Sébastien Spitzer : L'Heure des Livres (Émission du 30/09/2024)

  • il y a 5 heures
Anne Fulda reçoit Sébastien Spitzer pour son livre «Et nous danserons encore» dans #HDLivres

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Transcription
00:00Bienvenue à L'Heure des Livres, Sébastien Spitzer.
00:03Vous êtes journaliste, vous êtes écrivain.
00:05On vous doit notamment un très beau livre qui s'appelle
00:08« Ces rêves qu'on piétine », mais aussi d'autres,
00:10comme « Dans les flammes de Notre-Dame », un dictionnaire amoureux de Victor Hugo.
00:13Vous venez de publier « Et nous danserons encore, 7 octobre et après,
00:17les survivants racontent », un livre qui est paru chez Albin Michel,
00:20un livre témoignage pour raconter ce qui s'est passé ce 7 octobre 2023,
00:24le massacre de civils qui, pour la plupart,
00:28était pacifique et pris de coexistence avec les Palestiniens,
00:33qui ont été, pour certains, exécutés, torturés, violés,
00:36ou d'autres pris en otage, certains le sont encore.
00:40Pourquoi vous avez senti le besoin d'aller là-bas pour avoir des témoignages ?
00:48Est-ce que vous avez eu peur qu'on puisse dire « on ne savait pas » ?
00:54– Ou « on n'avait pas bien compris », ou « on n'avait pas bien mesuré »,
00:56absolument, absolument.
01:00Juste après l'attaque du 7 octobre,
01:03il y a eu toutes ces déclarations politiques qui étaient contradictoires
01:07et qui commençaient à semer le trou dans les esprits
01:10sur ce qui s'était réellement passé, tout simplement, objectivement.
01:14Puis il y a eu une manifestation contre l'antisémitisme,
01:17à laquelle j'ai participé et à laquelle nous étions assez peu,
01:20finalement 200 000 si ma mémoire est bonne.
01:22Et quand j'ai vu ça, je me suis dit qu'il fallait faire quelque chose,
01:27que ce n'était pas possible, qu'on ne pouvait pas passer à côté
01:30de cet événement, ce drame absolu, sans dire les choses très clairement.
01:34C'était une attaque terroriste monstrueuse.
01:38Le 7 octobre, je l'ai vécu de manière très intense.
01:44J'ai été journaliste, comme vous l'avez rappelé tout à l'heure,
01:46pendant 20 ans, j'ai voyagé à travers tout le Proche et le Moyen-Orient.
01:49J'ai vécu au Liban, j'ai appris l'arabe en Égypte,
01:52je suis allé en Iran, je suis allé en Afghanistan.
01:54Je sortais de Sciences Po, j'apprenais l'histoire du monde arabe.
01:58Et ce jour-là, j'ai eu la conscience littéralement déchirée,
02:02parce que je sais très bien ce qui se passe, je ne suis pas dupe
02:04de la situation dans les territoires occupés de Gaza et de Cisjordanie.
02:08Mais ce qui s'est passé le 7 octobre, cette attaque monstrueuse,
02:11porte un nom et il fallait le raconter jusqu'au bout.
02:16C'est-à-dire un pogrom.
02:18Un pogrom, bien sûr, un pogrom.
02:20– Ce que vous écrivez.
02:22Alors ce qui est étonnant, c'est qu'effectivement,
02:23vous parlez de cette opinion internationale qui,
02:26dans un premier temps, condamne quand même,
02:28puisque bon, il ne faut pas oublier que le Hamas est reconnu,
02:31comme la plupart des démocraties occidentales,
02:33comme une organisation terroriste.
02:35Et puis après, ça vacille, à mesure probablement aussi
02:42de la puissance des attaques qui visent des populistes,
02:45qui n'ont pas vise, mais en tout cas qui atteignent
02:48des populations civiles à Gaza.
02:50– Qui atteignent des populations civiles, qui sont prises en otages
02:53par ceux qui sont censés les représenter,
02:55c'est-à-dire le Hamas, les terroristes du Hamas.
02:58Il ne faut pas oublier cette problématique-là.
03:00Je ne sais pas si vous avez vu, quand on a retrouvé ces otages
03:03qui n'étaient pas loin, dans ces tunnels,
03:06ils étaient enfermés sous une chambre d'enfants,
03:09avec les murs tapissés de l'image de Mickey.
03:12Ils étaient sous ce sol-là, ils n'étaient pas n'importe où.
03:18Donc oui, bien sûr, il y a eu cette tragédie
03:24qu'ont subi, qu'ont traversé les civils palestiniens,
03:28et c'est monstrueux, mais elle ne vient pas de nulle part.
03:32C'est-à-dire qu'il y a eu cette volonté par les terroristes du Hamas
03:36de les prendre comme des boucliers humains.
03:38Ce n'est pas la première fois qu'on voit ça dans l'histoire.
03:40Mais pour en venir au sujet sur le 7 octobre,
03:43cette histoire raconte,
03:45vous l'avez dit en introduction il y a quelques minutes,
03:47très bien, enfin, mon intention, c'était de raconter
03:50que la plupart de ceux qui ont été tués le 7 octobre
03:54n'étaient pas des colombes, mais des colombes.
03:57Des colombes, c'est-à-dire des colombes de la paix.
03:59Viviane Silver, tous ces gens,
04:02la veille encore, faisaient des cerfs-volants pour la paix,
04:04habitaient à côté de l'enveloppe de Gaza,
04:07à proximité, pour aider les Palestiniens,
04:09pour secourir les Palestiniens.
04:11Ça faisait 20, 10, 20 ou 30 ans
04:13qu'ils avaient des relations permanentes avec les Palestiniens
04:15pour pouvoir aboutir à cette paix impossible.
04:19Et ce livre-là raconte l'histoire de ces pacifistes,
04:22ceux qu'on appelle là-bas en Israël des pisnics, des pisnics.
04:26Et avec toute cette connotation un peu péjorative
04:28sur le mot pisnics, c'est-à-dire un peu hurluberlu, un peu rêveur.
04:31De naïveté, oui, de rêveur.
04:32Alors qu'il n'y a que ça qui importe.
04:34Alors vous avez rencontré les parents de Netta,
04:36la mère de Noïa, le fils de Viviane Silver,
04:38du frère d'Elia, la sœur de Morane,
04:41des héros aussi comme Yair Golan,
04:43des mères d'enfants disparus.
04:46Et chez certains, il y a aussi ce qu'on ne dit pas beaucoup,
04:51il y a de la colère et de l'incompréhension face à Netta Niaou.
04:54Bien sûr.
04:55La politique et aux choix de Netta Niaou.
04:57Bien sûr. Ils ne sont pas dupes.
04:59Ils ne sont pas dupes.
05:00Le premier que je rencontre et que j'interviewe,
05:02c'est Jonathan Silver.
05:03Sa mère, Viviane Silver, elle a fait la une de la presse israélo-canadienne.
05:08Elle est en lice pour le prix Nobel de la paix post-mortem,
05:12après son décès.
05:13Elle a été assassinée le 7 octobre.
05:15Jonathan Silver me dit,
05:17moi Sébastien, mon premier souvenir, c'est sur les épaules de papa.
05:21C'était il y a 25 ans, j'étais sur les épaules de mon père.
05:24Il y avait un grand événement sur la place des grands rois d'Israël
05:28à Tel Aviv.
05:29Ce jour-là, j'ai vu un homme politique israélien monter sur scène.
05:32Il s'appelait Yitzhak Rabin.
05:34Ce jour-là, Yitzhak Rabin a été assassiné.
05:37Pourquoi ?
05:38Parce qu'il essayait de faire la paix avec les Palestiniens.
05:41Il a été assassiné par un Israélien,
05:43dont le portrait aujourd'hui était dans le bureau
05:47d'un des membres de la coalition montée par Netanyahou.
05:50C'est-à-dire qu'il y a une vraie problématique,
05:53une vraie mythologie de la paix aussi,
05:55qui empêche les choses d'avancer.
05:58Et Jonathan Silver me raconte que ce jour-là,
06:02il a pris conscience de la complexité de la situation.
06:05En tout cas, on n'a pas le temps de tout raconter.
06:08C'est un livre à lire.
06:09Vous évoquez aussi les conséquences que ça a
06:11sur les cours que vous donnez à Sciences Po,
06:13sur l'atmosphère qui y règne.
06:14Ça s'appelle ce livre qui est nécessaire, qu'il faut lire.
06:18Et nous danserons encore.
06:197 octobre et après, Les survivants racontent.
06:21C'est publié chez Albin Michel.
06:22Merci beaucoup, Sébastien Spiter.
06:24Merci beaucoup, Anne Fulda.

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