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Avec Olivier Mas, ancien agent de la DGSE dans la région et auteur du roman "Le Walk-in" (Ed. Flammarion)

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##SUD_RADIO_VOUS_EXPLIQUE-2024-12-13##

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00:00— Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin.
00:04— Nous recevons ce matin Olivier Mass, ancien agent de la DGSE. Olivier Mass, bonjour.
00:09— Bonjour. — Alors rappelons, la DGSE, c'est le contre-espionnage ou...
00:13— C'est le service extérieur de la France. — Oui. Service extérieur de la France. C'est-à-dire que...
00:18— Service secret. — Oui. C'est un service d'espionnage.
00:21— C'est un service d'espionnage, bien sûr. — Service d'espionnage.
00:23— Et d'action aussi. — Et d'action, oui. Olivier Mass, vous étiez basé au Liban.
00:29Vous étiez aussi fréquemment en Syrie. Vous recrutiez des sources. C'est-à-dire ?
00:36— Oui. C'est-à-dire pendant toute la guerre civile, on essayait de bloquer ce régime d'Assad.
00:41Et on essayait de renseigner nos autorités sur ce régime. Et donc eh bien l'ambassade de France, la Damas,
00:47elle avait fermé. Elle a fermé assez tôt, en 2012, au début de la guerre civile. Et donc fermeture de l'ambassade,
00:54ça veut dire fermeture du poste de DGSE. Donc on peut plus travailler. Donc il a fallu travailler
00:57sur les pays autour, périphériques. Et c'est ce qu'on faisait. Donc on a recruté des sources humaines,
01:03des gens proches du régime d'Assad, idéalement aussi des services de renseignement syriens,
01:10pour pouvoir mettre en avant, dénoncer les pratiques du régime.
01:13— Les pratiques du régime. Et vous transmettiez évidemment vos informations aux responsables politiques français.
01:19— Voilà. C'est ça. Par message crypté. — Par message crypté. Olivier Mass, vous saviez ce qui se passait
01:25dans cette tristement célèbre prison en Saïdania ? — Tout le monde le savait. Les Syriens, sur place, le savaient.
01:34C'est un système de torture institutionnalisé, systématique, aléatoire, qui a pour but de faire peur.
01:41Et c'est un système carcéral qui est mis en place et sous la tutelle des services SRTR.
01:48Donc le plus grand service d'enseignement syrien. Il y en a 4. Et là, c'est le plus grand.
01:53Et donc c'est un service d'enseignement qui ne fait même plus d'enquête, qui ne cherche pas à découvrir des choses.
01:58Il cherche juste à frapper la population, à faire peur, et à maintenir le régime grâce à la peur.
02:03— Grâce à la peur. On a vu les images, les témoignages. Effroyable. Effroyable !
02:09Le régime de Bachar al-Assad avait mis en place une industrie de la mise à mort jamais vue depuis l'Holocauste, disent certains.
02:17Est-ce qu'on peut aller jusque-là ? — C'est-à-dire qu'il y a un système où les gens rentrent dans ces prisons
02:22et ils ne sortent pas. Au début, on en faisait sortir quelques-uns, peut-être parce qu'ils avaient une utilité,
02:26de raconter ce qui s'y passait pour faire encore plus peur. Mais ensuite, les gens, on les prenait la nuit.
02:31Ensuite, on commence à les torturer. Et ils n'en sortent plus. Donc il y a ces prisons à sel pour pouvoir ensuite cacher les corps.
02:40Et on voit bien que quand on ouvre les portes, on trouve très peu de monde. C'est décevant pour les familles.
02:46— Alors vous publiez un roman qui s'appelle « Le Walk-in » aux éditions Flammarion. Olivier Maas, finalement, dans ce roman,
02:56vous retracez tout cela. — C'est ça. Je retrace le travail de la DGSE à ce moment-là... — De la DGSE dans cette zone ?
03:05— Dans cette zone. Et qui essaye de recruter des sources humaines. Et là, en l'occurrence, on a un walk-in, c'est-à-dire un volontaire
03:11qui tape à l'ambassade de France et qui dit « J'ai du renseignement à vous fournir ». Et c'est un membre des services de renseignement syriens.
03:16Donc c'est une aubaine. Ou alors c'est une arnaque. Et donc il faut toujours savoir, quand il y a un volontaire qui tape comme ça,
03:22qui se présente, il faut savoir si c'est un escroc ou un manipulateur ou une pépite. Et parfois, ce sont des pépites.
03:28— Alors j'imagine que vous travaillez aussi pour essayer de trouver des renseignements sur les djihadistes français engagés
03:36auprès d'un nouvel homme fort, Joulani, le HTS, les islamistes du HTS.
03:45— Bien sûr. Alors quand on a le service, maintenant, il est mobilisé là-dessus pour pouvoir suivre aussi nos djihadistes français
03:53qui sont au sein de ce mouvement, pour savoir... — 200 à peu près, entre 200 et 250.
03:57— Voilà, c'est ce qu'on dit. Donc voir le niveau de radicalisation. Leur chef a dit qu'il abandonnait le combat du djihadisme global,
04:06ce qui est plutôt une bonne nouvelle rassurante. Est-ce que c'est un positionnement politique pour pouvoir rester
04:11et réussir sa révolution rapidement ? C'est ça qu'il va falloir savoir. Savoir son niveau de sincérité.
04:18Et ensuite, est-ce qu'il va arriver à imposer ça à ses troupes, parce qu'il y a beaucoup de gens beaucoup plus radicaux que lui,
04:24en tout cas, et qui sont prêts aussi peut-être à l'assassiner, etc. — Vous avez réussi à avoir des informations sur ces djihadistes français ?
04:33— Bien sûr, c'était... — Vous avez réussi même peut-être à les approcher ou les infiltrer ?
04:37— Bien sûr. C'est ce qu'on a fait. Les grandes problématiques et priorités du service de la DGSE pendant les années de guerre civile,
04:44c'était le suivi de Daesh principalement et des Français, et puis le suivi du régime. Et donc on y arrivait en recrutant des gens,
04:51des Syriens qui sont souvent venus à nous aussi de manière volontaire. — Et pourquoi venaient-ils à vous de manière volontaire ?
04:58— Souvent, ce sont des gens qu'on recrute par l'idéologie. Des gens qui font ça pratiquement pas par argent, mais parce que ce sont des musulmans convaincus.
05:06— Mais ils étaient payés, quand même. — Alors ils étaient effrayés, payés, mais jamais beaucoup payés.
05:10C'est souvent des gens qui travaillent par idéologie, que ce soit contre le régime ou contre l'État islamique.
05:14On a des musulmans très pieux, très pratiquants, avec plusieurs femmes d'ailleurs, et qui se disent « Non, l'État islamique, c'est l'horreur absolue,
05:22et je veux travailler contre ce mouvement. » Et ils donnaient du renseignement. Il y en avait donc beaucoup de sources, à Raqqa notamment, à Deir Ezzor,
05:29dans toutes les zones État islamique, qui nous donnaient du renseignement de terrain très précis, très efficace.
05:34— Olivier Masse, il y a encore beaucoup d'agents de la DGSE dans la région ? Je vais pas dire où ils sont, évidemment, mais il y en a beaucoup.
05:43— Disons qu'on essaye. Et c'est vrai qu'on a une alliance depuis longtemps avec les Kurdes, qui nous permettent d'avoir une empreinte sur le territoire
05:52plus facilement, sur tout le nord de la Syrie. Alors cette alliance avec les Kurdes, elle est pratique, elle est utile pour pouvoir se rapprocher.
06:01— Donc il y a des agents aujourd'hui rampants, enfin des agents qui travaillent pour la DGSE et qui sont peut-être même pas très loin de Joulanie ?
06:11— Oui, je l'espère, en plus. Et ce sont des agents sous légende. C'est-à-dire que ce ne sont pas des agents en ambassade,
06:17puisqu'il n'y a pas d'ambassade, ils ne sont pas protégés par leur passeport diplomatique, donc ils ont une couverture, peut-être des photographes,
06:24peut-être des humanitaires, peut-être... Voilà. Et ils sont présents, ils travaillent pour renseigner nos autorités sur, notamment maintenant,
06:31ce tasse-téché et qu'est-ce qui va se passer en Syrie dans la Syrie de demain.
06:35— Alors, quelques mots sur votre livre, sur votre roman, Le Walk-in. Un résumé rapide, Olivier Masse ?
06:42— Oui, c'est un roman que je portais en moi depuis très longtemps. — Combien de temps vous êtes resté là-bas, au Liban-Syrie ?
06:49— En total, dans ma vie, c'était 9 ans, en plusieurs moments. Pas toujours pour la DGSE, mais une longue partie pour la DGSE.
06:57Et donc c'est de retranscrire ce que j'aime dans l'espionnage. Et donc la réalité des prix, c'est la difficulté de chercher du renseignement en zone de crise
07:07et le système de confiance et de recoupement d'informations. Qui est en face de moi ?
07:13La relation entre l'officier traitant et sa source, c'est une manipulation double. — Est-ce que vos proches savaient que vous étiez espion ?
07:19— Oui, mon conjoint, ma famille proche. Bien sûr, ils doivent le savoir. Sinon, on devient un schizophrène fou, foilier, on n'est pas stable.
07:27Donc ils le savent. Mais ensuite, on leur parle pas de ce qu'on fait, de nos dossiers, de nos sources humaines.
07:32Ça, c'est des secrets fermés à double tour. — À double tour. Merci beaucoup, Olivier Maas. Merci d'être venu nous voir.
07:38Votre roman Le Walk-in, c'est aux éditions Flammarion. Il est 7 h 48.

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