Face à Bock-Côté (Émission du 07/09/2024)

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Mathieu Bock-Côté propose un décryptage de l’actualité des deux côtés de l’Atlantique dans #FaceABockCote

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Transcript
00:00Quasiment 19h sur CNews, merci d'être avec nous pour Face à Mathieu Bocoté, cher Mathieu, bonsoir.
00:06Bonsoir.
00:07Bonsoir Arthur de Vatrigan, merci d'être avec nous comme chaque samedi soir à la une de l'incorrect féminisme.
00:14Posez le débat, Marlène Schiappa face à Alice Cordier, le papier est absolument passionnant,
00:21et j'invite tous les téléspectateurs à le découvrir dans vos kiosques pour l'incorrect.
00:27Le point sur l'information, c'est avec Adrien Spiterich.
00:29Adrien, bonsoir.
00:30Bonsoir Eliott et bonsoir à tous.
00:32Plusieurs manifestations ont eu lieu aujourd'hui en France à l'initiative de la gauche.
00:36A Paris, 26 000 personnes ont manifesté selon la préfecture, 160 000 selon les organisateurs.
00:42Pour la France Insoumise, le Président a réalisé un coup de force démocratique en refusant de nommer Lucie Castet à Matignon.
00:49Y avait-il un professeur devant chaque classe à la rentrée ?
00:52Non, selon une enquête menée par le premier syndicat du second degré,
00:56le SNEF-SFSU assure qu'il manquait au moins un professeur dans 56% des collèges et lycées.
01:01Ce sondage a été mené dans 893 établissements.
01:05Et puis le sanctuaire de Lourdes a été partiellement inondé hier soir, provoquant la fermeture de la grotte.
01:10Le directeur de la communication du sanctuaire précise qu'aucun blessé n'est à déplorer.
01:14Les Hautes-Pyrénées avaient été placées par Météo France sans alerte, pourpuis inondation.
01:19Merci cher Adrien pour le point sur l'information.
01:23A la une de face à Mathieu Bocoté, Michel Barnier succède à Gabriel Attal.
01:28Ce ne sont pas seulement 4 décennies qui séparent les deux hommes, mais un monde.
01:32L'ancien et le nouveau.
01:34Hommes d'expérience, les actes plutôt que les mots, le compromis plutôt que le conflit.
01:38Avec Michel Barnier sommes-nous rentrés dans une nouvelle ère.
01:41Pourra-t-il rassembler ?
01:43Si la France est à droite, la politique du gouvernement le sera-t-elle aussi ?
01:47On en parle dans un instant.
01:49La droite respire, la gauche et l'extrême gauche fulminent.
01:52La France Insoumise construit son narratif, relié massivement par certains médias.
01:56Michel Barnier à Matignon, Lucie Castais devant sa télévision.
02:00Voilà un scandale démocratique.
02:02Ils ont battu pavé ce samedi un peu partout en France la révolte à gauche.
02:06Est-elle factice ou sincère ?
02:08Élément de réponse dans cette émission.
02:10Enfin, cher Mathieu, vous recevez ce samedi l'un des plus fins analystes politiques français, Jérôme Fourquet.
02:15Auteur, entre autres, de la France d'après dans une assemblée façon puzzle.
02:20Un avenir politique qui se construit sur pointillés.
02:23Sommes-nous en pleine crise politique ou crise de régime ?
02:26Voilà le programme de face à Mathieu Bocoté.
02:29C'est parti, cher Mathieu.
02:31Première thématique, on va parler de Michel Barnier.
02:34Est-ce le grand retour de la droite ?
02:36Plusieurs le soutiennent.
02:38L'arrivée de Michel Barnier à Matignon correspond à un retour de la droite au pouvoir.
02:41Mais de quelle droite parlons-nous ?
02:44Et que peut-elle faire maintenant qu'elle est de retour aux affaires ?
02:47Ce sera le sujet de votre premier édition, Mathieu.
02:50Vous savez, on présentait souvent...
02:51En fait, les LR se présentaient souvent depuis des années comme un parti de gouvernement.
02:56À la différence du RN, par exemple, qui serait un parti protestataire.
03:00Mais ça commençait à faire un bon moment que les LR n'avaient pas eu l'exercice du gouvernement, sauf au niveau régional.
03:06Donc là, de nouveau, les LR peuvent considérer que la notion de parti de gouvernement n'appartient pas qu'à leur passé,
03:13mais aussi à leur présent, peut-être leur avenir.
03:16Première chose à dire, c'est assez intéressant, qu'il s'accompagne aussi d'un autre retour.
03:21Alors, on a dit ces dernières années, c'était la grande liquidation du clivage gauche-droite.
03:26Peut-être sommes-nous témoins d'un retour du clivage gauche-droite,
03:30avec cette question, inévitablement, qui l'accompagne.
03:33Qu'entend-on par droite aujourd'hui ?
03:35Je ne me ferai pas historien, ce soir, du clivage gauche-droite.
03:38Mais je veux simplement rappeler que la science politique française,
03:41l'histoire politique depuis, on pourrait dire, les années 50,
03:44a proposé plusieurs typologies, plusieurs catégories pour penser ce que veut dire ce clivage gauche-droite.
03:51On connaît les trois catégories de René Raymond, peut-être les plus célèbres,
03:54qui nous aillent à la droite légitimiste, donc traditionnaliste,
03:57la droite orléaniste, plutôt libérale et réformiste,
04:00la droite bonapartiste, nationaliste, avec un culte de l'autorité,
04:03une certaine sympathie pour la figure du chef.
04:06D'autres catégories se sont imposées au fil du temps.
04:09Ces dernières années, on distinguait beaucoup droite libérale et droite conservatrice,
04:13comme si l'une d'un certain côté avait la responsabilité de la modernité
04:18et l'autre la responsabilité de la transmission culturelle.
04:21On a entendu aussi des catégories, on peut oublier, droite littéraire.
04:24Les concepts de droite sont nombreux.
04:27Je note qu'un des plus intéressants intellectuels sur cette question,
04:31mais qui a un peu disparu de la carte, c'est Stéphane Rials,
04:34qui avait écrit dans un livre très important à la fin des années 70,
04:37il disait que globalement, le clivage gauche-droite repose sur une chose simple,
04:40il y a une forme de droite originelle, entre guillemets,
04:43et la plupart des droites, sinon, sont des anciennes gauches.
04:47Ce que disait aussi René Raymond à sa manière,
04:49donc la droite est généralement une ancienne gauche qui n'a pas suivi le rythme du progrès,
04:53qui n'a pas suivi le rythme des évolutions jugées nécessaires,
04:56et qui, d'ailleurs, c'est une gauche déportée à droite.
04:59Une fois qu'on a dit tout ça, la vie politique à droite aujourd'hui
05:03se résume quand même autour d'un simple clivage qui efface tous les autres,
05:06droite républicaine et extrême droite.
05:09Et ce qu'on entend dans des catégories que je ne reprends pas à mon compte,
05:12mais dont je vois l'usage dans la vie publique,
05:15alors qu'est-ce qui distingue les deux, c'est assez simple,
05:17la droite républicaine, c'est la droite tolérée par la gauche.
05:20C'est-à-dire, c'est une gauche qui considère que cette droite-là, elle est légitime, pourquoi ?
05:24Premièrement, parce qu'elle accepte les grands consensus sociétaux fixés par la gauche.
05:29Donc cette droite-là est tolérable dans la mesure où elle accepte les grandes décisions prises par la gauche
05:33et ne prétend pas revenir en arrière.
05:36Premier élément, donc sur les questions sociétales, sur l'identité, sur à peu près toutes les questions.
05:41Donc c'est une droite qui doit gérer avec une calculette les progrès sociaux de la gauche.
05:46Et de l'autre côté, il y a la fameuse extrême droite qui est diabolisée, comme d'habitude, on le sait.
05:51Et cette droite républicaine, donc, elle se distingue en quoi ?
05:54Elle accepte, comme je dis, les grandes avancées historiques fixées par la gauche.
06:00Et aussi, elle accepte l'idée, elle participe elle-même à la diabolisation de ce qu'elle appelle l'extrême droite.
06:05Donc lorsqu'elle participe à la diabolisation de ce qu'elle appelle l'extrême droite,
06:08alors là, c'est une droite pleinement intégrée dans la République.
06:12Et on a vu cette séquence-là ces derniers temps.
06:14Rappelez-vous le cirque un peu de Dominique de Villepin cet été, qui était l'agent promotionnel du NFP.
06:20Certaines figures qu'on a envisagées comme premiers ministres ces derniers jours,
06:24entre l'union des droites et les communistes, ils préféraient les communistes.
06:27Il faut garder l'info. Et ça se dit « droite » quand même. Donc c'est intéressant.
06:31J'ajoute, soit dit en passant, que lorsqu'on est devant une droite qui dit « nous refusons la gauche radicale,
06:36mais de l'autre côté, nous refusons aussi l'alliance avec le RN »,
06:40eh bien, cette droite-là, on va quand même jeter sur elle une forme de suspicion.
06:44On va se demander « ah là là, mais puisqu'elle ne condamne pas par principe, en toutes circonstances,
06:49la possibilité éventuelle et hypothétique d'une alliance avec le RN, elle est donc coupable au fond d'elle-même. »
06:55Tout ça pour dire que, j'ai rappelé ces considérations, à quelle droite correspond Michel Barnier finalement ?
07:00Ce n'est pas un idéologue, sans le moindre doute.
07:02C'est un homme qui a globalement accepté les différentes évolutions de la droite depuis 50 ans.
07:08Il a commencé dans le gaullisme, il se dit social.
07:11On pourrait dire que c'est une forme de modérite tempérament.
07:14C'est un conservateur prudent, donc la prudence fiscale.
07:18Du moins, s'en réclame-t-il de la même manière un engagement européen,
07:22mais qui s'est toujours présenté l'Europe comme vecteur de puissance pour la France.
07:26On le disait plutôt libéral, mais il ne l'était pas tant que ça.
07:29Il faut vraiment que la droite française ne soit pas très libérale pour qu'on considère que Barnier soit libéral.
07:33Ayons ça à l'esprit.
07:35Plutôt conservateur, je l'ai dit, mais pas conservateur enragé.
07:38Quand on fait l'histoire de ces votes qu'on a vus ces derniers jours, dont on parle depuis 48 heures,
07:42dans les années 80, dans les années 90, il évolue avec la société.
07:46L'originalité de Barnier, ce qui est assez intéressant, c'est ce qui s'est passé en 2021,
07:51lorsqu'au moment de revenir en politique avec la primaire DLR,
07:55il a pris un positionnement très ferme sur l'immigration, où il voulait un moratoire sur l'immigration.
07:59Un moratoire, il faut comprendre ce que ça veut dire.
08:01C'est-à-dire qu'on stoppe l'immigration, on ne prétend pas mieux la contrôler, on décide de l'empêcher.
08:06Autrement dit, c'est une volonté de tenir tête à la submersion migratoire,
08:11et aussi un plaidoyer pour le retour à la souveraineté nationale dans la question migratoire.
08:17L'Europe ne peut plus s'occuper de cela.
08:19Il faut faire un bouclier constitutionnel, il faut assurer le primat du droit national,
08:23il faut assurer le primat du politique contre le gouvernement des juges.
08:26Ce positionnement-là, normalement, ça suffit à classer un homme à l'extrême droite.
08:32Je note que la gauche, cherchant à nommer, à caractériser, à catégoriser Barnier,
08:37nous a dit finalement, c'est un homme de droite dure, très dure.
08:41Donc, il doit être une forme d'entre-deux entre la droite républicaine et l'extrême droite.
08:44On le présentait aussi comme un réactionnaire, un homophobe.
08:48Bon, là, les insultes se sont multipliées.
08:51Au final, je note que puisque la gauche est à ce point en colère, peut-être est-il quand même droite, en effet.
08:56Mathieu, d'autre côté, n'est-ce pas d'abord le style de Michel Barnier qui le distingue dans la classe politique?
09:02Oui, parce que là, on est effectivement devant un homme qui a multiplié les appels au respect des différentes familles politiques.
09:09Dans un pays à ce point polarisé, dans un pays à ce point tendu politiquement,
09:14dans un pays qui aujourd'hui, une partie importante de la population, et je reviendrai dans un instant,
09:19est exclue du périmètre de la légitimité démocratique,
09:22si vous tombez sur quelqu'un qui vous dit « je vous respecte, certes je suis en désaccord avec vous, mais je vous respecte »,
09:27on a presque l'impression que la politesse devient un élément révolutionnaire.
09:30Il faut noter qu'il y a eu ces derniers jours une forme de soupir de soulagement.
09:33C'est-à-dire, on a cru pendant un temps, un peu moins à la fin, que la gauche radicale pouvait s'emparer du gouvernement.
09:39Et de ce point de vue, cette figure d'homme plus âgé, figure de modération, figure de calme, figure de compromis,
09:45qui prend la responsabilité des affaires, on a senti une forme de soulagement,
09:49au point même où on sent naître à droite une forme de barnier mania.
09:53On verra combien de temps ça peut durer.
09:56Ensuite, je crois qu'il faut nommer quelques éléments.
09:58C'est-à-dire, la France a beaucoup souffert ces dernières années politiquement.
10:01Et c'est une souffrance politique très réelle.
10:04Et on peut identifier quatre grandes lignes, quatre grands traits qui caractérisent cette souffrance.
10:09D'abord, une forme de présidentialisme ou d'hyper-présidentialisation qui se retournait contre la vie politique.
10:16Le génie de la Ve République, c'est évidemment le président, très important,
10:19presque une forme de restauration de la monarchie sous la forme républicaine.
10:22Mais ça fonctionnait quand on avait de Gaulle.
10:24Et ça fonctionnait dans un pays très uni.
10:26Ça fonctionnait dans un pays qui reconnaissait la légitimité à la fonction présidentielle.
10:30Quand on est dans un pays fondamentalement fractionné, fondamentalement brisé,
10:34qui n'a plus non seulement sa cohérence politique, mais même sa cohérence culturelle,
10:39eh bien, l'hyper-présidentialisation ne fonctionne plus,
10:42ne permet plus de rendre compte de la diversité politique du pays, la diversité réelle.
10:47Peut-être la France est due pour un passage par un moment parlementaire ou parlementariste.
10:52Et de ce point de vue, Michel Barnier l'incarne un peu.
10:55La France a aussi souvert, je crois, de technocratisation de la vie politique, massive.
11:00Et ça, c'est un effet de caste.
11:01Et on l'a vu, cet effet de caste, ces dernières années.
11:03Une vraie rupture entre, d'un côté, une oligarchie,
11:06et de l'autre côté, une population qui se sent étrangère aux politiques.
11:10On va en parler avec Jérôme Fourquet dans un instant.
11:12Le sectarisme, c'est un élément très important.
11:15Quand vous considérez que près de 40 % des Français sont désormais extérieurs au peuple républicain
11:20parce qu'ils votent mal, ils s'entêtent à mal voter,
11:23dans la suprême marque d'incivilité qui consiste à mal voter,
11:26ce sectarisme fait mal au pays.
11:28Et ensuite, on parle souvent de la question du pouvoir d'achat, question fondamentale,
11:32mais qui réfère à une autre plus importante.
11:35C'est une économie qui est écrasée, suradministrée, surgestionnaire.
11:41Une économie qui, dans les faits, fonctionne.
11:43Je reviens souvent sur une forme de pression fiscale
11:46qui étouffe tout le monde d'une manière ou de l'autre,
11:48quelle que soit sa place dans la société.
11:50Donc, une telle société, aujourd'hui, a un pouvoir politique impuissant,
11:53mais magnifié, et des catégories pas seulement populaires.
11:56Une bonne partie de la population qui sent que l'État s'est retourné contre la population.
12:01Cela fait partie du portrait.
12:03On le sait, le gouvernement Mathieu Bocoté-Barnier
12:06reposera sur la bienveillance parlementaire du RN.
12:10Faut-il voir là l'amorce d'une sorte d'union des droites qui ne dit pas son nom ?
12:16À moitié, un peu quand même.
12:19C'est-à-dire que là, le RN, on a beau avoir des critiques qu'il était anti-républicain, méchant,
12:23qui puait des pieds, qui sentait mauvais, tout ça,
12:27et on a beau avoir des critiques qu'il n'existait pas,
12:29eh bien, il existe.
12:31Et on doit en tenir compte si on veut former un gouvernement
12:34qui ne soit pas pris en otage par la gauche radicale, par le NFP,
12:37par la France insoumise, et ainsi de suite.
12:39Donc, c'est la redécouverte du RN.
12:41Et là, on pourrait dire que c'est le fameux éléphant dans la pièce.
12:44Et là, pendant les prochaines semaines, ce qui va être assez amusant,
12:47c'est que tout le monde va noter sa présence.
12:49Alors, le RN a tenu à le dire, vous dépendez de nous désormais,
12:52vous avez besoin de nous, vous serez sous notre contrôle.
12:56Le RN dit, nous sommes un acteur majeur,
12:58vous avez tout fait pour que les dernières élections
13:00nous conduisent à la marche, à la périphérie,
13:02et malgré les combines électorales, disent les gens du RN,
13:05nous sommes désormais au centre du jeu.
13:08Donc, l'union des droites s'opère presque par une forme de double...
13:13double, je dirais pas supercherie, c'est pas le bon terme,
13:15mais de double ruse.
13:17Donc, d'un côté, le RN, on fait semblant qu'il n'existe pas,
13:22et on mise sur sa bienveillance tolérante et silencieuse.
13:25Et de l'autre côté, le gouvernement fait semblant
13:28qu'il ne dépend pas du RN, tout en sachant qu'il peut tomber
13:31dès lors qu'il entre en forme de confrontation directe avec le RN.
13:37Donc, c'est une union des droites par une double abstinence,
13:40en quelque sorte, qui s'opère devant nous.
13:43Reste à voir ce que le RN va faire de son pouvoir.
13:45Est-ce qu'il va se contenter de réclamer la proportionnelle,
13:47comme on l'entend, est-ce qu'il va se contenter de réclamer
13:49le respect de ses électeurs, comme on l'entend,
13:51ou est-ce que dans l'espace de quelques semaines,
13:53il va arriver quelques projets de loi qui diraient
13:56voilà ce que nous demandons, voilà ce que nous exigeons.
13:58Il pourrait, par exemple, on l'a vu, je le disais,
14:00les propositions de Michel Barnier sur l'immigration
14:02étaient très, très fortes au moment, en 2021.
14:04Est-ce que le RN pourrait reprendre mot pour mot
14:07la proposition Barnier et la soumettre à Michel Barnier
14:10en lui disant est-ce que vous êtes toujours d'accord
14:12avec vous-même, cher Michel Barnier?
14:14Est-ce que Michel Barnier 2024 est d'accord avec Michel Barnier 2021?
14:17Je vous propose votre propre projet de loi.
14:19Seriez-vous prêt à voter pour ce projet de loi?
14:21Ça pourrait être intéressant de voir la suite des choses.
14:24On le sait, Arthur de Vatrigan, la France vira à droite.
14:28Est-ce qu'avec Michel Barnier à Matignon,
14:31il faut comprendre également que le gouvernement sera de droite?
14:35Que la France vira à droite, ce n'est pas le sujet.
14:38La question, c'est le Parlement parce que Matignon,
14:40c'est chef du gouvernement et donc il doit faire
14:43avec les forces parlementaires.
14:44Et si la France était à droite et le Parlement à gauche,
14:46il aurait dû faire avec un Parlement de gauche.
14:48Là, ce n'est pas le cas.
14:49La nomination de Michel Barnier offre deux certitudes.
14:52La première, c'est que c'est déjà un moindre mal
14:54pour les lecteurs de droite.
14:56Déjà parce que quand on se prend autant d'accusations
14:59et de qualités qu'on vous jette à la figure de la part de la gauche,
15:01c'est rassurant pour les lecteurs de droite.
15:03Ensuite, entre l'inconnu Baudet qui était poussé par la rue Cadet,
15:06furieusement idéologisé, entre la femme de paille
15:08Lucie Castet et Xavier Bertrand qui est l'assurance
15:11contre l'antifasciste tout en faisant des papouilles
15:13avec les soviétes, Michel Barnier figure presque
15:16comme une bonne nouvelle pour les lecteurs de droite.
15:18Ensuite, la deuxième certitude, c'est,
15:20vous connaissez l'adage, il ne faut jamais insulter l'avenir.
15:22Jamais insulter l'avenir, ça commence par jamais liquider le passé.
15:25Et ça, Emmanuel Macron vient de s'en rendre compte.
15:27En un quinquennat et demi, il a voulu faire table rase.
15:30Le vieux monde est de retour comme un bouguang
15:32en plein dans le menton.
15:34Enfin, il y a un troisième enseignement,
15:36enfin un enseignement, une confirmation,
15:38c'est que le front républicain est bien un théâtre antifasciste.
15:41Puisqu'on rejoue 36 à chaque élection,
15:43on a vu cette fois-ci que lorsque le danger est bien réel,
15:46c'est-à-dire que des groupies de Maduro peuvent arriver au pouvoir,
15:49nos castors sont passés de l'autre côté du barrage
15:51avec la souplesse d'une baleine russe
15:53pour aller barboter avec le Rassemblement National.
15:55Donc, la question qu'on se pose, c'est
15:57à quelle droite appartient Michel Barnier ?
15:59Alors, Mathieu l'a rappelé, son parcours parle pour lui, évidemment.
16:02C'est la droite dite de gouvernement,
16:04donc la droite calculette, européiste,
16:07qui n'est pas très bravache, mais d'après nombreux témoignages,
16:10il ne pratique pas, comme l'a théorisé Mathieu,
16:13la politique de la reniflette.
16:14C'est-à-dire que quand on lui dit
16:16« aidez-vous à discuter avec le Rassemblement National »,
16:18il ne se bouge pas le nez.
16:19Et ce qui est assez rare dans le camp de la droite dite républicaine.
16:22Alors, naturellement, on l'a vu lors des primaires,
16:24Mathieu l'a également rappelé, c'était le plus offensif
16:26lors des primaires des Républicains,
16:29et il s'est même fâché avec l'Union Européenne.
16:31Mais bon, la droite parle beaucoup,
16:33et 2002-2007 ont montré que les roustons
16:36disparaissaient aussi vite qu'ils poussaient.
16:38Donc, on a toujours un doute là-dessus.
16:39Mais aujourd'hui, la situation est très différente
16:41parce qu'elle est inédite.
16:42Notre régime politique, depuis la cinquième,
16:45repose sur une cohabitation
16:47entre deux courants philosophiques,
16:48la droite et la gauche,
16:49qui alterne au gré de la démocratie.
16:51Sauf qu'au fur et à mesure des décennies,
16:53ce clivage a paraissé de plus en plus fou.
16:56Pour deux raisons.
16:57La première, c'est la fin des grands affrontements idéologiques
16:59depuis 1989.
17:00En gros, le faire partisan,
17:01les questions existentielles ont été remplacées
17:03par le management administratif.
17:04Et l'autre, c'est le fossé de plus en plus grand
17:06qui se crée entre les élites et le peuple.
17:08Une élite qui, comme l'a expliqué
17:10le philosophe Pierre Manon cet été,
17:11a oublié ses principes respectifs
17:13pour se convertir à une religion européenne
17:15aussi floue qu'impérieuse.
17:17Et donc, c'est la raison du succès de Macron en 2017.
17:19C'est qu'il dit qu'on ne va pas continuer
17:21à simuler un clivage qui n'existe pas.
17:23Sauf qu'un quinquennat et demi plus tard,
17:24le clivage est revenu,
17:26avec les questions existentielles et le fait partisan,
17:28il est revenu par la grande porte.
17:30Et aujourd'hui, on a un Parlement
17:31qui se divise en trois blocs.
17:33Et personne n'est la majorité.
17:35Il y a un centre peu divisé,
17:37un peu divisé,
17:38mais en même temps les étrasses.
17:39Vous avez une gauche radicale
17:40qui promet toujours d'installer
17:41le paradis sur terre
17:42à coups de keffiers et de drapeaux palestiniens.
17:44Et vous avez une droite
17:45qui est devenue l'ERN,
17:46parce que l'ERN, je le rappelle,
17:47a absorbé 80% des électeurs LR
17:49et qui nous propose
17:51le rétablissement des frontières,
17:52c'est-à-dire la souveraineté économique,
17:53sociale et identitaire.
17:54Et donc, pour gouverner,
17:55un Premier ministre est obligé
17:56de choisir une alliance
17:57parce que tout seul, il ne gouverne pas,
17:58il n'a pas la majorité.
17:59Donc, c'est la gauche ou la droite.
18:01Donc, la nomination de Barnier
18:02et l'accueil du ERN
18:03donnent une petite indication.
18:05Reste à le savoir
18:06si le vieux monde qui est de retour
18:07a retenu la leçon,
18:08car comme l'a expliqué Arnaud Benedetti,
18:09aujourd'hui, M. Barnier
18:10est à la convergence
18:11des droites libérales,
18:12sociales et nationales.
18:14Parlons de la gauche.
18:15À présent, Mathieu Bocoté,
18:17la gauche tendance NFP
18:19défilait aujourd'hui en France.
18:21C'était tendance LFI, d'ailleurs,
18:24en dénonçant ce qu'elle appelle
18:26le coup d'État d'Emmanuel Macron.
18:28La formule est forte, très forte.
18:30Peut-on croire que la gauche
18:31en rajoute dans l'indignation
18:32ou croit-elle vraiment à ses slogans ?
18:35Ce qui est assez amusant,
18:36c'est que quand la gauche
18:37dénonce le coup d'État d'Emmanuel Macron,
18:39c'est qu'elle l'accuse
18:40de pratiquer ce qu'elle voulait faire elle-même.
18:42C'est pas mal.
18:43Il faut comprendre l'état d'esprit
18:46de cette gauche radicale.
18:47Qui arrive ?
18:48Le résultat des élections
18:49est surprenant pour tout le monde,
18:50tous s'en conviennent.
18:51Il y a un moment de sidération.
18:53Tout le monde se dit
18:54« mais qu'est-ce qui vient de se passer ? »
18:56Si la gauche, à ce moment-là,
18:58est capable de se mettre d'accord
18:59assez rapidement
19:00sur le nom du Premier ministre,
19:01si elle est capable
19:02de jeter ses troupes dans la rue,
19:03ce n'est pas inimaginable.
19:04Si elle est capable
19:05de faire preuve de discipline,
19:07et ainsi de suite,
19:08la gauche aurait pu,
19:09sur un malentendu comme dirait l'autre,
19:11s'imposer à Matignon
19:14avec un programme,
19:15je le dis et le redis
19:16parce que c'est fondamental,
19:17de rupture irréversible.
19:19Quand on lit le programme du NFP,
19:21c'est un programme qui consiste à dire
19:23la société ne sera plus jamais pareille
19:24une fois que nous serons au pouvoir,
19:26par décret, par-ci, par-ça,
19:27les moyens de changer la société
19:29avant même d'arriver à l'épreuve budgétaire
19:31sont nombreux.
19:33Donc on était dans une gauche
19:35qui y a cru.
19:36Parce que la gauche ne réclame pas,
19:38il faut bien le savoir,
19:40ne fait pas reposer sa conception de la démocratie
19:42sur la majorité de la population.
19:44Elle la fait reposer
19:45sur une certaine conception du sens de l'histoire
19:47qui distingue le progrès et la réaction,
19:49les avancées sociétales et la régression,
19:52et elle fonctionne.
19:53La gauche est une catégorie religieuse
19:55autant que politique.
19:56On tente de l'oublier.
19:57La gauche est une révélation.
19:59Vous noterez d'ailleurs
20:00que souvent, les gens de gauche
20:01se parlent entre eux
20:02lorsqu'ils disent
20:03« ça, c'est un argument de droite ».
20:04Il ne suffit pas d'en dire davantage.
20:05Le mot « droite »
20:06est déjà un marqueur négatif.
20:07Il y a la gauche
20:08et il y a tout ce dont elle ne veut pas
20:09et qu'elle nomme droite.
20:10Tout ça pour dire
20:11qu'elle est passée bien près,
20:13bien près, je crois,
20:14de prendre le pouvoir
20:15quelque part dans la séquence
20:17qui a suivi le deuxième tour.
20:19Donc d'un côté, elle y a cru.
20:21De l'autre côté,
20:22ces gens ont beau être assez étranges
20:24lorsqu'ils sont aux affaires publiques,
20:26ils savent compter minimalement.
20:28Ils savent fondamentalement
20:30qu'ils n'avaient pas la majorité.
20:32Donc tout ce qu'ils peuvent faire
20:33dans les circonstances,
20:34c'est de jouer la carte de l'élection volée.
20:36L'élection volée.
20:37Leur argument est intéressant.
20:38Ils disent « nous sommes arrivés premiers,
20:40nous avons droit, nous avons droit
20:42à être appelés au gouvernement.
20:43C'est même un droit démocratique fondamental. »
20:45Je poserai la question
20:46à nos amis de LFI ou du NFP.
20:48Vous avez vu les élections en Thuringe,
20:50en Allemagne de l'Est, entre guillemets,
20:52où l'AFD est arrivée première.
20:54Est-ce qu'il faudrait demander à l'AFD
20:56de former le gouvernement
20:57au nom des exigences démocratiques,
20:59selon les catégories même qui viennent
21:01de LFI et du NFP?
21:03Je serais curieux d'avoir leur réponse.
21:05Chose certaine, dans les temps présents,
21:07on partage les rôles qui vont s'opérer,
21:08parce que la France est en crise de régime,
21:09ça ne va pas se terminer demain.
21:11La gauche va chercher à occuper
21:12tout le terrain de la contestation radicale.
21:14Et de l'autre côté, le RN
21:15est dans l'antichambre du pouvoir
21:17et cherche à se faire rassurer en disant
21:18« la prochaine étape,
21:19ce n'est pas l'antichambre du pouvoir,
21:21c'est le pouvoir. »
21:22Vous pourrez poser la question
21:23à vos amis LFI demain,
21:25dans le grand rendez-vous,
21:26puisque Manuel Bompard sera l'invité à 10h.
21:30Je vous ai souvent entendu dire
21:31que la gauche, même dans l'opposition,
21:34demeurait au pouvoir.
21:35Est-ce qu'aujourd'hui, c'est encore vrai?
21:38C'est plus vrai que jamais.
21:39Elle contrôle le Conseil constitutionnel,
21:41le Conseil d'État,
21:43les agences de contrôle de la parole
21:45dans les médias,
21:46ce n'est pas un détail,
21:47l'Éducation nationale,
21:48Bercy, quoi qu'on en dise.
21:49Quand on est dans une logique
21:50aussi fiscaliste,
21:51c'est qu'on a intégré
21:52une bonne part de socialisme
21:53sans s'en rendre compte.
21:54Ne l'oublions jamais.
21:55Quand on accepte l'idée
21:56de prélèvement obligatoire à ce niveau,
21:58on a beau se dire de droite,
21:59dans les faits, on est de gauche.
22:00Je pense qu'il faut le rappeler.
22:01Évidemment, plus largement,
22:02on pourrait dire l'université.
22:04Donc la gauche est au pouvoir,
22:05elle a le pouvoir spirituel,
22:06entre guillemets,
22:07comme on l'aurait dit autrefois.
22:08Elle a le pouvoir culturel,
22:09elle a le pouvoir technocratique,
22:10elle a le pouvoir administratif.
22:12Le pouvoir politique peut lui échapper un temps,
22:14mais que voudrait dire
22:15un bon usage du pouvoir politique?
22:17Je résume en un mot.
22:18Imaginons une France vraiment de droite.
22:20Imaginons que la droite soit aujourd'hui
22:21au pouvoir comme la gauche l'est.
22:23Ça voudrait dire une définition de la France
22:24non seulement par la matrice républicaine,
22:26mais par l'identité historique.
22:27Ça voudrait dire une défiscalisation véritable
22:29de la société française,
22:30une décentralisation pour casser
22:32le pouvoir technocratique,
22:33une démurocratisation,
22:34une restauration de la souveraineté nationale
22:36par rapport à Bruxelles.
22:38C'est la question de l'étatisme
22:40qu'on aurait rencontré.
22:41Une question fondamentale,
22:42mais pour l'instant,
22:44il y a un gouvernement de droite
22:46dont la principale fonction
22:47sera peut-être de ralentir
22:48les ardeurs de la gauche,
22:49le mouvement vers la gauche,
22:51certainement pas d'en inverser le cours.
22:53Hélas, diront certains.
22:54Bercy est à gauche.
22:55Bruno Le Maire est donc de gauche.
22:56Je pense que non.
22:57Le Maire, non.
22:58Mais en tant que tel,
22:59l'administration a intégré à ce point
23:01une logique fiscaliste dans les faits
23:03et de gauche sans le savoir.
23:04Socialiste, si vous préférez.
23:07Arthur Devat-Trigan,
23:08rapidement, puisque après la publicité,
23:09nous recevons Jérôme Fourquet.
23:13Est-ce que vous comprenez
23:14les cris d'orfraie du nouveau front populaire
23:17et notamment de la France insoumise?
23:19C'est un jeu.
23:20Ils passent leur temps à crier.
23:21Ils vocifèrent, ils crient, ils font du bruit.
23:23C'est comme ça, c'est leur stratégie.
23:24Mais Mathieu a mille fois de raison
23:26de rappeler que la gauche règne
23:27d'une manière illégitime.
23:28Mais il a oublié un domaine,
23:30un autre pouvoir qui est fondamental,
23:32c'est le pouvoir médiatico-culturel.
23:34Ce milieu qui, je rappelle,
23:36est investi par la gauche
23:37la plus sectaire depuis les années 80
23:38et qui bénéficie d'une rente de situation
23:40pour deux raisons.
23:42La majorité des libraires,
23:44des journalistes, des patrons de salles,
23:46des producteurs, des éditeurs
23:47sont de gauche et excluent
23:48de travailler avec des gens
23:49qui ne le sont pas.
23:50Et l'autre raison,
23:51c'est l'attitude des médias dits de droite
23:53qui eux-mêmes se sont paralysés.
23:55Alors, on observe depuis un certain temps
23:57un petit régistrement,
23:58mais on part de loin.
23:59Et si vous voulez,
24:00vous avez deux choix.
24:01Soit vous vous dédroitisez pour survivre,
24:04soit vous acceptez
24:05de vous composer dans l'espace ghettoïsé
24:07où la gauche vous a confinés.
24:09Et avec comme conséquence, donc,
24:11de vivre soit dans une réalité parallèle
24:13à l'actualité culturelle officielle,
24:15soit de se compromettre.
24:16Et donc, ces deux attitudes
24:18ont conforté, évidemment,
24:19le monopole de la gauche
24:20parce qu'ils disent
24:21la gauche, la légitimité, c'est nous.
24:23Vous, vous êtes dans un salon des refusés.
24:25Et voilà.
24:26Mais depuis quelque temps,
24:27vous avez remarqué,
24:28on parle beaucoup de combat culturel.
24:29C'est le mot à la mode,
24:30le combat culturel.
24:31Sauf qu'en fait,
24:32il faudra peut-être se rappeler
24:33que le combat culturel,
24:34il faut le mener,
24:35et surtout au bon endroit.
24:36C'est-à-dire se situer
24:37sur le même terrain que la gauche
24:38et pas en parallèle
24:39ni dans les catacombes.
24:40C'est-à-dire revendiquer son droit
24:41à prendre part au débat
24:43est légitime.
24:44Et aujourd'hui, c'est loin,
24:45très loin d'être le cas.
24:46La publicité.
24:47J'ai hâte d'être à 19h30 très précisément
24:50dans quelques instants.
24:51Puisque vous recevez Jérôme Fourquet
24:54avec un long entretien
24:56sur la situation politique.
24:57Est-ce qu'on est dans une crise de régime ?
24:59Une crise politique inédite ?
25:01On parle de tout cela
25:02dans un instant après la publicité.
25:03A tout de suite
25:04pour la suite de Face à Mathieu Bocoté.
25:1019h30 sur CNews.
25:11La suite de Face à Mathieu Bocoté.
25:12Toujours avec Mathieu, bien sûr,
25:13et Arthur de Vatrigan.
25:14Nous recevons Jérôme Fourquet.
25:16Jérôme Fourquet, bonsoir.
25:17Merci d'être avec nous.
25:19Vous êtes politologue.
25:20Vous avez écrit, entre autres,
25:21La France d'après.
25:22Mathieu Bocoté, pourquoi avoir invité
25:25ce samedi soir Jérôme Fourquet ?
25:27Pour comprendre un peu
25:28ce qui s'est passé ces derniers temps
25:29et comprendre où en est la France
25:30après ce que plusieurs voient
25:31comme un cirque ou d'autres
25:32comme un psychodrame.
25:33Jérôme Fourquet, bonsoir.
25:34Bonsoir.
25:35Les Français ont suivi
25:36ces dernières semaines
25:37ce qu'on pourrait appeler
25:38la course à Matignon.
25:39C'est-à-dire des Européennes, d'accord,
25:41mais ensuite la séquence politique
25:42qui s'est engagée des législatives
25:43et qui s'est terminée
25:44avec la nomination de Michel Barnier.
25:46Ont-ils suivi cela avec intérêt,
25:48avec passion ?
25:49Est-ce que c'est un moment
25:50de raccrochage à la vie politique
25:52ou qui a confirmé
25:53une forme de décrochage pour certains ?
25:55Il y a eu différentes phases,
25:56si vous voulez.
25:57On a vu qu'il y avait un moment
25:59de repolitisation intense
26:01au moment des législatives
26:03avec une participation électorale
26:05de plus de 65 %.
26:07Donc c'était du jamais vu
26:09depuis très longtemps
26:10sur des législatives.
26:11On commençait à s'approcher
26:12à des taux de participation
26:13de présidentielle.
26:15On a eu les résultats
26:16qu'on connaît
26:17à cette élection législative
26:19avec cette chambre introuvable
26:21ou improbable,
26:22ces trois blocs.
26:23Et face à la sidération,
26:26face aux résultats,
26:28les Français ont pris
26:32un peu de recul.
26:33Et j'allais dire,
26:34le calendrier les a aidés
26:35à le faire
26:36puisque c'était la trêve estivale.
26:38Le président a parlé
26:39de trêve olympique
26:40et ce moment a été
26:42un peu suspendu
26:44avec beaucoup de Français
26:46qui ont estimé
26:47qu'il fallait laisser
26:48du temps au temps,
26:49qui attendaient aussi
26:51une forme d'apaisement
26:53après des semaines
26:54de tensions et d'invectives.
26:57Et puis petit à petit,
26:59cette trêve olympique
27:01s'est refermée.
27:03Et puis on est revenus
27:04dans la réalité un petit peu,
27:06si vous voulez,
27:07comme un syndrome de cendrillon
27:08quand la carrosse,
27:09petit à petit,
27:10se retransforme en citrouille.
27:12Et nous y sommes
27:13depuis début septembre
27:15avec, du coup,
27:17cette course à Matignon.
27:20Et nous avons aujourd'hui
27:22une population française
27:23qui va être très divisée
27:25sur la décision
27:27qui a été faite.
27:28L'enquête qui paraîtra
27:30dans le journal du dimanche demain
27:32mais qui est confirmée
27:34par d'autres sondages de confrères
27:36montre qu'en gros,
27:37on a à peu près 50% de Français
27:38qui sont satisfaits
27:40de la nomination
27:41de Michel Barnier.
27:43Alors, ça s'explique en partie
27:45par, j'allais dire,
27:46un réflexe partisan.
27:48L'électorat LR
27:49et l'ancienne majorité présidentielle
27:52sont très majoritairement satisfaites.
27:55Et puis on a aussi,
27:56peut-être également,
27:58dans les rangs des oppositions,
27:59des gens qui peuvent être satisfaits
28:01puisqu'il se fait que,
28:02quelque part,
28:03on trouve un débouché,
28:05même provisoire.
28:06Pour prolonger votre questionnement,
28:08on peut s'interroger
28:09sur le fait de savoir
28:10si tout ça va durer très longtemps
28:12ou si nous ne sommes pas rentrés
28:14dans une nouvelle fenêtre
28:15de quelques semaines.
28:16Alors, il va falloir maintenant
28:17composer le gouvernement.
28:19Dans le même sondage,
28:20trois quarts des Français
28:22pensent que ce gouvernement,
28:24qui n'est pas encore composé,
28:26sera rapidement censuré.
28:28Et donc, ce qui est intéressant,
28:30c'est que tout le monde
28:31a bien intégré
28:32que la crise politique était profonde,
28:35qu'elle était également institutionnelle
28:37et que la situation n'allait pas,
28:40j'allais dire,
28:41se rétablir et se stabiliser
28:43d'un claquement de doigts.
28:45Dans la présente séquence,
28:46est-ce qu'on a aussi assisté
28:47à une forme de basculement
28:49du symbole RN ?
28:51Je m'explique.
28:52Remobilisation du Front républicain.
28:54On entendait depuis quelques années
28:55que ça ne fonctionne plus.
28:56Le Front républicain,
28:57ça ne fonctionne plus.
28:58Manifestement,
28:59ça fonctionne très bien.
29:00Mais ensuite,
29:01au terme de la séquence,
29:02le RN,
29:03qui devient l'allié inavoué,
29:05silencieux,
29:06voit tout le moins
29:07le compagnon de route clandestin
29:09du gouvernement Barnier
29:11et qui, finalement,
29:12trouve une place à l'Assemblée
29:13qui est centrale.
29:14Est-ce qu'il y a une forme
29:15de basculement à travers tout ça ?
29:17Alors, vous avez raison
29:18sur le diagnostic,
29:20sur la première partie
29:21de votre développement,
29:23sur la réactivation spectaculaire
29:26du Front républicain
29:28qui a marché comme jamais.
29:31Moi, je pense que ça tient
29:32à deux raisons.
29:33La première,
29:34c'est qu'il était devenu
29:37tout à fait plausible
29:39et palpable
29:40aux yeux d'une majorité de Français
29:42que le RN,
29:43cette fois,
29:44puisse vraiment l'emporter.
29:46Quand je dis cette fois,
29:47c'est au lendemain
29:48du premier tour des législatives
29:50quand les candidats RN
29:52et leurs alliés siotistes
29:53sont arrivés à plus de 33% des voix,
29:56confortant et amplifiant
29:57le score des Européennes
29:59avec une pôle position
30:02dans des centaines de circonscriptions
30:04et une quarantaine de députés RN
30:06du jamais vu,
30:07élus dès le premier tour.
30:09Et donc, là,
30:11la réactivation du Front républicain
30:13était permise
30:14par le fait
30:15qu'on n'était pas en train
30:16de réfléchir en laboratoire
30:17mais que c'était très plausible
30:19que, sept jours plus tard,
30:21le RN accède à Matignon.
30:24Le RN s'est d'ailleurs mis en scène
30:26pour accréditer ce mouvement historique.
30:32Jordan Bardella annonçant
30:35qu'il avait commencé à réfléchir
30:36à la composition de son gouvernement,
30:38Marine Le Pen indiquant
30:39qu'il n'y aurait pas forcément
30:40de domaine réservé
30:41pour le président de la République.
30:42Donc, c'était très concret.
30:45Et puis, le deuxième élément
30:46qui a permis la réactivation
30:47au plus haut niveau du Front républicain,
30:49c'est qu'à côté de ce caractère
30:53tout à fait plausible d'une victoire,
30:55on a vu réapparaître
30:58les péchés historiques
31:01ou les défauts historiques
31:02ou les critiques habituelles
31:05à l'égard du RN.
31:07D'une part, sur le profil et le pédigré
31:10de toute une partie de leurs candidats
31:12qui ont été dûment répertoriés
31:15durant la campagne des législatives.
31:17Et puis, d'autre part,
31:18un degré d'impréparation et d'amateurisme
31:20au plus haut sommet de ce parti
31:22avec des cadres dirigeants
31:24qui, d'un plateau télévisé à l'autre,
31:26se contredisaient sur
31:27est-ce que telle ou telle mesure
31:29fait partie ou non de notre programme.
31:32Et donc, quand vous ajoutez
31:34les deux éléments, si vous voulez,
31:36un caractère inéluctable d'une victoire
31:38et les clés de la Maison de France
31:40qui seraient confiées à un parti
31:41qui n'aurait pas coupé
31:43avec ses origines idéologiques
31:44et qui ne serait pas prêt
31:46professionnellement à exercer le pouvoir,
31:49tout ça a facilité le désistement
31:51de plus de 200 candidats marcheurs et de gauche
31:56et on a retrouvé un taux de report
31:59au deuxième tour tout à fait spectaculaire.
32:02Je vous donne juste quelques chiffres.
32:04En 2022, dans les duels au second tour
32:07opposant des candidats du RN
32:09aux candidats macronistes,
32:11le RN l'avait emporté dans 50% des cas en 2022.
32:14Puisque l'électorat de gauche a dit
32:16nous on ne se salit pas les mains,
32:17on ne va pas voter pour des macronistes
32:19et puis il n'y avait aucune possibilité
32:21ou éventualité que le RN accède au pouvoir.
32:24Lors du deuxième tour des législatives,
32:26dans la même configuration,
32:28le RN ne l'a emporté que dans 17% des cas.
32:31Donc vous voyez il y a plus de 30 points d'écart
32:33et donc dans des dizaines de circonscriptions
32:35quand vous regardiez les résultats du premier tour
32:37vous disiez là cette circonscription
32:39elle est dévolue au RN,
32:40l'écart est trop important
32:42et ce pronostic a été déjoué
32:44par la réactivation du Front républicain.
32:46Maintenant sur votre deuxième interrogation
32:51sur est-ce que le RN a changé de statut ?
32:53Est-ce qu'il devient clandestinement fréquentable ?
32:56Je n'en suis pas convaincu
32:58parce que le fait pour la gauche de dire
33:00que Michel Barnier est dans la main
33:02ou sous la pression du RN,
33:04c'est quelque part essayer de prolonger
33:06l'exercice du Front républicain
33:08en disqualifiant Michel Barnier
33:12et son futur gouvernement
33:14et également la Macronie,
33:15il y a une espèce de pacte implicite
33:17avec le diable
33:19qui fait que vous n'allez tenir
33:21qu'avec l'accord du RN
33:23qui reste un parti en fréquentable.
33:25Donc je pense qu'aux yeux de la gauche
33:27et de toute une partie de la population
33:29l'image du RN n'a pas changé
33:31et on va essayer de s'en servir
33:33pour essayer d'entraver l'exercice
33:35du pouvoir par ce nouveau gouvernement.
33:37Arthaud de La Trigueur.
33:39Vous dites que l'image n'a pas changé
33:41pour une partie de la population
33:43que vous avez toujours utilisé
33:45comme un repoussoir
33:47et qu'il y a eu un RN très actif.
33:49Néanmoins, beaucoup plus de députés,
33:51beaucoup plus de voix.
33:53Comment peut-on analyser cette progression ?
33:55Dans quelles zones géographiques
33:57ils ont progressé ?
33:59Est-ce qu'ils ont changé
34:01dans des zones socioprofessionnelles
34:03ou dans des catégories socioprofessionnelles ?
34:05Est-ce qu'on peut penser
34:07que le plafond qu'ils avaient
34:09peut-être est devenu un plancher
34:11et que le RN s'est heurté
34:13à la réactivation du Front Républicain ?
34:15J'ai essayé d'expliquer
34:17que c'était d'abord en raison
34:19de la dynamique très forte
34:21qui l'avait poussée.
34:23Si on voulait retenir une image,
34:25cette assemblée improbable
34:27est un peu la résultante
34:29de ces deux forces qui se sont entrechoquées.
34:31Un peu comme certains
34:33de nos reliefs géographiques.
34:35Vous avez deux plaques tectoniques
34:37qui se sont entrechoquées
34:39en raison de tout ça.
34:41Ne minimisons pas la dynamique RN
34:43qui est très forte.
34:45C'est 10,5 millions d'électeurs
34:47au premier tour, ce qui est colossal.
34:49Plusieurs dizaines de députés élus
34:51au premier tour et un rehaussement
34:53du vote pour le RN
34:55dans toutes les catégories de la population.
34:57Ce qui fait que dans les milieux populaires,
34:59ouvriers et employés sont désormais
35:01en majorité quasi absolue.
35:03Quand on regarde les votes
35:05par catégorie de communes,
35:07on a 4 ou 5 000 électeurs
35:09dans une commune.
35:11Le score moyen pour le RN
35:13c'est 40 % au premier tour.
35:15Dans toute la France
35:17qui fait moins de 5 000 habitants,
35:19si on prend un étiage
35:21de 35 à 38 %,
35:23c'est jusqu'à 10 000 habitants.
35:25Toute la France à moins de 10 000 habitants
35:27a voté à hauteur de près de 40 %
35:29pour le rassemblement national.
35:33On peut comparer
35:35la situation du RN
35:37à ce qu'était celle
35:39du Parti communiste dans les années 60.
35:41Il y avait un grand politologue
35:43qui s'appelait M. Laveau
35:45qui avait parlé de la fonction
35:47tribunicienne du Parti communiste.
35:49Il prenait comparaison
35:51avec l'Antiquité romaine en disant
35:53que le Parti communiste, c'est le tribun de la plèbe
35:55et c'est celui qui va représenter
35:57et être le porte-voix de tous les exclus
35:59du système politique, économique
36:01et culturel.
36:03On y est aujourd'hui avec le RN
36:05et j'allais dire
36:07que l'ostracisation
36:09de ce parti est
36:11aujourd'hui plus prononcée
36:13qu'elle ne l'était hier pour le Parti communiste.
36:15Le Parti communiste, même dans les années 60,
36:17s'il était rejeté par une majorité
36:19de Français, comme le RN
36:21l'est aujourd'hui,
36:23pouvait néanmoins compter, par exemple,
36:25vous en avez parlé tout à l'heure,
36:27sur le soutien d'intellectuels,
36:29de gens de culture,
36:31on se souvient d'Aragon,
36:33on se souvient de Picasso,
36:35on se souvient d'Yves Montand avant
36:37sa conversion,
36:39et donc il y avait des compagnons de route.
36:41Et donc toute cette électorat populaire
36:43ostracisée pouvait se dire, nous avons quand même
36:45là-haut des gens qui nous rendent
36:47fiers et qui nous représentent. Aujourd'hui,
36:49on compte sur les doigts d'une main,
36:51les scénaristes, les acteurs,
36:53les auteurs qui sont,
36:55qui pourraient être qualifiés de compagnons de route.
36:57Autre clivage, cette fois
36:59géographique, quand le PC
37:01de la grande époque était
37:03maintenu par un cordon sanitaire,
37:05il avait néanmoins des députés
37:07jusqu'au cœur de Paris.
37:09Dans l'Est parisien, les députés
37:11du 18e, du 19e, du 20e,
37:13même du 13e arrondissement étaient communistes.
37:15Aujourd'hui, comme vous regardez une carte de France,
37:17il faut faire 35 km
37:19en partant de Paris pour trouver la première circonscription.
37:21On est à Pontoise,
37:23il y a à peu près la même distance pour aller
37:25dans l'Essonne ou en Seine-et-Marne,
37:27et donc on a une espèce de
37:29grand espace central où
37:31le pouvoir économique, médiatique et politique
37:33est concentré, où l'ERN
37:35n'a pas le droit de cité.
37:37L'idée qu'on peut retenir,
37:39c'est que ce rassemblement
37:41national a connu
37:43une véritable dynamique, mais que c'est une dynamique
37:45qui a été empêchée.
37:47Il est néanmoins hégémonique dans
37:49des catégories sociales, dans des géographies,
37:51et il a renforcé
37:53son emprise.
37:55Vous avez fait une comparaison avec les années 60,
37:57le Parti communiste.
37:59Ajoutons une comparaison. La France, dans son histoire,
38:01a connu peut-être davantage que d'autres pays occidentaux
38:03des crises de régime, c'est-à-dire des institutions
38:05qui ne fonctionnent plus, qui ne sont plus capables de répondre
38:07aux circonstances historiques, qui ne traduisent plus
38:09les divisions,
38:11les clivages qui existent dans la société.
38:13Est-ce que la France, aujourd'hui, vit une forme
38:15de 1958 bis?
38:17Je me permets de dire que Marcel Gaucher avait lancé
38:19cette hypothèse en disant que la 4e République
38:21a tombé parce qu'elle n'était pas capable de répondre
38:23à la question de l'Algérie.
38:25La 5e, disait-il, pourrait tomber parce qu'elle n'a pas été
38:27capable de répondre à la question de l'immigration.
38:29Est-ce qu'on est dans un scénario, d'autant qu'il y a
38:31une force politique, non pas d'alternance,
38:33mais d'alternative, le RN qui se présente
38:35comme tel, une gauche radicale qui se radicalise
38:37davantage qu'elle ne se modère?
38:39Est-ce qu'on est dans un scénario
38:41qui ressemble à une crise de régime?
38:43Alors, on a un certain nombre
38:45de ferments de tout cela. On voit bien
38:47qu'à brève échéance,
38:49là, Emmanuel Macron
38:51a gagné du temps
38:53en nommant Michel Barnier,
38:55mais les Français
38:57ne sont pas...
38:59ils n'ont pas de capacité
39:01prédictive, mais quand trois quarts d'entre eux vous disent
39:03ce gouvernement va être censuré, et quand vous regardez
39:05l'état de l'Assemblée Nationale, on voit mal.
39:07Or, ils ont dix mois,
39:09c'est-à-dire le compte à rebours jusqu'à
39:11une éventuelle prochaine dissolution.
39:13Comment on va pouvoir
39:15dénouer les choses? Donc ça, c'est le premier
39:17élément, c'est-à-dire une chambre,
39:19une assemblée, chambre comme on disait jadis,
39:21qui est ingouvernable et où la
39:23majorité arithmétique
39:25n'existe pas.
39:27L'autre élément
39:29d'une crise institutionnelle,
39:31c'est l'affaiblissement
39:33manifeste de
39:35la légitimité et
39:37de la situation d'Emmanuel Macron.
39:39Le temps aurait fait son
39:41usage au fur et à mesure qu'on serait arrivé
39:43en vue de
39:45la fin de son deuxième mandat, sa légitimité
39:47et son aura politique,
39:49ce serait à moindris, mais le fait qu'il est
39:51lui-même décidé de dissoudre
39:53et qu'il ait pris en boomerang
39:55cette décision, le fait
39:57aussi qu'au sein de
39:59ce qui reste de son camp,
40:01les individus et les
40:03personnalités commencent à s'autonomiser,
40:05tout ça vient, là aussi,
40:07le fragilité. Avec une forme d'éclatement
40:09du bloc central, candidature
40:11Édouard Philippe, semi-candidature de Gabriel Attal.
40:13Voilà, même si Édouard Philippe nous
40:15a indiqué qu'il n'était absolument pas dans son
40:17intention d'affaiblir
40:19la légitimité du
40:21président, on verra ce
40:23qu'il lancera des
40:25figures qui ont rejoint le macronisme,
40:27qui viennent de la droite, les Gérald Darmanin,
40:29les Bruno Le Maire et autres,
40:31Michel Barnier est là,
40:33et donc une chambre ingouvernable
40:35avec une absence de majorité,
40:37un président qui affaiblit,
40:39un pays qui est
40:41assez fortement divisé,
40:43et vous ajoutez à cela,
40:45et cela, Michel Barnier,
40:47en est pleinement conscient,
40:49d'énormes contraintes
40:51économiques et budgétaires.
40:53Vous voyez que
40:55il a fait, de manière assez
40:57attendue, son premier déplacement dans un hôpital
40:59parisien
41:01dédié aux enfants,
41:03et donc là, on surfe sur la priorité numéro
41:051 des Français, qui est celle de la santé, mais il a expliqué
41:07au personnel soignant qu'il n'avait pas de baguette
41:09magique, qu'il n'y aurait pas de miracle, et donc
41:11qu'on n'allait pas forcément rouvrir les vannes.
41:13Vous avez vu que
41:15on peut s'interroger sur
41:17la relation qu'il va entretenir
41:19et comment vont s'équilibrer les pouvoirs avec le président
41:21de la République, puisqu'on a annoncé
41:23la nomination de son
41:25directeur de cabinet,
41:27qui n'est autre que l'ancien directeur de cabinet
41:29de Bruno Le Maire, et les adjoints
41:31de ce monsieur auront,
41:33selon un bandeau qui passe sur votre
41:35écran, deux fonctions,
41:37d'abord, deux priorités,
41:39la situation budgétaire, et d'autre part,
41:41les négociations européennes.
41:43Donc, on a un mécanisme
41:45politique qui est grippé,
41:47et des marges de manœuvre économiques
41:49qui sont inexistantes, puisque quand un
41:51mécanisme politique est grippé, on peut
41:53mettre du dégrippant en
41:55faisant fonctionner
41:57le déficit budgétaire,
41:59en achetant des voix
42:01à tel ou tel parlementaire, en disant
42:03on va faire dans votre circonscription
42:05ou
42:07on va tenir compte
42:09d'un talisman dans votre famille politique,
42:11ok, on va aller sur telle
42:13ou telle mesure. Là, les marges de manœuvre
42:15sont inexistantes, et donc on voit mal
42:17dans le contexte actuel
42:19comment une hypothèse pourrait
42:21sortir. Donc, tout ça
42:23accrédite l'idée
42:25d'une possible
42:27crise institutionnelle.
42:29Nous n'irons probablement
42:31pas jusqu'à la destitution du président de la République
42:33comme l'a souhaité, ou comme veut
42:35mettre en œuvre la France insoumise, mais
42:37des sondages ont montré qu'un Français
42:39sur deux souhaitait le départ
42:41d'Emmanuel Macron.
42:43Il est toujours considéré
42:45par deux tiers des Français comme le responsable
42:47de l'impasse politique
42:49dans laquelle nous nous trouvons.
42:51Donc, de ce point de vue-là, les prochaines semaines
42:53vont être absolument décisives.
42:55On va beaucoup commenter
42:57le casting
42:59ministériel, mais ce qui va
43:01compter vraiment, c'est ce qui va se passer sur le plan
43:03économique et budgétaire.
43:05Et on va voir aussi quel usage
43:07fera le Rassemblement national
43:09de sa niche parlementaire.
43:11C'est le premier parti, comme il est en tête
43:13en nombre de députés.
43:15C'est lui qui va avoir la première niche
43:17d'opposition. Et donc, est-ce qu'il va, par exemple,
43:19mettre sur la table
43:21l'abrogation de la réforme des retraites ?
43:23Et est-ce que, dans ce cas-là, la gauche
43:25mêlerait ses voix à celle
43:27du Rassemblement national, auquel cas
43:29on aurait
43:31possiblement
43:33la fin
43:35de l'aventure
43:37Barnier, au bout seulement de quelques semaines.
43:39– Arsene Vatrigan. – Vous avez
43:41rappelé très justement que le communiste
43:43de la belle ou de la triste époque avait
43:45le peuple, une partie du peuple et une partie
43:47des élites. Donc, on comprend que si
43:49une fraction des élites ne rejoint pas
43:51le Rassemblement national, ça va être compliqué
43:53de passer l'étape supérieure. La question, c'est
43:55où sont les élites aujourd'hui ?
43:57Et pour qui elles votent ?
43:59– Alors, elles votent aujourd'hui
44:01majoritairement pour le parti
44:03présidentiel.
44:07Il faudrait s'entendre ensuite sur ce qu'on
44:09entend par élite.
44:11Si on prend le critère économique,
44:15une variable qui en vaut d'autres,
44:17par exemple, on regarde le revenu médian
44:19dans une commune. Et on regarde le vote
44:21selon cette variable du revenu médian.
44:23Passer 30 000 euros
44:25de revenu médian annuel dans une
44:27commune,
44:29le camp présidentiel est majoritaire.
44:31Et donc, vous voyez que
44:33la majorité de ces députés sont élus
44:35dans l'ouest parisien,
44:37dans les Hauts-de-Seine ou les Yvelines,
44:39et avec aussi un fort contingent
44:41de ce qu'on appelle les circonscriptions des Français
44:43de l'étranger, qui correspondent
44:45à beaucoup de nos compatriotes
44:47expatriés, qui à Londres,
44:49qui à Bruxelles, qui à New York, qui à Vancouver
44:51ou à Toronto,
44:53souvent dans des places financières. Donc, l'élite économique
44:55soutient
44:57assez fortement
44:59Emmanuel Macron.
45:03On parlait
45:05de Londres et de la Grande-Bretagne,
45:07vous connaissez bien évidemment
45:09l'essayiste David Goudart,
45:11qui avait parlé des Somewhere et des Anywhere,
45:13et puis il avait commis un autre livre
45:15qui, en français, avait été
45:17traduit de la manière suivante,
45:19le titre avait été traduit de la manière suivante,
45:21La tête, la main et le cœur.
45:23Aujourd'hui, comme Duby
45:25dans l'ordre ancien du Moyen Âge,
45:27il y a trois fonctions,
45:29la tête, donc ceux qui ont des...
45:31qui dirigent,
45:33qui ont un capital économique et des diplômes,
45:35le cœur,
45:37les métiers qu'on dirait en bon français
45:39du cher Mathieu Ducquer,
45:41les professions de la santé,
45:43du social, de l'éducation,
45:45et puis le peuple de la main,
45:47c'est-à-dire les ouvriers,
45:49les artisans, ce qui reste de paysans,
45:51les commerçants.
45:53Et donc,
45:55dans cette Grande-Bretagne très fracturée
45:57post-Brexit,
45:59Goudart, qui vient plutôt de la gauche britannique,
46:01disait qu'il faut absolument qu'on réconcilie
46:03les trois organes du corps
46:05du corps social. Et donc aujourd'hui,
46:07quelque part, notre tripartition
46:09en trois blocs, elle correspond
46:11à cette tripartition. Quand vous regardez
46:13le profil sociologique des candidats
46:15présentés par les différents blocs
46:17politiques, c'est au hasard
46:19dans le camp présidentiel
46:21que la proportion de cadres,
46:23chefs d'entreprises, professions libérales, était la plus importante.
46:25C'est au NFP
46:27que la proportion
46:29de personnels soignants,
46:31personnels de la culture, enseignants,
46:33était la plus importante.
46:35Et c'était au Rassemblement National que
46:37les quelques contingents d'ouvriers,
46:39d'employés, de techniciens,
46:41d'artisans, étaient
46:43les plus nombreux. Et donc aujourd'hui, on a
46:45cette tripartition qui a
46:47trouvé, sociologique et culturelle,
46:49qui a trouvé quelque part
46:51son expression politique
46:53avec
46:55un corps qui dysfonctionne puisque nos trois
46:57organes ont de plus en plus de mal
46:59à se parler, à se comprendre.
47:01Eh bien écoutez, un grand merci Jérôme Fourquet
47:03pour cet entretien et cet échange avec
47:05Mathieu Bockcôté et Arthur de Vintrigan.
47:07On se retrouve dans un instant
47:09pour la suite des programmes
47:11avec l'heure des pros 2.
47:13On sera accompagné de Geoffroy Lejeune,
47:15Aminel Ketmi, Nathan Devers, Gabriel Cluzel
47:17avec une exclu à vous présenter
47:19à 20h très précisément.
47:21A tout de suite.

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