Les rebelles en Syrie progressent vers Homs et sont désormais à 5 km de la troisième ville du pays, après avoir pris le contrôle la veille de la ville stratégique de Hama, plus au Nord. Le chef des rebelles islamistes, Abou Mohammed Al-Jolani, a affirmé que "l'objectif" de cette offensive fulgurante dans le pays était de "renverser" le régime du président Bachar Al-Assad. Regardez l'analyse de Antoine Basbous, politologue, directeur de l'Observatoire des pays arabes et associé chez Forward Global..
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 06 décembre 2024.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 06 décembre 2024.
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00:00RTL Soir. Yves Calvi et Agnès Bonfillon.
00:05Bonsoir Antoine Basbous.
00:07Bonsoir Yves Calvi.
00:08Vous êtes politologue, directeur de l'Observatoire des Pays Arabes et associé chez Forward Global.
00:12C'est une offensive fulgurante qui a surpris tout le monde en Syrie.
00:16En un peu plus d'une semaine, des rebelles islamistes se sont donc emparés de plusieurs villes,
00:20Clé, Alep, Hama.
00:22Au moment où nous parlons, ils sont aux portes de Homs, la troisième ville du pays.
00:26Antoine Basbous, qui sont ces rebelles ?
00:29À l'origine, ce sont des islamistes qui ont viré un peu leur cuti
00:33et qui aujourd'hui rassurent les populations chez qui ils s'invitent.
00:39Du coup, ils sont beaucoup plus civilisés qu'ils n'apparaissaient il y a sept ou huit ans.
00:46C'est une rébellion davantage sunnite qui a soulevé une insurrection dans les villes
00:53dans lesquelles ils ne sont pas encore arrivés.
00:56Nous avons vu aujourd'hui tomber Deir ez-Zour à la frontière avec l'Irak,
01:01prise par les forces démocratiques kurdes.
01:05Nous avons vu la ville de Russe de Swayda et sa région se soulever également
01:10et chasser le préfet.
01:13Nous avons vu Dera dans le sud-ouest de la Syrie à la frontière avec la Jordanie tomber également.
01:21Bref, maintenant, Homs, c'est le verrou stratégique qui sépare Damas du pays Alawite.
01:27Si Homs tombe, Eh bien, Assad, s'il est toujours à Damas,
01:32il ne pourra même plus rejoindre par voie terrestre le pays Alawite.
01:37Vous nous dites que le régime du président Assad peut tomber ?
01:42Oui, je suis convaincu qu'il peut tomber.
01:47D'ailleurs, le président lui-même est convaincu qu'il prend beaucoup de risques.
01:52C'est qu'il a évacué, il y a une semaine, sa famille à Londres, son épouse et ses enfants.
01:57C'est la première fois qu'il le fait depuis 2011, le début du tsunami syrien.
02:03En plus, il y a deux jours, il a relevé le solde de son armée de 50%
02:10parce qu'il y a tellement de désertions, de défections.
02:13Il est très inquiet et il voit bien que le peuple,
02:18qui a subi la dictature de père en fils depuis 1970, n'en peut plus.
02:23Il a appauvri les Syriens, il les a réprimés.
02:26Et donc, aujourd'hui, il récolte un peu le fruit de ce qu'il a semé.
02:30On est quand même extrêmement surpris par la vitesse à laquelle ces rebelles avancent.
02:35Oui, justement, c'est parce qu'ils avancent dans du beurre.
02:38Parce qu'en face, Assad n'a pas de soutien à sa base sociale, a énormément rétréci.
02:44Et en fait, c'est une affaire qui signifie le démantèlement du croissant chiite iranien.
02:51C'est le démantèlement de l'axe de la résistance.
02:53C'est la chute de Gaza, puis la décapitation du Hezbollah.
02:58Et maintenant, c'est le tour de la Syrie qui tombe.
03:01Et donc, l'influence iranienne qui a créé ce croissant chiite depuis 2003,
03:07après la chute de Saddam Hussein, qui est en train d'être démantelée.
03:10Au point que même les milices chiites irakiennes aux ordres de Téhéran
03:15refusent de franchir la frontière pour venir au secours d'Assad.
03:19En même temps, la Russie qui a parrainé Assad, qui l'a sauvé en 2015,
03:23ne se mobilise pas pour lui, ne s'engage pas.
03:27Parce que d'abord, elle a l'Ukraine.
03:29Et en même temps, elle ne croit pas à la survie du régime d'Assad.
03:33Et dit, si les soldats syriens fuient et ne défendent pas leur position,
03:38comment voulez-vous que Moscou le fasse à leur place ?
03:41Donc, la situation d'Assad est vraiment dramatique.
03:44Alors, pardon, quels sont leurs moyens militaires à ces rebelles islamistes ?
03:48Et d'ailleurs, qui les fournit en armes, en munitions, en argent ?
03:52D'abord, en armes, en munitions, en drones, c'est la Turquie.
03:58C'était la poche de Idlib adossée à la Turquie, hébergée, soutenue avec l'oxygène,
04:05avec tous les moyens du renseignement turc qui les a fournis
04:10et qui ont attendu le moment opportun pour foncer.
04:14À vrai dire, cette crise nous livre aussi le fait que la Turquie joue un peu de façon stratégique.
04:22Rappelez-vous leur offensive en Libye qui a été un succès,
04:26leur offensive en Arménie aux côtés de l'Azerbaïdjan qui a été un succès.
04:30Et ils ont su attendre le moment opportun,
04:33c'est-à-dire l'évacuation des passadarans iraniens et du Hezbollah de la zone d'Alep
04:41pour aller combattre Israël dans le sud de Liban.
04:44Avec ce front dégarni, ça a ouvert la voie aux hommes au proxy de la Turquie
04:49pour avancer comme dans du beurre dans des territoires où le régime est haï.
04:55La Russie a un rôle aussi dans ce qui se passe ?
04:58La Russie, effectivement, la Russie était l'un des coparrains avec l'Iran d'Assad.
05:06Ils l'ont sauvée en 2015 et aujourd'hui la Russie est très engagée en Ukraine,
05:11c'est son principal front et aujourd'hui elle n'a plus les moyens de venir sauver Assad,
05:16d'autant plus que les fantassins de l'Iran ont été vaincus au Liban,
05:21sont en perdition en Syrie, repartent, quittent le pays.
05:25Et donc la flotte russe au port de Latakia a pris le large pour échapper à d'éventuels tirs.
05:34Et en 2015, quand la Russie est arrivée, il y avait 30 avions de guerre sur la base de Khmeimim à Latakia.
05:42Aujourd'hui il y en a 6 et les bombardements qu'ils ont faits ont été trop tard et trop peu,
05:49du fait qu'ils n'ont pas changé le sort du combat.
05:52Ce qui veut dire que la seule aide qu'elle peut apporter aujourd'hui, c'est d'exilier le président Assad ?
05:58Le président Assad, s'il réussit à s'en sortir vivant,
06:03il a deux choix, soit l'Iran, soit la Russie.
06:09Alors que sa famille, puisque son épouse est née en Grande-Bretagne,
06:14elle a la nationalité anglaise qu'elle a donnée à ses enfants,
06:17ils sont à Londres mais ils peuvent le rejoindre là où il veut.
06:20Pouvez-vous nous parler un petit peu du chef de ces rebelles islamistes qui avancent actuellement vers Damas ?
06:26Abou-Mohamed Al-Joulani, qui est-il ?
06:30C'est un surnom, il a révélé hier son vrai nom, c'est Ahmed Al-Shara.
06:38C'est un homme qui est jeune mais qui a pas mal réuni d'expérience
06:45et qui commence à communiquer de façon très moderne.
06:50Tous les jours il a une vidéo qu'il adresse à ses concitoyens.
06:55Il a été à la citadelle d'Alep il y a deux jours, il a fait des déclarations rassurantes.
07:02Bref, il sait communiquer, c'est un communicant et sa cause est porteuse,
07:08même s'il vient de l'islamisme et s'il est trop proche de la Turquie.
07:16Ce qui est vrai c'est que la Syrie d'Assad a été un pion iranien,
07:24maintenant c'est la Turquie qui remplace l'Iran
07:27et c'est le démantèlement du croissant chiite iranien qui est à l'oeuvre
07:32et dont nous assistons aux derniers mouvements.
07:36Merci infiniment Antoine Basbous, politologue, directeur de l'Observatoire des Pays Arabes
07:39et associé chez Watch Forward Global.
07:42On apprend par ailleurs que ce soir, une statue de l'ancien président syrien,
07:45Afaz al-Assad, a été renversée par la population dans la ville syrienne d'Ama.
07:50Dans un instant, une idée brillante pour illuminer votre week-end,
07:53la fête des Lumières de Lyon, 25e anniversaire magnifique dans la capitale des Gaules.