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Écoutez l'appel du patron des patrons : "On ne peut pas faire comme si la France était seule au monde". Patrick Martin, président du Medef, est l'invité de Thomas Sotto.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 30 janvier 2025.

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Transcription
00:00RTL Matin
00:04Et l'invité d'RTL Matin va continuer Thomas à parler d'économie
00:07puisque vous recevez aujourd'hui le président du MEDEF Patrick Martin.
00:10Bonjour et bienvenue sur RTL Patrick Martin.
00:12Bonjour.
00:12François Langlais vient de planter le décor, on l'a entendu.
00:15Cela dit, comparaison, petit lettre, raison.
00:17Ce n'est pas une question de philo du bac mais celle que je vous pose après les propos de Bernard Arnault,
00:21patron de LVMH, qui ne comprend pas qu'en France on s'apprête à surtaxer les entreprises qui font de gros bénéfices
00:26alors qu'aux Etats-Unis, dit-il, les impôts vont descendre à 15% et les ateliers sont subventionnés dans une série d'États.
00:32Est-ce qu'il a raison Bernard Arnault ?
00:34Il a évidemment raison, comme d'autres grands chefs d'entreprise qui sont exprimés dans le même sens sur la fiscalité bien sûr.
00:40Génère, France, Total Energy.
00:42Bien sûr, pardon.
00:44Ils sont tous adhérents du MEDEF, moi je voudrais exprimer le point de vue de tous les adhérents du MEDEF.
00:48Oui.
00:48200 000 entreprises, plus de 10 millions de salariés.
00:50Moi je sens la colère monter, l'incompréhension tourne à la colère.
00:55La semaine dernière, 500 adhérents devant lesquels je suis intervenu à Perigueux, ce soir je suis à Amiens, je sais ce qu'on va me dire à Amiens.
01:01Et donc, tout ça n'est pas sans conséquence, ce ne sont pas des humeurs, ça se traduit dans des comportements d'achat, d'investissement, d'embauche ou de débauche.
01:12Ça peut être ça les conséquences de la colère ?
01:14Bien sûr.
01:14Moins d'embauche, des licenciements, c'est quoi les conséquences de la colère ?
01:18Les conséquences c'est que ceux qui peuvent partir, partent. Et ils ont raison.
01:23Ils ont raison ?
01:24Ils ont raison.
01:25Bernard Arnault aurait raison de quitter la France et de délocaliser ?
01:27Qu'est-ce que vous voulez ? Il y a une rationalité économique.
01:29Nous on est là, les entrepreneurs, pour faire de la croissance, pour investir, pour innover, pour embaucher.
01:34Si vous avez des conditions qui sont aussi divergentes entre la France, les Etats-Unis, mais j'entends ce que François Lenglet a dit sur l'Espagne, c'est vrai de la Pologne, c'est vrai de l'Italie, c'est vrai du Portugal.
01:45Le Portugal va baisser son taux d'imposition à 15%, voire à 12,5%.
01:49Nous, pour les grandes entreprises, sur 2025, on nous dit que ce ne sera plus qu'en 2026, je suis dubitatif et je peux vous expliquer pourquoi, on va monter à 35,5%.
01:57Mais vous, patron du Medef, vous dites ce matin au patron, grand ou petit, si vous pouvez quitter la France, quittez-la, c'est ça ce que vous dites ? Oui à la délocalisation ?
02:05Je ne les incite pas à le faire. La rationalité veut que, quand vous avez un pays qui a de la croissance,
02:13qui a des conditions attractives en termes de prix de l'énergie, en termes de fiscalité, que voulez-vous y aller, c'est normal.
02:21Et le patriotisme économique, et l'effort commun, vous en faites quoi ?
02:28On le fait tous les jours. Au mois d'août, j'ai tiré le signal d'alarme, en disant, on va être en récession au quatrième trimestre, l'emploi va se dégrader.
02:39La classe politique, dans son immense majorité, n'a rien entendu.
02:43Ils ne risquent pas d'entendre, ils n'écoutent même pas.
02:47C'est vrai encore plus aujourd'hui, on a des débats politiques totalement hors-sol.
02:51Que nos politiques regardent ce qui va se passer en Allemagne.
02:54Les socialistes allemands viennent de produire un programme économique en perspective des législatives,
03:01qui est un programme intégralement tourné vers la compétitivité et l'attractivité.
03:05D'un côté à l'autre du Rhin, on change de monde.
03:09Vous demandez quoi concrètement ? La suppression de cette taxe que dénonce Bernard Arnault dans le projet de loi de finances ?
03:14Vous dites au gouvernement, on n'en veut pas, c'est non ?
03:16Non, mais c'est beaucoup plus global que ça.
03:18Non, mais il pose des questions concrètes qui demandent des réponses concrètes.
03:22Est-ce que ce matin, vous qui avez un discours très sévère contre le gouvernement, vous dites, on ne veut pas de cet effort, de cette surtaxe pour les entreprises qui marche très bien ?
03:29Bien sûr. On veut des vraies réformes structurelles.
03:32La limite du raisonnement, c'est qu'il y a une équation politique qui est insolvable.
03:37Insoluble. Insoluble et insolvable d'ailleurs.
03:39Donc je mesure ça.
03:42Mais on se laisse embarquer, le projet de loi de finances, la sécurité sociale, se laisse embarquer vers nos vieux démons.
03:49Il faut des réformes de structure.
03:51Quand on vient nous expliquer qu'on ne peut pas supprimer...
03:55Les réformes de structure, elles ne se font pas dans l'urgence avec la CMP d'aujourd'hui.
03:58Quand la porte-parole du gouvernement dit que chacun doit prendre sa part aux efforts, vous dites, non, ça y est, on en a trop fait, nous, les entreprises ?
04:03Regardez la répartition de l'effort. Il y a 13 milliards à la charge des entreprises. 13 milliards.
04:07Moi, je vois d'autres catégories qui sont beaucoup plus épargnées.
04:10Qui est trop épargné ?
04:12Il y a des efforts, il y a des coups de rabot qui sont donnés sur la dépense publique.
04:15Il n'en meurt pas moins que la dépense publique va augmenter l'année prochaine.
04:19Enfin, cette année, pardon.
04:20Elle va augmenter moins vite, en fait. C'est une baisse de l'augmentation. Ce ne sont pas des économies.
04:24Quand on vient nous dire, on ne peut pas supprimer 4 000 emplois dans l'éducation nationale.
04:28Plus d'un million de salariés, on va dire, agents et salariés à l'éducation nationale.
04:34Moi, j'observe qu'il y a 117 000 emplois qui ont été supprimés dans le secteur privé au quatrième trimestre.
04:40Il y a vraiment de quoi...
04:41Donc, vous dites, c'est le service public qui doit faire les efforts, il faut supprimer ces postes d'enseignants.
04:44C'est là-dessus qu'on parle d'économie ?
04:45On s'entend.
04:46Pas des postes de première ligne, on sait qu'il y a des postes d'enseignants vacants.
04:50C'est toute l'administration de l'administration qui est préservée dans cette affaire.
04:53On a besoin d'un état fort, on a besoin d'un état efficace, mais on a besoin d'un état frugal
04:57parce que la variable d'ajustement en ce moment, c'est l'économie.
05:00Patrick Martin, on a eu les chiffres de la croissance qui ne sont pas bons.
05:03François en parlait à l'instant.
05:04Il y a eu des mauvais chiffres du chômage il y a quelques jours.
05:06Est-ce qu'on est en train de replonger dans le chômage de masse ?
05:09Est-ce que vous le redoutez ou est-ce qu'on n'en est pas là ?
05:11Il y a un risque qui est avéré.
05:14Puisqu'on a déjà une baisse de la croissance, une augmentation du chômage.
05:19Il y a urgence à ce que nos décideurs politiques se ressaisissent
05:23et comprennent ce qui se passe à travers le monde.
05:25La France n'est pas un îlot de prospérité dans un océan déchaîné.
05:28C'est exactement l'inverse.
05:30Donc, je sais qu'on est tous très intelligents.
05:33Il y a une forme de génie français.
05:35Il serait grand temps que ce génie s'exprime positivement.
05:37Je vous sens en colère ce matin.
05:38Je suis en colère.
05:40Je suis en colère parce qu'on parle à un mur.
05:42On parle à un mur.
05:44Je vais vous citer un cas.
05:46Il y a un appôt de production, je ne vais pas trop rentrer dans les détails.
05:48Qui est supposément supprimé depuis 2023.
05:51Les impôts de production sont une aberration économique.
05:54Même des économistes totalement indépendants du MEDEF le disent.
05:59Eh bien, ça fait 4 fois que l'État renie sa parole.
06:02Or, nous avons besoin de confiance.
06:04Les agents économiques, d'une manière générale.
06:06Les ménages, qui non seulement achètent des produits étrangers mais sur-épargnent en ce moment.
06:10Les entreprises elles-mêmes.
06:11Que voulez-vous ?
06:12Qu'on fasse confiance au pouvoir public.
06:14Je ne vise pas une personne ou une autre.
06:15Les pouvoirs publics, l'État.
06:16Si année après année, il renie ses promesses.
06:19Vous dites quoi ?
06:20Il vaut mieux faire tomber ce gouvernement ?
06:22Il vaut mieux une nouvelle censure qu'un budget qui mettrait trop de pression sur les entreprises ?
06:25Non mais écoutez, c'est les arguments qu'on nous sert.
06:27Non, non, c'est une question que je vous pose.
06:29On nous dit, ça serait pire encore s'il y avait un chaos politique.
06:31Et c'est vrai d'une certaine manière.
06:33On nous dit, regardez à quoi vous avez échappé.
06:35Vous auriez pris un uppercut, vous ne prenez qu'une grande gifle.
06:38C'est moyennement satisfaisant.
06:40Et puis on nous dit enfin, il faut passer ces étapes.
06:42Et vous allez voir, après on attaque des réformes structurelles.
06:44Moi je ne vois pas très bien avec quelle majorité on va pouvoir attaquer des réformes structurelles.
06:47Donc ce budget de censure, pour vous c'est pareil, c'est la même chose ?
06:49Moi ce que je dis simplement, c'est que le MEDEF va faire des propositions.
06:51Notamment sur le financement de la protection sociale.
06:54Et que si ces propositions ne sont pas entendues...
06:56C'est quoi par exemple, une TVA sociale ?
06:57Vous voulez une TVA sociale ?
06:58Bien sûr.
06:59Mais là maintenant pour le jeu de 2025...
07:01Ça fait partie de ces nombreux tabous dans le débat public.
07:04Alors qu'en off, beaucoup, beaucoup, savent que c'est ça la solution.
07:08Savent que notre système social est très bon.
07:10Qui dit ça en off ?
07:12Mais ça ne fait pas avancer les choses.
07:14Est-ce que le ministre de l'économie, il pense ça quand vous lui parlez ?
07:17Est-ce que Emmanuel Macron, il pense ça quand vous lui parlez ?
07:20Est-ce que François Bayrou, il pense ça quand vous lui parlez ?
07:22Écoutez, le ministre de l'économie, il fait ses meilleurs efforts.
07:24Mais par moments, on se dit, les chefs d'entreprise, on se dit qu'il est très, très loin de nos réalités.
07:28Très loin de nos réalités.
07:29Il est hors sol ?
07:30Il nous explique que la France doit être un pays étatique.
07:32Que finalement, les entreprises peuvent embaucher ou déboucher.
07:35C'est pas grave, il faut que l'État préserve son train de vie.
07:38Là, j'avoue qu'on est choqués.
07:40J'ai de l'estime pour la personne, ça va sans dire, et pour la fonction également.
07:43Gabriel Attal, le chef du groupe macroniste à l'Assemblée, il parlait hier d'un référendum
07:46pour, dit-il, alléger le fardeau fiscal qui pèse aujourd'hui sur le travail.
07:49Ça peut être la solution, ça ou pas ?
07:51Ça peut être la solution, moi je crois...
07:53Non, mais quoi ?
07:54Non, mais je crois que les partenaires sociaux sont lucides d'abord sur le diagnostic.
07:57Je rappelle que le 17 décembre, on a commis une déclaration commune pour alerter,
08:01alerter les politiques sur la gravité de la situation économique
08:04et par voie de conséquences sociales, et les appeler à la responsabilité.
08:07J'ai peur qu'on est à peu près chez dans le désert,
08:09même si les solutions que nous avons, organisation syndicale, organisation patronale,
08:12ne sont, en règle générale, pas les mêmes, mais elles peuvent l'être.
08:15Vous êtes déjà fâché, j'ose à peine vous poser une question sur les retraites.
08:18Ça avance, on en est où ?
08:19Mais ça n'avancera que si les règles sont mieux définies.
08:23Moi, je ne veux pas de cette espèce de pot commun entre les retraites privées et publiques,
08:28parce que, vous venez le coup, on va retenter ce qui a été tenté il y a deux ans,
08:32et que j'avais empêché, c'est-à-dire la ponction...
08:34Ça veut dire quoi, le pot commun ?
08:36Il y a des déficits massifs des retraites publiques,
08:39il y a des excédents des retraites, en tout cas complémentaires, privées.
08:42Donc, on veut nous faire travailler sur ce pot commun.
08:46Vous avez peur qu'on plonge dans les excédents du privé ?
08:48Mais bien sûr.
08:49Et ça, c'est no way.
08:50Et ça serait la double peine, on paye déjà des impôts.
08:51Les retraites publiques nous intéressent en tant que contribuables.
08:53Mais si, en plus, il faut détourner les cotisations des entreprises,
08:5760% des salariés, 40% du privé, non, il n'en est pas question.
09:02Donc, moi, je ne me prêterai pas à une discussion qui nous entraînerait dans ce terrain incognitant.
09:08Ça veut dire que, si c'est ça la vie, vous laisserez tomber le conclave, vous n'irez pas ?
09:11Oui.
09:12Vous n'irez pas ?
09:13Oui.
09:14Le MEDEF fera la politique de la place vide.
09:15Par ailleurs, s'il n'est pas gravé dans le marbre, en amont ou en ouverture de la négociation,
09:20que le rendement de la réforme, dite borne, est garanti,
09:23et en fait, il faudrait qu'il soit même amélioré, on n'ira pas non plus.
09:27C'est pas pour faire les malins.
09:28Nous, on ne vit pas pour défendre la réforme des retraites,
09:31mais pour faire tourner l'économie.
09:32Il se trouve que c'est une composante essentielle de la stabilité financière du pays
09:37et de la confiance que nous accordent nos créanciers.
09:3954% de la dette, de l'énorme dette publique française, est détenue par des créanciers étrangers.
09:44On est sous surveillance, il faut quand même l'avoir en tête.
09:47On peut se dire que tout ça est très loin de notre quotidien.
09:48Vous ne voteriez pas la confiance du gouvernement Bayrou, vous, là ?
09:50Mais c'est pas mon rôle.
09:51Mais si, c'est important, c'est important, parce que...
09:53Ça, ce n'est pas mon rôle.
09:54Je reviens à ma question que vous n'avez pas clairement répondu.
09:56Est-ce qu'il vaut mieux pas de budget ou un mauvais budget ?
09:58Est-ce qu'il vaut mieux une censure ou un mauvais budget ?
10:00Non, mais c'est un vrai dilemme pour nous.
10:02Mais ce n'est pas clair.
10:03Oui, ben oui.
10:04Mais on a un mauvais budget, faut-il ne pas avoir de budget ?
10:07Il faut un budget, j'en suis conscient.
10:09Donc, c'est la limite du raisonnement.
10:12Ça n'enlève rien, tout ce que j'ai dit tout à l'heure.
10:14Si on nous garantissait que demain, ça ira mieux, à la limite.
10:18Mais ce n'est même pas le cas.
10:19Merci, Patrick Martin, d'être venu ce matin sur la tête.
10:22Vous restez avec nous.
10:23Philippe Kévrier va essayer de vous défendre.

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