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Thierry Guerrier avec Thibaut Guilluy, Denis Mercier

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Transcription
00:00Sud Radio, l'œil de l'expert.
00:02L'œil de l'expert est la réforme qui touche beaucoup de gens, qui concerne beaucoup d'entre nous.
00:08La réforme du RSA, du revenu de solidarité active et de France Travail, vous savez, l'ancien Pôle emploi notamment,
00:14qui a été associé à d'autres dispositifs et qui est entré en vigueur dans toute la France hier.
00:21Je dis dans toute la France parce qu'il y avait des expériences qui avaient été menées jusque-là
00:25pour mener à bien cette réforme du RSA, de son application,
00:28avec notamment notre expert du jour, Thibaut Gillu. Bonjour Thibaut Gillu, vous êtes avec nous ?
00:33Bonjour.
00:34Alors vous êtes le directeur général de France Travail.
00:36Je voudrais commencer par cette première question tout simplement.
00:38Qu'est-ce que cette réforme qui était expérimentée depuis un an dans plusieurs départements pilote ?
00:43Qu'est-ce que cette généralisation aujourd'hui à toute la France change concrètement ?
00:51Eh bien la première des choses, c'est l'inscription de toutes les personnes qui sont dépourvues d'emploi à France Travail.
00:58Automatique ?
01:00Exactement. Et je pense par exemple aux bénéficiaires du RSA, vous l'avez mentionné,
01:05qui étaient finalement à peine 40% à être inscrits à France Travail.
01:09Donc ils seront désormais tous inscrits, mais c'est aussi le cas des jeunes qui sont suivis en mission locale
01:14ou des personnes qui ont besoin de retrouver une dignité par le travail.
01:19Donc l'idée c'est à la fois, on va en parler, en les inscrivant automatiquement,
01:24de les recenser, de les accompagner pour les ramener au travail,
01:28mais aussi de leur demander des choses et d'avoir des formes d'obligation à leur égale.
01:32Ça c'était la première mesure. Qu'est-ce que ça change d'autre ? Vous disiez concrètement autre mesure ?
01:37Effectivement, si vous avez l'inscription, ça ne va pas changer la vie des gens.
01:42Ce qui va changer, c'est qu'ensuite on va faire le point avec eux pour les orienter vers le bon accompagnement vers l'emploi.
01:48Notamment, par exemple, pour les bénéficiaires du RSA, la signature d'un contrat d'engagement réciproque
01:54avec 15 heures d'activité minimum qui permet chaque semaine de faire en sorte que chaque jour qui passe
02:00soit consacré à retrouver confiance en soi, retrouver une stabilité sociale si nécessaire, se former, retrouver un emploi.
02:07Ça veut dire que les bénéficiaires du RSA auront de nouvelles obligations pour ceux qui en tout cas le touchaient
02:15mais qui n'étaient pas automatiquement inscrits à Pôle emploi, l'ancien Pôle emploi et qui sont aujourd'hui inscrits à France Travail.
02:21Et donc là, vos équipes, les contacts, qu'est-ce que vous avez mis en place pour pouvoir avoir les moyens d'assurer ça ?
02:27Parce que ça vous demande énormément de travail en plus.
02:31Comme vous l'avez mentionné, ce n'est pas une réforme technocratique.
02:35Elle est partie du terrain et depuis 2023, dans 18 départements puis 49 départements, nous avons testé et mis en œuvre cet accompagnement.
02:44Comment on oriente vers le bon professionnel ?
02:47Quels sont les contenus et les activités qui sont nécessaires pour accélérer le retour à l'emploi ?
02:52Quels sont les outils qui vont fonctionner, qui vont simplifier la vie des gens comme des conseillers ?
02:56C'est ce que nous avons testé pendant deux ans pour pouvoir ensuite passer à une génération progressive.
03:01Progressive parce qu'évidemment, si vous avez 1 200 000 personnes qui vont être inscrites automatiquement au 1er janvier,
03:08ce n'est pas en quelques jours que nous allons pouvoir assurer l'accompagnement qui soit adapté à tout le monde.
03:14C'est pour cela que la loi prévoit deux ans pour pouvoir le réaliser.
03:18La deuxième chose, c'est que c'est collectif aussi.
03:20Ce n'est pas France Travail seul, mais c'est France Travail main dans la main,
03:24avec les équipes des départements qui ont la responsabilité de l'insertion sociale et professionnelle,
03:28mais aussi des missions locales, de cap emploi pour les personnes en situation de handicap.
03:32Et je pense aussi à tous les acteurs de l'insertion par études économiques, aux associations qui accompagnent ces personnes
03:38qui connaissent des difficultés particulières de retour à l'emploi.
03:40Et puis les entreprises elles-mêmes, avec leurs différentes filières, et notamment la filière de l'emploi à durée déterminée,
03:48qui aujourd'hui vous aide à essayer non seulement de former ces chômeurs pour essayer de retrouver les moyens,
03:57et notamment psychologiques, la volonté, le désir, la confiance en soi, vous le disiez,
04:02parce que j'ose plus, j'ai des enfants, je suis malade, je n'ai pas de voiture.
04:06C'est compliqué pour les gens aussi de retrouver un travail.
04:09Là l'idée c'est de les amener à reprendre confiance en soi et à aller travailler ?
04:13Effectivement, pour les personnes, c'est de s'adapter à la réalité concrète.
04:18C'est-à-dire que quand on recherche un emploi, parfois on peut aussi être confronté à une difficulté, par exemple, de mobilité.
04:25Je n'ai pas le permis ou je n'ai pas de moyens de locomotion pour me rendre au travail sur des horaires décalés,
04:30des problèmes de garde d'enfants.
04:32Vous savez que plus d'un tiers des bénéficiaires du RSA sont des mamans seules isolées avec des enfants.
04:37Si vous ne résolvez pas, si vous ne les aidez pas à résoudre aussi ces questions très concrètes,
04:42comment voulez-vous que le retour au travail soit possible ?
04:44Mais comme vous le disiez, il y a effectivement accompagner différemment les personnes,
04:48les accompagner mieux, mais c'est aussi de mobiliser les entreprises.
04:52C'est le sens d'ailleurs du lancement de France Travail Pro que nous avons lancé il y a maintenant quelques semaines
04:57pour apporter un meilleur service aux entreprises.
04:58Alors qu'est-ce qui vous attrape les entreprises ?
05:00C'est que vous essayez de les aider à trouver les bonnes personnes qui correspondent à leurs besoins,
05:04parce qu'il y a beaucoup d'emplois non pourvus aujourd'hui en France,
05:06parce que les entreprises ne trouvent pas.
05:08Exactement. Vous avez entre 300 000 et 500 000 emplois non pourvus chaque année.
05:1457% des entreprises ont des difficultés de recrutement.
05:16Et vous savez, le recrutement, c'est souvent dans des toutes petites entreprises
05:20où vous n'avez pas de services de ressources humaines pour pouvoir gérer la complexité du processus.
05:26Et donc c'est pour cela que France Travail a lancé des services simples,
05:30adaptés à ces petites entreprises, pour définir l'offre d'emploi qui va bien,
05:36pour aider à trouver des bons candidats, financer la formation quand elle est nécessaire.
05:41Et c'est parce qu'on va améliorer les services aux entreprises, qu'on va 1. créer plus d'emplois,
05:46et aussi amener les entreprises à s'ouvrir à la diversité des profils.
05:51Trop jeune, trop vieux, trop en situation de handicap, pas tout à fait le bon profil ou la bonne expérience.
05:57Il faut aussi qu'on s'affranchisse parfois du CV pour aller chercher le talent et la motivation.
06:02Oui, vous dites au fond, il faut que les entreprises aujourd'hui, elles recrutent différemment,
06:05avec plus de souplesse, avec moins de rigidité, donc avec des cadres un peu différents.
06:10Mais alors, Thibaut Juillet, vous, le patron de France Travail,
06:13vous venez, et on vient d'évoquer, je dirais de façon très positive, cette réforme du RSA.
06:18Mais disons les choses, Sud Radio, c'est parlons vrai.
06:20Et le parlons vrai, c'est aussi l'idée, et c'est ce que disent beaucoup de syndicats aujourd'hui,
06:25cette réforme, c'était une façon de traquer ceux qui ont des difficultés.
06:29Et surtout, on va imposer ces 15 heures par semaine.
06:32Si les gens ne le font pas, un jour, ils perdront, il y aura des sanctions et ils perdront le RSA.
06:36C'est cette idée-là aussi.
06:37Tout de même, il y avait une volonté de traquer ceux qui, entre guillemets,
06:42en tout cas, c'est la formule que reprochent les syndicats, qui se seraient planqués ou qu'on voit comme ça.
06:48On veut culpabiliser les chômeurs.
06:50Certains aiment bien utiliser des formules.
06:52Moi, vous savez, j'ai passé d'abord quasiment 20 ans de ma vie dans l'insertion des personnes les plus éloignées de l'emploi.
06:57Et ce que j'ai pu constater, comme tous ceux qui sont sur le terrain,
07:00c'est que depuis des années et des années, on laisse les gens sur le bord de la route.
07:05Les bénéficiaires du RSA, il y en a plus de la moitié qui y sont depuis plus de 4 ans.
07:09Il y avait, et ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Cour des comptes,
07:123 contacts par an, mails compris.
07:15Comment voulez-vous que les gens puissent sortir de leur situation ?
07:19Vous avez les moyens de faire mieux aujourd'hui et d'aller vraiment personnellement rencontrer
07:23les personnes qui cherchent un travail et qui pourtant ont du mal,
07:27parce qu'on les a décrits, problèmes de santé, les enfants, etc., les voitures.
07:30Vous avez des moyens aujourd'hui en personnel pour pouvoir assurer ce contact personnel avec les chômeurs ?
07:37C'est exactement la volonté du gouvernement et de la ministre Astrid Panossian.
07:44Et donc, on s'organise pour cela.
07:46On s'organise d'abord en travaillant mieux, plus collectivement.
07:49Parce que vous savez, jusqu'à maintenant, on renvoyait les gens d'un guichet à un autre.
07:53Sauf que si on ne met pas à la fois le problème de l'emploi, du logement et de la garde d'enfants,
08:01en fait, c'est inefficace au possible et c'est les gens qui subissent la complexité du système.
08:06Donc, un, on s'organise mieux, on s'outille.
08:09Et puis effectivement, il faut qu'on mette des moyens adaptés à cela.
08:14Vous ne pouvez pas avoir 400, 500 personnes à suivre quand elles sont en difficulté.
08:18Donc, on s'organise pour qu'un conseiller ait 50, 60, 70 personnes maximum à suivre
08:24pour pouvoir s'adapter et personnaliser la réponse.
08:27Alors oui, c'est des moyens.
08:28On va mobiliser, nous, France Travail, par exemple, plus de 1000 collaborateurs supplémentaires
08:34d'ici la fin 2025 pour assurer cette montée en charge progressive.
08:38À côté de cela, le gouvernement finance aussi 168 millions d'euros au département
08:43pour renforcer les moyens de l'accompagnement social qui est nécessaire.
08:46Donc, on mobilise des moyens et on essaye de les mettre en œuvre de façon aussi plus simple,
08:51plus efficace et plus collective.
08:53On a dit les entreprises, les associations, en effet, de l'économie sociale et solidaire.
08:58Et puis, vous avez raison, les départements, l'organisation, l'institution départementale,
09:03elle a du personnel qui est chargé de gérer, en effet, l'accès au RSA,
09:07puisque c'est une des prérogatives des départements que de s'occuper de ça.
09:11Bon, mais vous n'avez pas répondu à la question.
09:15Il y avait tout de même certains points de cette réforme en disant
09:18c'est une façon de culpabiliser les chômeurs.
09:20Vous n'aimez pas qu'on dise ça de cette réforme ?
09:22Pas du tout, parce qu'en fait, le sujet, c'est d'abord d'accompagner les gens.
09:29Et d'ailleurs, si vous regardez les faits, parce qu'il y a ceux qui commentent,
09:32mais ensuite, si vous allez dans les 49 départements, parce que là, on ne parle pas en théorie,
09:36c'est des gens très concrètement, aujourd'hui, qui sont accompagnés depuis des mois et des mois,
09:3990% d'entre eux se disent satisfaits de l'accompagnement des 15 heures minimum d'activité.
09:45Et dans tous ceux que vous avez récupérés, si j'ose dire,
09:48qui n'étaient pas inscrits à France Travail depuis que vous avez piloté cette expérience dans 49 départements,
09:56combien en pourcentage ont finalement retrouvé un emploi ?
09:59Parce qu'au fond, c'est ça l'objectif.
10:01Et bien exactement, 54%.
10:03Donc vous voyez, il n'y a pas de fatalité.
10:08Quand on s'y met, et pour bien répondre à votre question,
10:12non, on n'est pas là pour stigmatiser les bénéficiaires du RSA.
10:15On est là pour permettre à chacun de pouvoir sortir de l'assistanat,
10:20parce qu'on ne vit pas avec un RSA, on survit.
10:23Et donc, ce qui est important, c'est que ce soit un filet de sécurité le temps de retrouver un travail.
10:27Donc notre seule obsession collective, ça doit être de donner les moyens à chacun
10:32de pouvoir retrouver confiance, de l'assistance personnelle et à la fin, un emploi.
10:36Parce qu'il n'y a que ça qui permet de sortir de la pauvreté et de retrouver de la dignité.
10:40Et c'est vrai qu'au premier rendez-vous, quand il n'y a pas eu de contact,
10:43parfois depuis des mois et des mois, la convocation peut faire peur à la personne.
10:47Mais je peux vous dire que...
10:48Il y aura sanction ?
10:49Est-ce qu'on supprimera un jour le RSA à quelqu'un qui finalement n'aura pas trouvé de travail ?
10:53Mais c'est déjà dans les textes depuis la mention du RMI.
10:56C'est-à-dire que le contrat d'engagement réciproque,
10:58s'investir dans son parcours, c'est déjà prévu.
11:01Simplement, comme il n'y avait pas de droit, il y avait finalement très peu de devoirs.
11:05Et c'est sûr que ce qu'on demande aux bénéficiaires du RSA,
11:08mais on n'a pas besoin de forcer tellement le trait,
11:11c'est de pouvoir s'engager dans leur parcours.
11:13Parce que moi, à titre personnel,
11:15je n'ai jamais vu quelqu'un réussir sa vie sans sa propre volonté.
11:18Et donc, c'est ça que nous activons.
11:20Et donc, on soutient, on apporte, on adapte les problématiques sociales, la formation,
11:25tout ce qu'il faut.
11:26On donne le temps au temps aussi quand il est nécessaire.
11:29Mais à la fin, c'est le retour à l'emploi qui doit être notre seule boussole.
11:33– Merci Thibault Jouy-Louis, le directeur général de France Travail,
11:36le patron de France Travail qui pilote cette grande réforme du RSA
11:40et de France Travail et de l'ancien pôle emploi,
11:42d'avoir accepté de répondre aux questions de Sud Radio,
11:46l'œil de l'expert ce matin.
11:47On se retrouve dans quelques minutes,
11:49on va parler avec un autre expert,
11:51un de nos meilleurs spécialistes des glaciers.
11:54On va parler de la fonte des glaciers,
11:56car l'ONU a décidé que 2025 serait l'année de la préservation des glaciers.
12:02Il s'appelle Denis Mercier, il est avec nous.
12:04A tout de suite sur Sud Radio.
12:06– Sud Radio, votre avis fait la différence.
12:09– Oui bonjour Sud Radio, merci de votre émission,
12:12de donner la parole au territoire sur les campagnes.
12:15– Sud Radio, parlons vrai.
12:17– Pour l'œil de l'expert maintenant, un grand spécialiste de nos glaciers,
12:21car nous allons nous intéresser à la situation des glaciers.
12:25Vous savez, ces énormes lagunes gelées,
12:28ces grandes réserves d'eau douce qui sont au nombre,
12:30je l'ai vu grâce à vous Denis Mercier, bonjour.
12:32– Bonjour Thierry Guéry.
12:33– Ravi de vous accueillir ici sur l'antenne de Sud Radio,
12:35le sud de la France, dans lequel notamment,
12:38il y a évidemment beaucoup de nos glaciers,
12:40les Pyrénées, les Alpes, mais pas que.
12:43Et il y a dans le monde, j'ai découvert ça dans ce magnifique
12:47Atlas des glaciers que vous venez de publier aux éditions Autrement,
12:51un petit livre formidable qu'on peut offrir à tous ceux,
12:54gamins ou anciens ou boomers comme moi,
12:57qui sont passionnés par ces sujets qui sont liés à la nature et à la science.
13:00Dans cet Atlas des glaciers, vous nous expliquez qu'il y a
13:03à peu près dans le monde 264, quand je dis à peu près,
13:06c'est une très mauvaise formule, très précisément,
13:09274 000 de ces glaciers de nature très différente,
13:13on va le voir, il y a ceux en montagne, bloqués dans les vallées,
13:16et puis il y a ceux qui sont par exemple au pôle Nord ou à l'Antarctique,
13:19des couches plates très différentes.
13:22Ce sont donc des grosses réserves gelées d'eau douce,
13:25pas d'eau de mer, d'eau qui n'est pas salée,
13:28et qui aujourd'hui, il faut bien le dire, sont en mauvaise situation,
13:31ils fondent les glaciers. Vous êtes géographe,
13:34Denis Mercier, vous êtes docteur en géographie,
13:37vous êtes géomorphologue, vous étudiez la géomorphologie
13:40de la planète. Qu'est-ce que ça veut dire ?
13:43C'est quoi cette discipline déjà ? Expliquez-nous !
13:46La géomorphologie est une des branches de la géographie physique en France
13:49qui s'intéresse aux formes du relief terrestre et à l'évolution
13:52terrestre, et ma spécialité c'est plutôt de regarder
13:55ce qui se passe dans les régions qui sont englacées
13:58ou qui ont été englacées, quelles sont les conséquences
14:01de la fonte de ces glaciers. Et la géomorphologie,
14:04pour prendre un exemple très concret de cette fonte des glaciers,
14:07c'est par exemple les glaciers qui appuient
14:10sur les parois des vallées quand ils sont présents, quand ils fondent, ils disparaissent,
14:13et la pression exercée par les glaciers sur les parois
14:16entraîne une décompression au moment où les glaciers fondent,
14:19et ça entraîne des écroulements rocheux, des écroulements de parois,
14:22des glissements de terrain. C'est pour ça qu'il y a, par exemple,
14:25sur l'autoroute Blanche, en France,
14:28près de Chamonix, il y a notamment là où il y a des zones un peu glacées
14:31qui ont disparu parce qu'elles ont fondu,
14:34il y a des éboulements aujourd'hui puisqu'il y a plus cette pression
14:37qui retenait en quelque sorte la pierre sur la paroi,
14:40sur le mur en fond. Exactement, et en corollaire
14:43de la fonte des glaciers, il y a la fonte liée au réchauffement climatique,
14:46la fonte de ce qu'on appelle le pergélisol de parois, ou le permafrost,
14:49c'est-à-dire l'eau qui... On a du permafrost aussi dans les zones de glaciers,
14:52y compris en France ? Oui, bien sûr, dans toutes les parois du massif
14:55du Mont Blanc, par exemple,
14:58les fissures sont comblées d'eau gelée,
15:01donc de pergélisol, ce qu'on appelle le pergélisol,
15:04et ce pergélisol est très sensible
15:07au rayonnement solaire et à l'augmentation des températures de l'air,
15:10et quand ce pergélisol fond,
15:13l'eau gelée est remplacée par de l'eau liquide, ça lubrifie
15:16les parois, et ça entraîne l'écroulement
15:19de la face ouest des Drus, dans le massif du Mont Blanc, par exemple,
15:22ou d'autres écroulements rocheux qui provoquent...
15:25Avec un danger, et aussi avec le danger immédiat au moment de la chute,
15:28mais aussi, on verra pour les Andes
15:31et pour l'Asie, avec des gens qui ont besoin
15:34de l'eau des glaciers qui coule normalement
15:37beaucoup plus doucement, et qui là vont voir cette réserve disparaître.
15:40Mais je voudrais préciser d'abord que vous n'êtes pas
15:43un spécialiste purement théorique
15:46des glaciers, depuis votre bureau de Sorbonne Université
15:49à Paris, vous êtes docteur en géographie et vous enseignez
15:52la géographie et la géomorphologie,
15:55en effet, mais vous êtes aussi quelqu'un qui cherche sur le terrain.
15:58Vous avez fait combien d'expéditions aujourd'hui ?
16:01J'en ai fait plus d'une vingtaine, je pense.
16:04Sur toute la planète ? Non, j'ai des zones de prédilection,
16:07j'ai beaucoup travaillé au Spitsberg, qui est en Norvège,
16:10l'île principale de l'archipel du Svalbard,
16:13entre le pôle Nord et le Cap Nord,
16:16et là j'ai travaillé sur les conséquences directes de la fonte
16:19des glaciers, notamment l'augmentation des débits des rivières
16:22et la mobilité des sédiments, et la mobilité
16:25et la construction des deltas, comment un delta, finalement,
16:28est très bien alimenté en sédiments,
16:31à l'état des fleuves, qui construisent et qui progressent
16:34sont très bien alimentés, ça fait des très bons analogues
16:37et des comparaisons possibles avec
16:40notamment les deltas du monde qui sont, au contraire, corsetées
16:43avec des barrages, des digues, etc.
16:46Et puis j'ai aussi, et je travaille en ce moment,
16:49beaucoup en Islande, pour voir la conséquence
16:52Au près du Groenland, en dessous, cette grande île qu'est l'Islande ?
16:55Exactement, et je travaille sur, j'essaie de dater
16:58avec une équipe, les glissements de terrain
17:01qui se sont mis en place il y a une dizaine de milliers d'années
17:04quand l'Islande a commencé à perdre cette grande calotte de glace
17:07qui recouvrait cette île
17:10et donc j'essaie avec mes collègues
17:13Donc la Norvège, l'Islande, bien sûr le Mont Blanc, vous connaissez
17:16nos glaciers européens et français, notamment, donc vous les suivez
17:19Qu'est-ce qui se produit ? C'est quoi le phénomène en ce moment ?
17:22La fonte, j'ai lu deux chiffres qui m'ont frappé
17:2525%, c'est-à-dire un quart, nous avons perdu un quart
17:28de la surface de nos glaciers depuis 50 ans, c'est ça ?
17:31Tout à fait. Mais alors, je vais tout de suite vous poser la question
17:34qui fâche, beaucoup de nos auditeurs sont des gens qui ne croient pas
17:37au réchauffement climatique, ou qui considèrent que c'est
17:40un phénomène naturel, d'ailleurs les chiffres que je viens de citer le disent
17:43puisque 50 ans, ça date d'un quart de siècle
17:46une moitié de siècle pardon, donc au fond
17:49qu'est-ce qui est la cause de cette fonte des glaciers ?
17:52Le réchauffement de l'atmosphère terrestre ?
17:55L'augmentation de la température qui modifie
17:58l'alimentation des glaciers,
18:01les glaciers, si on a des glaciers, c'est qu'ils sont bien alimentés en neige,
18:04et donc pour être bien alimentés en neige, il faut que les températures soient froides
18:07et donc il y a beaucoup de précipitations, mais des précipitations neigeuses.
18:10Mais on a de la neige, on en a beaucoup !
18:13Il y a une deuxième condition, c'est qu'il faut qu'elle reste l'été.
18:16Il y a moins de neige l'hiver déjà, parce qu'il pleut plus
18:19qu'il ne neige, et la seconde explication c'est que
18:22l'été, on a des températures qui sont beaucoup plus élevées
18:25qu'on avait il y a encore 50 ans, et là ça fond trop l'été en fait !
18:28C'est-à-dire que si on prend l'année 2024,
18:31en Suisse, dans le massif
18:34alpin suisse, on avait
18:37un bilan de masse des glaciers qui est négatif, alors que
18:40il y avait eu un hiver et un printemps
18:432024 très neigeux. C'était la meilleure
18:46apport de neige du printemps, mais l'été a été
18:49trop chaud, et toute cette masse de neige
18:52a fondu, et le bilan est négatif.
18:55Mais j'ai envie de vous dire docteur, en géographie, est-ce que c'est grave ?
18:58Parce qu'au fond, pourquoi c'est grave ? Vous nous dites même carrément
19:01je vous ai lu, disant
19:04la fonte des glaciers va affecter l'ensemble de l'humanité. Pourquoi c'est si grave ?
19:07Parce qu'après tout, il y en a qui se sont formés
19:10il y en a qui se réduisent
19:13aujourd'hui...
19:16Il y a plusieurs échelles, mais à l'échelle mondiale
19:19il y a deux grandes conséquences qui sont importantes, c'est l'élévation du niveau marin
19:22liée à la fonte des glaciers.
19:25L'eau douce va augmenter
19:28la quantité d'eau dans la bassine
19:31océanique, et ça va inonder et
19:34submerger les terres basses, pas tous les littoraux du monde
19:37il y a beaucoup de littoraux qui seront épargnés par cette élévation du niveau marin, les littoraux
19:40à falaises par exemple. En revanche, les littoraux qui sont déjà bas
19:43les deltas, qui sont pour partie du monde
19:46très entropisées, avec des densités de population
19:49plus élevées parce que ce sont des terres nourricières
19:52en Asie, dans les Andes, en Amérique latine
19:55exactement, et donc ces zones basses
19:58et les zones estuariennes chez nous en France par exemple, seront
20:01les premières impactées par cette élévation
20:04parce qu'on a beaucoup de marées maritimes
20:07des zones basses topographiquement
20:11C'est l'énigme, la question n'est pas de savoir
20:14si ça va déborder, on sait que ça va déborder à cause du
20:17réchauffement climatique, c'est quand, et donc
20:20c'est la bonne question, et les projections
20:23nous donnent au moins 50 cm
20:26à 1 mètre d'ici à la fin du XXIème siècle
20:29donc il faut se préparer dès maintenant
20:321 mètre d'élévation des eaux dans les zones estuariennes
20:35comme vous dites, c'est beaucoup, c'est considérable, c'est des maisons
20:39Vous avez parlé de la Suisse tout à l'heure, est-ce qu'il y a des solutions
20:42pour sauver les glaciers, par exemple, les Suisses mettent des bâches
20:45ils installent des grandes bâches pour protéger
20:48c'est pas très beau, mais c'est efficace quand même, ça protège
20:51notamment l'été quand il y a, il faut stopper le soleil
20:54c'est exactement le principe, c'est le but recherché
20:57on refait de manière artificielle le phénomène d'Albedo
21:00c'est-à-dire la partie du rayonnement solaire qui est renvoyée par la surface
21:03et si vous mettez une bâche blanche, le rayonnement solaire ne va pas
21:06faire fondre le glacier dessous, techniquement ça marche
21:09mais si vous voulez que votre glacier soit nourri l'hiver, il faut enlever la bâche
21:12pour que la neige puisse revenir
21:15et vous mettez un pansement sur une jambe de bois, c'est quelque chose qui ne va pas
21:18faire à terme, à moyen et à long terme
21:21faire préserver votre glacier sur des dizaines
21:24voire des centaines d'années, donc ça marche
21:27la technique et les ingénieurs qui ont mis au point cette technique
21:30ça marche techniquement
21:33mais c'est une fausse bonne solution
21:36Dans votre magnifique ouvrage, cette atlas des glaciers
21:39aux éditions Autrement, Denis Mercier, vous nous montrez
21:42en quoi il y a des natures très différentes, c'est pas du tout pareil
21:45évidemment les glaciers des vallées comme à Chamonix
21:48la très belle vallée de Chamonix et du Mont Blanc
21:51les glaciers qui sont dans les vallées, donc qui sont protégés justement
21:54parce qu'ils sont enfermés dans la terre des vallées
21:57des grands glaciers de l'Islande ou du Groenland
22:00ou de Paule ou de l'Antarctique aussi
22:03Oui, alors la diversité
22:06tous les glaciers, c'est ce que j'essaie de montrer dans cette atlas
22:09des glaciers aux éditions Autrement, j'essaie de montrer que
22:12cette diversité des glaciers fait que les tout petits glaciers
22:15comme les glaciers des Pyrénées sont à terme condamnés
22:18dans les 10, 20, 30 ans qui viennent
22:21en revanche, des masses todontes de glace comme l'Antarctique
22:24et une grande partie du Groenland, il y aura encore des glaciers
22:27à la fin du XXIe siècle et beaucoup de glaciers
22:30qui sont les plus hauts en altitude ou le mieux placés sur les chiquiers mondiaux
22:33des glaciers, eux seront préservés à la fin du XXIe siècle
22:36Il y avait déjà des glaciers qui fondaient
22:39des hauts niveaux marins très anciens, vous le racontez par exemple
22:42au Groenland, c'est passionnant, on pourrait parler des déserts
22:45de nos glaciers parce que ce sont des lieux magnifiques
22:48et il y a cette très belle photo qui est prise à quel endroit ?
22:51C'est en Patagonie, c'est le Péridot Moreno
22:54et c'est aussi le sud de l'Amérique Latine avec ce très beau glacier
22:57je montre pour Youtube notamment, notre chaîne Youtube
23:00et tous ceux qui nous regardent tout en nous écoutant
23:03l'Atlas des Glaciers de Denis Mercier
23:06professeur à Sorbonne Université, un des meilleurs spécialistes
23:09mondiaux des glaciers qui a accepté de venir aujourd'hui en parler
23:12on leur souhaite avec l'année de préservation des glaciers décidée par l'ONU
23:15une très bonne année 2025 car c'est un peu une formule
23:18aux glaciers mais aussi à vous et à votre équipe et aux éditions
23:21autrement merci à vous d'avoir été avec nous
23:24moi je vais remercier Dési, Djamel Abdelak
23:27et toute l'équipe de Sud Radio, Marie Foliot aussi
23:30ce matin qui m'ont accompagné pour cette matinée
23:33et vous aussi les auditrices et les auditeurs de Sud Radio
23:36auxquels je souhaite encore une très belle année 2025

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