Avec Oleg J. Imbert, Directeur de l'entreprise Vitraux Imbert & Christophe Beausoleil, L'atelier de création de la Forge d'Art Loubière
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00:00Le réseau des chambres de métiers de l'artisanat, artisans de la nouvelle économie présente
00:05Sud Radio Cessa la France, Nathalie Schrengerma.
00:09Bienvenue dans Cessa la France, l'émission du savoir-faire français consacrée aujourd'hui
00:14à ce triomphe du savoir-faire français au secours de Notre-Dame de Paris.
00:18Régulièrement dans cette émission, on met en avant ces métiers rares, peu connus
00:21du grand public, mais qui constituent une véritable vitrine du made in France et de
00:26tous les savoir-faire hexagonaux.
00:28Le dernier exemple en date, la cathédrale Notre-Dame, ce joyau de notre patrimoine gravement
00:32endommagé par les flammes en 2019, s'élève à nouveau grâce à un effort collectif hors
00:38du commun.
00:39Artisans, compagnons, métiers d'art réunis autour d'un même objectif, lui redonner
00:43sa flamme.
00:44On en parle tout de suite avec nos invités qui ont travaillé à la rénovation de Notre-Dame.
00:49Et parmi ces 2000 artisans du chantier, des charpentiers, des maîtres verriers, des maçons,
00:56des tailleurs de pierre, des souffleurs de verre, des tisserands, les vitraux imbères.
01:00Merci d'être avec nous, Oleg Imbert.
01:02Et bonjour Nathalie, merci pour votre invitation.
01:06Alors cet artisanat qui a su traverser les siècles, grâce à la transmission de techniques
01:11ancestrales, pour travailler sur Notre-Dame de Paris, en fait partie de ces entreprises
01:15qui ont dû justement se mobiliser.
01:18Ça a été un travail d'historien, d'architecte ? Comment ça se passe quand on travaille sur
01:24un chantier comme celui-ci ?
01:26Alors nous, si vous voulez, on a été sélectionnés à travers un appel d'offres, c'était en
01:32septembre 2022, donc ça fait depuis deux ans qu'on travaille sur la cathédrale.
01:37Et on est amené un peu à faire surtout sur pourquoi on nous a appelé, c'est-à-dire
01:43de la restauration de vitraux d'art.
01:45Donc on est vraiment spécialisés dans ce type de travaux.
01:49Et c'est vrai que bon, quand on travaille sur un tel chantier, on est amené à faire
01:53un peu de tout, à la fois livreur, on organise, on doit organiser l'hébergement pour les
02:01salariés, etc.
02:02Donc il y a énormément de différentes tâches qui nous sont associées quand on est sur
02:06ce type de chantier d'ampleur.
02:07J'imagine que c'est une fierté de d'être sélectionnés pour Notre-Dame de Paris ?
02:11Oui, oui, tout à fait, c'est vraiment une fierté.
02:16Parce que si vous voulez, quand on travaille sur ce chantier, à la base on ne pensait
02:23pas vraiment l'avoir.
02:24Ça a été quand même une surprise et un choc.
02:26Et ensuite, quand l'établissement public nous a donné leur confiance, on a été bien
02:32sûr honorés et très fiers.
02:33Mais surtout, on est fiers d'avoir aussi fait ce qu'on appelle du travail bien fait, où
02:40on a su répondre aussi à cette demande qui est quand même forte et avec de nombreuses
02:46contraintes aussi.
02:47Justement, en parlant des contraintes techniques, on a beaucoup parlé de l'importance de
02:52travailler, de respecter l'esprit de Notre-Dame.
02:55A l'époque, les artisans ont travaillé avec des méthodes anciennes.
02:58Comment est-ce qu'on peut faire aujourd'hui des vitraux maintenant, à notre siècle,
03:03au XXIème siècle, en sachant qu'on travaille sur des vitraux qui ont été réalisés au
03:06Moyen-Âge ?
03:07Il se trouve que, justement, notre entreprise, mais toutes les entreprises qui ont travaillé
03:12sur Notre-Dame, travaillent bien sûr, parfois on utilise des moyens plus contemporains comme
03:21des échafaudages ou des moyens de levage qui sont adaptés à notre époque.
03:25Mais en tout cas, en atelier, on est amené à travailler avec les mêmes techniques ancestrales
03:31et de savoir-faire.
03:32Toujours aussi manuel ?
03:33Toujours aussi manuel.
03:34Toujours aussi manuel.
03:35Toujours aussi manuel.
03:36On a vraiment un métier où la main-d'œuvre a une place principale.
03:41Après, on est amené, bien sûr, à utiliser aujourd'hui les ordinateurs pour échanger
03:47par mail ou faire éventuellement des dessins.
03:49Mais vraiment, excusez-moi, parce qu'il y a des gens qui passent là.
03:54Vous êtes sur un chantier, c'est normal en même temps.
03:57Non, non, là je suis actuellement dans le salon des entrepreneurs 13 à Marseille.
04:03Donc, il y a un peu de gens qui passent, excusez-moi.
04:06Mais oui, du coup, c'est pour ça qu'en effet, on garde les mêmes techniques qu'à l'époque,
04:11même si aujourd'hui, avec l'électricité, etc., on peut se permettre d'avoir des outils
04:15qui sont un peu plus modernes.
04:16Oui, c'est ça.
04:17Le plomb, par exemple, qui est devenu l'ennemi à combattre, là, j'imagine que c'est remplacé
04:22par de l'étain ou d'autres voilà.
04:23Il y a quand même des matériaux qui ont évolué aussi.
04:26Alors, écoutez, pas vraiment.
04:29Pour nous, le plomb, c'est primordial.
04:33C'est vraiment ce qui a permis de révolutionner notre métier.
04:37C'est vraiment la matière qui compte le plus pour nous, parce qu'elle dure dans le temps
04:41et elle est aussi malléable.
04:42Donc, le plomb, si vous voulez, il ne faut pas le voir comme quelque chose de mauvais
04:46en soi.
04:47Dans votre savoir-faire, c'est primordial pour pouvoir justement réaliser les vitraux
04:51les plus résistants possibles et fidèles à l'esprit de l'époque aussi.
04:55Les vitraux, eux-mêmes, c'est des composants de verre qui sont sortis dans du plomb.
05:00Et ça, ça date depuis le 10e siècle.
05:03Donc, le plomb, c'est vraiment à une place primordiale dans la réalisation des vitraux.
05:09Mais d'ailleurs, pas que nous.
05:10Il y a aussi les couloirs, etc. qui utilisent aussi le plomb parce que le plomb a vraiment
05:14cette force de rester dans le temps et d'être malléable.
05:17Et bien évidemment, si c'est utilisé correctement, ce qui est le cas, puisqu'on a bien sûr
05:23des suivis de nos salariés en ce qui concerne le plomb, et également des systèmes aujourd'hui
05:31de ventilation, etc. qui permettent de travailler avec la poussière de plomb, etc.
05:36Donc, aujourd'hui, on est vraiment adapté.
05:38Il y a aujourd'hui très peu de cas, il n'y a plus de cas de saturnisme dans les ateliers,
05:43il n'y a plus de cas, très très peu.
05:44Donc, il faut faire attention, le plomb, ça reste très important et nous, on est vraiment
05:49pour le plomb parce que sans ça, les vitraux de nos cathédrales auront du mal à être
05:55restaurés.
05:56Après, il faudra peut-être trouver d'autres solutions.
05:58Ça a déjà été le cas, par exemple, à la cathédrale Saint-Front, dans la salle
06:01du Trésor, où on avait eu la chance de faire une création dans la salle du Trésor, où
06:06là, on a utilisé, si vous voulez, une méthode de collage sur verre.
06:10On n'y avait pas de plomb, mais on a dû coller des supports en verre qu'on avait
06:14préalablement peints en atelier, puis ensuite les coller sur une autre feuille de verre.
06:21Donc, c'était un processus qui existait auparavant un peu en Allemagne.
06:25Donc, ça peut exister, mais ça ne remplacera jamais le plomb.
06:28Et au niveau de la lumière, qui est importante aussi pour magnifier les vitraux, comment
06:32on fait ? On colore le verre ? Comment on colore le verre pour les vitraux ? Comment
06:36on trouve la bonne couleur ?
06:38On nous appelle les passeurs de lumière.
06:40On transforme la lumière extérieure en lumière intérieure.
06:43Il y a deux façons pour le verre.
06:45Le verre, on l'achète déjà dans une teinte qui est déjà rouge, bleue, verte, colorée
06:52dans la masse.
06:53Et on a un fournisseur, d'ailleurs, on peut les saluer, l'Averix Injuste, qui est épitomogène
06:57de Saint-Robin.
06:58Grâce à eux, on arrive à avoir des produits de très bonne qualité et ça nous permet
07:03d'avoir des teintes qu'on souhaite à nos ateliers.
07:07Et ensuite, il y a aussi le travail de peinture sur verre, si vous voulez.
07:10On utilise des grisailles, ce sont des émeaux d'oxyde métallique et avec la cuisson à
07:15600 degrés dans un four, si vous voulez, cet oxyde métallique, cette grisaille va
07:19s'imprégner dans le verre et c'est ça qui va permettre que cette peinture reste
07:24sur le verre.
07:25Quelle a été la partie la plus compliquée, justement, dans cette restauration des vitraux
07:30pour Notre-Dame de Paris ?
07:31Pour Notre-Dame de Paris, je dirais que c'est surtout la logistique et l'organisation
07:38à la fois liées à la distance, parce que nous, nous sommes dans un atelier qui est
07:41à Marseille, marseillais, et aussi liées aux contraintes du site.
07:46C'est-à-dire, voilà, j'en parlais l'autre jour, mais bien sûr, quand vous avez affaire
07:53à un protocole plomb dû aux poussières de plomb qui sont tombées sur les vitraux
08:00à cause de l'incendie, et d'ailleurs tous les compagnons étaient dans la même situation
08:05où il fallait passer par un sas propre, un sas sain, et ensuite, à chaque fois, si vous
08:10voulez, qu'on voulait aspirer, nettoyer, il fallait absolument qu'on ait à la fois
08:13des équipes non adaptées, avec par exemple des aspirateurs avec des filtres spécifiques,
08:18ou des tenues, les combinaisons, etc., ou des masques à ventilation assistée qui nous
08:22permettent de travailler dans ces conditions.
08:23Donc ça, c'était quand même assez difficile.
08:25Et ensuite, voilà, la distance, l'organisation, puisqu'il faut quand même amener du personnel,
08:30des compagnons sur site, et leur faciliter au maximum la tâche, et pour ça, ça veut
08:35dire la livraison de matériel, par exemple de matériaux ou autres, où il faut savoir
08:41quand même emmener ça correctement.
08:42Mais bon, je dois dire que l'établissement public a été exceptionnel là-dessus, ça
08:47a été très bien organisé, et vraiment, ça a été appréciable tout au long du chantier.
08:53Ça a été une sacrée aventure humaine, parce que finalement, ces compagnons, ces entreprises
08:57qui parfois sont concurrentes, c'est normal, sur différents marchés, tout d'un coup,
09:01il a fallu travailler tous ensemble.
09:03Oui, tout à fait.
09:04Alors c'est vrai qu'on avait chacun un petit peu, si vous voulez, notre précaré, on peut
09:09dire ça comme ça, chacun avait son territoire.
09:10Sa spécialité, son territoire, oui.
09:12Oui, mais c'est vrai qu'on a eu une chance de rencontrer des gens de tout corps de métier,
09:17des charpentiers, des chafaudeurs, d'autres maîtres verriers aussi, ça peut être des
09:22couvreurs également, des peintures d'orures, toutes sortes de métiers de l'artisanat
09:28d'art.
09:29Et c'est vrai que ça a créé un lien, parce que c'est vrai que quand on travaille sur
09:34ce chantier, chantier du siècle quand même, forcément ça crée un lien, et c'est vrai
09:38que cette aventure, ça a créé un lien, et en même temps, ça a permis, et c'est ça
09:44qui est exceptionnel aux entreprises artisanales, de montrer leur savoir-faire, vraiment unique,
09:49qui est vraiment, qui est tentative dans le monde entier, de ce savoir-faire artisanal.
09:55La valeur inestimable de ces savoir-faire, effectivement, qui sont en danger pour certains,
09:59donc c'est vrai que c'est important de montrer tout ça.
10:01Oui, c'est vrai que c'est très fragile, c'est un équilibre très fragile, ce sont des métiers
10:08qui sont difficiles, et qui sont parfois, qui peuvent être, à cause de, par exemple,
10:16des travaux ou un manque de carnet de commandes, qui peuvent très vite perdre le savoir-faire
10:21même, on peut perdre le savoir-faire, donc c'est important d'arriver à continuer à
10:25faire en sorte que ces entreprises puissent travailler.
10:27Bon, c'est vrai qu'avec le Notre-Dame de Paris, ça a permis, bien évidemment, un
10:30élan aussi, de toutes ces entreprises, d'avoir une certaine stabilité financière pendant
10:35les travaux de Notre-Dame, mais maintenant, on va remettre le bleu de travail, on va se
10:40remettre sur le compteur à zéro, et on va être vigilant, et il va falloir aller chercher
10:46du chantier.
10:47Oui, alors on a beaucoup parlé des défis religieux avec Notre-Dame, mais il faut le
10:50rappeler, les créations contemporaines sont aussi une grande partie de votre activité.
10:54Un petit mot rapide, c'est une entreprise familiale, la famille Vitro-Imbert, qui porte
10:59le nom de famille.
11:01Bien sûr, tout à fait.
11:02Alors écoutez, fondée en 1981 par mon père Dominique Imbert, qui est un maitre-dérié
11:07peintre, un peintre aussi de, vraiment, qui est un artiste peintre, mais qui a étudié
11:16à Olivier de Cerf, qui est une école spécialisée dans le vitrail, et après avoir travaillé
11:20pour une entreprise à Paris, un atelier, il est revenu à Marseille, puisqu'il est
11:25né à Marseille, et il a ouvert son entreprise en 1981, et depuis 40 ans, mon père, c'est
11:30vrai qu'il a travaillé vraiment de manière traditionnelle, comme on le fait aujourd'hui,
11:37mais aussi a été porteur de beaucoup de projets de création, notamment en Bretagne,
11:41ou aussi pour, par exemple, le conseil régional PACA, donc on a fait d'autres choses aussi,
11:48mais disons qu'il a cette fibre artistique, mais c'est vrai que c'est ça qui amène
11:52un peu la valeur ajoutée dans ces ateliers d'artistes, d'artisans d'art, c'est
11:58à la fois, enfin en tout cas dans le métier de vitrailliste, c'est de savoir connaître
12:02la peinture sur l'air, et aujourd'hui on a aussi d'autres vitraillistes compagnons
12:07qui sont à l'atelier et qui maîtrisent ce savoir-faire, et c'est ça qui est très
12:11important, c'est de continuer, périminer ce savoir-faire, et moi mon rôle c'est vraiment
12:16ça, c'est de sublimer le travail de ces artisans, et de faire en sorte que ce savoir-faire
12:21puisse continuer dans les siècles à venir.
12:23Voilà, et ce chantier Notre-Dame de Paris aura été aussi un formidable coup de projecteur
12:29sur ces précieux savoir-faire français.
12:31Merci beaucoup Oleg Imbert d'avoir pris le temps de nous présenter cette belle entreprise
12:35Vitro Imbert, et puis justement cette belle aventure que vous avez vécue à travers la
12:39restauration de Notre-Dame de Paris.
12:42Merci et belle journée à vous, au revoir !
12:44Merci, merci Nathalie, au revoir !
12:53SUD RADIO CESSA LA FRANCE, Nathalie Schrengerma
12:56Nous voilà de retour dans Cessa la France, l'émission du savoir-faire français consacrée
13:00à Notre-Dame de Paris, au triomphe du savoir-faire français qui est venu au secours de la cathédrale.
13:05On met en avant justement ces entreprises, ces artisans qui ont travaillé sur la cathédrale,
13:09à la restauration de la cathédrale.
13:11Avec nous pour en parler justement, Christophe Beausoleil qui gère l'entreprise Loubière
13:16La Forge d'Art.
13:17SUD RADIO CESSA LA FRANCE
13:20Bonjour Christophe !
13:21Bonjour !
13:22Alors vous aussi vous avez travaillé sur la restauration de Notre-Dame, quel chantier.
13:26Expliquez-nous justement la partie que vous avez réalisé, votre corps de métier, votre
13:32savoir-faire et de quelle façon vous avez participé à cette restauration ?
13:35Alors donc on est une entreprise de ferronnerie d'art, à ce titre on restaure essentiellement
13:41tout type de monument métallique, on va dire, d'orage métallique dans un monument historique
13:49et dans le cadre de la cathédrale Notre-Dame de Paris.
13:53Alors je tiens à préciser aux auditeurs que vous avez un petit problème de voix,
13:56vous avez dû prendre un soif, vous avez trop parlé, il y a eu tellement d'interviews
13:59ou bien des courants d'air en travaillant, non non c'est pas grave, pour qu'on puisse
14:02comprendre que ce n'est pas votre voix habituelle.
14:05Je suis vraiment désolé, j'ai essayé de poser la voix pour éviter d'avoir...
14:11Voilà, prenez le temps de répondre et racontez-nous justement de quelle façon vous avez participé
14:15au chantier Notre-Dame ?
14:17Donc on travaille essentiellement dans tout ce qui est restauration, d'ouvrage métallique
14:24et notamment dans le cadre de monuments historiques.
14:27Pour le chantier de restauration, en fait, notre intervention a démarré, allez pas
14:34le lendemain, mais quelques jours après l'incendie.
14:37Ah oui, donc vous c'est quasiment dès 2019 vous étiez sur le chantier ?
14:39Dès 2019, dès avril 2019, nos chantiers se sont arrêtés et on est intervenu pour
14:47la mise en sécurité et notamment la mise en sécurité des vitraux, puisque ça c'était
14:52une partie importante et où il y avait même des vitraux historiés et donc il fallait
14:57protéger l'ensemble de ces vitraux, les mettre en caisse et donc dans ce cadre-là,
15:04nous sommes intervenus lors de la dépose de ces vitraux.
15:07Ah oui, et là aussi vous avez été appelé en urgence tout de suite, ça a été quoi ?
15:13Il a fallu mobiliser les équipes pour se mettre tout de suite en marche pour sauver
15:16Notre-Dame ?
15:17Tout à fait.
15:18En fait, à ce moment-là, on ne se pose pas trop de questions, l'ensemble des chantiers
15:22sur lesquels nous étions, et notamment on en avait quelques-uns en région parisienne,
15:26on les a stoppés, on n'a pas été réquisitionnés, mais on appelle ça de la quasi-réquisition.
15:33En fait, nous on est intervenu pour aider les maîtres verriers qui venaient déposer
15:42les vitraux.
15:43On venait avec eux pour déposer les nourrages métalliques qui maintiennent les vitraux
15:48en place.
15:49Donc c'est un petit coup d'air en enlevant un des vitraux qui vous a abîmé la voix.
15:54C'est ça.
15:55Et alors, pour retirer ces vitraux justement, pour ne pas les abîmer et en même temps
15:58être dans l'urgence, comment on travaille ? Est-ce qu'on est encore sur des techniques
16:02anciennes ? Est-ce que là non ? Heureusement, on a des nouvelles technologies qui permettent
16:06d'aller plus vite, comment on arrive à déposer aussi rapidement des vitraux ?
16:10Là, c'est un problème d'hommes, vous avez mille heures à faire, si vous mettez un homme,
16:15il va mettre mille heures, si vous mettez mille hommes, il va mettre une heure.
16:18Donc en fait, l'idée, c'est qu'on a été un certain nombre de maîtres verriers, de
16:24ferronniers, appelés sur l'ouvrage, sur Notre-Dame-de-Paris, au moment où il y a eu la mise dans l'accurité.
16:31À ce moment-là, on utilise les mêmes techniques qu'avant, on est manuels, on a quelques outils
16:38pour nous aider à poinçonner ou à sortir les barleautières et les vitraux, mais ça
16:46reste du travail manuel, en tout cas à ce stade-là.
16:49Oui, alors juste avant vous, on était justement avec l'entreprise Imbert, qui fait des vitraux
16:54en PACA et qui nous expliquait aussi tout un système de sécurité qui avait été mis
16:58en place.
16:59Ce n'est pas simple d'aller justement travailler sur un monument comme Notre-Dame.
17:02Là aussi, il y avait une course contre la montre, finalement.
17:07Oui, effectivement, il y a eu une course contre la montre le lendemain de l'incendie, pour
17:14la mise en sécurité, où là, suite à l'intervention des pompiers, un certain nombre de tonnes
17:23d'eau ont été déposées, il fallait réagir très vite, mettre en sécurité tout ce qui
17:28pouvait être mis en sécurité, donc grosso modo les vitraux notamment ont été mis dans
17:33des caisses.
17:34Ces caisses ont été stockées dans un grand entrepôt en région parisienne.
17:38De la même manière, les serruris, ce qu'on appelle la serrurie de vitraux, ce qui maintient
17:43en place les vitraux, ont été mis en caisse aussi et on les a récupérés quelques années
17:48après pour la restauration.
17:49Qu'est-ce qui caractérise un changer comme celui-là ? C'est le gigantisme et le côté
17:56un peu hors norme.
17:57Effectivement, on a eu des contraintes.
17:59On a eu des contraintes d'abord de plomb.
18:01Ah oui, on a parlé de la poussière de plomb, il fallait faire attention bien évidemment.
18:05Donc là, on est dans une démarche où il faut protéger nos salariés, donc la mise
18:13en place de protections collectives, mise en place de protections individuelles et puis
18:18après il faut éviter que le plomb sorte de la zone de chantier, donc dans les protections
18:24collectives, on va mettre en place aussi des endroits où on va changer, on va passer d'une
18:30zone sale à une zone propre, on va se changer pour pouvoir sortir de la zone de chantier.
18:34On n'imagine pas tout ça, nous, de l'extérieur, tout ce qui a dû être mis en place pour
18:38justement restaurer Notre-Dame.
18:40Une fois la dépose faite, il y a eu aussi la restauration, c'est ça, en chantier,
18:44il y a eu un travail aussi de ferronnerie, de forgerie, de la part de l'entreprise ?
18:47Tout à fait, alors après, quelques années après, on a répondu à des appels d'offres
18:52où là, on était en deuxième ligne derrière les maîtres verriers, on était tout près
18:56dans les maîtres verriers, notamment les maîtres verriers avec qui on avait travaillé
19:00lors de la mise en sécurité, qui ont été satisfaits de travailler avec nous et qui
19:04ont trouvé qu'on travaillait plutôt bien, donc du coup, ils ont fait appel à nous pour
19:10répondre à des appels d'offres au moment de la restauration de Notre-Dame.
19:13Donc ça, ça a été dans la deuxième partie 2022-2023-2024, où là, on est intervenu
19:19en sous-traitance de maîtres verriers et on a restauré, on ne va pas dire les mêmes
19:24baies, mais on a restauré des baies quasiment identiques, puisqu'on a eu la chance de gagner
19:30quelques marchés avec plusieurs maîtres verriers, et donc on a pu travailler sur la restauration
19:37qu'on avait déposée quelques années avant.
19:40Je ne vais pas vous faire souffrir davantage, Christophe Beausoleil, avec votre voix qui
19:44se perd.
19:45Merci en tout cas d'avoir pris le temps de témoigner.
19:47Oh non, mais même pour vous, merci d'avoir pris le temps de témoigner, parce que c'est
19:51important de montrer justement tous ces savoir-faires inestimables qui se sont mis ensemble, qui
19:57ont collaboré ensemble pour pouvoir justement sauver Notre-Dame de Paris, et la Loubière
20:00et la Forge d'Art a fait partie de l'aventure, et donc c'est important de pouvoir justement
20:04échanger avec vous là-dessus, et on l'évoquait précédemment, c'est aussi primordial de
20:08mettre en avant tous ces savoir-faires, parce qu'ils ont été présents au moment de la
20:12restauration, mais il ne faut pas les oublier derrière, parce qu'il faut ensuite les mettre
20:15en avant aussi sur d'autres chantiers.
20:17Merci encore, Christophe Beausoleil, du miel, de la tisane, du gingembre, tout ce que vous
20:22voulez pour retrouver votre voix.
20:24C'est ce que je fais, merci beaucoup, merci infiniment.
20:26Bonne fin de journée, au revoir, il est temps de laisser balader avec Thibaut, notre french-trotter.
20:35Alors Thibaut, parlez-nous de cette réouverture de Notre-Dame de Paris, vous faites partie
20:39des premiers visiteurs le week-end dernier, alors quelles sont vos impressions ?
20:42Alors ce qui m'a frappé en entrant, c'est sa luminosité, j'ai senti une vraie chaleur
20:46et maintenant de ses pieds restaurés, désormais d'un blanc éclatant, et je me suis senti
20:50vraiment tout petit face à cette beauté, face à ce lieu familier, mais que l'on découvre
20:54sous un jour complètement nouveau.
20:55Alors j'ai pensé tout de suite aux pompiers qui l'ont sauvé des flammes, et à tous les
20:59artisans qui lui ont redonné sa majesté en seulement cinq ans, c'est la preuve qu'avec
21:03un objectif commun qui nous dépasse, on peut accomplir des miracles, on va y revenir.
21:07Mais avant, je voudrais vous faire écouter la première impression de cette visiteuse
21:11qui partageait cette émotion.
21:13J'ai l'impression de la voir pour la première fois, je suis déjà venue, et j'avais le souvenir
21:17plus de la cathédrale de l'époque de Victor Hugo, puisqu'elle était effectivement très
21:22sombre, et pour moi, Notre-Dame, c'est effectivement celle de Quasimodo et Sméralda, c'est aussi
21:28l'époque des bâtisseurs de cathédrales, c'est toute une histoire, et ce qui est impressionnant
21:34habituellement quand on rentre dans un lieu d'église, c'est le fait de se dire qu'on
21:39est en train de marcher dans les pas de personnes qui étaient là il y a mille ans, deux mille
21:43ans, qui sont nées, qui ont eu leur baptême, qui se sont mariées, qui se sont décédées,
21:48ce sont des lieux qui marquent en fait le passage du temps, le passage de la vie.
21:54Mes impressions aujourd'hui en rentrant dans Notre-Dame, c'est que je ne la retrouve pas,
21:59mais en même temps, je vais m'y habituer, je vais la réapprivoiser.
22:03Oui, la réapprivoiser, il paraît que c'est effectivement magnifique, je n'ai pas encore
22:07eu l'occasion d'y aller.
22:08Vous, vous avez rencontré également un artisan passionné qui a œuvré à la restauration
22:11de la cathédrale.
22:12Exactement, il s'appelle Philippe Giraud, il est compagnon tailleur de pierre, il a
22:15un atelier dans le Perche, et il est intervenu sur les ornements extérieurs du transept
22:19nord, gravement dommagé par les flammes.
22:22Et on va découvrir son parcours et son travail, mais écoutons d'abord ce qu'il a ressenti
22:26lors de l'inauguration.
22:27A la fois une fierté, en même temps le fait de se rappeler que Notre-Dame, c'est surtout
22:32l'œuvre des bâtisseurs du Moyen-Âge qui ont fait un travail incroyablement supérieur
22:36au nôtre.
22:37Donc à la fois de la fierté et de l'humilité d'avoir pu avoir l'honneur d'être dans
22:41la continuité de ces bâtisseurs qui ont conçu Notre-Dame au XIIe et XIIIe siècles.
22:45Savoir que les pierres qu'on a faites en ce XXIe siècle côtoient des pierres du XIIe.
22:4912 et 21, c'est deux chiffres qui s'inversent, mais ça fonctionne bien.
22:54C'est vrai.
22:55Alors moi j'aimerais revenir un peu d'abord, on va bien sûr parler de votre travail sur
22:59ce chantier.
23:00J'aimerais revenir sur votre parcours de compagnon tailleur de pierre.
23:03J'ai commencé la taille de pierre à 19 ans, juste après mon bac, et j'ai commencé
23:07à l'œuvre Notre-Dame de Strasbourg, donc j'étais chez les compagnons du devoir à
23:10Strasbourg pour mon apprentissage et après j'ai fait l'école des monuments historiques
23:14pendant deux ans.
23:15C'est une forme de compagnonnage, mais avec un rythme plus accéléré puisqu'on fait
23:20deux entreprises par an au lieu d'une entreprise par an.
23:22Et ensuite, on revient à la période d'aujourd'hui, comment avez-vous été appelés sur ce chantier
23:26de Notre-Dame ?
23:27En fait, il faut savoir que les sculpteurs, c'est un monument historique, on n'est pas
23:30très nombreux.
23:32C'est un petit peu une grande famille et qu'avec le bouche à oreille, on sait qu'il y a des
23:38besoins, des besoins de renforts et voilà, c'est comme ça que j'ai été mis dans la
23:43boucle.
23:44J'aimerais qu'on parle un petit peu de ce que vous avez fait concrètement, vous êtes
23:47intervenu sur les ornements, je crois ?
23:49Sur l'ornement, oui, l'ornementation, c'est tout ce qui est végétal, les frises, on avait
23:54une série de trèfles-crochets qui s'alternent et aussi une frise avec des crochets sur les
24:00pignons nord et sud.
24:01J'ai travaillé sur trois endroits différents, surtout en atelier, mais toujours à la fin,
24:06il y a des raccords à faire une fois que les pierres sont posées, ce qui est toujours
24:08agréable de travailler sur site avec la vue sur Paris et puis au contact des pierres
24:13mêmes de Notre-Dame.
24:14Pour comprendre, vous avez travaillé à la fois sur cet atelier éphémère qui avait
24:17été installé devant Notre-Dame et également en échafaudage ?
24:20Oui, donc on appelait la loge des sculpteurs cette grande tente blanche qui en fait, c'était
24:26un vrai atelier en dur, c'était juste le toit qui était en espèce de bâche très
24:31épaisse et un atelier extrêmement efficace et moderne puisqu'on avait jusqu'à la climatisation
24:39en été, les conditions étaient optimales pour travailler et aussi le grand intérêt
24:43de cet atelier au pied de la cathédrale, c'était d'être en capacité de monter,
24:47revoir les statues sur place sur la cathédrale pour pouvoir s'en inspirer.
24:51Et comme Philippe a beaucoup de choses à nous raconter, on le retrouve la semaine prochaine,
24:55c'est ça Thibaut ?
24:56Ben oui, c'est un peu notre feuilleton de cette fin d'année.
24:59Merci beaucoup Thibaut, donc rendez-vous la semaine prochaine pour continuer les aventures
25:02de Philippe à la rénovation de cette cathédrale.
25:04Merci à vous chers auditeurs, on se retrouve la semaine prochaine, même jour, même heure
25:09et même radio et surtout d'ici là, portez-vous bien !