• il y a 3 mois
SMART IMPACT reçoit Christophe Girardier, PDG de Glimpact, très critique envers la méthodologie retenue par le label Ecobalyse, qui doit notamment permettre de lutter contre la fast fashion. Il estime qu’Ecobalyse déroge au cadre européen, et multiplie d’un « facteur de 2 à 3, dans un sens positif ou négatif » les résultats que l’on obtiendrait en appliquant strictement la méthode de l’Union européenne.

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Transcription
00:00Retrouvez le débat de Smart Impact avec Veolia.
00:12Que faut-il penser du label Ecobalize, mis en place pour alerter sur les ravages de l'ultra-fast fashion ?
00:18C'est la question de notre Zoom aujourd'hui avec Christophe Girardier. Bonjour.
00:22Bonjour.
00:23Bienvenue. Vous êtes le patron, le PLG de Glimpact, startup que vous avez fondée en 2017.
00:27C'est ça. On la présente en quelques mots avant de rentrer dans le détail d'Ecobalize.
00:30Glimpact, que j'ai cofondé avec Michael Holmes, nous sommes deux cofondateurs,
00:34est une entreprise qui aide les entreprises et les citoyens à comprendre l'impact global de leur activité.
00:43Pour un citoyen, c'est le comportement de consommation.
00:46Pour une entreprise, c'est son activité.
00:48Et pas simplement mesurer leur impact, mais surtout les aider à le réduire.
00:55La spécificité de Glimpact, c'est que nous sommes à l'origine d'une technologie qui s'appelle Glimpact,
00:59qui est la première à avoir modélisé la nouvelle doctrine scientifique de l'Union Européenne
01:03qui définit l'empreinte environnementale, non pas simplement à travers l'empreinte carbone,
01:08mais à travers les 16 catégories d'impact de l'activité humaine sur la planète.
01:13C'est-à-dire qu'on ne parle que du climat, mais la crise environnementale n'est pas que climatique.
01:18Elle est systémique. Voilà ce qu'on a fait.
01:20Très bien. Alors, évacuer l'impact environnemental des produits, des organisations, on l'a bien compris,
01:25c'est votre métier depuis 7 ans.
01:28Et vous êtes donc critique sur le label Ecobalise, lancé officiellement par le ministère de la Transition écologique
01:33en avril dernier pour, on va simplifier, traquer l'ultra-fast fashion.
01:37Pourquoi êtes-vous dubitatif ? Et encore le mot est peut-être un peu faible.
01:40Alors d'abord, il faut dire que l'initiative Ecobalise, qui est donc l'affichage environnemental,
01:44qui est en fait enfin l'application de l'article 2 de la loi Climat et Résilience,
01:48qui, je le rappelle, a été votée en 2021 et qui n'a toujours pas de décret d'application.
01:53Donc, le principe même de l'affichage environnemental des vêtements ou même des produits alimentaires,
01:59ça c'est évidemment une bonne chose.
02:00D'ailleurs, rappelez-vous que l'affichage environnemental date du Grenelle de l'environnement, Sarkozy.
02:062008.
02:07Et on n'a toujours rien.
02:082007.
02:09Donc le principe, parfait.
02:11Le problème, c'est la méthode qui préside à l'affichage environnemental.
02:15L'affichage environnemental, rappelons pour ceux qui nous regardent,
02:18l'affichage environnemental, c'est la possibilité pour les consommateurs d'avoir une note environnementale
02:21qui leur permet, en plus des autres critères, le prix et autres,
02:24de choisir leurs vêtements ou produits alimentaires en fonction de l'impact environnemental.
02:30Et donc, là où ça devient critiquable, c'est que l'Union Européenne travaille sur cette approche d'affichage environnemental depuis 10 ans.
02:3810 ans.
02:39Ce qu'on appelle le PEF, c'est ça ?
02:41Voilà.
02:42C'est le système européen de performance environnementale des produits ?
02:45Voilà.
02:46Des produits et des organisations.
02:47Et tous les produits.
02:48Ça marche pour le textile ou autre.
02:49Donc le PEF, c'est une méthode, qui s'appelle Product Environmental Footprint,
02:53qui répond à deux questions.
02:551.
02:56Qu'est-ce que c'est que l'empreinte environnementale ?
02:57Comment on la définit ?
02:58Et 2.
02:59Comment on la mesure ?
03:00Cette immense initiative de l'Union Européenne, qui a débuté en 2015,
03:06a donné lieu avec la participation de tous les États membres, dont la France, et d'experts.
03:12J'ai eu la chance d'en faire partie.
03:14Cette initiative, qui s'appelle It is a Single Market for Green Product, a permis d'aboutir à cette méthode.
03:21Et au départ, cette méthode était une recommandation de l'Union Européenne pour dire à toutes les entreprises mondiales,
03:27et en particulier européennes,
03:28si vous voulez mesurer l'empreinte environnementale, il ne faut pas vous limiter aux émissions de gaz à effet de serre.
03:32Il faut regarder l'ensemble des 16 catégories d'impact, la biodiversité, les ressources fossiles et autres.
03:38Donc, ça, ça a été la première étape de l'Union Européenne.
03:41Deuxième étape, dans le cadre du Green Deal, l'Europe a voulu légiférer.
03:46Et elle a pris deux mesures, je ne rentre pas dans le détail, puisqu'elles sont récentes.
03:49Une, en 2023, que toutes les entouristes connaissent, c'est la directive CSRD relative à le reporting extra-financier.
03:59Donc, comment on fait son reporting extra-financier qui est en vigueur.
04:03Et puis le deuxième, qui est moins connu, et dont la presse a peu parlé d'ailleurs, qui est l'ESPR,
04:08c'est-à-dire le Nouveau Règlement pour l'éco-conception des produits.
04:12Ce règlement a été voté au mois d'avril et adopté au mois de juillet.
04:16Et pour terminer sur l'éco-valise, la méthode d'éco-valise ignore les règles de ce règlement.
04:22Alors justement, j'allais y venir, parce que c'est une règle européenne maintenant.
04:28Et vous nous dites que l'éco-valise déroge à cette règle européenne.
04:32Pourtant, en préparant l'émission, je vois que l'ADEME fait référence à ce fameux PEF,
04:38à ce système européen, quand elle promeut l'éco-valise.
04:42Alors je ne comprends plus.
04:43Vous avez raison, et c'est bien tout le problème.
04:45D'abord, le Nouveau Règlement sur l'éco-conception des produits, il est en vigueur depuis le 18 juillet.
04:55Donc ce n'est pas une directive, c'est une législation.
04:57Et pour ceux qui nous regardent, une législation est une loi qui s'impose à tous les États membres.
05:02Et donc l'ADEME, et l'ex-gouvernement, puisqu'on ne peut plus parler de gouvernement démissionnaire,
05:08il va y en avoir un nouveau, a expliqué qu'elle s'appuyait sur cette méthode pour créer l'éco-valise.
05:14Sauf qu'elle explique en même moment que, ce référentiel n'étant pas à leur goût,
05:21ils partent de cette méthode européenne pour y ajouter d'autres critères.
05:26Et donc, in fine, et c'est ça ce que je conteste,
05:29c'est que, in fine, le score éco-valise ne ressemble en rien à la méthode originale.
05:35Juste pour se placer de mon point de vue de consommateur,
05:39en fait, pourquoi ce label éco-valise éventuellement va me tromper ?
05:44C'est-à-dire qu'il y a des lobbies qui sont rentrés en jeu,
05:48il y a des critères qui ont été poussés plus que d'autres, pourquoi il ne fonctionne pas ?
05:52On peut le dire, et c'est exactement ce que l'Europe veut éviter.
05:55L'Europe s'est dit, imaginez que chaque pays invente son éco-score, c'est ce que fait la France,
06:01vous imaginez votre veste notée avec un score en France,
06:05et la même veste notée avec un autre score en Allemagne, en Italie, ça n'a absolument aucun sens.
06:09L'ESPR détermine une règle commune,
06:13et délègue à la Commission européenne le soin de définir la règle scientifique
06:17qui préside au calcul du score.
06:19Et donc, pour le consommateur, le fait d'avoir, on peut dire que l'éco-score éco-valise,
06:26est un éco-score particulier, et qui n'est pas celui...
06:30Mais est-ce qu'il est moins disant ? Est-ce qu'il est moins exigeant ?
06:34Oui sur certains critères, non sur d'autres, c'est ça.
06:37En gros, les ajouts de la méthode éco-valise française vont multiplier d'un rapport 2 à 3,
06:43dans un sens, comme dans un autre, le score.
06:46Et pourquoi ? Tout simplement parce que c'est tout l'intérêt de suivre une règle commune,
06:51et scientifique, l'éco-valise rajoute des indicateurs,
06:55par exemple qui prennent en compte des indicateurs de type durabilité,
07:02qu'on appelle émotionnels et extra-physiques, si je puis dire,
07:08qui vont déterminer, comment dire, un indicateur qui va s'appliquer au score,
07:14mais qui n'ont plus trait au produit, mais aux pratiques commerciales de l'entreprise.
07:19Ça c'est un exemple.
07:20Et rien que ces indicateurs complémentaires vont évidemment complètement caricaturer le score.
07:25Oui je comprends, mais dans ce qu'il devrait faire,
07:28dans ce qui fait une partie de ce score, ou dans ce qui fait le règlement européen,
07:33il y a des données qui ne sont pas contestables.
07:36C'est quoi ? C'est la quantité d'eau ? C'est l'électricité ? Quel mix énergétique ?
07:41Qu'est-ce qui rentre dans, ou qu'est-ce qui doit rentrer dans un bon label ?
07:44Voilà en fait ma question.
07:45Alors, les 16 catégories d'impact définies par la méthode européenne,
07:47et c'est exactement ce que vous venez de dire.
07:49Donc évidemment, les émissions de gaz à effet de serre,
07:52l'utilisation des ressources en eau, très important pour l'industrie d'axile.
07:55Alors justement, c'est une excellente occasion de vous dire les différences.
07:58Sur cet indicateur, la Commission définit une méthode de caractérisation des ressources en eau.
08:04Que la France va changer.
08:06Et alors c'est grave, je vous donne un exemple.
08:08Dans la méthode européenne, on prend en compte non seulement l'usage que vous faites de l'eau,
08:12si vous la rajoutez dans sa média culturelle, on en tient compte,
08:15mais surtout on va tenir compte de ce qu'on appelle le stress hydrique.
08:18En gros, pour vos téléspectateurs, un mètre cube d'eau prélevée en France
08:23n'a pas du tout le même impact qu'un mètre cube d'eau prélevée en Italie par exemple.
08:27Évidemment, là où les ressources sont rares,
08:29la même quantité d'eau est beaucoup plus impactante pour l'environnement.
08:32Eh bien, cette logique-là n'est plus prise en compte.
08:35La France décide, je vais retirer cet indicateur et je vais le calculer différemment.
08:39Mais le plus stressant, c'est pour répondre à votre question,
08:43les 16 indicateurs, il y a des indicateurs sur la toxicité humaine,
08:47ou sur l'écotoxicité, c'est-à-dire la toxicité dans les sols,
08:52les rivières, les océans et l'atmosphère.
08:55La méthode Ecoli supprime trois de ces indicateurs
08:58pour les remplacer par un indicateur qui n'a plus rien à voir avec la logique.
09:02Donc ça, le principe de modifier ça, ça veut dire ne plus s'inscrire dans le cadre européen.
09:06Qu'est-ce que vous attendez du futur nouveau gouvernement ?
09:10Très simplement, l'Europe a défini le cadre,
09:13donc la méthode générique, la méthode CEF,
09:16et elle précise sa déclinaison par catégorie de produit.
09:19Elle a pris le soin, la Commission européenne,
09:21avant de voir ce règlement adopté par l'UE,
09:25de définir un référentiel pour le textile.
09:27Il existe depuis presque un an.
09:29Et nous demandons au gouvernement, tout simplement,
09:32d'être le premier Etat à appliquer ce référentiel
09:35qui sera de toute façon le référentiel qui s'imposera à tous les Etats.
09:39Et c'est la façon, quelle belle façon pour ce gouvernement,
09:43M. Barnier est un Européen convaincu,
09:45on ne peut pas contester l'engagement européen de M. le Premier ministre,
09:48eh bien, il pourrait être le premier à appliquer cette méthode,
09:54puisque la France est la première à avoir mis dans sa loi l'affichage environnemental.
09:59Eh bien maintenant, l'affichage environnemental,
10:01c'est le nouveau règlement sur les concessions.
10:03Il faut que la France comprenne qu'elle ne peut pas transgresser un règlement européen,
10:07ce qu'elle fait aujourd'hui avec Kobaliz.
10:09C'est-à-dire que si on gardait Kobaliz tel qu'il existe aujourd'hui,
10:11la France est en faute à ce règlement européen.
10:14Je vais même aller plus loin.
10:16L'ex-ministre nous a présenté au mois de juillet des projets de décrets d'application,
10:21et je lui ai dit que ces décrets d'application, pour nous, sont privés de base légale
10:25en présence de l'adoption du nouveau règlement sur les co-conceptions.
10:31Donc avec une perspective de conflits, de procédures judiciaires qui pourraient...
10:36Je vais vous donner un exemple.
10:37Ce n'est pas la première fois que la France a été condamnée sous le précédent gouvernement.
10:41Vous connaissez la loi GEC,
10:43qui impose un certain nombre de critères intéressants pour les industriels de traces habitées.
10:48Deux décrets publiés par la France sur la loi GEC ont été censurés purement et simplement
10:53il y a à peu près cinq mois par l'Union Européenne.
10:55Donc la France, en persistant sur Kobaliz, risque la censure de l'Union Européenne.
11:01Merci beaucoup Christophe Girardier. C'était passionnant.
11:03A bientôt sur BeSmart for Change.
11:05On passe tout de suite à notre rubrique consacrée aux startups et co-responsables.

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