Jacques Pessis reçoit Dominique Marny. Romancière, petite- nièce de Jean Cocteau, elle publie « Je t’aime » un beau livre ou à travers des textes , des citations et des illustrations, elle évoque l’une des plus belles expressions de la langue française
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##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2024-12-12##
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00:00Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
00:03Sud Radio, les clés d'une vie, celle de mon invité.
00:05Votre vie, ce sont des romans que vous imaginez,
00:08mais aussi une histoire vraie, celle de vos liens avec un poète
00:12qui s'est battu envers et parfois contre tous.
00:14Avec vous aujourd'hui, nous allons parler d'amour,
00:17en évanquant parfois des choses pas toujours tendres.
00:19Bonjour Dominique Marny.
00:21Bonjour.
00:21Alors, vous êtes romancière, vous êtes la petite nièce de Jean Cocteau
00:24et vous publiez un très beau livre de fin d'année, un cadeau idéal,
00:28un livre qui s'appelle Je t'aime, je crois,
00:30et qui est un livre qu'on va évoquer dans les clés d'une vie
00:34en évoquant votre parcours puisque c'est le principe de l'émission.
00:37Alors, j'ai trouvé plusieurs dates vous concernant
00:40et la première, elle est assez étonnante, c'est le 28 juin 1985.
00:45Votre première télé et on ne s'attend pas du tout à ce que vous soyez dans ces émissions.
00:52L'Académie des Neufs.
00:53Alors, premier roman et vous êtes dans l'Académie des Neufs au dernier étage.
00:57Oui, oui, oui, c'est vrai et j'étais quand même un peu traqueuse
01:01parce que j'avais déjà vu, mais vous savez pourquoi ?
01:03J'avais demandé à l'attaché de presse est-ce que je peux être à l'Académie des Neufs
01:06parce que ma fille regardait ça et c'était son rêve de me voir dans cette émission.
01:10Donc, en fait, c'est comme ça que je me suis retrouvée là, effectivement.
01:13C'était les débuts de Jean-Pierre Foucault à la télévision.
01:15Cette émission, on est tous passé un jour ou l'autre en ayant le vertige
01:18et je crois que ce jour-là, l'invité d'honneur, c'était Robert Charlebois.
01:21Je ne sais pas si vous vous en souvenez.
01:23Il avait eu droit à un gâteau pour son anniversaire.
01:25Ça, je ne me souviens pas, mais est-ce qu'il n'y avait pas Florent Pagny qui était débutant ?
01:28Débutant aussi.
01:29Ah voilà, ça, vous voyez, je me souviens de ça.
01:31Alors, ce livre que vous évoquez dans l'Académie des Neufs, c'est Crystal Palace,
01:35c'est-à-dire un monument de verre et d'acier qui a abrité une exposition universelle,
01:39la première, je crois, à Londres en 1851.
01:42Oui, oui, ça a été vraiment la première exposition qui était dédiée à l'ère industrielle
01:46parce qu'en fait, c'était les tout débuts et le monde entier s'était jeté à Londres
01:52dans cette banlieue de Crystal Palace.
01:55Et d'ailleurs, il a brûlé ce Crystal Palace.
01:58Alors maintenant, il y a un Crystal Palace qui existe, mais qui est près de New York,
02:01qui est aux États-Unis.
02:02Ça n'a plus rien à voir avec le premier.
02:03Voilà.
02:04Et il y avait un cabaret, un cabaret bar qui s'appelait Crystal Palace à Toulouse
02:08qui a été un centre de la résistance entre 40 et 44.
02:11Alors ça, je l'ignorais.
02:12Alors, il se trouve donc que ce monument qui est composé d'éléments préfabriqués,
02:16c'est la première exposition universelle, que l'on doit à un Anglais
02:19parce qu'on ignore que c'est un certain Henry Cole
02:22qui a visité l'exposition nationale des produits de l'industrie agricole et manufacturière de 1849 à Paris
02:28qui a eu l'idée de cette exposition.
02:29C'est ça.
02:30Et qui a été inaugurée par la Reine Victoria.
02:32C'était extraordinaire, cette inauguration.
02:34Et alors, on voyait à une époque, on n'imaginait pas tellement ce qui se passait dans le reste du monde.
02:38Et on voyait toutes les plus belles inventions et fabrications du monde entier.
02:43Alors, pour faire ce livre, Dominique Marny, c'est un immense travail de recherche.
02:46C'était un immense travail de recherche.
02:48Et d'autant plus que maintenant, on a beaucoup plus d'outils dans nos mains.
02:54C'est-à-dire qu'il y a Internet, qu'il y a des avantages extraordinaires.
02:58Mais à l'époque, non, il fallait écumer les bibliothèques.
03:01Et c'était compliqué de trouver des documents du 19e siècle.
03:04C'était compliqué.
03:05Il y en avait certains aussi qui étaient en anglais.
03:07C'était ceux-là aussi qui étaient intéressants.
03:08Donc, c'était un travail de recherche.
03:10Mais c'est bien parce que ça m'a formée à la recherche.
03:12Et même si maintenant, c'est peut-être plus simple,
03:14moi, je reste très exigeante sur les recherches pour les romans
03:16parce qu'on ne peut pas dire n'importe quoi.
03:18Alors, les romans, justement, écrire, je crois, ça a toujours été le but de votre vie.
03:22Oui. Enfin, je n'en étais pas consciente.
03:25Mais c'est vrai que petite, je commençais déjà à me raconter des histoires.
03:28Je lisais beaucoup, énormément.
03:30Mais c'était une époque aussi où on lisait beaucoup plus que maintenant.
03:32Donc, je lisais beaucoup.
03:34Je me racontais des histoires.
03:36J'en écrivais des bribes.
03:38Mais je n'avais pas du tout dans l'idée que je deviendrais romancière.
03:41Pour moi, ça me paraissait beaucoup trop compliqué.
03:43Et puis, c'est venu tout d'un coup.
03:44Je crois qu'en fait, il ne faut pas tellement réfléchir.
03:46Il y a quelque chose qui s'est imposé, une histoire, Crystal Palace.
03:49Et puis, voilà, les choses se sont faites.
03:51Je dirais presque d'elles-mêmes.
03:53Et vous vous habitez dans un Paris différent de celui d'aujourd'hui.
03:56Beaucoup plus joyeux, beaucoup plus calme.
03:58Je crois que vous n'étiez pas loin du Panthéon.
04:00Alors, adulte, oui.
04:02Mais enfant et adolescente, si on parle des débuts, de mes lectures, etc.,
04:08non, c'était rue François 1er.
04:10Mais bon, après, c'est vrai que je suis allée au Panthéon.
04:12Et voilà, ça s'est continué là.
04:17Mais quand on change de lieu, vous savez, moi, j'ai une sorte de...
04:20Je me dis, mais est-ce que si je change, si je déménage,
04:23je vais écrire de la même manière ?
04:25Est-ce que je ne vais pas perdre mon inspiration ?
04:27Vous savez, il y a des espèces de choses un peu comme des gris-gris,
04:29et puis finalement, non.
04:31C'est des points de repère, en quelque sorte.
04:33Alors, il se trouve que c'est un quartier idéal, le Panthéon, pour les écrivains,
04:36et pas seulement quand ils entrent au Panthéon,
04:38puisque c'est aux 17 places du Panthéon, je ne sais pas si vous le savez,
04:41qu'André Breton, dans une petite chambre,
04:43a reçu Aragon et quelques autres,
04:45et qu'il a vraiment créé ses premiers textes surréalistes.
04:49Alors ça, je l'avais entendu.
04:50Est-ce que ce n'est pas dans cet immeuble,
04:52ce n'est pas cet immeuble qui est devenu l'hôtel des grands hommes ?
04:54C'est ça, exactement, pour une revue qui s'appelle Littérature.
04:56C'est ça.
04:57Alors, il se trouve que vous avez quand même des antécédents,
05:00parce que votre famille aime l'aventure, les voyages, l'art, la littérature.
05:04Oui, alors c'était formidable,
05:06parce qu'il y avait l'art d'un côté et l'aventure de l'autre.
05:08Du côté de ma mère, c'était la littérature, l'édition,
05:12tout ce qui était artistique, etc.
05:15Et du côté de mon père, c'était tous les grands rallies,
05:19les premiers grands rallies à travers l'Afrique,
05:21les premiers grands rallies d'automobiles.
05:23Donc, j'étais élevée dans ces deux aspects de la vie,
05:27et ça, ça a été formidable.
05:29Et puis, vous aviez une astuce, Dominique Marny, pour lire,
05:31c'est que vous profitiez des maladies infantiles
05:33pour vous plonger dans des livres.
05:35Mais bien sûr, j'étais ravie dès qu'on me disait
05:37que j'avais la varicelle, la rougeole et tout ça.
05:39C'était formidable.
05:41J'adorais l'univers de la chambre.
05:43Je trouvais que c'était magique.
05:45Et je crois que vos livres de chevet
05:47étaient une collection totalement oubliée aujourd'hui,
05:49qui était la collection Rouge et Or.
05:51Il y a eu la collection Rouge et Or,
05:53et puis après, il y avait toutes les collections
05:55chez Marabout, Fillette, Jeune fille ou Marabout Junior.
05:59Et c'était comme des feuilletons,
06:01les livres paraissaient tous les mois ou tous les deux mois.
06:03Et j'allais avec ma mère chercher ces livres.
06:05Enfin, c'était toute une aventure.
06:07Alors que maintenant, il suffit de faire un clic.
06:09Et à l'époque, vous teniez même votre journal, je crois.
06:11Votre journal d'enfants.
06:13Oui, ça devait être assez paresseux, je pense.
06:17Oui, mais ça existait quand même.
06:19Un peu, oui.
06:21Et puis, il y avait Paris, mais il y avait la Touraine aussi,
06:23qui est liée à votre enfance pour les grandes vacances, je crois.
06:25Voilà, toutes les vacances scolaires
06:27se passaient chez mes grands-parents,
06:29entre Tours et Loges,
06:31dans un endroit qui s'appelait Cormerie.
06:33Alors, j'ai des souvenirs de vacances
06:35qui n'en finissaient pas.
06:37Pour moi, ça me paraissait beaucoup trop long.
06:39J'ai des souvenirs d'ennuis.
06:41J'étais en pleine campagne.
06:43Et peut-être que justement, pour juguler cet ennui,
06:45j'ai découvert le plaisir de la lecture.
06:47Et c'est là où j'ai compris qu'avec la lecture,
06:49on ne s'ennuyait jamais.
06:51Oui, mais la maison de vos grands-parents
06:53était énorme, je crois, Dominique Parton.
06:55Oui, elle était grande.
06:57Elle avait des immenses couloirs.
06:59Ça parcourait à certaines heures de la soirée.
07:01Ah bon, pourquoi ?
07:03En plus de ça,
07:05c'était une maison construite en 1930.
07:07Vous voyez, donc,
07:09en fait, totalement art déco.
07:11Donc, il n'y avait pas des histoires de fantômes
07:13qui remontaient à des siècles précédents.
07:15Non pas du tout, mais quand même, elle était impressionnante.
07:17Je crois que c'est votre grand-mère qui vous avait raconté
07:19l'histoire de cette maison.
07:21Oui, en fait, ma grand-mère
07:23venait d'accoucher.
07:25Donc, ma mère venait de naître.
07:27Et mon grand-père, je lui avais dit,
07:29c'était une époque où on faisait des cadeaux à ses somme-cueils.
07:31Je lui avais dit, coup de voilà, pour la naissance de notre fille,
07:33est-ce que tu voudras avoir une maison dans la campagne ?
07:35Elle a dit oui, en Touraine.
07:37Alors, ils ont sillonné la Touraine. Ils ont failli
07:39acheter la maison au Ségur des Balzac,
07:41qui s'appelait Sachet.
07:43Et puis, ils sont un jour passés
07:45sur un plateau qui
07:47dominait l'Inde. Et là, ma grand-mère a dit
07:49« Ah, Paul, c'est là où je voudrais habiter. »
07:51Et là, mon grand-père a acheté 18 parcelles,
07:53je crois, de terrain, a fait construire un château d'eau.
07:55Il a donné l'eau au village voisin.
07:57Mais voilà, ça s'est passé comme ça.
07:59Et ils ont appelé un grand décorateur
08:01qui s'appelait Marcel Cohard,
08:03qui a vraiment tout créé,
08:05mais tout créé jusqu'au robinet.
08:07C'était totalement Art Déco. Et j'ai vécu là-dedans.
08:09Et on ne peut pas imaginer une telle construction aujourd'hui.
08:11Je ne sais pas.
08:13Pourquoi pas ?
08:15Peut-être avec des architectes formidables, des décorateurs formidables.
08:17Il faut l'espérer, en tous les cas.
08:19Je crois aussi que des parajutistes
08:21anglais ont été cachés pendant la guerre
08:23dans cette maison.
08:25Alors oui, ils ont été cachés par la femme du jardinier.
08:27Il y avait des grottes
08:29dans le parc.
08:31Et il y avait des caves.
08:33Et il y avait des caves avec des souterrains.
08:35La région était connue pour des souterrains.
08:37Alors je ne crois pas qu'elle les ait cachées dans des souterrains,
08:39mais elle les a cachées dans les caves.
08:41Et mes grands-parents ne le savaient pas.
08:43Et il valait mieux qu'ils ne sachent rien,
08:45parce qu'ils auraient tremblé quand même,
08:47étant donné que là, si on trouvait les parachutistes,
08:49ça, c'est votre enfance, Dominique Marny.
08:51Et je crois qu'adolescente,
08:53après le bac, c'est l'école du Louvre.
08:55Oui. Pourquoi ?
08:57Parce qu'à ce moment-là, j'étais très, très
08:59intéressée par l'idée
09:01de devenir archéologue.
09:03Et d'ailleurs, j'ai eu la chance, la chance
09:05merveilleuse d'avoir Mme Desrochers
09:07pour certains cours.
09:09Mais bon, je ne suis pas du tout devenue archéologue,
09:11parce que quand j'ai compris qu'au fond, ce n'était pas
09:13simplement des aventures, des recherches,
09:15qu'il fallait être dicté, qu'il fallait être très minutieux,
09:17c'était pas du tout pour moi.
09:19Voilà, c'était ça.
09:21Mais ça pouvait aussi vous conduire
09:23à de hautes fonctions, l'histoire de l'art.
09:25Ah ben moi, je m'en fiche des hautes fonctions, ça ne m'intéresse pas au fond.
09:27Et d'ailleurs, les premiers livres que vous avez écrits,
09:29tout ce que vous avez appris
09:31dans cette école du Louvre, ça vous a servi
09:33pour les fous de lumière ou les désirés des jours ?
09:35Oui, ça me sert tout le temps,
09:37en fait, ça me sert tout le temps.
09:39Et je crois que
09:41ce qui est important,
09:43c'est de toujours chercher à apprendre quelque chose.
09:45Pour moi, aujourd'hui,
09:47tous les jours, tous les jours, j'apprends des choses que j'ignore,
09:49dans des domaines qui sont différents,
09:51quelquefois. Mais pour moi,
09:53ce besoin de connaissance, c'est indispensable.
09:55Enfin, je ne pourrais pas exister autrement.
09:57Et à l'époque, le côté
09:59connaissance, c'était les peintres impressionnistes ?
10:01Oui, ça a été... Alors, j'ai écrit
10:03deux romans qui s'appelaient...
10:05Le premier s'appelait Les fous de lumière
10:07et le deuxième, Les désirés des jours.
10:09Et là aussi, c'était des recherches
10:11à n'en plus finir, parce que là, il fallait
10:13aussi écumer les musées, les bibliothèques.
10:15Il n'y avait rien à porter de main, comme ça.
10:17Et ça a été
10:19vraiment le roman de l'impressionnisme.
10:21C'est-à-dire que j'ai voulu raconter les impressionnistes
10:23dans leur vie quotidienne.
10:25Et j'ai essayé vraiment d'être le plus juste possible.
10:27Et votre carrière de romancière a commencé
10:29tardivement, après la naissance de votre fille.
10:31Oui, c'est vrai.
10:33Voilà.
10:35J'ai commencé à publier, je crois que j'avais
10:3730 ans, 29-30 ans, quelque chose comme ça.
10:39C'est rare. En général, on publie beaucoup plus tôt, on s'essaye
10:41beaucoup plus tôt. Vous voyez, je me suis fait attendre.
10:43Mais vous aviez
10:45envie quand même de faire des romans.
10:47Non, je pense...
10:49Je n'y ai pas pensé, en fait.
10:51Jusqu'au moment où une histoire s'est imposée,
10:53je me suis dit, bon, voilà. Et en fait, j'ai pas réfléchi.
10:55Mais non,
10:57je pensais travailler peut-être
10:59plutôt dans l'édition
11:01ou dans les librairies, des choses comme ça.
11:03Quelque chose qui avait un rapport avec la littérature,
11:05mais je ne pensais pas écrire moi-même.
11:07En plus, ça a été des succès. Et puis, vous avez mis
11:09les bouchées doubles quand il y a eu aussi un
11:11second dossier, si j'ose dire, à traiter,
11:13qu'on va évoquer à travers une date clé aussi,
11:15le 25 septembre 1946.
11:17A tout de suite sur Sud Radio
11:19avec Dominique Marny.
11:21Sud Radio, les clés d'une vie.
11:23Jacques Pessis.
11:25Mon invité Dominique Marny,
11:27romancière à succès,
11:29mais pas seulement en parler,
11:31a publié un magnifique livre qu'on va évoquer tout à l'heure
11:33pour les fêtes de fin d'année, « Je t'aime ».
11:35Un titre déjà
11:37qui signifie ce sujet qu'on va traiter.
11:39Et puis, vous avez une autre
11:41particularité.
11:43J'ai choisi le 25 septembre 1946
11:45car c'est le jour de la sortie
11:47d'un film qui vous a marqué.
11:55« La belle et la bête » de Jean Cocteau,
11:57qui a été présenté, je ne sais pas si vous le savez, en avant-première au Festival de Cannes.
11:59Oui, qui n'a eu aucun prix d'ailleurs.
12:01Non, non.
12:03Sauf, je crois, il y a eu la musique.
12:05En fait, c'était la première adaptation
12:07de « La belle et la bête » au cinéma.
12:09Cocteau était venu à Cannes
12:11et ça avait été une panérique totale pendant la projection,
12:13je ne sais pas si vous le savez.
12:15En fait, c'était le premier festival d'après-guerre
12:17et on n'attendait personne.
12:19Il y a eu beaucoup de monde
12:21et il y avait des sièges numérotés
12:23et le public venait, rentrait,
12:25enlevait les numéros et on ne savait plus quoi faire
12:27pour remplacer les gens.
12:29Mais ça, ça devait plaire à Cocteau, je suis sûre qu'il adorait ce genre de choses.
12:31Il adorait ça.
12:33C'est la symphonie pastorale qui a remporté le grand prix
12:35cette année-là de Jean Delannoy.
12:37Et pour les 50 ans du festival de Cannes,
12:39ils ont juste oublié Jean Delannoy.
12:41Ce qui a fait scandale à l'époque.
12:43« La belle et la bête », c'est la découverte
12:45du cinéma pour vous, de Cocteau.
12:47Ah oui, c'est la découverte.
12:49Moi, j'étais adolescente
12:51quand Cocteau est mort.
12:53Je suis allée à ses obsèques
12:55et après sa mort,
12:57il y a eu un festival de cinéma.
12:59Je me souviens, je crois que c'était
13:01à Cannes ou à Avenue Magma ou quelque chose comme ça.
13:03Et donc, je suis allée avec ma mère
13:05et mon frère et j'ai découvert « La belle et la bête »
13:07que je n'avais encore jamais vue.
13:09Et je suis contente de ne pas l'avoir vue plus jeune.
13:11Pourquoi ?
13:13On comprend beaucoup plus.
13:15Je pense qu'il faut avoir une certaine expérience peut-être des choses.
13:17Je ne parle pas du film de Walt Disney
13:19qui est très joli d'ailleurs aussi.
13:21Mais je pense que pour
13:23« La belle et la bête » de Cocteau,
13:25je pense que c'est bien d'être un peu adolescent
13:27et pas simplement enfant.
13:29Et ce film, je précise, a remporté le prix Louis Deluc
13:31qui était le prix prestigieux du cinéma.
13:33Alors, si je parle de Cocteau,
13:35c'est que c'est votre grand-oncle.
13:37Ce que vous n'avez pas dit pendant des années.
13:39Oui, alors c'était le frère de mon grand-père maternel.
13:41Il y avait une soeur,
13:43mon grand-père
13:45et Jean qui était le dernier des trois enfants.
13:47Non, je ne l'ai pas dit
13:49quand j'ai donné mon texte à éditer.
13:51Je ne voulais surtout pas être édité
13:53pour les mauvaises raisons.
13:55Donc en fait, je n'ai rien dit.
13:57Mais mon livre, ça s'est su.
13:59Et c'est né comme ça.
14:01Et ça, c'est d'autant plus su
14:03quand j'ai écrit mon premier livre sur Jean Cocteau.
14:05Oui, parce que justement, quand on l'a su,
14:07on m'a demandé d'écrire un livre sur lui.
14:09Vous avez hésité.
14:11Je n'ai pas hésité, j'ai répondu oui.
14:13Et c'est après, dans le métro,
14:15quand je suis revenue chez moi, j'ai dit
14:17« Mais qu'est-ce que j'ai fait là ? »
14:19J'aurais jamais dû accepter.
14:21Parce que je me suis dit, on va m'attendre au tournant.
14:23Parce qu'on peut m'accuser de ne pas justement
14:25et puis après, je me suis dit, je vais m'en sortir.
14:27Mais je me dis souvent ça.
14:29Il se trouve que votre grand-père maternel,
14:31Paul, était agent de change
14:33et photographe, déjà artiste.
14:35Alors, il était photographe,
14:37amateur en fait.
14:39Il faisait des photographies magnifiques.
14:41J'ai d'ailleurs une quinzaine
14:43d'albums qui vont de
14:451890
14:47à 1935
14:49de photos faites par lui.
14:51Et qui sont absolument extraordinaires.
14:53Ils sont extrêmement modestes et extrêmement âmes.
14:55Personne ne les voyait.
14:57C'est pratique, oui.
14:59Cocteau, vous l'avez connu pendant vos jeunes années.
15:01C'était un monstre sacré
15:03mais vous ne le mesuriez pas.
15:05Pas du tout, ça m'était complètement indifférent au fond.
15:07Et quand ma mère m'a dit
15:09« Mais tu sais, ton oncle Jean vient d'être
15:11élu à l'Académie française. »
15:13Ça m'était complètement
15:15égale.
15:17Parce que moi, ce qui m'intéressait, c'était plutôt
15:19Romy Schneider, Sissi,
15:21Bardot, toutes ces histoires-là.
15:23Mais Jean Cocteau, c'était vraiment très
15:25au-dessus de ma tête.
15:27Et Jean Cocteau avait été élu à l'Académie française au fauteuil
15:29d'un monsieur Tarot.
15:31Et pour le discours, il avait longtemps hésité.
15:33Il avait dit « J'ai trouvé. Je vais dire Tarot, c'est Descartes. »
15:35Ah oui, alors ça, vous le savez
15:37mieux que moi. Parce que vous me l'apprenez, vous voyez.
15:39J'avais lu pourtant son discours.
15:41Je me souviens qu'il a parlé de Jean Genest.
15:43Mais ça, je ne me souviens pas du tout.
15:45C'était sa réponse à André Moreau.
15:47Je pense.
15:49Il se trouve en plus qu'il y avait un candidat
15:51qui avait écrit sa candidature
15:53en vert, de Mirliton,
15:55et qui s'est présenté 40 fois à l'Académie
15:57sans être élu.
15:59Ça, c'est ce qu'il s'appelle de la constance.
16:01Et il avait été, bien sûr, battu par Jean Cocteau, élu au premier tour.
16:03C'est ça.
16:05Il disait « J'ai reçu une raclée d'honneur. »
16:07Il se plaignait parce qu'il avait
16:09été effectivement élu à l'Académie française,
16:11à l'Académie royale de Belgique.
16:13Il avait été élu
16:15à Oxford, etc.
16:17Il disait « J'ai eu une raclée d'honneur. »
16:19Mais en même temps, il s'est bien cherché aussi.
16:21Jean Cocteau et le cinéma,
16:23c'est quand même deux mondes
16:25qui se sont rapprochés.
16:27Il faut savoir que Jean Cocteau a commencé
16:29à écrire à 10 ans et qu'il a été renvoyé
16:31de l'école pour Indiscipline.
16:33Pour Indiscipline, certainement.
16:35Mais surtout,
16:37vous savez, c'est comme les enfants très doués.
16:39Ils s'ennuyaient.
16:41Il était un élève parfaitement médiocre.
16:43C'est ça.
16:45Mais vous savez que moi, quand j'étais petite,
16:47il m'a appelé « Ma colombe » et il me disait
16:49« Tu sais, Ma colombe, fais comme moi. »
16:51Moi, j'ai jamais travaillé à l'école.
16:53Quand il me disait « Fais comme moi,
16:55j'ai jamais travaillé à l'école »,
16:57ça ne sert à rien.
16:59Il se trouve qu'il a commencé
17:01dans le cinéma parce qu'il a été
17:03le premier écrivain à tenter l'aventure du cinéma.
17:05Il a commencé au cinéma
17:07par un film totalement oublié qui était un dommage
17:09à Charlot, je crois.
17:11Je ne l'ai jamais vu.
17:13Je n'ai jamais vu ce film.
17:15Je ne connais que son premier film,
17:17« Le sang d'un poète », mais je n'ai pas vu d'autres.
17:19Je n'ai pas vu. Ça devait être un petit
17:21court-métrage, mais je ne l'ai jamais vu.
17:23« Le sang d'un poète », c'était un mécène.
17:25Le Vicomte de Noailles qui l'avait financé.
17:27Car Jean Cocteau a toujours eu beaucoup de mécènes autour de lui.
17:29Oui, c'est vrai.
17:31Mais je pense qu'il leur rendait aussi
17:33beaucoup les choses.
17:35Ou par des dessins,
17:37ou par des œuvres qu'il leur dédiait.
17:39Vous voyez, c'était toujours
17:41à double sens. Ce n'était pas quelqu'un
17:43qui profitait des choses. Pas du tout.
17:45Je pense qu'il avait sa manière
17:47à lui de les remercier.
17:49« Le sang d'un poète », son premier moyen-métrage,
17:51au départ, ça devait être un dessin animé.
17:53Oui, c'était un dessin animé.
17:55C'était prévu avec justement
17:57les Noailles.
17:59Il s'est rendu compte qu'il n'en serait pas capable.
18:01Il a proposé aux Noailles
18:03de faire un film.
18:05En fait, les poèmes perdaient de leur intensité
18:07quand ils étaient traduits dans une autre langue.
18:09Plutôt que de faire un film
18:11où il y aurait des sous-titres,
18:13il a pensé à faire très peu de dialogues,
18:15mais que tout passe par l'œil, par la caméra.
18:17En fait, c'est un film
18:19totalement surréaliste,
18:21mais avec la première, « Traversée du miroir »,
18:23bien connue chez Cocteau.
18:25Ça, c'est le premier volet d'une trilogie.
18:27Le second film,
18:29Charles Trenet l'a évoqué en chanson.
18:37Je sais que Trenet et Cocteau étaient inséparables.
18:39Lorsque Max Jacob a connu Trenet,
18:41il l'a envoyé chez Cocteau.
18:43Ils sont devenus copains
18:45et Max Jacob a téléphoné à Cocteau.
18:47« C'est moi qui l'ai découvert, Trenet,
18:49pas toi. »
18:51Il lui raccrochait au nez.
18:53Il y a un très beau portrait de Trenet fait par Cocteau
18:55que j'ai donné.
18:57Je montre des expositions
18:59et qui est parti en exposition l'été dernier.
19:01Alors, « Orphée », c'est le second film
19:03qui a été un échec finalement
19:05au départ et à sa sortie.
19:07« Orphée » n'a pas été un échec,
19:09c'est « Testament » qui a été un échec.
19:11La trilogie, c'est « Le sang d'un poète »,
19:13« Orphée », « Le testament d'Orphée ».
19:15« Le testament d'Orphée », c'est un film
19:17où il n'y avait pas d'argent,
19:19où il a appelé des tas de copains pour faire de la figuration.
19:21François Truffaut l'a aidé.
19:23François Truffaut venait d'avoir un prix au Festival de Cannes
19:25et il a financé un film de Cocteau.
19:27C'est ça.
19:29C'était Claude Pinoteau
19:31qui était l'assistant principal du « Testament d'Orphée ».
19:33C'est fou.
19:35Il était aussi assistant,
19:37je parle de Pinoteau,
19:39sur « Les parents terribles »
19:41et sur « L'aigle à deux têtes ».
19:43Le film.
19:45Mais Cocteau a beaucoup apporté au cinéma
19:47et au Festival de Cannes puisqu'il a été trois fois président.
19:49Deux fois président et une fois président d'honneur.
19:51C'est fou. C'est un record dans le genre.
19:53Oui, c'est un record dans le genre.
19:55Je ne sais pas si vous le savez, mais la dernière année,
19:57il s'asseyait sur les marges du Festival de Cannes
19:59et il félicitait tous les producteurs pour leur prix.
20:01C'était totalement bidon et tout le monde pensait
20:03qu'ils allaient avoir un prix.
20:05Mais vous savez qu'il y a eu une année où il était furieux
20:07parce qu'il voulait que ce soit David Crockett.
20:09Oui, il voulait que ce soit le capitaine Crochet
20:11qui soit récompensé
20:13et trouver que c'était lui
20:15qui méritait le prix d'interprétation.
20:17Oui, ça n'a pas vraiment plu au Festival de Cannes.
20:19Non, mais il était totalement contre les idées reçues.
20:21Tous ses choix étaient absolument
20:23à l'inverse de ce qu'on voulait.
20:25En plus, il assurait le montage de chacun de ses films.
20:27Oui.
20:29C'est rare aussi d'être présent au montage
20:31à cette époque-là.
20:33Oui, c'était comme s'il n'aurait pas pu lâcher
20:35un film monté par quelqu'un d'autre.
20:37Ce n'était pas possible.
20:39Il aimait aussi les mondanités.
20:41Je crois qu'il a dit un jour
20:43« Cocteau n'est pas le pluriel de cocktail ».
20:45Oui, il aimait beaucoup ce genre de choses-là.
20:47Mais c'est vrai que
20:49maintenant, il y a le terme « coctalien ».
20:51Je crois que ça ne lui aurait pas plu du tout.
20:53Tous ces gens qui se définissent comme coctaliens,
20:55ça leur a énervé prodigieusement, je pense.
20:57Non, mais c'était du travail pour lui.
20:59C'est une façon d'observer les autres.
21:01Oui. Il l'observait beaucoup, au fond.
21:03Et il avait un flair incroyable.
21:05C'est-à-dire qu'il ne se trompait jamais
21:07quand il décidait que quelqu'un avait du talent.
21:09Et il a dit souvent
21:11« On me reproche de ne connaître que des gens connus,
21:13mais sachez que
21:15je les ai connus bien avant
21:17qu'ils soient célèbres ».
21:19Ça a été le cas de Jean Marais.
21:21Ça a été le cas de Jean Marais, mais de tellement de monde.
21:23Parce qu'en fait, Jean Cocteau est un fil rouge
21:25de l'histoire du XXe siècle.
21:27En fait, on ne peut pas parler d'un mouvement artistique
21:29sans parler de lui. On ne peut pas parler de quelqu'un de connu
21:31sans qu'il soit son ami.
21:33Et d'ailleurs, vous perpétuez la tradition
21:35et on va l'évoquer à travers une autre date,
21:37le 5 février 2018.
21:39A tout de suite sur Sud Radio avec Dominique Marni.
21:41Sud Radio, les clés d'une vie.
21:43Jacques Pessis.
21:45Sud Radio, les clés d'une vie. Mon invité Dominique Marni.
21:47On parlera tout à l'heure de « Je t'aime »,
21:49votre livre cadeau pour les fêtes de fin d'année.
21:51On a évoqué votre parcours
21:53de romancière.
21:55On a évoqué votre filiation
21:57avec Jean Cocteau. Et justement,
21:59cette filiation vous a conduit le 5 février
22:012018 à devenir présidente
22:03des Amis de Jean Cocteau.
22:05Non, pas des Amis.
22:07Du Comité Jean Cocteau.
22:09Et justement, écoutons la voix de Cocteau pour se la remettre en mémoire.
22:11J'ai cru d'abord
22:13que la poésie était un plaisir,
22:15que les muses étaient des femmes charmantes.
22:17Et puis je me suis aperçu
22:19que c'était des personnes qui sont
22:21comme la menthe religieuse,
22:23qui dévorent la personne qu'elles épousent.
22:25Vous connaissez bien cette voix pour l'avoir
22:27entendue. Oui, très particulière, très métallique.
22:29Exactement. Donc le Comité Jean Cocteau,
22:31il a été créé pour défendre
22:33et promouvoir l'œuvre de Jean Cocteau.
22:35Je crois que c'est Pierre Berger qui est à l'origine de tout ça.
22:37Oui, oui, oui. En fait, c'est Pierre Berger
22:39qui a créé le comité dans les années
22:412000. Il a été président de ce comité.
22:43J'étais sa vice-présidente.
22:45Et après son décès, en 2017,
22:47j'ai été élue,
22:49parce que ça se fait pas comme ça, j'ai été élue
22:51présidente du comité Cocteau.
22:53Et un comité avec un but bien précis,
22:55parce que finalement, si personne n'était là,
22:57l'œuvre de Cocteau aurait disparu.
22:59Enfin, je vais peut-être pas dire ça,
23:01mais c'est vrai que ces demandes à travail
23:03quotidien, d'abord donner les autorisations
23:05dans le monde entier, c'est déjà quelque chose.
23:07Il faut réfléchir, qu'est-ce qui est bien, qu'est-ce qui est pas bien,
23:09qu'est-ce qu'il faut accepter, qu'est-ce qu'il faut refuser,
23:11qu'est-ce qu'il aurait aimé, qu'est-ce qu'il n'aurait pas voulu.
23:13Donc il y a quand même cette responsabilité là.
23:15Il y a aussi générer des choses,
23:17c'est-à-dire générer des expositions.
23:19Il y a aussi organiser des partenariats
23:21avec des marques souvent célèbres.
23:23C'est vraiment défendre son image
23:25au maximum, c'est très important.
23:27Il y a la littérature, les traductions.
23:29Et puis aussi, ce qui est très important
23:31pour moi, c'est d'initier les jeunes générations
23:33à Cocteau, ça c'est aussi mon but.
23:35C'est très, très, très important.
23:37Et c'est pas toujours facile.
23:39Je dirais que c'est assez facile.
23:41Et en fait,
23:43ça devient très facile.
23:45Parce que, au fond,
23:47je vais dire des choses pas très
23:49agréables, mais la littérature,
23:51littérature pure et dure de Jean Cocteau,
23:53ça n'est pas ce qui est demandé par les jeunes
23:55générations. Le cinéma,
23:57oui, certains films, pas tous,
23:59mais en tout cas La Belle et la Bête et Orphée
24:01et aussi Le Testament, voilà, trois
24:03films que les jeunes générations trouvent intéressants.
24:05Mais ce qui me
24:07plaît énormément, c'est l'oeuvre graphique.
24:09Tous les dessins de Jean Cocteau,
24:11ça, ça plaît énormément
24:13aux jeunes générations. Et puis,
24:15sa personnalité, c'est-à-dire
24:17le fait qu'il soit un dandy,
24:19donc les gens autour de la mode sont très
24:21intéressés par ça, sa modernité,
24:23la liberté
24:25avec laquelle il a vécu,
24:27il a vécu son homosexualité,
24:29il a aussi, il s'est drogué
24:31quand même une grande partie de sa vie, mais
24:33en fait, il faisait tel qu'il l'entendait.
24:35Il n'avait pas besoin des autorisations
24:37ou de quoi que ce soit, voilà. Et ça,
24:39ça étonne à une époque où tout le monde a besoin
24:41de tout le monde pour savoir ce qu'il faut faire.
24:43Il faut savoir que tout a commencé pour
24:45ce comité de Jean Cocteau avec
24:47la maison de Millet-la-Forêt qu'il avait achetée
24:49en 1946 après La Belle et la Bête
24:51par hasard, un petit peu, avec Jean Marais.
24:53Et ils s'étaient partagés à la maison.
24:55Cette maison, moi, je l'ai visitée quand
24:57Édouard Dermitte, qui était à l'époque l'héritier
24:59de Jean Cocteau, l'avait.
25:01Je me souviens très bien de cette maison avec le premier étage,
25:03il y avait du papier au mur un peu
25:05déchiré au premier étage, et le bureau
25:07intact au premier étage avec des stylos
25:09et des papiers partout.
25:11Du temps d'Édouard Dermitte, cette maison est restée
25:13absolument telle que Cocteau l'avait laissée.
25:15Il y est mort en 1963,
25:17le même jour qu'Édith Piaf.
25:19Non, justement, car ça, c'est la légende.
25:21En fait, Édith Piaf est morte le 10
25:23la veille,
25:25mais comme il fallait éviter l'autopsie,
25:27on l'a ramenée discrètement la nuit
25:29à Paris, où elle est soi-disant
25:31morte chez elle, boulevard Lannes.
25:33D'accord. Et alors donc, lui ne l'a appris
25:35que le 11, effectivement.
25:37Il a eu une crise cardiaque.
25:39Je ne sais pas si la crise cardiaque,
25:41on a beaucoup monté cette légende,
25:43je pense que la crise cardiaque,
25:45il savait qu'elle arriverait parce qu'il avait eu
25:47un infarctus très peu de temps avant son deuxième infarctus
25:49et qu'il se savait en sursis.
25:51En tout cas, c'est vrai qu'il est
25:53mort le 11 octobre 1963,
25:55le jour où on a annoncé
25:57le décès d'Édith Piaf.
25:59Il y avait la maison et il y avait aussi cette chapelle
26:01que j'ai visitée à l'époque,
26:03qui est une chapelle qu'il avait entièrement
26:05décorée et dessinée.
26:07Comme un pharaon qui organise son tombeau.
26:09En fait, c'était le maire de
26:11Millier-la-Forêt qui lui avait demandé de décorer cette
26:13très jolie chapelle qui datait du 12e
26:15siècle et qui s'appelle Saint-Blaise.
26:17Et pendant qu'il la décorait
26:19avec des fleurs, parce que vous savez,
26:21Millier est connu pour les plantes médicinales.
26:23Pendant qu'il la décorait avec les fleurs
26:25médicinales et d'autres choses,
26:27il s'est dit, mais pourquoi est-ce que je ne serais pas
26:29enterré là ? Et effectivement, ça a été fait.
26:31Il repose dans cette chapelle
26:33qu'il a décorée lui-même.
26:35Et ce qui est extraordinaire, c'est que quand on sort de cette chapelle, il y a un panneau
26:37qui indique la direction de la maison de Claude François.
26:39Oui, parce qu'il y avait
26:41plusieurs personnes qui habitaient à Millier.
26:43Claude François Palloy et aussi Christian Dior.
26:45Et le moulin de Claude François à Danemois
26:47est à quelques kilomètres de Millier-la-Forêt.
26:49C'est ça, effectivement.
26:51Et on le voit à la sortie de la chapelle de Cocteau.
26:53Cette maison, ça a été le point de départ
26:55pour sauver, justement, pour relancer
26:57l'image de Jean Cocteau.
26:59Il a fallu la rénover.
27:01Elle a été rénovée par Pierre Berger.
27:03Elle est aujourd'hui visitée de temps en temps.
27:05C'est inégal,
27:07dirons-nous.
27:09Écoutez, c'est une maison
27:11qui maintenant est gérée par
27:13la région Île-de-France.
27:15Donc, nous, on a donné cette
27:17maison à la région et la région
27:19s'en occupe. Elle fait ce qu'elle veut.
27:21Il se trouve qu'il a beaucoup, beaucoup travaillé
27:23dans cette maison.
27:25Il disait toujours
27:27j'ai énormément travaillé et je me suis fabriqué
27:29une armure morale par rapport
27:31à tous ceux qui me critiquaient.
27:33Oui, il ajoutait pour quelqu'un qu'on
27:35m'accuse de dilettantisme, j'ai beaucoup
27:37travaillé. Et c'est vrai que quand vous voyez tout ce qu'il a
27:39fait, c'est absolument
27:41hallucinant. Et c'est d'autant plus hallucinant
27:43que c'est quelqu'un
27:45pour qui les choses paraissaient effectivement
27:47très faciles. Moi, je pense qu'il travaillait la nuit.
27:49La nuit, c'était
27:51ce qu'il appelait les songes dormis debout, c'est-à-dire
27:53entre le sommeil la veille
27:55et les fumées d'opium.
27:57C'est aussi le moment où il était
27:59tranquille pour son inspiration. Je pense
28:01qu'il travaillait beaucoup, beaucoup, beaucoup la nuit
28:03quand c'était le grand silence.
28:05Il n'y avait pas de téléphone, il n'y avait pas tout ça.
28:07Il sortait dans la journée.
28:09Il allait au théâtre tous les soirs pratiquement.
28:11Oui, il voyait en tout cas beaucoup, beaucoup de monde.
28:13Il avait une activité incroyable
28:15dans la journée et je pense que oui, la nuit
28:17lui appartenait et c'est là que l'oeuvre se formait.
28:19Jean Cocteau doit à sa découverte du théâtre,
28:21je crois, à sa mère à 6 ans.
28:23Déjà, il imaginait des décors,
28:25des mises en scène.
28:27Oui, il voyait ses parents.
28:29Sa famille habitait rue La Brouillère dans le
28:319e arrondissement et ses parents allaient très, très souvent
28:33au théâtre, à l'opéra comique ou à l'opéra.
28:35Et il voyait sa mère
28:37partir au théâtre, s'habiller
28:39dans cette robe de velours rouge qu'il décrit
28:41dans Portraits et souvenirs et
28:43elle revenait et le lendemain, il trouvait
28:45les programmes de ce qu'elle avait vu.
28:47Alors, il était encore très jeune mais ça le fascinait.
28:49Et il allait avec sa gouvernante
28:51et il allait
28:53récupérer
28:55des cartons d'emballage
28:57dans lesquels il, lui-même, faisait
28:59créer des personnages,
29:01des costumes, etc. Avec elle, il collait,
29:03il clouait, etc. C'est comme ça qu'il s'est formé
29:05et c'est comme ça qu'il a touché
29:07au décor, qu'il a touché au costume plus tard,
29:09adulte. Alors, le théâtre,
29:11c'est une anecdote qui est historique.
29:13En 1943, il y a le soulier de satin
29:15mis en scène par Jean-Louis Barraud
29:17à la Comédie française.
29:19C'est le couvre-feu, donc c'est 17h à 22h
29:21et la critique de Jean Cocteau
29:23à la fin, c'est « Heureusement, il n'y avait pas la paire ».
29:25Alors, ça a été attribué à beaucoup de personnes.
29:27Je pense qu'il l'a répété, il l'a entendu
29:29mais je pense que
29:31c'est pas de lui mais il a dû trouver ça tellement
29:33génial qu'il l'a bien évidemment répété parce que ça,
29:35c'est assez...
29:37Je ne sais plus qui a dit cette
29:39phrase mais elle est connue.
29:41En tout cas, Charles Trenet m'a dit un jour,
29:43Cocteau m'a téléphoné et m'a dit cette formule le lendemain matin.
29:45Je crois qu'il s'est emparé de quelque chose
29:47qui était assez brillant, dit par quelqu'un d'autre.
29:49Alors, la drogue justement,
29:51c'est incroyable parce que
29:53Jean Cocteau, qui avait tous les talents,
29:55il est tombé dans la drogue. Je crois qu'au départ, c'est par
29:57des espoirs d'amour que ça a commencé.
29:59Alors, c'est ce qu'on raconte, c'est ce que je crois
30:01assez vrai. En fait, il a été
30:03désespéré par la mort de Raymond Radiguet
30:05qui l'aimait, qui est mort
30:07d'une fièvre typhoïde. Radiguet avait 20 ans
30:09et Cocteau a été inconsolable
30:11parce que non seulement il perdait l'homme qu'il aimait
30:13mais il perdait son alter ego littéraire
30:15c'est-à-dire qu'ils ont beaucoup travaillé ensemble
30:17chacun a des romans différents
30:19mais aussi a des oeuvres communes.
30:21Donc ça a été un désespoir
30:23total pour Cocteau.
30:25Il est ensuite allé à Montécarle
30:27où il a
30:29commencé à fumer de l'opium
30:31et puis il en a pris énormément
30:33il a commencé à en prendre énormément
30:35en 1924
30:37et ça a été
30:39un début
30:41d'une addiction qui a duré toute sa vie
30:43et il a fait sept ou huit
30:45cours de désintoxication en sachant
30:47très bien au fond de lui-même qu'il recommencerait.
30:49La Côte d'Azur c'est important pour lui
30:51je crois qu'il est souvent à Nice
30:53il a vu Stravinsky à Nice
30:55il a vu
30:57des tas de gens. C'était une passion
30:59pour les grands de ce monde
31:01les grands écrivains, les grands musiciens.
31:03Je crois qu'il aimait
31:05les gens avec qui
31:07le dialogue s'instaurait et quand ça fusait
31:09en fait il avait besoin d'être
31:11d'être ou intéressé au minimum
31:13ou ébloui au maximum
31:15et il ne pouvait pas se contenter d'avoir des dialogues
31:17médiocres avec des gens qui n'apprenaient rien
31:19ou qui n'incitaient rien
31:21au fond. Stravinsky c'est le
31:23sacre du printemps quand même. Bien sûr et puis ça a été
31:25oui, alors là ça a été le bouleversement
31:27quand il a découvert, quand il a entendu
31:29au théâtre des Champs-Élysées le sacre
31:31qui était un scandale, les gens hurlaient
31:33et lui il savait que c'était absolument magnifique.
31:35Mais ça a eu un tel scandale
31:37c'était les balais russes qu'il a réussi ensuite
31:39à travailler pour les balais russes. Oui
31:41il a réussi à approcher Diaghilev
31:43qui était le mentor des balais russes
31:45par Missia Cert
31:47qui était l'égérie de
31:49Diaghilev et il a
31:51essayé jusqu'au moment où il a créé
31:53Parade en 1917
31:55pendant la première
31:57guerre mondiale et il a créé
31:59Parade avec Picasso qui
32:01créait les décors, Éric Satie pour
32:03la musique et
32:05les balais russes
32:07pour la chorégraphie.
32:09Personne n'imaginait que ce serait mythique aujourd'hui.
32:11Personne ne l'imaginait, ça aussi c'était un scandale
32:13mais ça il était ravi Cocteau de faire
32:15scandale, c'était tout ce qu'il voulait
32:17parce qu'en fait il avait connu la belle époque
32:19cette époque très empoulée,
32:21cet art de vivre, cette facilité de vie
32:23avant cette guerre de 1914 et puis tout d'un coup
32:25c'était la modernité et lui ce qu'il voulait
32:27c'est justement un nouveau langage et basculer
32:29dans cette modernité, ce qu'il a fait avec Parade.
32:31Et aller au-delà de la modernité
32:33puisqu'il était un fan inconditionnel
32:35il croyait aux soucoupes volantes.
32:37Ah oui alors ça c'était à la fin de sa vie
32:39effectivement, dans les années 50
32:41il a vraiment cru
32:43enfin il a cru aux soucoupes volantes
32:45et puis il ne voulait vraiment pas en démanteler parce que ça lui convenait
32:47tout à fait cette histoire. Il y a eu
32:49des alertes de soucoupes volantes à l'époque
32:51dans les journaux, il était dans le Midi à ce
32:53moment-là et il a entamé
32:55une correspondance
32:57avec un passionné des soucoupes volantes
32:59qui était Émile Michel, il y a une correspondance croisée
33:01des deux qui est assez extraordinaire.
33:03Il a fait des dessins, je les ai exposés
33:05il n'y a pas longtemps, de soucoupes volantes
33:07de
33:09cosmos, de choses absolument incroyables
33:11et il croyait absolument
33:13absolument, il l'a écrit dans son journal.
33:15Alors il habitait à l'époque un petit appartement
33:17en rue Montpensier à côté du
33:19palais royal et Mireille m'a raconté
33:21elle habitait juste au-dessus au cinquième étage
33:23qu'elle avait racheté cet appartement
33:25après la mort de Cocteau en se disant
33:27il n'y a pas d'ascenseur pour aller au cinquième, si j'ai un problème
33:29j'habiterai là-dedans.
33:31Oui, alors c'est ce qu'elle a raconté mais c'est faux
33:33c'est totalement faux
33:35non, non, non, ça n'a
33:37jamais racheté cet appartement qui restait
33:39qui restait l'appartement d'Edouard Dermitte
33:41qui était légataire de Cocteau, donc elle ne l'a
33:43jamais racheté.
33:45Elle a été sa voisine
33:47et s'était très amie pendant des années
33:49et surtout Cocteau était très amie avec Emmanuel Berle
33:51le mari de Mireille. Oui, qui était aussi
33:53un philosophe journaliste bien connu.
33:55Il a laissé une oeuvre considérable et
33:57il a ouvert la voie à beaucoup d'autres finalement que Cocteau.
33:59Je pense qu'il a
34:01ouvert la voie, je pense qu'il était très
34:03généreux
34:05d'offrir ce
34:07qu'il pouvait offrir, d'offrir
34:09ses connaissances, d'offrir son aide
34:11de lancer des jeunes
34:13de croire justement que ces jeunes
34:15allaient faire des choses formidables. Je pense
34:17qu'il a vraiment oeuvré pour ça, oui.
34:19Et il oeuvrait aussi
34:21pour les autres en les recevant à déjeuner au Grand Véfour
34:23à côté de chez lui où il avait sa table
34:25au quotidien. Alors il avait sa table au Grand Véfour
34:27et Colette avait la sienne.
34:29Et c'est vrai que ça devait être assez
34:31extraordinaire. Mais ils étaient plusieurs
34:33artistes et écrivains à se retrouver
34:35dans ce restaurant qui est
34:37devenu totalement mythique sous
34:39l'aide de Raymond Oliver.
34:41Exactement, qui faisait Arrêt Magie de la Cuisine, première
34:43émission culinaire à la télévision.
34:45Alors ça c'est le côté humour et
34:47maintenant on va parler d'amour à travers la date
34:49du 15 novembre 2024. A tout de suite
34:51sur Sud Radio avec Dominique Pardi.
34:57Sur Sud Radio, le clé d'une vie, mon invité
34:59Dominique Marny. On a parlé de vos
35:01romans, on a parlé de Jean Cocteau dont vous êtes
35:03la petite nièce. Et on
35:05en revient au 15 novembre 2024
35:07avec la sortie d'un album
35:09magnifique, étonnant qui s'appelle
35:11Je t'aime et qu'on pourrait symboliser
35:13par cette chanson.
35:21Lucienne Boyer, Parlez-moi d'amour.
35:23Chanson qui a été célèbre dans le monde entier, je ne sais pas si
35:25vous le savez. Elle a descendu un jour à la cinquième
35:27avenue comme une présidente des Etats-Unis
35:29avec la foule qui l'acclamait grâce
35:31à Parlez-moi d'amour. Voilà, c'est formidable,
35:33vous voyez ça s'exporte.
35:35Ce livre, Je t'aime,
35:37c'est sur le sentiment amoureux
35:39qui vous passionne depuis des années Dominique Marny.
35:41Oui, alors ça m'a
35:43beaucoup intéressée évidemment quand j'écrivais des romans
35:45parce que c'est quand même souvent dans
35:47le centre de certains
35:49romans. Donc
35:51ensuite j'ai beaucoup travaillé sur le sentiment
35:53amoureux en Occident.
35:55J'ai publié plusieurs livres sur ce sujet,
35:57sur les correspondances amoureuses,
35:59sur
36:01l'amour dans
36:03les écrits, dans la littérature, les scènes
36:05d'amour dans la littérature, etc.
36:07Après, depuis 2012,
36:09je suis très souvent commissaire d'exposition.
36:11Alors, 10 expositions sur Cocteau mais pas que
36:13et beaucoup d'expositions sur le sentiment amoureux.
36:15Et c'est vrai que quand
36:17j'ai parlé avec
36:19les éditions des Saint-Père
36:21avec qui j'adore travailler
36:23et que je leur ai parlé de ce sujet-là,
36:25tout de suite ils m'ont dit
36:27bien sûr, pourquoi pas, c'est-à-dire
36:29réunir, raconter
36:31l'histoire de l'amour
36:33à travers les textes, à travers
36:35les citations mais aussi à travers les œuvres d'art
36:37et réunir le tout. Et pas
36:39simplement illustrer des textes avec
36:41des œuvres mais que tout ça se réponde
36:43et montrer que tout ça fonctionne ensemble.
36:45Je trouve que c'est un livre très particulier et rare
36:47puisque c'est un livre tiré à même pas 1 000 exemplaires,
36:4999 exemplaires, numéroté
36:51et qui est un livre donc très
36:53illustré car c'est la spécialité des éditions
36:55des Saint-Père qui reprennent des manuscrits
36:57originaux et là c'est un texte original.
36:59Voilà, alors ils font
37:01des... ils créent
37:03des livres extraordinaires
37:05avec des facsimilés
37:07de manuscrits de grands, grands, grands auteurs
37:09et moi j'ai cette chance
37:11et ce privilège de pouvoir écrire
37:13directement pour eux
37:15d'avoir écrit ces textes
37:17sur l'amour, chaque chapitre est
37:19expliqué par moi mais
37:21de pouvoir y incorporer des
37:23citations, des extraits
37:25et comme je vous disais, de pouvoir
37:27faire... enfin ce sont des livres
37:29exposition, c'est-à-dire que vous avez l'impression
37:31de traverser une exposition
37:33qui vous raconte l'amour et que
37:35on vous explique de façon plutôt
37:37ludique et agréable
37:39et romanesque le sentiment.
37:41Voilà, et c'est pas du tout quelque chose
37:43de didactique et d'ennuyeux, enfin j'espère.
37:45Mais en tout cas c'est des livres, quand je dis pour Noël
37:47c'est un très beau cadeau puisque ce sont des livres
37:49grand format, avec un papier très spécial
37:51et des reliures comme on ne fait plus
37:53aujourd'hui. Ah mais personne ne pourrait faire ça
37:55il n'y a que les éditions des Saint-Père qui sont capables de faire des choses
37:57pareilles et avec effectivement
37:59une reliure,
38:01tout est doré à leur chaud, le papier
38:03est extraordinaire, c'est fait,
38:05c'est suivi au détail prêt et alors
38:07j'ai travaillé, parce qu'il faut le nommer, j'ai travaillé
38:09avec un graphiste avec qui j'ai l'habitude de travailler
38:11et qui travaille pour les éditions des Saint-Père
38:13qui s'appelle Nicolas Patrinsky et qui comprend
38:15quart de tour ce que je souhaite.
38:17Donc il y a quelque chose de très
38:19artistique aussi dans la maquette, c'est pas
38:21simplement poser des choses, c'est vraiment
38:23réfléchir, chaque chose
38:25a une signification, voilà, il n'y a
38:27rien de gratuit. Mais les livres objet d'art
38:29c'est rare aujourd'hui ? Mais c'est rare et c'est
38:31merveilleux, heureusement que ça existe parce que ça réconcilie
38:33avec beaucoup de choses. Alors le sentiment amoureux
38:35justement c'est une spécificité
38:37française, vous le dites dans ce livre.
38:39Oui alors moi je parle effectivement
38:41du sentiment amoureux en Occident
38:43particulièrement en France
38:45donc je vous montre comment ça a été vécu
38:47en France mais aussi avec les apports anglo-saxons
38:49les apports
38:51européens. Donc en fait
38:53je fais un état des lieux, je parle
38:55des origines et en fait
38:57je me pose la question
38:59est-ce que l'amour existerait si on n'en avait
39:01jamais entendu parler ?
39:03Ben voilà, c'est la question. Est-ce que
39:05on saurait ce que c'est que l'amour si on ne nous
39:07avait pas raconté la mythologie ?
39:09Si on ne nous avait pas raconté
39:11ce que c'était que
39:13je ne sais pas
39:15les rites
39:17gréco-romains etc. En fait on a l'impression
39:19qu'on découvre l'amour en France
39:21au XIIIe siècle avec l'amour courtois
39:23XIIe, XIIIe siècle et que
39:25pendant la période, entre la chute
39:27de l'Empire romain et puis
39:29le XIIe et le XIIIe siècle, on ne savait pas ce que c'était
39:31il y avait des rapes, il y avait des mariages arrangés etc.
39:33Mais l'amour, l'amour
39:35le sentiment amoureux exalté
39:37et raconté et déclaré
39:39on a l'impression que ça démarre
39:41vraiment avec l'amour courtois
39:43en France au Moyen-Âge.
39:45Ce que personne n'avait dit, je ne l'ai vu nulle part dans des livres ça.
39:47Ben si, si, si, je ne suis pas la première
39:49à le dire quand même mais c'est vrai que c'est quand même
39:51très passionnant de voir ça. Alors après
39:53l'amour c'est un
39:55son de persistance, c'est ce que tout le monde voudrait
39:57connaître et même
39:59ceux qui sont malheureusement en amour n'ont qu'une envie
40:01même quitte à souffrir encore une nouvelle fois
40:03c'est recommencer l'expérience
40:05en fait on se rend compte qu'on ne s'arrête pas
40:07forcément à un désespoir
40:09ou à une séparation et qu'on recommence
40:11et ça c'est quand même
40:13passionnant aussi.
40:15Dans ce livre, toutes les étapes de l'amour
40:17c'est-à-dire la séduction,
40:19le consentement, le désir, les promesses
40:21et parfois la souffrance.
40:23Oui alors voilà, l'amour qui est tel
40:25qu'il est, qui est immuable, c'est-à-dire la sensation
40:27de ne vivre
40:29que pour quelqu'un et de vouloir que cette personne ne vive
40:31que pour soi, bon ça mais
40:33en fait à travers les époques ça a été vécu
40:35différemment et donc dans ce
40:37parcours, dans ce livre
40:39qui est raconté comme
40:41si c'était un parcours dans un parc qui rappelle
40:43les cartes du tendre de Mademoiselle de Scuderi
40:45et bien
40:47c'est effectivement montrer comment
40:49on rêve
40:51et comme on rêvait autrefois, comme on rêve aujourd'hui
40:53c'est comment on se déclare
40:55comment on se séduit, comment on s'embrasse
40:57comment on se désire, comment on souffre
40:59comment on correspond
41:01comment on partage
41:03comment on promet, c'est tout ça
41:05et on se rend compte que dans les formes c'est totalement différent
41:07que ça a beaucoup évolué selon les époques
41:09Voilà, et il y a une chanson
41:11que vous évoquez qui est un poème au départ
41:13mais Brassens l'a mis en musique
41:15Rien n'est jamais acquis
41:17à l'homme
41:19ni sa force
41:21ni sa faiblesse, ni son cœur
41:23et quand il voit
41:25Il n'y a pas d'amour heureux, poème de Louis Aragon
41:27Vous savez pourquoi il a écrit ce poème ?
41:29Il y a 43 ans en résistance à Lyon
41:31et Elsa Triolet s'en va
41:33parce que les résistants ne pouvaient pas vivre ensemble
41:35de peur d'être arrêtés
41:37Et après il se retrouve à Nice, c'est ça ?
41:39C'est vrai qu'il n'y a pas d'amour heureux
41:41mais en même temps Aragon
41:43est présent, il y a aussi Victor Hugo
41:45Marivaux, Colette
41:47Kessel, vous avez réuni
41:49et ce n'était pas simple, tout ce qui se rapporte
41:51à l'amour, écrit par de grands auteurs
41:53Oui, et ça se rapporte
41:55à ce que je disais tout à l'heure
41:57Il n'y a pas d'amour heureux
41:59il y a des amours heureux mais de façon plus ou moins
42:01courte ou éphémère
42:03parce que quand on cite Victor Hugo
42:05quand on cite Kessel, quand on cite pas mal de personnes
42:07qui sont là, on se rend compte qu'ils ont aimé plusieurs personnes dans leur vie
42:09et qu'ils ont juré
42:11à chacun ou à chacune
42:13d'ailleurs on parlait d'Edith Piaf
42:15Edith Piaf a juré
42:17à ses amants successifs
42:19qu'elle n'avait jamais connu
42:21quelque chose d'aussi extraordinaire
42:23Je crois qu'en fait finalement
42:25les gens les plus aguerris, les auteurs les plus aguerris
42:27finalement tombent dans le même écueil
42:29Alors il se trouve qu'il y a effectivement
42:31cette évocation sous forme de citations
42:33mais il y a aussi des textes, des lettres manuscrites
42:35et des oeuvres d'art
42:37Oui, parce que
42:39c'est vrai que l'amour
42:41que vous étudiez
42:43la peinture, la sculpture, la photographie
42:45tout ce qui
42:47relève, je n'ai pas abordé la chanson
42:49parce que ça, ça mériterait un livre absolument à part
42:51mais en tout cas, toutes les disciplines artistiques
42:53vous vous rendez compte que l'amour est omniprésent
42:55c'est presque la place privilégiée
42:57je crois que c'est la place privilégiée
42:59pour les artistes
43:01donc voilà, j'avais l'embarras du choix
43:03le principal c'était surtout de ne pas se perdre
43:05Il fallait faire le choix
43:07Comment on fait pour faire le choix ?
43:09C'est par étapes ? Dominique Marny ?
43:11Alors, moi je dirais que je l'ai fait
43:13oui, par connaissance, mais j'ai beaucoup aussi
43:15laissé libre cours à l'intuition
43:17et puis je trouvais qu'il fallait
43:19que ça fonctionne ensemble, c'est ce que je vous disais tout à l'heure
43:21il faut que ça se réponde
43:23ça ne doit pas être posé par hasard
43:25vous voyez
43:27ça doit apporter quelque chose
43:29mais pas simplement illustrer
43:31Alors, il y a des textes écrits par Boris Vian
43:33et puis naturellement
43:35Cocteau est présent à travers une lettre
43:37car la correspondance était très importante
43:39pour beaucoup de gens, en particulier pour Cocteau
43:41Mais oui, c'était très important
43:43donc Cocteau, il y a une lettre à Jean Marais
43:45parce qu'il a écrit des lettres magnifiques à Jean Marais
43:47mais pas qu'à lui, mais en tout cas il y a celle-ci
43:49c'est vrai que les gens écrivaient autrefois
43:51maintenant ils envoient des mails ou des textos
43:53et puis il y avait aussi
43:55l'attente de la lettre
43:57quelquefois ça durait des mois
43:59à certaines époques où ça n'arrivait jamais
44:01alors que maintenant, dans la seconde, vous avez tout
44:03alors l'amour est passé de l'attente à l'immédiateté
44:05c'est une des formes différentes aujourd'hui
44:07Alors, il y avait le courrier
44:09mais aussi il y avait les télégrammes
44:11et c'est l'occasion d'écouter un extrait d'un rare sketch
44:13de Yves Montand
44:15La ville est morte
44:17depuis que tu es partie
44:19mais la statue est toujours à la même place
44:21Depuis que tu es partie
44:23alors c'est Montand
44:25la statue est toujours à la même place, c'est un classique
44:27c'est le seul sketch
44:29enregistré par Yves Montand et Simon Signoret
44:31ça symbolise
44:33le télégramme téléphonique
44:35ah mais oui, c'était ça
44:37mais ça a été ça pendant longtemps
44:39et avant le télégramme, il n'y avait même pas les télégrammes
44:41il y avait les courriers
44:43et à une époque, les courriers étaient lus par les parents
44:45par les gouvernantes, etc
44:47il fallait déjouer des tas d'obstacles
44:49alors que maintenant, il n'y a plus aucun obstacle
44:51à déjouer
44:53C'est regrettable, non ?
44:55Je ne sais pas, chacun à son époque
44:57peut-être que c'est très bien pour certaines choses aujourd'hui
44:59il y a des gens qui vous disent que les plateformes de rencontre
45:01beaucoup de gens se rencontrent par des plateformes
45:03vous disent que les plateformes ont des logiciels
45:05qui font le tri
45:07et qu'elles vous proposent des gens qui sont adaptés
45:09à ce que vous cherchez
45:11Il y a aussi l'évocation
45:13des photos rares
45:15la plus célèbre, c'est quand même le baiser
45:17les amoureux de Paris
45:19de Robert Doisneau
45:21Ah oui, il y a Robert Doisneau
45:23il y a Brassaille aussi
45:25et puis il y a plus récemment
45:27ça fait partie des photographes
45:29qui ont illustré le baiser de façon
45:31extraordinaire. Je crois que leurs photos ont fait
45:33le tour du monde
45:35On sait maintenant que Doisneau
45:37s'était arrangé
45:39il avait pris deux étudiants dans un café
45:41c'est pas du tout des albénimes
45:43qui se brassent par hasard
45:45c'était très réfléchi
45:47très organisé
45:49Et puis dans ce livre, vous évoquez, Dominique Marny
45:51les films et les pièces de théâtre autour des thèmes de l'amour
45:53car il y en a d'innombrables
45:55innombrables
45:57vraiment, mais je pense que tous les auteurs
45:59tous les grands auteurs dramatiques
46:01ont touché à ce thème-là
46:03on peut penser à tout le monde
46:05on peut penser à Racine
46:07on peut penser à Marie Vaux
46:09Victor Hugo, ça ne s'arrête pas
46:11Et le baiser de cinéma a fait rêver
46:13toutes les générations. Oui, le fameux french kiss
46:15c'est-à-dire que le baiser où on s'embrasse sur la bouche
46:17qui est arrivé qu'à une certaine époque
46:19alors là, ça fait le tour du monde aussi
46:21et d'ailleurs, maintenant, quand on parle
46:23de french kiss, tout le monde sait ce que c'est
46:25Exactement. Il se trouve aussi que je sais que
46:27Nino Ventura a tourné avec Bardot
46:29et il a refusé de l'embrasser sur la bouche
46:31parce qu'il dit « ma femme honnête sera furieuse »
46:33et il a refusé la scène
46:35Oui, il avait la réputation de refuser d'embrasser ses partenaires
46:37sur le tournage. Exactement. Puis vous évoquez aussi
46:39Humphrey Bogart et Ingrid Bergman
46:41qui sont quand même des mythes avec Casablanca
46:43Bien sûr. Il y a aussi Clark Gable
46:45Avec « autant n'emporte le vent » quand il dit
46:47à Scarlett, quand Red dit à Scarlett
46:49« vous avez besoin d'être embrassée par quelqu'un
46:51qui sait s'y prendre » ou quelque chose comme ça
46:53il lui dit quelque chose comme ça. Voilà.
46:55Mais à l'époque, vous imaginez, ça c'était
46:57quand même, dans des années, on parlait
46:59peu, peu du sentiment amoureux
47:01et très très peu de la sexualité
47:03Et bien, il y a aussi un film « L'affaire Thomas Cronne »
47:05où il y a un baiser aussi mythique
47:07Pendant la partie d'échec. Voilà.
47:09Et le baiser le plus long de l'histoire du cinéma, je me suis un peu renseigné
47:11le premier, c'était deux minutes
47:13trente secondes, un record, dans le film
47:15d'Hitchcock « Les Enchaînées »
47:17où il a obligé Cary Grant
47:19et Ingrid Bergman
47:21à s'embrasser pendant deux minutes trente. C'est ça.
47:23Alors, peut-être que, je ne sais pas si ça leur faisait forcément
47:25plaisir, mais en tout cas... Pas vraiment.
47:27Alors, ce livre, c'est un livre
47:29d'art, c'est un livre d'art
47:31il ne fallait pas se tromper
47:33sur les sujets, sur l'univers que vous vouliez évoquer
47:35Non, il ne faut pas se tromper
47:37surtout, par exemple, il y a un chapitre qui est très important
47:39qui est sur le consentement, et ça, je trouvais
47:41que c'était important de parler du consentement
47:43qui n'a tellement pas existé pendant des siècles
47:45et des siècles, et je trouve que
47:47justement, j'ai consacré un chapitre à ça
47:49pour bien mettre les choses au point aujourd'hui
47:51donc il y a bien un chapitre sur le consentement
47:53Parce que là, c'est un sujet d'actualité
47:55qui a évolué au fil des siècles
47:57Dieu merci, heureusement dans le bon sens
47:59mais il n'était absolument pas question
48:01c'est sous silence, et donc le chapitre du consentement
48:03il est avant le chapitre embrassé
48:05et le chapitre avoué, c'est-à-dire que
48:07voilà, pour moi, un consentement
48:09doit être dit, formulé
48:11et entendu
48:13Oui, ça c'est un message, justement, pour les générations d'aujourd'hui
48:15qui ne connaissent pas forcément le passé
48:17Non, mais justement, il faut leur montrer que ça n'a pas
48:19été comme ça, et qu'il est temps que ça change
48:21Voilà, bah tout ça, c'est dans ce livre
48:23qui est un merveilleux cadeau de Noël
48:25qui s'appelle « Je t'aime »
48:27Personne n'avait pris ce titre finalement
48:29Pour un livre d'art ?
48:31Ah non, pour un livre d'art, non, mais en tous les cas
48:33ce qui est extraordinaire, ce sont des mots
48:35qui pendant des siècles sont dits dans toutes les langues
48:37et qui, malgré tout ça, qui ont été répétés
48:39à saciété, et qui continuent
48:41d'être magiques
48:43En tout cas, ce qui est magique, c'est ce livre-objet
48:45qui est vraiment un objet d'art pour les fêtes de Noël
48:47qu'on pourra offrir à celles et ceux qu'on aime
48:49c'est le cadeau idéal
48:51pour prouver son affection
48:53Écoutez, oui, c'est un...
48:55c'est une jolie manière de l'approuver
48:57Merci infiniment Dominique Parby
48:59Merci beaucoup
49:01Et continuez à aimer votre univers et votre métier
49:03Merci beaucoup, merci mille fois
49:05Merci, les Clés d'une Vie, c'est terminé pour aujourd'hui
49:07On se retrouve bientôt, restez fidèles à l'écoute de Sud Radio