou.
00:56:28Ça peut être vraiment étonnant,
00:56:30parce que ça ne devrait pas être un tabou.
00:56:32C'est la question de la ménopause.
00:56:34Quand on revoit la ménopause,
00:56:36ou la question de
00:56:38représenter la ménopause,
00:56:40ou même la place
00:56:42des personnages féminins
00:56:44qui ont plus de 50 ans dans l'histoire du cinéma,
00:56:46il y a aussi une réalité qu'on peut regarder,
00:56:48qu'on peut chiffrer, qui fait qu'à un moment donné,
00:56:50les femmes, les actrices, disparaissent.
00:56:52On se demande qu'est-ce qui se passe.
00:56:54Elles n'ont plus autant d'opportunités.
00:56:56Elles n'ont plus
00:56:58de possibilité d'exister
00:57:00à l'écran.
00:57:02Concentrer toute l'histoire là-dessus,
00:57:04sur la question du changement du corps,
00:57:06qui est un grand tabou,
00:57:08qui est très peu abordé dans le cinéma.
00:57:10Quand on sait que
00:57:12les femmes sont tous
00:57:14touchées, à un moment donné,
00:57:16de leur vie par la ménopause,
00:57:18on peut se dire que c'est bizarre
00:57:20que la question ne soit pas abordée
00:57:22dans le cinéma.
00:57:24C'est aussi cette idée,
00:57:26le cinéma, les histoires,
00:57:28sont là aussi pour proposer d'autres récits
00:57:30qui ne sont pas dits,
00:57:32et qui permettent aussi une solidarité.
00:57:34Le fait qu'on en parle
00:57:36dans un film, qui va peut-être
00:57:38permettre d'étabouiser
00:57:40les choses. Et dans cette séquence-là,
00:57:42on voit aussi que cette
00:57:44femme-là, qui a des bouffées de chaleur,
00:57:46elle est en train d'inviter
00:57:48l'idée
00:57:50qu'il y a une complicité entre elles.
00:57:52Elle vit ça, et il y a une
00:57:54possibilité de lien entre
00:57:56elles, comme il peut y avoir
00:57:58un lien entre vous et
00:58:00le film, les personnages du film.
00:58:02Donc ça non plus n'est pas du tout
00:58:04anodin dans cette construction.
00:58:10Il est déjà
00:58:127h30, et encore une fois,
00:58:14ce sera intéressant d'avoir vos échanges,
00:58:16et surtout que vous ayez du temps
00:58:18pour voir le film de ce soir, qui est à 21h,
00:58:20qui est justement au rang.
00:58:22Il y a d'autres séquences vraiment savoureuses,
00:58:24je ne vais pas tout raconter,
00:58:26énormément de choses qui sont racontées,
00:58:28je ne vais pas vous les dévoiler.
00:58:30Vous pouvez le redécouvrir,
00:58:32et peut-être avec un autre regard,
00:58:34enrichi des autres films que vous avez pu voir
00:58:36de Blandineau Noir. Là, on arrive
00:58:38sur un autre film, qui est
00:58:40Annikolaer. Annikolaer,
00:58:42le seul film
00:58:44qui, à un moment donné, va être mis en valeur
00:58:46avec un festival.
00:58:48Ce n'est pas Cannes, c'est Locarno.
00:58:50C'est pareil,
00:58:52une économie du cinéma, sachez que
00:58:54être reconnu
00:58:56par Cannes, ça facilite beaucoup la diffusion,
00:58:58le rapport avec la presse, etc.
00:59:00Locarno l'a identifié,
00:59:02et c'est aussi
00:59:04intéressant que ce film-là, Annikolaer,
00:59:06arrive dans un contexte bien particulier.
00:59:08Même si l'arisatrice
00:59:10l'a beaucoup travaillé, ce sujet
00:59:12pendant des années, il se trouve que
00:59:14c'était le moment où
00:59:16la remise en cause de l'avortement commençait à arriver.
00:59:18Et donc,
00:59:20il était d'autant plus important
00:59:22de revenir là-dessus. Les choses qu'on se dit
00:59:24qui sont acquis,
00:59:26l'arisatrice revenait dessus
00:59:28en rappelant que les choses ne sont
00:59:30qu'acquis. Et c'est une longue lutte.
00:59:32Et c'est une longue lutte qui n'appartient pas
00:59:34à l'éclairage
00:59:36de nos politiques, législateurs,
00:59:38législatrices. Non, il y a une réalité
00:59:40de terrain qu'il y a à mettre en valeur.
00:59:42Et c'est là où le film
00:59:44rencontre aussi
00:59:46une époque. Et donc,
00:59:48ce film-là, Annikolaer,
00:59:50qui tournait
00:59:52en Seine-et-Marne, c'est aussi un gros
00:59:54enjeu de montrer
00:59:56le personnage principal, Annikolaer,
00:59:58qui fait partie
01:00:00de la classe ouvrière, qui va
01:00:02développer une conscience politique
01:00:04progressive
01:00:06au fur et à mesure, parce qu'elle a été concernée
01:00:08à un moment donné sur la question
01:00:10de l'avortement. Ça, c'est une autre
01:00:12réalité qui est intéressante,
01:00:14qui traverse aussi la cinématographie
01:00:16de Blandine-le-Noir. C'est que le féminisme
01:00:18qui traverse le cinéma de Blandine-le-Noir,
01:00:20il n'est pas
01:00:22du côté du militantisme, c'est avec des personnages
01:00:24qui deviennent,
01:00:26qui se politisent
01:00:28par les situations.
01:00:30Et c'est un autre
01:00:32cas de figure, ça permet de montrer
01:00:34que l'accès
01:00:36aux situations, à la conscience aussi
01:00:38des choses, peut se faire. C'est pas
01:00:40des super-héros qui ont des
01:00:42super-pouvoirs, qui ont un accès
01:00:44à la connaissance des choses,
01:00:46ils le font au fur et à mesure,
01:00:48parce qu'ils sont concernés. Le personnage
01:00:50d'Agnès Jahy,
01:00:52elle découvre
01:00:54sa discrimination en tant que
01:00:56femme, qui a plus
01:00:58de 50 ans, et elle va découvrir
01:01:00qu'est-ce que c'est qu'à un moment donné,
01:01:02d'être femme de plus de 50 ans
01:01:04sans travail, et comment c'est compliqué.
01:01:06Et ça, elle ne va pas
01:01:08le découvrir en faisant partie
01:01:10d'un parti politique, elle va le découvrir
01:01:12de fait. Et je vais juste aussi
01:01:14ajouter que,
01:01:16que ce soit dans le film Aurore,
01:01:18dans Zouzou, ou même dans Nicolaire,
01:01:20vous retrouverez aussi,
01:01:22dans cette mise en valeur aussi
01:01:24de l'histoire féministe,
01:01:26un hommage aussi à différentes figures.
01:01:28Dans Zouzou, vous aviez
01:01:30Christine Delphi, qui était citée
01:01:32par
01:01:34Laure Calamy, son personnage.
01:01:36Dans Aurore, vous aurez
01:01:38à la fois Thérèse Clerc,
01:01:40avec l'idée des
01:01:42Baba Yéyagam, elle n'a pas fait que ça,
01:01:44et aussi le texte de François Zéritier.
01:01:46Et donc c'est en ce sens-là aussi
01:01:48que je vois que ce cinéma-là,
01:01:50c'est un endroit aussi de
01:01:52transmission, pour encore
01:01:54une fois transmettre une autre histoire,
01:01:56l'histoire des luttes des femmes,
01:01:58de ces intellectuels,
01:02:00et intellectuels-le,
01:02:02qui ne sont pas
01:02:04forcément mis en valeur, dont on n'a pas forcément
01:02:06la trace. À plusieurs moments,
01:02:08il y a toujours des petites notes de bas de page,
01:02:10pour avoir accès aussi à cette
01:02:12pensée aussi
01:02:14de l'histoire des sociétés.
01:02:16Donc là, maintenant, on arrive avec Annick Hollère,
01:02:18il y a un moment aussi qui est très fort.
01:02:20Là, vous allez être face
01:02:22à un moment, pour moi,
01:02:24qui est très beau, qui est très fort politiquement,
01:02:26qui est une scène d'accouchement,
01:02:28de, excusez-moi,
01:02:30d'avortement, sur la méthode Carman,
01:02:32mais si je fais l'association entre les deux,
01:02:34vous allez voir que la manière d'entourer,
01:02:36etc., est proche aussi
01:02:38de l'accouchement.
01:02:40Donc n'ayez pas peur, c'est un moment donné, justement,
01:02:42qui va revenir sur la manière
01:02:44dont on peut vivre un
01:02:46avortement.
01:02:48Dans cette séquence-là, vous aurez
01:02:50aussi une chanteuse
01:02:52qui est
01:02:54Rosemary Stanley.
01:02:56Vous allez voir aussi son rôle
01:02:58dans cette séquence.
01:03:00Découvrez aussi cette séquence-là
01:03:02d'Annick Hollère.
01:03:04Bonjour, moi c'est Claudine.
01:03:06Tu t'appelles comment ? Chantal.
01:03:08D'accord, c'est moi qui vais t'avorter, Chantal.
01:03:10D'accord. Ça va très bien se passer.
01:03:12À la
01:03:14claire fontaine,
01:03:16en allant promener,
01:03:18j'ai
01:03:20trouvé l'eau si belle
01:03:22que je m'y suis baignée.
01:03:24Il y a
01:03:26longtemps que je t'aime,
01:03:28jamais je ne
01:03:30t'oublierai.
01:03:34Sur la plus haute
01:03:36branche, un
01:03:38rossignol
01:03:40chantait.
01:03:42Chante, rossignol,
01:03:44chante-toi
01:03:46qui a le coeur
01:03:48gay.
01:03:50Il y a longtemps
01:03:52que je t'aime,
01:03:54jamais je ne
01:03:56t'oublierai.
01:04:00Chante, rossignol,
01:04:02chante-toi
01:04:04qui a le coeur
01:04:06gay.
01:04:08Il y a longtemps
01:04:10que je t'aime,
01:04:12jamais je ne
01:04:14t'oublierai.
01:04:16Tu as le coeur
01:04:18à rire, moi
01:04:20je l'ai à pleurer.
01:04:22Il y a
01:04:24longtemps que je t'aime,
01:04:26jamais je ne
01:04:28t'oublierai.
01:04:30Et voilà.
01:04:32C'est fini.
01:04:34Vous voyez aussi
01:04:36pourquoi aussi
01:04:38j'ai fait la confusion entre l'accouchement
01:04:40et l'avortement,
01:04:42parce qu'il est aussi pensé comme ça
01:04:44et ça devient aussi politique,
01:04:46c'est qu'on peut vivre
01:04:48aussi un avortement bien accompagné
01:04:50et qu'il ne soit pas un drame.
01:04:52C'est d'autant plus important que, ça je disais,
01:04:54c'est un texte de Geneviève Sellier
01:04:56qui parlait de ça, à l'époque
01:04:58quand le texte est passé
01:05:00pour légaliser l'avortement,
01:05:02il y a eu cette phrase en plus
01:05:04qui disait, sachant que
01:05:06pour toutes les femmes,
01:05:08l'avortement est un drame.
01:05:10C'est une phrase qui a été reprise encore
01:05:12par notre actuel président.
01:05:14Ça sous-entendait
01:05:16que les personnes qui ont
01:05:18vécu un bon avortement,
01:05:20qui l'ont bien vécu,
01:05:22pouvaient se sentir aussi coupables.
01:05:24C'est aussi important
01:05:26cette vision de l'avortement,
01:05:28qui pour moi, pour être aussi unique,
01:05:30comme d'autres films à l'époque
01:05:32qui ont suivi la méthode Karmann,
01:05:34mais qui vient sur un autre regard,
01:05:36sur cette idée de culpabiliser
01:05:38l'avortement dans une logique
01:05:40judéo-chrétienne, c'était important
01:05:42d'accompagner ça là-dedans.
01:05:44Pour moi aussi, il y a un lien très fort,
01:05:46je pense qu'il y a un lien de
01:05:48Blondie-le-Noir avec la musique,
01:05:50parce qu'il y a la présence de
01:05:52Bertrand Belin dans tout son cinéma,
01:05:54mais en permanence, il y a des
01:05:56chanteuses qui sont là, que ce soit
01:05:58Christine Isiaïchlin,
01:06:00Rosemary Stanley,
01:06:02qui est son premier rôle au cinéma,
01:06:04et vous voyez que la force
01:06:06aussi de la musique, on est dans le retour
01:06:08aussi du corps, c'est le corps qui va pouvoir
01:06:10accompagner, parce que
01:06:12quand on chante, c'est le corps
01:06:14qui vibre, qui va
01:06:16approcher, qui va soutenir
01:06:18cette femme. Il y a une transition aussi
01:06:20très forte de la musique aussi dans le cinéma
01:06:22de Blondie-le-Noir,
01:06:24sans parler aussi de
01:06:26Dany Jaoui, qui est aussi
01:06:28chanteuse. Donc c'est en ce
01:06:30sens-là aussi que la musique devient
01:06:32politique, et montrer
01:06:34aussi cette séquence-là, vient montrer
01:06:36aussi qu'il y a autre chose.
01:06:38Autant il est essentiel aussi que
01:06:40le film, l'événement d'Audrey
01:06:42Diwan, qui parle de l'horreur,
01:06:44de vivre dans la clandestinité, de risquer
01:06:46sa vie, etc., il est
01:06:48important d'avoir aussi cet
01:06:50autre regard aussi sur un
01:06:52avortement, quand il est bien accompagné
01:06:54dans un cadre de bienveillance d'un groupe
01:06:56de personnes. Je tiens à saluer aussi dans
01:06:58ce moment-là
01:07:00plusieurs actrices vraiment pour moi extraordinaires,
01:07:02que ce soit India R
01:07:04que vous voyez, Zita Enro,
01:07:06il y a aussi une galerie d'une nouvelle
01:07:08génération d'actrices
01:07:10que la réalisatrice accompagne,
01:07:12qui, pour non certaines,
01:07:14émergent à travers
01:07:16leur talent, on le voit pour leur calamis,
01:07:18et c'est une nouvelle génération d'actrices qui
01:07:20permet aussi que la parole des réalisatrices
01:07:22à devenir aussi possible,
01:07:24et c'est ce que j'aime beaucoup dans cette séquence.
01:07:26On va terminer avec
01:07:28un dernier extrait,
01:07:30donc je n'ai pas fait la chronologie,
01:07:32je n'ai pas été exhaustif sur tous les films,
01:07:34je n'ai pas pu avoir de la place sur
01:07:36Juliette, mais le temps
01:07:38passe, et c'est pareil,
01:07:40je ne suis pas exhaustif, il y a énormément de choses
01:07:42à dire sur d'autres actrices,
01:07:44là je me suis peut-être enfermé sur des
01:07:46séquences en intérieur,
01:07:48il se passe beaucoup de choses dans le cinéma
01:07:50de Blondine le Noir,
01:07:52notamment à l'extérieur, avec des corps libérés,
01:07:54vous voyez des décors nus,
01:07:56qui ne sont pas classiques dans
01:07:58le film Juliette au printemps,
01:08:00comment faire l'amour libre
01:08:02dehors, dans une serre, c'est possible,
01:08:04et ça,
01:08:06c'est aussi une autre réalité que je vous invite
01:08:08à découvrir dans le film.
01:08:10Ce que je vous ai montré, c'est juste
01:08:12une infime partie
01:08:14qui permet d'avoir quelques
01:08:16clés d'ouverture sur le film,
01:08:18sur la cinématographie de Blondine le Noir,
01:08:20mais ce n'est pas tout. Je termine là-dessus,
01:08:22sur cette dernière séquence,
01:08:24on est encore sur Annie Colère,
01:08:26avec le rôle-titre.
01:08:48...
01:09:00Ça pourrait vous apparaître surprenant,
01:09:02il n'y a pas une grande performance d'actrice,
01:09:04mais là aussi,
01:09:06je voulais aussi terminer sur quelque chose,
01:09:08une ouverture très forte,
01:09:10et quand on voit le film, on voit d'autant plus
01:09:12l'importance de cette séquence.
01:09:14Cette séquence est doublée par le fait
01:09:16qu'au début du film, je ne vais pas tout vous dire
01:09:18sur le film, vous n'en faites pas,
01:09:20elle fait ce même mouvement de trajet
01:09:22en vélo, ce personnage, Annie,
01:09:24en vélo,
01:09:26mais la nuit, traversée par une autre voiture
01:09:28qui passe
01:09:30très violemment
01:09:32aux côtés d'elle,
01:09:34qui insiste sur la menace,
01:09:36et c'est le moment où, en vélo,
01:09:38elle va de manière clandestine
01:09:40au rendez-vous où l'avortement sera possible.
01:09:42Ce que vous venez de voir,
01:09:44c'est une autre libération.
01:09:46Je voulais aussi vous montrer à quel point
01:09:48le corps,
01:09:50qui peut être aussi libre
01:09:52dans son expression,
01:09:54une actrice qui est capable
01:09:56de traverser différentes émotions,
01:09:58et tout ça,
01:10:00effectivement, sans parole.
01:10:02Juste pour vous montrer l'importance,
01:10:04dans un cinéma où les dialogues sont très importants
01:10:06chez Blarney Lenoir,
01:10:08l'expression du corps, du corps libéré,
01:10:10comme on voyait dans
01:10:12cette première scène de Zouzou,
01:10:14il est très important dans le cinéma de Blarney Lenoir.
01:10:16Et j'ajouterais une chose qui n'est pas non plus anodin,
01:10:18pour moi aussi, le vélo.
01:10:20C'est d'ailleurs cette séquence qui a été choisie
01:10:22comme la photo d'image du film.
01:10:24C'est quand on pense aussi
01:10:26le rapport entre les femmes et le vélo,
01:10:28comment à un moment donné, l'accès au vélo,
01:10:30au début du...
01:10:32à travers tout le XIXe siècle,
01:10:34les femmes ne pouvaient pas avoir de vélo, elles étaient contraintes.
01:10:36On leur disait qu'elles ne pouvaient pas faire du vélo
01:10:38parce qu'elles avaient des grandes robes, etc.
01:10:40Il y a eu tout un lien très étroit
01:10:42entre le vélo et
01:10:44la libération des femmes,
01:10:46le changement des robes,
01:10:48et une femme qui a inventé le boomer
01:10:50pour avoir des tenues
01:10:52beaucoup plus adaptées pour faire du vélo.
01:10:54Donc pour moi, le symbole aussi du vélo,
01:10:56il est aussi représentatif
01:10:58d'une histoire aussi des luttes
01:11:00qui n'est pas anodine.
01:11:02Je fais une pause là
01:11:04parce qu'il est 20 ans, on n'a pas eu beaucoup
01:11:06de temps pour échanger, mais n'hésitez pas.
01:11:08Encore une fois, je vous dis,
01:11:10il y a une personne qui est anonymement là,
01:11:12qui s'appelle Blandine Lenoir,
01:11:14donc s'il y a des questions, des réponses,
01:11:16que ce soit avec moi et tout, n'hésitez pas.