Marche blanche pour Lilian Dejean à Grenoble : «La ville est à la dérive» assure l'ancien maire Alain Carignon

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Vendredi, samedi et dimanche dans Europe 1 Soir Week-end, Pascale de La Tour du Pin reçoit un invité au cœur de l'actualité politique.
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00:00Que se passe-t-il à Grenoble ? Alain Carignan, bonsoir, vous êtes ancien maire de cette ville, conseiller métropolitain de Grenoble-Alpes, merci d'être avec nous en direct.
00:11D'abord Alain Carignan, peut-être un mot sur cette marche blanche à laquelle vous avez participé tout à l'heure, un millier de personnes dans les rues de Grenoble pour rendre hommage à cet agent municipal qui a été tué la semaine dernière par balle.
00:28C'est toute la population vraiment qui est meurtrie par cette affaire, Alain Carignan ?
00:34Oui, j'étais très émouvant et on était tous là parce que beaucoup le connaissaient, dont moi, mais parce que c'est un employé municipal exemplaire.
00:42Il est aussi un citoyen exemplaire, très engagé, avec une vie sociale active, toujours prêt à un service, toujours prêt à intervenir en toutes circonstances.
00:52Quelqu'un de bien, un homme gentil, très gentil. C'est affreux que ça tombe sur lui, d'ailleurs il est mort comme il a vécu, c'est un acte de courage et de dévouement.
01:05Il a voulu empêcher un délinquant de s'enfuir et ça lui a coûté la vie.
01:10Alain Carignan, je voudrais quand même avoir votre sentiment et votre réaction, vous êtes ancien maire de Grenoble.
01:16Que vous disent vos anciens administrés à propos de la situation de cette ville ?
01:21Nouvelle fusillade, on parle quand même, je le disais il y a quelques instants, de deux blessés dont un a reçu une balle de kalachnikov dans la tête.
01:29C'est-à-dire que depuis quelques mois, je parle sous votre contrôle Alain Carignan, des faits de cette sorte se multiplient dans cette ville et on a le sentiment que rien ne les arrête.
01:40Pourquoi Alain Carignan ?
01:42D'abord la ville est à la dérive, c'est terrible à vivre pour les grenoblois, pour tous ceux qui ne veulent plus sortir, pour tous ceux qui ont peur, pour tous ceux qui craignent, pour les étudiants qui sont agressés parce que ça part.
01:55Bien sûr on arrive à la kalachnikov mais à la sortie du tramway on peut avoir un traumatisme crânien pour un vol de portefeuille ou pour un vol de portable.
02:06C'est cela, la pression de l'insécurité endémique est considérable.
02:11En une dizaine d'années la ville s'est transformée, enfin il faudrait aller plus loin parce qu'il y a deux villes, il y a deux métropoles.
02:19Il y a une métropole qui est au top mondial, la technologie de l'université de la recherche et puis il y a une métropole qui vit au quotidien cette situation.
02:26Parce qu'en réalité il y a trois piliers pour agir sur l'insécurité, il y a le pilier justice, il y a le pilier police et puis il y a le pilier ville.
02:37Or le pilier ville est totalement absent, c'est ce qui déséquilibre l'ensemble.
02:43Parce qu'évidemment dans le logement social par exemple Eric Cole refuse d'intégrer des revenus des dealers qui nous permettraient, puisqu'ils dépasseraient les plafonds de les sorties.
02:55Il refuse évidemment de les expulser quand ils sont condamnés donc ils sont installés et les quartiers se ghettoïsent complètement.
03:05Ils font la loi évidemment parce qu'ils en ont les moyens et les quartiers se ghettoïsent.
03:10Et ce ghetto en réalité s'est tendu à toute la ville, il n'y a plus de quartier épargné.
03:16Parce qu'évidemment elle est tellement puissante, tellement forte et elle n'a pas de barrière.
03:22Je veux dire il faut que vous sachiez qu'il y a des délinquants qui s'installent dans les locaux municipaux et il n'y a aucune plainte déposée par la ville.
03:32Mais comment c'est possible ça ? On a peut-être un peu du mal à comprendre.
03:36Alors Julie de Vautreuil connaît bien cette ville de Grenoble, elle a enquêté notamment pour le Figaro.
03:42Mais pardon, mais excusez-moi, moi je ne connais pas, les auditeurs d'Europe 1 peut-être ne connaissent pas cette ville de Grenoble.
03:46Comment est-ce possible qu'on laisse faire de telles choses ?
03:50C'est-à-dire que je pense que le maire, Jérémy Biot, se rend bien compte de la situation.
03:54Il a des remontées de ses administrés qui vont la condition de vie se dégrader.
03:59Ce sont des doctrinaires, c'est-à-dire qu'en réalité, la réalité elle-même n'a pas tellement d'importance en excès.
04:05Je vous cite le dernier cas, c'est le club de judo qui ne peut plus entrer dans son gymnase parce qu'à côté, dans un local municipal,
04:13les dealers se sont installés ou ont tabassé les parents qui amenaient leurs enfants devant leurs enfants.
04:19Et donc le club de judo vient de décider de fermer son activité.
04:23Et personne ne fait rien ?
04:25Non, non, parce que depuis plusieurs mois, le club de judo dit à la municipalité
04:32« Regardez dans ce local à côté du nôtre, les locaux municipaux payés par le contribuable. »
04:37Les délinquants sont installés et il ne se passe rien.
04:41Parce que même pour que la police nationale agisse, faut-il déjà que la municipalité dépose plainte.
04:48Et ce n'est pas le cas.
04:50Donc on a vraiment un immobilisme qui tourne à la connuance et se cumule, crée une synergie qui aboutit à l'explosion d'une ville.
05:01Vous avez là dix ans de gestion quand on dit qu'on voudrait le nouveau front populaire à l'échelle nationale et LFI au pouvoir,
05:11mais qu'on vienne voir ce que ça donne au bout de dix ans dans une ville.
05:14On a les impôts locaux les plus élevés de France des grandes villes, la taxe foncière,
05:19et on a la valeur des biens qui devient la plus faible des grandes villes après dix ans de cette gestion.
05:25Ça va un peu dans le sens de ce que disait Éric Piolle, évidemment cette phrase on va la reprendre,
05:32qui affirmait la semaine dernière en marge d'une conférence de presse qu'il a tenue quelques heures après le décès de cet agent municipal
05:39que personne n'est à l'abri d'une balle perdue dans les règlements de comptes.
05:43Oui, alors ça n'avait rien à voir.
05:46Rien à voir, et c'est pour ça que je précise bien une balle perdue dans les règlements de comptes.
05:50Mais les règlements de comptes, semble-t-il, à Grenoble, il y en a quand même pas mal, non ?
05:54C'est bien le problème.
05:55Oui, alors si vous voulez, on a voulu indiquer qu'il avait dit cela à propos de ça, ce qui n'est pas le cas.
06:04Simplement c'était une maladresse folle d'évoquer au moment où quelqu'un avait pris deux balles dans le thorax
06:12pour avoir essayé d'empêcher un délinquant de partir, de parler des balles perdues qui se produisent dans les règlements de comptes.
06:19C'était une maladresse folle.
06:21Il a également évoqué un accident de la circulation.
06:23Non, ce n'est pas un accident de la circulation.
06:26C'est un acte de courage et de dévouement d'un employé municipal qui a voulu intervenir comme citoyen.
06:31Mais cette volonté de minimiser, de banaliser, d'ajouter, de mettre ce drame dans une liste comme si c'était une situation quasi normale,
06:43ça résulte d'une mentalité, d'une doctrine, d'une philosophie, d'une pensée qui consiste à nier que la situation de l'insécurité est grave et qu'il faut lutter contre.
06:56Alain Carignan, restez avec nous, je voudrais entendre Judi Denetrope qui connaît bien, qui a enquêté sur cette situation à Grenoble et sur la dégradation de la ville.
07:05Oui, alors Eric Carignan parle d'une idéologie.
07:12On a eu cette marche blanche pour Lilian Dejean.
07:16Moi je me rappelle une autre marche blanche qui avait été organisée pour la mort d'un jeune.
07:23En fait c'était deux jeunes en 2019 qui avaient été pris en chasse.
07:28Ils étaient sans casque sur un scooter volé et ça s'était terminé.
07:32Ils avaient été pris en chasse par la police et ça s'était terminé malheureusement par la mort de ces deux jeunes de 17 et 19 ans, ce qui est un drame absolu.
07:40Il y avait eu une marche blanche à laquelle avait participé Eric Piolle et le matin il était sur une radio concurrente
07:46et on lui avait demandé si le maire qu'il était, avant d'aller à la marche blanche, pouvait rappeler que lorsqu'on roule sans casque sur un scooter volé
07:55et qu'on est contrôlé par la police, il vaut mieux s'arrêter.
07:58Et la réponse d'Eric Piolle avait été, quel est le rapport ?
08:02Donc on va très très loin dans la connivence, la culture de l'excuse, le réflexe anti-flic alors qu'Eric Piolle s'en défend.
08:14Mais en fait ça revient à ça, c'est une politique de complaisance, de connivence, de l'excuse.
08:21On a largement parlé partout de sa réticence à installer de la vidéosurveillance.
08:30Moi quand j'y suis allée il y a déjà quelques années, c'était en 2020 me semble-t-il, il y avait des caméras cassées par les dealers.
08:39Donc Eric Piolle vous explique que les caméras ça ne sert à rien, ça sert tellement à rien qu'il les casse quand on les installe et elles ne sont pas réparées.
08:47Joseph Macescaron aussi sur ce thème, cette ville qui se dégrade en tout cas pour ses administrés.
08:53Je vais redemander à Alain Carignan effectivement quel est l'état des lieux, mais comment vous voyez ça Joseph Macescaron ?
09:00Le problème c'est qu'il y a un problème, comme Judith Carignan, et Alain Carignan l'a rappelé, il y a quand même un problème Eric Piolle.
09:12C'est évident, la liste des exemples, c'est millétrait, c'est sans cesse.
09:18Je me souviens par exemple au moment où Cédric Ayrou avait fait passer illégalement 200 migrants dans la vallée de la Royale.
09:30Il l'avait soutenu, il l'avait ardemment soutenu en disant la phrase « moi aussi je suis un délinquant solidaire ».
09:38Il est maire et il dit « moi aussi je suis un délinquant solidaire ».
09:44Je me souviens aussi que lorsqu'il y avait eu un festival Art Street à Grenoble, je reprends l'exemple des jeunes donnés par Judith,
09:53c'est qu'on voyait deux CRS matraquer Marianne.
09:58Et ils trouvaient ça normal, c'était même subventionné par la mairie.
10:01Il y a quand même une atmosphère extrêmement particulière.
10:07La question que je voudrais poser à Alain Carignan, c'est, à un moment, est-ce qu'il ne faut pas que finalement,
10:14puisqu'il a très justement expliqué que la municipalité est aux abonnés absents et ne portant pas plainte,
10:20rien ne se passe, est-ce qu'il ne faut pas mettre Grenoble sous tutelle ?
10:24Alain Carignan, on peut vous poser la question, faut-il mettre Grenoble sous tutelle ?
10:30On pourrait, en tout cas.
10:32Non mais, Judith Ventreaube et Joseph-Francis Caron citent des exemples qui sont vraiment parlants également.
10:40La tutelle, en réalité, il y a la tutelle financière, ce n'est pas le cas puisque la fuite en avant consiste à augmenter les impôts.
10:47Mais effectivement, la situation dans laquelle la ville est, on pourrait envisager en tout cas que des quartiers soient gérés directement par l'État.
10:57Mais comment on en est arrivé là ? Alain Carignan, pardon, mais enfin, les grenoblois ont voté.
11:01Je ne comprends pas, ils disent quoi les grenoblois ?
11:04Il faut respecter leur vote, je ne sais pas ce qu'ils voteront, est-ce qu'ils voteraient, mais il faut respecter leur vote.
11:12C'est des grenoblois qui ont mis Ricciole à la mairie, vous échangez certainement avec vos administrés.
11:18Que vous disent-ils aujourd'hui ? Ils se rendent compte de la situation ou pas ?
11:21Je me permets d'anticiper la réponse d'Alain Carignan, il y a eu un changement de population à Grenoble qu'il y a eu dans beaucoup de centres-villes.
11:28Mais aggravé par le fait que, comme on le rappelait, Éric Piolle a mené une politique pro-migrants extrêmement active.
11:39Et depuis longtemps, même avant qu'il arrive d'ailleurs des maires socialistes, je pense à Dubedou, ce grand-mère aussi,
11:49la politique pro-migrants active, elle est très ancienne à Grenoble, elle date des années 60-70,
11:56et évidemment, il y a une proportion de la population qui est maintenant française, qui a le droit de vote,
12:03et ça change aussi le profil électoral d'une ville.
12:07Oui, tout à fait, mais j'ajouterais un élément quand même, c'est qu'Éric Piolle a bénéficié d'une préférence médiatique extrêmement forte.
12:18C'est-à-dire qu'on considérait toute une partie de la gauche, une immense partie de la gauche, une immense partie du service public, des médias en France,
12:25on considérait qu'Éric Piolle, c'était formidable, c'était un laboratoire, moi je m'en souviens, je n'ai pas une mémoire de Poisson Rouge,
12:30je me souviens très très bien, tous les papiers d'Itirambique en permanence, jusqu'à peu près en 2022,
12:35où lorsqu'il est arrivé en quatrième position, si ma mémoire est bonne, pour la primaire écolo pour la présidentielle en 2022,
12:44parce que quand même un certain nombre de ses amis ont eu des doutes sur la gestion, même des écologistes ont eu un doute sur la gestion de M. Éric Piolle.
12:51Mais à ce moment-là, mais en tout cas jusqu'au moins en 2022-2023, très franchement, M. Piolle a bénéficié d'une...
12:59Vous avez une bonne image, oui c'est ça, une image sympathique, on allait voir ce que ça allait donner.
13:03La bonne image, c'était vraiment un conseil.
13:06Le clientélisme ça existe.
13:08Bon, Alain Carignan, on va continuer d'en parler dans un instant, mais je voulais vous entendre réagir effectivement à ce que nous disions.
13:16La bascule, si vous voulez, ça a été quand même quand il a voulu imposer le burkini dans les piscines, qu'il a été démenti par un conseil d'État.
13:24Là, je pense qu'il y a eu quand même une alerte nationale qui a montré quelle était sa véritable philosophie en matière d'islamo-gauchisme.
13:32Mais quant à sa réélection en 2020, depuis 50 ans, c'est le maire le plus mal élu, c'est-à-dire avec 65% d'abstention.
13:40Il n'y a jamais eu autant d'abstention dans une élection municipale.
13:43Mais pardon, si les Grenoblois ne sont pas contents, ils ont qu'à se rendre aux urnes.
13:46Enfin, je sais pas.
13:47Mais ce que je veux dire, c'est que c'est quand même aussi...
13:49C'est la même chose pour les parisiens.
13:52C'est quand même aussi une élection de l'indifférence.
13:55Voilà.
13:56Je sais pas, ils en payent, je sais pas ce que disent...
13:58Vous qui connaissez bien la ville, j'ai peine à croire que les Grenoblois se satisfassent de la situation actuelle à l'Incarnio.
14:05D'abord, il faut bien...
14:07C'est une ville où il y a faible taux de propriétaires, 40%, alors que la moyenne des villes est plutôt 50-55.
14:14Donc quand vous augmentez de 30% la taxe foncière, qu'elle est la plus élevée de toutes les communes de 100 à 200 000 habitants,
14:23eh bien vous ne touchez que 40% des électeurs.
14:26Donc déjà, il y en a 60% qui ne payent pas cet impôt.
14:30Et ça permet de matraquer sans avoir trop de conséquences électorales.
14:34Je pense que désormais, les Grenoblois voient la situation de leur ville.
14:39Vous parliez de l'élection de 2014.
14:41Il y avait une intuition juste d'Éric Piot qui l'a incarnée, à savoir une ville apaisée qui s'adapte au réchauffement climatique.
14:50Qui ne peut pas adhérer à ça ?
14:52Mais on n'avait pas vu derrière qu'il y avait une écologie punitive et un dogmatisme d'extrême-gauche
14:59qui étaient cachés derrière ce slogan auquel, en tout cas pour ma part, j'adhère.
15:05Maintenant, il faut reprendre cette idée de ville apaisée qui s'adapte au réchauffement climatique,
15:11mais en tenant compte des avis des Grenoblois, en ayant des références pour une gestion saine, financière
15:18et évidemment en s'occupant aussi des questions de sécurité.
15:21Des questions de sécurité.
15:22Alain Carignan, est-ce que vous acceptez de rester un peu avec nous sur Europe 1 ?
15:25On va continuer.
15:26Bon bah écoutez, c'est fait.
15:28Les équipes me demandaient, on va lui demander.
15:30Je vous demande en direct.
15:32Sur Europe 1, il est 20h29, le journal permanent Brandon Warren.
15:36Alain Carignan, c'est un maire de Grenoble, est avec nous en direct dans ce studio.
15:41Toujours Julie de Ventreobbe, journaliste, grand reporteur au Figaro Magazine.
15:45Et Joseph Macescaron aussi, c'était consultant.
15:47Je voulais vous garder juste un petit instant Alain Carignan.
15:49Vous demandez à l'État d'intervenir, mais sous quelle forme ?
15:52Que peut faire l'État pour la ville de Grenoble ?
15:55Je pense que, je ne sais pas si ça ne se posera pas un jour,
15:59dans une ville comme Grenoble telle qu'elle est gérée,
16:01sauf si nous arrivons à changer les choses dans 18 mois au moment des élections municipales.
16:07Mais on ne peut pas envisager que des quartiers soient gérés directement par l'État.
16:13Pour l'instant ça n'existe pas, ce n'est pas possible.
16:16Joseph Macescaron comme il vous proposait tout à l'heure.
16:21Pardon ?
16:22Joseph Macescaron dit que la conséquence c'est la tutelle.
16:25La tutelle de la ville de Grenoble.
16:27La tutelle, juridiquement, c'est une ville en déséquilibre financier.
16:31C'est le seul cas de tutelle du préfet.
16:35Merci beaucoup Alain Carignan d'avoir été en direct avec nous sur Europe 1.

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